
Thor
PARTIE 3
Chapitre 2
Midgard : 2010
Loki
Hel avait éclaté en sanglot à l’instant où il l’avait eu dans ses bras. Elle avait grandi depuis la dernière fois qu’il l’avait vu, attendant que son corps décapité se régénère pour pouvoir retrouver le monde des vivants. En théorie, Odin avait interdit qu’ils se revoient, mais dans son Royaume, elle était la Reine d’Helheim et de ce fait, avait tous les pouvoirs. Car toutes les malédictions prennent fin quand l’âme se sépare du corps. Ils avaient donc la possibilité de se voir de temps en temps même si ce n’était pas encore assez.
« J’ai entendu dire que tu avais utilisé Gungnir pour libérer mes frères ? » gloussa-t-elle.
« Oui. Je me suis assis sur le trône d’Odin, j’ai été le Roi de son Royaume et j’ai utilisé son propre pouvoir pour défaire ses propres châtiments. Comment te dire qu’il doit être furieux. »
Sa fille éclata de rire et son visage se plissa de joie. Elle était belle sa fille, avec sa peau de porcelaine, ses yeux émeraudes et ses cheveux sombres comme son Royaume. Malheureusement l’inquiétude arriva rapidement son regard.
« Il va vouloir te punir encore. » Elle se serra plus fort contre lui. Il pouvait la sentir trembler. « Il va vouloir te faire du mal. Pourquoi tu ne le tue pas Maman ?! »
Son expression se modifia en grimasse cruelle et tout son corps se transforma. Ses cheveux se teintèrent de blanc, sa peau devint grise et ridée jusqu’à tomber en poussière pour dévoiler muscles et os, ses yeux se résorbèrent pour ne plus laisser que des crevasses vides.
« Tue-le, libère-toi, et je jure qu’il subira les pires châtiments ! » cria la Reine des Morts.
« Je sais mon ange, je sais. » répondit doucement sa Mère. Il caressa les os saillants de son visage jusqu’à ce qu’elle retrouve une apparence vivante. C’était le prix à payer pour siéger au-dessus de Helheim. Ni morte ni vivante, à la fois morte et vivante, éternellement piégée entre les deux. De la même manière que son corps passait de l’un à l’autre, sa personnalité oscillait elle aussi. « Mais affronter Odin reviendrait à vous mettre en danger, et jamais je ne le ferais de mon plein grès. »
Hel pleura, parce qu’elle savait que sa Maman les aimait tant qu’elle préfèrerait toutes les souffrances d’Yggdrasil que de mettre ses enfants en danger.
« Tu passeras quelques fois à la maison ? Tes frères ont hâte de te rencontrer. »
« Bien sûr. J’ai hâte aussi. Pouvoir seulement observer leurs âmes de loin est assez frustrant. » sourit-elle. « Je te ramène ? »
« Avec plaisir ma chérie. »
Hel s’agrippa à son bras, se collant contre lui plus par envie que par nécessité, et ouvrit le Chemin des Âmes. C’était l’un des chemins qu’empruntait Mort, qui était une entité et un concept qui n’obéissait qu’à la Reine d’Helheim et avait pour but de récolter les âmes des défunts quand leur heure était arrivée.
Ce fut cahoteux et désordonné, car des êtres vivants n’étaient pas censés parcourir le chemin dans ce sens-là, mais ils arrivèrent sans encombre chez Loki. Leur apparition stupéfia Stark, que seule la Magie dans sa poitrine sauva de la folie causée par sa condition de mortel face à la Reine d’Helheim. Quand la jeune fille posa ses yeux sur le milliardaire, elle hoqueta de surprise et papillonna plusieurs fois des yeux, à court de mots.
« Qui est donc ce mortel ? Il a de la Magie dans sa poitrine. Et voilà deux fois maintenant que les Nornes (1) ont décidées qu’il repousserait Mort. »
« Tony Stark, un ami et allié. » Elle baissa les yeux la marque de leur alliance avec un sourire amusé.
