Fuir l'amour de peur qu'il ne se sauve

Carol (2015)
F/F
F/M
G
Fuir l'amour de peur qu'il ne se sauve
Summary
ceci est la version "française ; il est possible que j'ai laissé passer des fautes d'orthographede grammaire, de syntaxe , d'accord des temps etc.... je le fais pour les lectrices et lecteursfrancophonesmerci de votre éventuelle lecture ou relecturecertaines personnes peuvent être choques en découvrant la personne qu'est Carol mais c'est quelqu'un qui a été le souffre-douleur de sa mère et qui ne s'en remet pas...et parfois son côté cruel ressortavec moi il n'y aura pas de domination mais de l'égalité comme je l'ai sentie en visionnant Portrait d'une jeune fille en feu...Carol n'est pas dominatrice Thérèse n'est pas falote...
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Chapter 39

 

 

Carol ne put s’empêcher de sourire à ce que lui avait dit Margot mais aussi à la reculade de Thérèse qui l’observait.

« je sais que tu es ma fille à temps plein et puis oui il est beau et fuyant ton lézard ».

 

Le ciel bleu les surplombait mais il y eu des ombres ; ce n’était d’abord qu’un peu de poussière mêlée de sable piquant un peu les yeux , puis les quelques premières feuilles mortes éparses roulaient plus vite et plus violement comme pour une valse à mille temps

La belle journée ensoleillée comme l’était la bonne humeur de Carol s’assombrit lentement . Les nuages noirs le disputaient aux nuages gris. Les cartons sur les tables du bistrot voisin prirent la poudre d’escampette. Prudemment tout le monde se mit à l’abri. Ceux qui voulaient terminer leur café en se levant prenaient une mauvaise décision. Il fallait s’abriter sans tarder.

 

Margot haussa les épaules et la regarda d’un air entendu :

"Beau et fuyant... ça me rappelle quelqu’un. Allez maman on y va ... il va pleuvoir"

Les premières grosses gouttes s’écrasèrent sur le macadam du trottoir . Le soleil s’était fait la malle et Eole frappait à tout va. Le parfum de la pluie se substitua à la chaleur d’un soleil déjà moins ardent , annonciateur de l’automne si proche.

"tu as raison chèrie ; me donne la main et on court jusqu’à l’hôpital"

Margot connaissait les réticences de sa mère à aller à l’hôpital . Plus rien ne l’étonnait.. C’est bien simple . Depuis que Thérèse était entrée dans la vie de Carol, cette dernière passait son temps à faire des efforts et à accomplir des choses tellement incroyables. À cette évocation, la petite fille débordante de plaisir se mit à courir avec sa maman pour s’abriter des grosses gouttes. Des tas de souvenirs agréables se bousculaient dans sa tête...

Ah ce grand voyage en voiture ,les mots d’argot qui émaillaient les dialogues de Thérèse le pique-à l’orée d’un bois, le pipi derrière un bosquet et puis la maison minuscule de Thérèse , cette petite table où elles avaient mangé toutes les trois ... tout était petit et tout était charmant . Elle avait aussi souri intérieurement quand elle voyait sa maman si embarassée par les tâches ménagères que Thérèse accomplissait si naturellement... bref toutes ces choses merveilleuses et déroutantes qu’elle découvrait pendant ces grandes vacances et que la présence de Thérèse avait provoquée. Margot les avait autant appréciées que les sorties dans la campagne avec ses copains du village pendant lesquelles ils volaient des fruits , chassaient les grenouilles dans les étangs et se battaient les uns contre les autres ; les cicatrices qu’elle avait sur les bras et les jambes en étaient la preuve.

 

Elle courrait et elle aurait voulu que ça dure éternellement, elle courrait et remarquait l’incroyable sourire de Carol qui semblait goûter tant le temps présent... c’était aussi chouette que les crêpes au sucre du marché. Elle aimait regarder sa maman ; il lui arrivait parfois d’essayer de la copier dans sa démarche , dans son sourire, dans son maintien.

Même , une fois , elle était rentrée dans sa chambre et avait ouvert les armoires. Elle aimait le parfum de sa maman et elle le sentit fort quand elle ouvrit les portes de l’armoire en mérisier ; les yeux fermés elle s’imprégna de cette odeur pour la faire sienne. Elle hésita un peu devant les tenues de sortie du week-end ; elle les respira pour s’en éloigner

promptement ... que des mauvais souvenirs, une odeur animale et amère , une odeur de tabac froid beurk.....

