
Du bon côté de l'arme.
“Tu es heureuse?”
“...”
“Tu es heureuse, avec lui?”
“... Je l’aime...”
“C’est pas ma question, Tiffany. Est-ce que tu es heureuse quand tu passes du temps avec lui?”
“Oui…”
“Alors passe plus de temps avec lui!”
“... Non, je ne veux pas… J’ai peur.”
“Peur de quoi, Tiffany?”
“De déranger. Peur d’être de trop. Peur de ne pas savoir que dire... Zach, j’ai peur de pas être dans la bonne vie.”
La soirée avait été particulièrement rude pour Tiffany. Elle était vide, tandis qu’elle avait tenté de remplir son cœur, sa tête et son corps d’une manière qui fonctionnait à l’époque. Mais ce n’était plus vraiment le cas, à présent.
Elle avait tenté de laisser aller son corps, et avait réussi. Mais loin d’arranger quoi que ce soit, Tiffany s’était seulement sentie encore plus sale. Et toujours plus vide. Toujours plus lamentable. Lamentablement pleine de rien d’autre que d’une gueule de bois, de douleur, de frustration et de semence. Comme ça avait toujours été le cas, finalement.
“Je pense que je ne vivrai pas vieille. Mais tu sais, ça ne me dérange pas. Je le sais depuis que je suis toute petite. Je sais que je vivrais pas plus de 35, 36 ans. Illian déteste les gens qui croient au destin. Mais moi, j’y crois. C'est écrit sur une pierre depuis ma naissance. Mais ça ne me dérange pas. Il y a une vie après la mort, après tout. Et même s’il n’y en a pas, l’idée du néant me plait.”
C’est Zach qui l’avait retrouvée en larme dans une des ruelles de Los Santos. C’est lui qui l’avait redressée et qui lui avait relevé le visage. C'est grâce à lui qu’elle réussit à envoyer un message à Joshua. Et lorsque celui-ci fut à ses côtés, Tiffany ne put se sentir rien d'autre que coupable. Nora et lui travaillaient dur, comparé à elle. Ils risquaient leur vie tous les jours, comparé à elle.
Et elle, comme toujours, elle rapportait tout à elle. Une nouvelle preuve de son inutilité et de sa faiblesse.
Mais elle aussi, elle veut se battre. Elle aussi, elle veut mordre. Elle aussi veut servir à quelque chose.
“Tu sais Zach, des fois je sais que si je m’écoutais, je quitterais le Téquilala et partirais braquer une banque. J’irais prouver au monde que pour une fois, ce ne sera pas moi la victime. Que cette fois-ci, je serais du bon côté de l’arme.”
“Qu’est ce qui te retient?"
"Illian. Maggie. Gabriel. Nora. Thelma. Olivia. Ils seraient tous si déçus de moi, si tu savais. Ils me haïraient."
“Je serais là, moi.”
“Si je décidais de braquer une banque, tu serais avec moi?”
“Oui.”
Nora ne cherchera pas plus loin, à l’autre bout du fil. Et Tiffany ne put même pas lui en vouloir. Tout comme Joshua. Tout comme Illian. Tout comme tous les autres. Hormis Zach. Zach, sa lune, celle autour duquel, parfois, elle aimerait flotter pour toujours. Les cernes se creusent à nouveau, elles se font une place de choix sur son joli minois.
“Tu devrais mordre, sortir tes crocs!” Qu’ils disent.
“Je t’assure que tout à l’heure, ça n’aurait pas servi à grand chose!” Répond-elle, bien informée. Il ne serait jamais une bonne idée de mordre lorsqu’un homme se soulage dans sa bouche.
“Tu n’es pas en danger?” Qu’ils demandent.
“La seule personne qui peut me mettre en danger ici, c'est moi-même.” Répond-elle, bien informée. Elle est la seule qui décide d’où elle se rend.
Un ravissant sourire face aux clients. Elle va bien. Elle se porte bien. Sa petite voix? Ce n’est rien, juste une extinction de voix. Sa petite mine? Elle a juste eu du mal à trouver le sommeil cette nuit. Le mascara qui a coulé? La pluie. Les bleus? Elle est encore tombée du haut de ses talons.
“Zach, est-ce que je peux dormir contre toi?”
“... Bien sûr, Tiffany.”
Une demande. Elle est morte de trouille. Elle retire ses talons, ses lunettes, ses gants, sa jupe, et elle s’allonge contre lui. Contre la seule onde de chaleur qu’elle a. La lune est chaude cette nuit, la lune est rassurante. Elle hume son odeur, et fond à nouveau en larmes. Elle se brise contre sa lune.
Ah, tout ce que j’aurais pu laisser faire
Te laisser naviguer autour de moi sans jamais t’arrêter.
Embarquer dans une nouvelle vie et laisser celle-ci de côté.
Sentir tes mains laisser une brûlure sur ma peau.
Mais j’ai tenté de résister et je m’en mords les doigts
L’arme du bon ou du mauvais côté, je te laisse le choix
Je crois bien ne pas l’imaginer : cette ville est un fléau.
Si je devais fermer les yeux et m’agenouiller, c’est devant toi que je le ferais.
J'ai tant confiance en toi que ça devrait être interdit.
Car à choisir, c’est à tes mains que je confierais ma vie.
C’est bien loin qu’on aurait pu s’en aller, faire le tour de la terre
mais je me sens trop enfermée pour le faire,
et je sais que du haut de tes talonnettes tu appellerais ça “le déni”.
(Mais je promet ne pas nier,
je suis simplement morte de peur.
Que penseront ils tous de moi,
une fois le grand départ tiré?)