« Loki. » intervint le mortel. « Pas que je veuille vous interrompre ou quoi que ce soit, mais Thor est là. »
« Thor ? »
Un mélange de surprise et de colère se mélangea dans sa poitrine. Il ne s’attendait pas vraiment à ce qu’Odin lui envoie son frère, s’attendant davantage à Heimdall, mais c’était quelque part la solution la plus stratégique. Personne d’autre n’aurait pu le capturer. Mais Thor sans Mjöllnir…
« Ouais. Et il a rapporté quatre amis avec lui. Armure comprise. D’après les infos que j’ai obtenues, ils veulent récupérer le marteau. »
« Tu peux les vaincre, Maman. Tu peux offrir leurs âmes à Mort et bruler le corps de Thor pour l’empêcher de revenir. Tu n’as plus besoin de les laisser te faire du mal ou te rabaisser ! »
« Je sais Hel. » souffla le Dieu du Chaos, en sachant déjà qu’il ne le ferait pas. Elle laissa la colère se muer en inquiétude.
« Ne fait pas de bêtise, je t’en supplie. » murmura une dernière fois sa fille avant de retourner dans son Royaume. Il la regarda disparaitre avec tristesse, se demandant quand il pourrait la revoir. S’il pourrait revoir le moindre de ses enfants.
Quand il fit face à Stark, celui-ci le regardait avec une expression sombre.
« Qu’y a-t-il ? »
« Je sais à quoi tu penses. Je ne suis pas d’accord. »
Peu importait qu’il ne soit pas d’accord. En quittant Asgard, Loki c’était promis qu’il ne laisserait plus personne lui dicter sa conduite alors un mortel comme Stark n’allait certainement pas essayer de le contrôler !
« Vous n’avez aucune idée de mes pensées Stark. » siffla le Dieu, alors que la colère pulsait au rythme de ses battements de cœur.
« Je ne suis ni idiot ni aveugle Loki ! » cria à son tour le Midgardien, s’approchant de lui pour pouvoir l’empoigner et l’empêcher de disparaitre.
« Que ce passe-t-il ? » demanda Nyma en arrivant.
« Rien du tout ! »
« Il se passe que Loki veut aller se rendre à Thor ! » s’exclama l’autre.
Loki le fusilla du regard, à deux doigts de lui voler la voix avec un sort. Nyma fronça immédiatement les sourcils avec cette expression qu’elle avait toujours quand Loki faisait quelque chose d’inconscient et de stupide.
« Vraiment ? » dit-elle lentement. Sa voix gardait sa neutralité habituelle et sa douceur, mais c’était d’autant plus effrayant.
« C’est la meilleure solution ! » essaya de se défendre le Prince en faisant abstraction à ses paumes soudainement moites.
« Vraiment ? » répéta-t-elle de nouveau en s’approchant toujours plus prêt, et il dut résister de toutes ses forces pour ne pas reculer d’un pas. Stark lui, s’empressa de fuir sans dignité.
« Je préfère me rendre plutôt qu’il me retrouve et retrouve mes enfants par la même occasion ! »
« Les Ases n’y verront que du feu. Frigga sera soulagée. Thor se doutera bien que quelque chose ne va pas, mais il t’est loyal. Odin par contre… » Elle s’arrêta seulement quand il put voir son reflet dans ses yeux dorés. « Que pensera-t-il quand on lui rapportera que tu es venu les narguer, que tu t’es laissé emporter sans chercher à t’enfuir ? Ça ne te ressemble pas. C’est suspect. Loki Odinson ne se rend pas, il ne ploie pas même si on le décapite ou qu’on lui coud les lèvres. »
Ils entendirent Stark hoqueter de surprise et d’horreur mais ils l’ignorèrent tous les deux.