 

 

Mais il y avait aussi ces explorations dans la propriété ; à chaque détour , à chaque clairière des découvertes et des surprises. Carol et Margot s’étaient promenées un dimanche pour découvrir enfin ce vaste domaine qu’elles voyaient de leurs fenêtres. La petite désirait ces moments là pendant lesquels Carol lâchait prise et devenait la petite fille qu’elle n’avait jamais été ; Margot adorait ça et c’était alors des instants rares et précieux où elle avait enfin sa maman rêvée, sa maman délivrée.

Carol l’avait emmenée vers un recoin très spécial et très privé qu’elle avait fait restaurer avec comme point de départ le ruisseau qui passait sous la maison et sous la boulangerie par le plus grand des hasards. Margot avait découvert cette particularité en explorant tous les coins et les recoins de cette incroyable propriété. C’était peut-être la raison cachée pour laquelle Carol avait dit qu’elle achèterait cette boulangerie ; car , ainsi, elles pourraient emprunter cet étrange et surprenant raccourci... parce que, à chaque fois, ce serait comme surgir des entrailles de la terre comme pour une renaissance infinie et multiple.

 

Ce ruisseau traversait le domaine et le suivre entraina vers une cascade mise en scène à partir de grosses pierres et qui alimentait une pièce d’eau cristalline et froide , un étang aux eaux claires habité par des grenouilles et des carpes. émergeant de par sa couleur une koï blanche et rouge zébrée d’or nageait avec indifférence , à peine perturbée par ces baigneuses impromptues .

Carol n’y avait pas pensé, elle ne l’envisageait même pas. Mais Margot n’eut pas son pareil pour la sortir de sa réserve.

Et ce fut un merveilleux moment que la petite gardait bien au chaud dans sa tête et dans son cœur.

"Maman l’étang....c’était super chouette. Tu t’en souviens ?"

 

Elles se ruèrent dans l’entrée de l’hôpital et Carol retint sa fille par la main :

"Comment l’oublier, Chèrie ? Notre secret n’est-ce pas ?

-ouiiiiiiie

 

-bon on va retrouver Thérèse ; elle nous a dit que c’était dans le département psy . ça va tes cheveux tu n’es pas trop mouillée ?

-non? Ils vont juste friser ; mais tu oublies quelque chose"

Contrariée mais le cachant Carol interpella sa fille :

« qu’est-ce que tu veux dire ? »

Margot se campa devant sa maman :

"tu dois aller chercher le résultat de tes analyses ; et ton rendez-vous est, elle se tourna vers la grosse horloge qui surplombait le guichet, dans 8 minutes maman"

Carol n’avait pas oublié mais elle n’était pas pressée de savoir. La ménopause était là , bien là et elle ne voulait pas le savoir et surtout ne pas en tirer les conséquences. Mais savoir qu’elle n’aurait plus d’enfant accrut sa détresse intérieure ; là , de suite, elle avait besoin de présence , de sa présence...

"j’y vais ma chèrie ; est-ce que tu viens avec moi ?

-non maman je n’ai pas envie. Ce sont des trucs d’adulte et j’y arriverais moi aussi un jour alors... Bof; je vas rejoindre Thérèse qui doit s’impatienter

-tu crois ?

-moi ? Je ne crois à rien"

Puis elle leva les bras comme un prédicateur baptiste et déclama modérément , on était dans un hôpital quand même :

« sauf à la force de l’amour qui réunit tous ceux qui s’aiment... »

-tu plaisantes là ?"

Margot s’éloigna courant et riant :

« peut-être bien que oui , peut-être bien que non ».

Carol regarda sa petite friponne adorée qui s’éloigna dans les couloirs . Les ombres du passé , les remords éprouvés pour n’avoir pas assez aimé Anne alors qu’on se doit d’aimer sa mère, la désolation de n’en avoir aucun retour , le ratage de sa vie amoureuse ... tout cela disparaissait en un claquement de doigt.

Dieu merci de m’avoir envoyé ma Margot cet ange , tombé du ciel rien que pour moi, qui répare et me réconcilie avec la vie

 

Elle se dirigea à regret vers le département de médecine générale. Des patients groupés dans un petit salon la suivirent du regard , compensant ainsi le soleil caché par les nuages.

 

 

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Thérèse s'impatientait . Le besoin de voir Carol submergeait le bonheur de retrouver sa maman ; elle était impatiente de les voir ensemble pour goûter un moment de félicité fugace , forcément fugace ; elle s'agaça de son pessimisme redondant. Elle ne changerait donc jamais ; elle hésiterait toujours entre l'ombre et la lumière , la certitude et le doute.

