
Happy new year.
Larry n’avait pas l’habitude de boire. Aussi, c’était sûrement l’une des premières fois, son état était donc facilement explicable. Aussi était-il assez facilement remarquable que quelque chose tournait en boucle dans sa tête ces derniers mois. Et même à travers la fumée des clopes, même à travers les cris de joie, même à travers les « BONNE ANNÉE » que tout le monde avait en bouche, c’était visible. Larry était perturbé. C’était facilement visible, si on daignait le regarder l’espace d’un instant. Et il n’y avait qu’une personne qui daignait le regarder ce soir. Son ami de fac, un certain Miquel Romero, qui après avoir hurlé avec ses potes, s’était laissé tomber sur le canapé, non loin d’un Larry absent et pensif. Le nez dans son verre d’alcool, l’argentin se mit à observer son ami, silencieusement. Celui-ci ne semblait pas profiter de la fête. Il n’était pourtant visiblement pas anxieux : Miquel l’avait vu des centaines de fois en proie à son anxiété et cela n’y ressemblait point. Il ne tordait pas ses doigts, ne mordait pas ses phalanges, ne jouait pas nerveusement avec ses cheveux. Non. Larry semblait simplement perdu dans ses pensées et incroyablement.. perturbé. Il n’y avait pas d’autres mots. La moitié de son visage caché dans le creux de sa main, coude appuyé sur le dos du canapé, le regard dans le vague et les sourcils froncés. Et surtout, il n’avait toujours pas remarqué qu’il le regardait, et ça, c’était une preuve suffisante pour Miquel ; Larry n’était pas triste, ou angoissé, il était simplement en pleine réflexion, en proie à une introspection bien trop sérieuse pour l’instant présent. Alors Miquel resta ainsi à le fixer quelques temps, espérant qu’il ne tarderait pas à se rendre compte qu’il était épié.
Lorsqu’il réussit enfin à capter son regard, Miquel pu observer Larry réagir en plusieurs temps. Tout d’abord, il le remarque et leurs regards se croisent, quelques secondes. Puis, Larry détourne le regard, et enfin, son visage prend une teinte rouge. Embarrassé, le rouquin lance un regard à sa montre et racle alors sa gorge avant de dire d’une voix basse.
« Ah, bonne année Miquel. »
Visiblement amusé, Miquel laisse aller un sourire en coin. « Ouais, bonne année, mec. »
À nouveau, un silence s’installe. Silence est un bien grand mot, tout les étudiants autour d’eux hurlent. Certains des potes de Miquel sortent et sautent dans la piscine de la petite maison empruntée pour l’occasion. Larry les suit du regard, zieute ensuite Miquel, et l’interroge du regard.
« Tu les rejoint pas? »
« Peut être plus tard. » Miquel hausse les épaules.
En attendant, l’argentin se redresse et avance de quelque pas avant de s’effondrer à nouveau sur le canapé, à présent bien plus proche de Larry. Il laisse son corps s’écraser tout en longueur, tête posée sur une des jambes du rouquin qui sourit alors.
« Qu’est ce que t’as en tête, Larry? » Appuie Miquel, aimant se moquer du prénom de son ami, gentiment.
« Arrête… » rit-il « Comment ça qu’est ce que j’ai en tête? »
« T’as l’air préoccupé depuis le début de la soirée. Si c’est l’alcool qui te fais ça, fais moi rappeler de plus jamais te laisser boire- »
« Mais non! Mais non c’est pas ça… » comme par habitude, Larry pose sa main sur le front de son ami, et commence a la laisser aller de son front à ses cheveux, aplatissant ceux-ci doucement. « Je réfléchis juste. »
« A quoi? » demande l’argentin.
Larry marque une pause dans ses mots et dans ses mouvements. Leurs regards se croisent l’espace d’une seconde, et aussi vite, le regard brun de Larry fuit vers la piscine.
« Tu veux pas aller piquer une tête avec tes potes? »
Un des sourcils de Miquel s’arque, d’un air interrogateur.
« Et toi? T’aime te baigner nan? C’est ce que tu m’as dis l’autre jour. »
Miquel l’observe. Il semble, pendant une fraction de seconde, envisager cette possibilité et l’étincelle dans ses yeux le prouve. Mais aussi tôt apparut-elle, aussitôt l’air fermé du rouquin revint.
« Si, mais pas ce soir. »
« Pourquoi pas? »
« J’ai… pas envie. »
« Oh ok. »
Depuis, Larry a reprit les caresses dans ses cheveux, alors Miquel s’autorise à fermer les yeux quelques instants.
« Est ce que t’as dansé depuis le début de la soirée? » demande Miquel, de nul part.