« Tu as libéré tes enfants et maintenant tu te rends ? Odin ne mettra pas plus de quelques heures à nous retrouver et ce sera pire encore. As-tu réfléchi à ce qu’il adviendra alors ? Toi enchainé de nouveau, peut-être même incapable de faire quoi que ce soit, et tes enfants devant Odin, Cassiopée et moi accusées de trahison et condamnées à mort. Que fera-t-il de tes enfants ? Tu sais comme moi qu’il les considère comme des monstres et qu’il n’aura aucune pitié. Peut-être les renverra-t-il dans leur ancienne prison. Peut-être décidera-t-il de les tuer en essayant d’empêcher le Ragnarök. Peut-être les liera-t-il à lui et à Asgard, comme Sleipnir. Peut-être que tu ne le sauras jamais et que tu ne les reverras jamais. » Elle lui caressa la joue. « Penses-tu toujours que te rendre à Thor est une bonne idée ? »
Il eut l’impression qu’Yggdrasil s’effondrait et le noyait sous le désespoir. La peur se faufilait sous sa peau, mesquine et empoisonnée. Il n’arrivait plus à réfléchir. Il pensait avoir prévu des plans mais il n’arrivait plus à s’en souvenir. Il voyait ses enfants arrachés et condamnés et enchainés sous ses paupières et même ouvrir les yeux n’effaçait pas les images.
« Mais… que faire alors ? Je ne peux pas attirer Asgard jusqu’à mes enfants. » Nyma sourit dangereusement, une expression qu’il n’avait encore jamais vu sur son visage. A cet instant, il se demanda pour la première fois ce qui l’avait poussé d’abandonner définitivement Asgard alors qu’elle avait fait le serment en tant que Valkyrie de toujours servir le Royaume.
« Tu vas mentir Loki. Tu vas distiller le Chaos. Tu vas être le Dieu des Mensonges et le Dieu du Chaos. Ce sera ta dernière chance de détruire les chaines qui te relient à Odin. »
« NON ! »
Cassiopée s’écrasa violement contre son torse, manquant de les faire basculer. Elle tremblait.
« Cass— »
« Non ! Je ne te laisserais pas partir ! Je ne te laisserais pas retourner là-bas ! » hurla la petite fille, et ses larmes mouillèrent le tissu de sa chemise. Il essaya de la repousser mais elle le serrait trop fort.
« Je dois— »
« Non ! Tu ne reviendras jamais ! Je le sais ! Si tu y vas, tu ne pourrais plus revenir ! »
Son cœur se brisa et il tenta de trouver les mots pour la rassurer. Il connaissait sa peur de l’abandon. Sa disparition à 14 ans avait laissé une trace indélébile dans son esprit et elle était maintenant terrifiée à l’idée qu’il disparaisse à nouveau. Ses craintes n’étaient pas infondées ; s’il retournait à Asgard, ils ne se reverraient certainement plus jamais.
Elle se retourna vivement vers Stark, ses tresses rousses volant dans son sillage comme une tempête.
« Stark ! Dit quelque chose ! » Celui-ci abordait un visage fermé et sombre, franchement mécontent mais aussi terriblement inquiet. Les bras croisés et les pieds fermement plantés dans le sol, il était prêt à déployer son armure pour le retenir par la force.
« Je m’oppose totalement à ce plan. Si tu veux retrouver ton frangin il va falloir me passer sur le corps. »
Il pouvait encore sentir les doigts tremblants de Jormungandr le tenir de toutes leurs forces, entendre les supplications de Fenrir pour qu’on le libère en promettant d’être gentil simplement parce la lumière c’était éteinte, voir le box vide de Sleipnir, sentir l’odeur âcre et salée de Helheim où sa fille avait été enfermée, et son cœur hurla.
Avant d’avoir pu y penser, sa Magie se ruait sur Stark comme une dragonne. Il ne souhaitait pas réellement le blesser, simplement l’immobiliser et le faire taire, pour qu’il arrête de parler et de s’opposer, de juger et d’ordonner, de se penser être suffisamment important pour pouvoir décider de l’avenir de ses enfants à sa place.
Mais sa Magie entra en résonnance avec celle logée dans l’Artéfact du mortel, qui essaya de riposter à l’attaque et de se défendre et une grande onde de choc les mit tous à terre.
C’était douloureux mais Loki avait l’habitude de la douleur. Le mortel ne se releva pas tout de suite alors il en profita pour déposer un baiser sur le front de Cassiopée, chargé d’adieux et d’excuses, avant de se téléporter loin de cette maison où il avait connu le bonheur.