L'impitoyable mélancolie la guettait toujours , quelles que soient les circonstances , quelles que soient les opportunités.

 

 

Elle n'eut pas longtemps à marcher car , très vite, une chevelure blonde l'interpella…mais c'était Margot. L'air de riene t cachant son agacement , elle demanda à la petite :

"Carol?

-oh rassure toi mais on avait oublié qu'elle devait passer chercher son ordonnance

-c'est vrai

-je vois que ça t'énerve. Elle te manque déjà?

-je ne sais pas … si tu le dis c'est que c'est vrai" soupira Thérèse décidément incapable d'échapper au regard scrutateur de la fille de Carol. Elle lui prit la main :" je vais donc te présenter à ma maman ; je te préviens elle adore les enfants

 

-ben alors avec toi elle est mal barrée"

 

Margot regretta aussi vite ce qu'elle avait dit .

"je ne voulais pas dire ça ,excuse moi je ne devrais pas parler ainsi. Je suis qui pour dire ça?"

Thérèse s'immobilisa le regard anormalement dur:

"c'est mon problème  . Cela dit le sujet est clos ok?"

Margot était sincèrement désolée et prit son air de chien battu auquel personne ne résistait... enfin jusqu’à présent :

"d’accord... allons voir ta maman ; j’ai hâte de la connaître"

Thérèse leva un sourcil et fit une moue dubitative ayant vite compris la manœuvre de la petite en âge mais si pertinente, la pertinence d’une adulte ayant déjà beaucoup connu. Elle hocha la tête.

Sans s’en rendre compte, elles atteignirent la chambre où Jacqueline , assise sur le grand fauteuil jouxtant le lit, les accueillit avec un immense sourire. Thérèse laissa Margot s’avancer.

"Bonjour jeune fille

-bonjour Madame je m’appelle Margot et ma maman Caroline , mais on l’appelle toutes Carol.

-Margot? Le vin ou la princesse ?"

 

Margot ne s’attendait pas à cette question et , contrairement à son habitude, ne sut quoi répondre. Jacqueline , si pâle mais les yeux pétillants de gentillesse , posa les mains sur celles de Margot qui était fascinée par le labyrinthe saillant eet bleuâtre des veines qui , telles des stigmates et plus que le visage ou la silhouette, soulignait le grand âge et les épreuves de la petite femme menue qui ajouta :

"eh bien, je dirais M.A.R.G.A.U.X, comme ce vin de bordeaux sublime ou M.A.R.G.O.T., comme Marguerite de Valois, une princesse de France dans les années 1500 pendant les guerres de religion. Margot est un diminutif de ce prénom

-alors c’est M.A.R.G.O.T

-bien nous voilà donc d’accord".

Ce dialogue surprenant plut beaucoup à Thérèse ravie par la réactivité et la complicité naissante. Elle n’ignorait pas la déception soigneusement dissimulée par sa maman et elle reconnut la blessure légère et permanente que son choix de vie avait provoqué chez sa maman qui adorait les enfants.

Thérèse n’en voulait pas ; mais un fort sentiment de culpabilité latente l’avait poussé à protéger très vite et très tôt Jacqueline des aléas d’une vie dominée par le don , l’oubli de soi-même et une profonde détresse. Elle ne put que constater combien la jeunesse apportait à la vieillesse un soulagement et une joie de vivre et son cœur se serra encore une fois devant tant de grâce réciproque .

Son éternelle culpabilité l’envahit une fois de plus, mais pas que...

"Margot je vais au devant de Carol ; je vous laisse vous parler... j’arrive . Mais là"

Margot se retourna :

"ça va , on a compris... de toutes façons on a des choses à se dire et tu n’as pas à les entendre... vas y Rintintin"

Thérèse ne releva même pas le ton insolent de Margot parce qu’elle était déjà loin. L’ascenseur était bloqué et elle se rendit compte très vite qu’il fallait mieux prendre les escaliers. Il n’y avait qu’un étage à descendre après tout. Mais quelle ne fut pas sa surprise de voir sur les marches Carol assise la tête dans les mains.

 

Elle ralentit et, doucement, s’assit près de Carol et, en hésitant, défit les mains qui s’accrochaient au visage :

« Que se passe-t-il ? »

Les yeux bleus perdus , ne sachant quoi regarder, se dérobaient. Thérèse, stupéfaire de sa propre audace , prit le menton de Carol et balaya du regard ce beau visage éploré :

« dis-moi, explique-moi, je suis là »

Carol gardait le silence puis balbutia quelques mots :

« la doctoresse m’a dit que , retenant son souffle, j’étais en ménopause ». Les yeux de Thérèse se remplirent de gentillesse et d’empathie :"serait-ce un problème pour toi ? ». Carol se redressa :"il n’y a pas que ça ... j’ai quelque chose d’autre". l’inquiétude submergea le cœur de Thérèse , imaginant tout et n’importe quoi.