« Euh-» déstabilisé, Larry prend quelques instants pour répondre. « Non ? »
« Pourquoiiiii? »
« Euh, je sais pas? Je crois que je n’aime pas vraiment que les gens puissent me voir danser. »
« Même ta sœur ? »
« Euh, je sais pas vraiment-»
« Même moi? »
« … Miquel arrête un peu avec tes question, tu me gênes. » lance t’il, le rire aux lèvres, posant ses mains de manière brouillon sur le visage de l’argentin pour le faire taire.
Pas prêt à se laisser se faire étouffer et tentant de montrer son désaccord à son ami, Miquel lécha l’une des mains de Larry, celle posée sur sa bouche. Larry tira la grimace et retira rapidement sa main.
« Ah Miquel t’es degueu!! »
En un rire, le brun se redressa et attrapa le poignet du rouquin.
« Aller viens. »
« Où ça?? » demande Larry, et se redressant.
Mais aucune réponse. Miquel embarqua Larry dans la maison louée pour la fête. Maison typique américaine, avec plusieurs chambres et salle de bain, bref, typiquement le genre d’endroit où les deux n’avaient pas l’habitude de passer du temps.
« Les américains peuvent vraiment se permettent d’acheter ce genre de maison ? »
« Certains oui, mais bon, y en a d’autres qui habitent dans une ferme avec une dizaine de frère et sœur et des poules. »
Faisant mine d’être interloqué, Miquel dit « tu as besoin de te confier peut être Larry? »
Les deux ricanent ensembles avant d’arriver devant une porte que Miquel entre ouvre, avant de la refermer aussi vite.
« Oups, désolé ! » il fait la grimace à Larry puis chuchote. « Ça baise la dedans!»
« Ah- O-ok. » Il en faut évidemment pas plus pour faire bégayer Larry qui se remet à la suite de Miquel, en quête d’une pièce libre.
Nouvelle chance, une salle de bain. Elle n’est pas très grande mais elle fera l’affaire. Miquel entre donc en premier, et inspecte les alentours.
Larry ferme la porte derrière lui et se laisse aller, dos contre le lavabo.
« J’en pouvais plus, trop de bruit. » lança Miquel et fouillant dans sa poche, avant de sortir une paquet de cigarette. « Je peux ? »
Larry lui lance un regard. « oui, juste, ouvre la fenêtre j’ai pas envie de mourir à cause de mon asthme. »
« Ouais t’inquiète, j’ai pas oublié ce qu’il s’est passé la dernière fois. » ricane Miquel.
Croisant les bras, Larry prend un air faussement outré. « Tu veux dire, la fois où tu as trouvé que me souffler ta fumée au visage était une bonne idée ? »
« Mais je savais paaaas que t’étais asthmatique! »
« -Et que tu m’as défoncé le dos en tapant dessus comme si c’était un pot de cornichon que tu arrivais pas à ouvrir? »
« J’croyais que tu t’étouffais mec, j’allais pas te laisser mourrir! »
« Mmmmh, bref. Oui tu peux, juste ouvre la fenêtre. » lance t’il avec un sourire amusé aux lèvres.
Dans le silence neuf, Miquel grimpe alors dans la baignoire, sur le rebord de celle-ci, ouvrant la fenêtre et s’y mettant avant d’allumer sa cigarette. Les deux profitèrent de ces quelques instant de silence.
Larry s’était nerveusement mit à jouer avec sa croix de baptême. Il semblait tourner sa langue 10 fois dans sa bouche, de peur de parler.
« J’étais anxieux à l’idée de venir à cette soirée. »
« Ah? Pourquoi? »
Silence. Larry mord sa lèvre inférieure.
« Ma soeur m’a raconté un jour comment ça se passait dans les fêtes étudiantes. »
« Qu’est ce qu’elle t’a dit? »
« Hum… » il prit à nouveau une couleur rouge, semblable à celle de son pull. « Que ça… … hum. »
« Hum? » répéta Miquel, sans vraiment être là.
« elle m’a dit qu’en général, ça- forniquait un peu de partout et à toute heure. »
Comprenez bien que Miquel n’avait vraiment pas prévu d’entendre ça, et il sembla se retenir d’exploser de rire, ce qui eu le don d’embarrasser Larry.
« Quoi?? »
« Mprf- Mnon rien rien- je- elle a vraiment utilisé ce mot? »
« … non… »
« Ah ok je me disais aussi- »
« Mais visiblement elle avait raison… » dit il en référence à la chambre à quelques pas d’eux.