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Thor
« Je l’ai trouvé. » annonça Sif avec une cruelle satisfaction alors que la boussole qu’elle tenait se mettait à briller. « Heureusement que le Roi nous a donné cet objet, sinon nous aurions eu à fouiller Midgard toute entier. »
« Qu’est-ce ? »
« Je ne sais pas trop. C’est Magique et synchronisé sur la Magie de Loki pour nous permettre de le localiser. »
Contre sa paume, Mjöllnir frémit et il prit le temps de l’écouter. Sa Magie était différente de celle de son frère parce qu’il ne pouvait y avoir accès que par le biais d’un catalyseur. Mjöllnir avait été construite pour lui par les Nains, forgée dans le cœur d’une étoile pour pouvoir supporter sa force. Sa personnalité était en réalité d’avantage celle de sa Magie que celle de l’objet.
D’aussi loin qu’il s’en souvienne, il l’avait toujours sentie et entendue, mais ne pouvait pas la toucher comme Loki le faisait. Avoir été séparée d’elle ainsi était comme se faire couper le bras : on sentait encore sa présence fantomatique et la douleur, et on se retrouvait maladroit et handicapé.
Il l’avait toujours senti, mais il percevait celle de Loki depuis toujours également. Elle avait soigné ses blessures et animé les histoires, elle l’avait fait rire et l’avait émerveillé, elle l’avait vengé plus d’une fois et l’avait sauvé plus qu’il ne pourrait compter. Sa Magie était une part de l’entité et Loki, qui pouvait la toucher et la manipuler sans problème, qui l’écoutait lui parler et chanter pour lui, devait avoir une relation encore plus intime.
Qu’Odin ait pu ancrer un traceur dans sa Magie était une abomination. C’était un viol l’esprit et du corps, un empoisonnement et un crime infâme.
Si son Père avait pu faire une chose pareille, que pourrait-il faire d’autre quand il aurait Loki à sa merci ?
« Je ne suis pas comme toi, Thor. Ma Magie est une part de moi comme je suis une part du Chaos. Tout est étroitement entremêlé ; Magie, Corps, Esprit, et arracher l’un reviendrait à tuer les autres. »
« Thor ? Tout va bien ? » s’inquiéta Hogun. Le Prince essaya un sourire, Mjöllnir vibra.
« Allons-y. »
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Loki avait perdu quelques centièmes de cheveux depuis la dernière fois qu’ils s’étaient vus, mais pas en hargne. Il attaqua dès l’instant où ils arrivèrent dans son champ de vision, alors qu’il tentait visiblement de fuir à travers une forêt.
« Je n’y retournerais jamais, Thor, tu m’entends ? » hurla, promit, jura Loki, la folie dans les yeux. « Jamais ! »
Autrefois cette folie n’existait pas, mais alors sa petite fille était encore en vie.
« Loki ! »
Il aurait voulu lui dire qu’il ne voulait pas non plus, qu’il ne devait pas rentrer, qu’il devait être heureux et libre avec ses enfants, qu’il était tellement désolé.
D’un sursaut de Magie une araignée géante se jeta sur Frandal. Le guerrier, apeuré, tomba sur le sol en retenant la puissante mâchoire du monstre seulement avec la lame de son épée.
« Elle est belle n’est-ce pas ? » rit le brun en dansant autour d’eux, évitant les attaques comme s’il connaissait l’avenir. « Elle se nourrit de la peur… Plus tu seras effrayé, plus le Chaos grandira, plus elle sera consistante. »
Sif parvint à lui perforer l’estomac de son épée, mais son image se transforma en un nid de serpents qui plantèrent leurs crocs dans son armure jusqu’à l’atteindre. Elle ravala un hurlement et bondit en arrière en leur coupant la tête.
« Et elle finira même par s’ancrer dans la réalité ! »
Thor savait qu’il devait intervenir, aider ses amis et attaquer Loki. Mais Mjöllnir tout comme lui était réticente, en proie de doutes et quelque part… Lady Sif et les Trois Guerriers apprenaient que Loki n’était pas aussi faible qu’ils le pensaient.