"dis-moi"

Carol baissa les yeux submergée de honte et inquiète de la réaction de la jeune femme qui prit la parole :

"il faut me parler Carol et vite. Tu me fais peur…tu n'as pas un can

-non"  Carol se crispa et Thérèse sentit ses ongles lui rentrer dans la paume.

"j'ai honte

-pourquoi as-tu honte? "

Carol arbora une grimace amère et mélancolique et elle s'affaissa au propre comme au figuré:

"j'ai une maladie vénérienne et j'ai honte. Je trinque toujours quoique je fasse"

Thérèse glissa un bras autour des épaules de Carol:

"tu n'as pas à avoir honte ; c'est plutôt celui qui te l'a donné qui devrait avoir honte" mais Carol garda le silence et Thérèse reprit:

"est-ce que ça se soigne?

-oui facilement ; j'ai une ordonnance. C'est juste un comprimé à prendre

-bien; si tu as besoin de quelque chose , si tu as besoin d'en parler n'hésite pas je suis là. Je ne veux pas que tu aies honte…ça m'est arrivé aussi. Je pense que Richard a dû me tromper"

Stupéfaite de cette spontanéité simple et évidente Carol leva les yeux et regarda longuement Thérèse parce que, inexplicablement, elle s'étonnait toujours de son refus  de la juger ou de la qualifier :

"tu es une drôle de fille tu sais…d'où viens-tu?"

Thérèse se leva et invita Carol à faire de même en lui prenant la main sur laquelle elle posa le plus tendre des baisers

 

"de l'amour de  maman pour sa fille"

 

Ce n'était plus la Thérèse des "deux trous rouges au côté droit" , c'était la Thérèse  du vivre malgré tout , la Thérèse dont le désir de vivre s'alimentait de la présence de Carol et du futur qui, peut-être un jour ou un autre, s'ouvrirait à elles deux ensemble et à jamais. Mais , parce qu'on ne change pas du jour au lendemain, la mélancolie, son animal favori, l'effleura telle l'aile d'une chauve-souris qui traînait après elle une pénombre fatale et la peur de la perte s'installa tranquillement…Thérèse sut à ce moment précis ce que serait la douleur de la perdre et cette ultime conscience la frappa; elle sourit un peu plus fort  à Carol  comme pour  contrer déjà  la douleur du partir.

 

         

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Elles arrivèrent dans la chambre :

                                             

"ça y est …nous voici, nous voilà"

 

Margot quitta le bord du lit où elle s'était assise et alla au devant de Carol :

"ça va maman, pas de mauvaises nouvelles?"

Carol se pencha et posa un baiser sur le front de sa fille :

"non , petite, tout va bien . Bon veux- tu bien me présenter?"

Jacqueline suivait des yeux Carol et son visage s'inonda de joie :

"oh Carol comme vous êtes magnifiques vous et votre fille ; c'est un vrai plaisir de voir la beauté apparaître dans ce triste lieu"

Thérèse ne fut pas étonnée de la réaction de Jacqueline ; c'était une personne  absolument dépourvue de jalousie

Et toujours prête à se réjouir du bonheur des autres. La beauté des autres femmes ne lui avait jamais causé de problèmes. Carol fut surprise d'une telle entrée en matière  et frappée de l'élégance naturelle et délicate de la femme âgée qui la dévisageait avec bienveillance; elle se sentit de suite à l'aise:

"merci mais je vous trouve également très jolie"

Thérèse s'approcha :

"maman a la grâce et le maintien que j'aurais voulu tant avoir"

Jacqueline, posant la main sur le bras de sa fille, se récria :

"enfin Thérèse arrête de te sous-estimer constamment ; tu es jolie et tu dois t'en persuader. Enfin Carol je vous prends à témoin. N'ai-je pas raison?"