« Bah c’est clair que ça peux arriver dans ce genre de soirée… »
« Aussi j’avais peur d’autre chose. »
« De quoi? »
« Elle m’a parlé du jeu actions ou vérité. »
« Ah ça? Ça arrive plutôt quand t’es au lycée je pense… on est trop âgés pour ça maintenant. Pourquoi t’en avait peur ? »
« Elle m’a dit qu’en général, dans ce genre de soirée ça finissait souvent seulement avec des question en rapport avec… le .. sexe.. et avec des actions du type… embrasser quelqu’un.. tout ça.. »
« Ah ouais, c’est clair que c’est pas ta came tout ça! »
« Bah c’est surtout que… j’ai aucune expérience et que… j’ai jamais embrassé. »
Miquel, bien que le visage toujours tourné vers le dehors, prit un air étonné, restant silencieux quelques instant.
« Sérieux? »
À nouveau, le rouquin se mit à jouer nerveusement avec son collier. « Bah, oui. »
Il prit le temps de finir sa cigarette avant de l’éteindre et de se redresser, pour enfin se tourner vers son ami.
« Par choix ou parce que t’as jamais eu l’occasion? » demande t’il, en remarquant ce sur quoi Larry passait sa nervosité.
« Je… sais pas trop. » L’alcool l’avait bien fatigué, aussi les mots sortaient tout seuls, bien plus aisément. « Je pense qu’il y a quelqu’un avec qui j’aimerais bien avoir mon premier baiser. Mais j’ose pas me lancer. Comment on demande ça ? »
Miquel se laisse tomber assit dans la baignoire, jambes ballantes en dehors de celle ci. Il croise les bras, un sourire serein au visage. Il sait exactement ce qui est entrain de se passer.
« Mh… je sais pas? Tu lui dis, simplement? » lance t’il en tapotant la place dans la baignoire, à ses côtés.
Larry racle sa gorge et vient alors se laisser tomber dans la baignoire, doigts jouant nerveusement entre eux.
« C’est correct ? De demander, juste comme ça? »
« Bah ouais. Surtout si t’en a envie. On sait jamais, peut être que l’autre en a envie lui aussi. »
« … j’ai.. jamais dis que c’était un homme. »
« Hein? »
« Tu dis « lui aussi »… j’ai jamais dis que c’était un homme… »
Miquel hausse les épaules, s’amusant avec son briquet. « Parce que c’est une femme? »
Larry se tait comme si sa vie en dépendait. Son silence en dit long pour Miquel.
« Ouais, c’est bien ce que je me disais. » Miquel arrête de s’amuser avec son briquet et le laisse tomber sur son ventre. « T’es gay, Larry? »
Sa franchise glace le sang du rouquin, aussi ne répond t’il pas.
« Tu sais, je sais pas si c’est ta religion qui te fout dans le mal comme ça, ou si c’est à cause de ça que tu oses pas demander à l’homme que t’aime bien si tu peux l’embrasser, mais y a rien qui devrait remettre en question qui tu es- fin, si t’es gay, t’es gay et c’est tout, c’est pas grave, c’est pas un crime fin je veux dire-»
Il s’arrêta lorsqu’il pu voir dans son champs de vision le visage de Larry se remplir de larmes. Il ouvrit donc grands les yeux et se redressa un minimum.
« Ok j’ai peut être été un peu trop brute de décoffrage, désolé Larry-»
« C’est toi que j’ai envie d’embrasser. » renifle t’il.
Cela coupe net Miquel qui, pour le coup, n’est pas sûr d’avoir bien entendu ce qu’il a entendu. Enfin, il se doute du fait que Larry l’aime bien, bien plus que juste comme un ami, mais qu’il le sorte comme ça, de but en blanc, ça l’a surpris.
Il laisse quelque secondes de blanc avant de répondre.
« Genre, moi? »
« Bah oui… »
« T’en as envie maintenant ? »
« … oui. S’il te plaît me le fait pas répéter… »
« Larry, demande le moi… »
« … quoi? »
Larry tourne son visage vers Miquel qui ne dit mot. Ils se regardent plusieurs secondes avant que le rouquin ne comprenne et n’accepte ce qui lui reste à faire.
« Je- euh… Miquel? Est ce que je peux… t’embrasser?… »
Miquel rattrape son sourire alors qu’il hoche doucement la tête.
« T’as juste à te rapprocher et à poser tes lèvres sur les miennes. » lance Miquel en retirant ses propres lunettes.
C’est ainsi que l’air frai de la fenêtre et la froideur de la baignoire ne pu rafraîchir leurs deux visage à présent collés l’un à l’autre, et que Larry et Miquel échangèrent leurs premiers baisers, un soir de nouvel an, dans une baignoire.