Loki ne se battait pas ; il jouait. Il les énervait, leur faisant perdre leur self-control et attaquer sans réfléchir, se moquait d’eux et les vexaient sur leurs capacités de guerriers. Il dansait autour d’eux, toujours sous l’image d’une illusion plus ou moins ancrée, disparaissant pour réapparaitre dans leurs dos. Ils les épuisaient, aussi bien physiquement et mentalement et son rire résonnait encore et encore entre les arbres.
C’était une partie de chasse où les chasseurs étaient devenus les proies.
« Il suffit ! » siffla haineusement la guerrière en sortant la boussole. D’un mouvement colérique elle la jeta sur le sol et brisa l’objet avec son épée.
Sous ses yeux choqués, Thor vit très clairement Loki se figer et pâlir brutalement, comme si on venait de le saigner intégralement. L’Héritier eut toujours juste le temps de le rattraper alors qu’il s’effondrait, à la manière d’une marionnette sans fils, et le sentit trembler de tout son corps, la bouche et les yeux grands ouverts en un hurlement muet.
« Sif ! Qu’as-tu fait ?! »
L’ancienne blonde (2) regarda avec satisfaction l’araignée magique disparaitre et son ami se relever.
« Je ne sais pas vraiment. Le Roi m’a dit que faire ça si Loki utilisait sa Magie. Je crois que ça la restreint. »
Loki tomba à genoux, alors même que les bras de son frère l’entouraient, l’horreur se mélangeant à la douleur inscrite sur son visage. Il ne parvenait toujours pas à parler, hurlant en silence, et Thor n’avait jamais vu son frère avec cette expression de souffrance. Loki était fort et imperturbable, il ne pleurait ni ne criait ni ne suppliait alors qu’on lui cousait les lèvres, alors qu’on lui brisait les doigts, alors qu’on le torturait. Loki ne montrait aucune faiblesse, jamais et certainement pas devant Sif.
« Arrête ça ! »
« Pourquoi ? Il est hors d’état de nuire. »
« Il souffre ! Arrête-ça Sif ! »
« Il n’a que ce qu’il mérite. » La jeune femme renifla et croisa ses bras.
« C’est un ordre. » gronda Thor, des éclairs dans la voix.
Si elle n’arrêtait pas le dispositif immédiatement, elle en subirait son courroux. Il ne laisserait pas son petit-frère une seule seconde de plus dans l’agonie. Mjöllnir crépita, menaçante et furieuse.
« Je… Je ne sais pas comment faire… » avoua-t-elle avec hésitation, réalisant la colère sous-jacente du Prince qui menaçait de la foudroyer.
En désespoir de cause, il choisit de tourner sa Magie vers le Mage, comme celui-ci le faisait quand il le soignait. Il sentit très clairement le contact entre leurs Magies, et la faiblesse de l’autre qui pouvait à peine réagir. C’était comme si elle était soufflée hors de lui par un trou noir. Il n’avait aucune idée de ce qu’il devait faire, alors il souhaita.
« Les sorts n’existent que pour nous faciliter la tâche, et atteindre son objectif du premier coup. Il faut savoir que la Magie ne répond pas aux ordres, mais aux souhaits. Si tu veux soigner, alors tu devras souhaiter que la blessure disparaisse et ta Magie l’exaucera si tu en as la puissance nécessaire. »
Il souhaita que la douleur cesse et que la Magie de Loki arrête de s’affaiblir. Il sentit sa Magie bruler, Mjöllnir bruler, les éclairs déchirer le ciel et le gorger de puissance pour exhausser son souhait et son frère perdit connaissance.
Le blond passa ses doigts sur sa nuque pour vérifier son pouls, caressant la peau pâle et la pointe de ses cheveux noirs. Il respirait, faiblement mais il respirait, vidé de toute énergie. Il ne savait pas ce qu’avait réellement fait Odin, mais il avait souillé jusque son âme, et Thor avait l’ordre de lui apporter Loki. Son cœur et Mjöllnir se révoltèrent contre cette idée mais s’il revenait les mains vides que ses amis parlaient, alors son Père enverraient d’autres Asgardiens et cette fois-ci son frère en mourrait.
Il se redressa en portant le corps trop léger du Second Prince.
« HEIMDALL ! »
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Nyma
Nyma était une enfant d’Yggdrasil ; sans famille et élevée dans l’un des nombreux orphelinats d’Asgard. Elle avait grandi là où il y avait plus de bouches à nourrir que de nourriture, là où l’hiver était meurtrier, là où il fallait se battre pour une bouchée de pain.
Au départ, elle perdait. Alors elle avait observé. Jusqu’à ce qu’elle gagne. Et elle n’avait plus jamais perdu, car elle savait maintenant voler les mouvements de ses adversaires pour les utiliser contre eux.
Elle avait été sauvée par une femme dont il manquait un bras mais qui pouvait mettre trois hommes armés à terre en moins de trois secondes. Hildr était une Valkyrie, qui l’arracha à la pauvreté et à la faim et lui apprit à vivre plutôt que survivre. Ce fut les plus belles années de sa vie et plus d’une fois Nyma se demanda pourquoi elle mais Hildr ne lui répondit jamais et emporta ce secret avec elle au Valhalla.
Elle devint une Valkyrie jusqu’à ce qu’elle perde sa jambe et soit forcée de rendre son épée. Les règles d’Asgard étaient claires, même si elle était parvenue à payer un artisan réputé pour une jambe artificielle. Elle devint la nourrice de Second Prince sans vraiment comprendre comment, certainement embauchée parce qu’elle saurait vaincre le moindre agresseur, mais dès l’instant où la peau de l’enfant se colora de bleue, elle décida de le protéger. Comme Hildr l’avait fait avec elle, comme Hildr avait été elle-même sauvée. Elle s’était promit de lui apprendre à devenir suffisamment fort pour affronter la vie, de lui apprendre à être suffisamment intelligent pour ne pas avoir à tacher ses poings de sang.
Elle l’avait élevée en lui apprenant à quoi ressemblait la vie en dehors des murs du Palais. Elle lui avait montré : la poussière, la faim, la peau sur les os et les regards vides, le sang sur les poings et les larmes trop précieuses pour être dépensées. Elle lui avait appris à se rendre compte de sa chance et du privilège qu’il avait d’être le fils du Roi. Elle lui apprit que les monstres n’étaient pas ceux que l’on désignait comme monstres mais ceux qui désignaient.
Aujourd’hui Nyma savait qu’elle ne reverrait jamais les tours dorées du Palais ou les deux lunes d’Asgard, mais cela n’avait aucune importance. Rien ne la reliait à ce Royaume, ni famille ni amis, rien d’autre que cet enfant qu’elle avait décidé de suivre et de protéger.
« Écoutez-moi. » Elle avait observé les mouvements de ses adversaires et savait comment gagner. « Je sais que vous êtes en colère et que vous voulez vous précipiter à Asgard pour sauver le Prince Loki. Mais si vous faites ça, cela ne fera que précipiter et aggraver son châtiment. Si j’ai agréé que Loki de se rende, il ne le fera pas sans combattre. J’ai un plan, mais pour gagner et libérer notre Prince, il va falloir me faire confiance. »
Elle les regarda ; Cassiopée réfugiée contre un Fenrir furieux pour pleurer, l’expression renfrognée de Stark qui ne le quittait plus depuis qu’il s’était réveillé, Jormungandr qui avait retrouvé sa forme animale pour s’enrouler sur lui-même, Sleipnir profondément inquiet.
« Mais tu ne peux pas vraiment t’opposer à Asgard non ? Tu as fait serment. » dit la petite fille en posant ses yeux rougit sur celle qui était sa mère de substitution.
« C’est vrai. » confirma-t-elle. « J’ai fait serment devant Asgard de combattre ses ennemis et j’ai fait serment devant le Roi d’être toujours fidèle à la Famille Royale. Mais j’ai aussi fait serment à la Reine de protéger le Second Prince et à une mère de protéger son enfant. Je ne peux pas me rendre à Asgard pour combattre le Roi Odin aux côtés de Loki, mais rien ne m’empêche de construire un plan qui vous permettra de gagner. Je sais comment sont gérées les défenses du Royaume en cas d’attaque, et j’ai suffisamment observé le Roi au cours des années pour pouvoir prédire ses réactions. Vous combattrez, si tel est votre souhait, et je resterais ici avec Sleipnir pour veiller sur notre maison. »
« Avec Sleipnir ? » répéta le Midgardien. Nyma ne savait pas ce que Loki lui avait raconté, mais ce n’était plus l’heure des secrets.
« Voulez-vous vraiment prendre le risque de voir Sleipnir se retourner contre vous suite à un ordre d’Odin ? » L’ainé ne leur laissa dans le temps d’hésiter, il trotta jusqu’à la femme pour se poster à ses côtés.
« Je resterais ici. »
Les autres s’entre-regardèrent avant d’hocher la tête à son égard.
« Épate-nous Super Nany. »
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Localisation : Asgard
Loki
C’est la douleur qui arriva en premier. Le feu dans les veines, brulant à chaque battement de cœur.
Il découvrit que son corps était plus lourd que Mjöllnir, comme s’il avait été piétiné par une horde de Jötnar enragés. Il n’arrivait pas à bouger, ni même à ouvrir les yeux.
Vint ensuite sa Magie. Il la sentait blessée, affaiblie, tremblante, terrifiée. Elle qui auparavant était dispersée dans tout son corps était maintenant recroquevillée derrière son cœur. Quand il tendit virtuellement la main vers elle pour la rassurer, elle gémit et Loki faillit pleurer.
Le son arriva à son tour, étouffé et dispersé. Il pouvait entendre la Magie d’Yggdrasil chanter par-dessus les voix qui parlaient trop fort.
Il finit par réussir à ouvrir les yeux et il tomba dans une mer dorée. Asgard, lui dit son esprit. Il regarda vers le bas pour voir d’épaisses menottes à ses poignets. Il était dans les bras de Thor, dont il pouvait sentir la Magie crépiter à travers sa peau. Son frère fut le premier à remarquer son réveil et il lui sourit, comme s’il ne l’avait pas envoyé à l’échafaudage. Malgré lui, Loki s’apaisa un peu.
« Tu peux tenir debout ? »
Il ne pouvait pas, mais il le fit quand même. Les jambes tremblantes comme un nouveau-né, supportant à peine son propre poids, il se dressa face au Roi d’Asgard.
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Localisation : Midgard
Tony
La Magie dans sa poitrine avait le gout de la glace à la noix de coco. Ça crépitait et ça réchauffait, ça brillait avec ses émotions, c’était vivant et incroyable et il n’avait encore jamais ressentit ça. Il savait déjà qu’il ne pourrait pas se passer de cette sensation. Il avait l’impression d’avoir rajeunit de vingt ans.
Tony ne croyait pas au Destin, mais quoi d’autre que le Destin pour l’avoir mis sur la route de Loki ? Parce que quand on a besoin de Magie pour aller sauver les fesses du seul Mage…
Il se concentra sur l’objet qu’il tenait et souhaita le gorger de sa Magie : La Flèche d’Yggdrasil commença à vibrer et il se félicita d’avoir choisi de porter son armure. Il n’avait vraiment aucune idée de ce qu’il faisait, mais cela marchait visiblement.
« Maintenant, Stark. » annonça Cassiopée, et il tira à l’aide de l’arc qu’il avait rapidement façonné avec des chutes de vibranium.
Quand le portail s’ouvrit sur le paysage glacé et enneigé de Jötunheim, il rit de tout son cœur.
(1) Nornes : Trois Divinités (Urd le passé, Verdandi le présent et Skuld le futur) tissant le Destin. Elles se rapprochent des Moires de la mythologie grecque ou des Parques de la mythologie romaine.
(2) L’ancienne blonde : Sif était autrefois réputée pour sa magnifique chevelure dorée avant que Loki ne rase ses cheveux sous le venger. Depuis, elle est brune