Carol s'amusa de la gêne évidente de la jeune femme qui ne savait où poser les yeux:

"bien sûr qu'elle l'est , jolie ; mais je crois qu'elle ne s'en rend pas compte. Et , en plus, elle a un sourire tellement ouvert et franc. Ça vaut de l'or"

Margot se glissa discrétement entre les deux femmes adultes et ajouta :

"oui elle est pas mal du tout mais on dirait qu'elle s'en moque"

Thérèse se sentit coincée par tant de compliments:" si vous le dites toutes les trois je pense qu'il y a du vrai dedans" et elle s'approcha de sa maman et l'embrassa très fort :"je sais que tu me défendras toujours et à jamais. Merci "

Jacqueline retint les mains de sa fille :"tu es ma fille adorée tu le sais?" Thérèse hocha la tête et se tourna vers Carol :

"voilà j'aimerais que tu exposes les conditions pour que maman puisse vivre dans la maison du garde-chasse"

 

Thérèse était de nature réservée dans certaines circonstances mais, en l'occurrence, elle voulait que soit éclairci au plus vite le sort de Jacqueline et qu'elle sache ce qui l'attendait à Godberghen . Carol apprécia beaucoup le contraste entre le manque de confiance que Thérèse avait en elle-même et l'assurance qui illuminait ses yeux quand elle parlait du sort de

Jacqueline :

"bon j'ai une maison qui était celle du garde-chasse du domaine et que j'ai rajeuni car j'avais l'envie d'en faire une maison d'hôte. Mais j'ai eu quelques mésaventures avec mes clients et j'ai arrêté. Alors cette maison n'est plus habitée

depuis un an et j'aimerais qu'elle le soit par quelqu'un de totale confiance…et c'est plus important qu'un loyer. J'ai besoin d'aide parce que je n'ai absolument pas le temps de m'occuper de tout; en quelque sorte j'ai besoin de quelqu'un de confiance qui me déchargerait des tâches quotidiennes et qui pourrait s'occuper de Margot quand je ne suis pas là"

Margot se tourna vers Jacqueline :"alors tu vas t'occuper de moi?

-hey bien il me semble que oui"

La conversation roula ensuite sur le projet de Gaëlle . Thérèse remercia Carol pour toutes les dispositions prises et pour le projet et pour sa maman:

"sincèrement , si le projet ne fonctionne pas tu vas perdre de l'argent et j'en serais désolée"

Margot et Jacqueline écoutaient attentivement et , ensemble, elles se tournèrent vers Carol attendant sa réponse.

 Thérèse avait rejoint Margot déjà assise sur le lit et Jacqueline posa son regard sur Carol qui prit la parole :

"je profite du fait que nous sommes toutes les quatre réunies et je tiens à préciser mes sentiments quant à ce qui va se passer.

-on t'écoute maman; nous sommes toutes ouïe "

Thérèse ne put s'empêcher de sourire de cette expression peu commune chez une anglophone de cet âge . Carol était restée debout et posa ses mains sur l'épaule de Thérèse et de Jacqueline :

"dites-vous bien que ce que je fais là est une chose inédite et qui me plait ; j'ai confiance dans ton projet Thérèse et je pense que ce n'est que le début. Mes avocats d'affaire me conseillent toujours des investissements juteux ; moi je veux investir dans ce projet car il est révélateur d'une situation que je commence à flairer doucement ; l'envie d'un retour à une authenticité et je veux en être . Thérèse il est clair que je veux investir sur ton honnêteté et ton courage et Gaëlle montre aussi ces qualités là . Quant à vous Jacqueline votre gentillesse est un trésor ; tout l'argent du monde ne le vaut pas. J'espère que vous serez , comment le  dire?, que vous serez une deuxième grand-mère pour Margot "

Jacqueline posa les mains jointes sur sa poitrine :

"votre fille est absolument adorable ;elle me rappelle qui était Thérèse dans sa jeunesse avant qu'une femme méchante

Et cruelle ne la blesse intimement"

Thérèse ne s’attendait pas à cette déclaration et sentit une boule d’angoisse bloquer sa gorge :

"mais maman je te jure que j’ai surmonté tout ça

-je veux bien le croire ma chèrie... mais je sais que la blessure se rouvre parfois . Je te connais bien ; tu es ma fille. Je sais quand tu retiens tes larmes et quand tu es heureuse. Tu gardes le silence longtemps mais tes yeux parlent pour toi. Tu as toujours été le sang de mon sang et la chair de ma chair et cela tu ne peux l’empêcher ou l’atténuer"

 

Un silence s’installa et Carol ressentit dans ses tripes tout ce qu’elle avait connu comme enfer avec Anne . La douleur de son calvaire lui revint et les tressaillements qui la secouèrent n’échappèrent pas à Thérèse qui posa la main sur la main qui se crispait sur son épaule. Margot les dévorait des yeux prête à secourir Carol.

« je suis là pour t’aider comme je le fais pour ma maman »

Margot descendit du lit et s’accrocha à Carol :

-moi aussi maman je suis là pour t’aider "

Carol prit sa fille dans ses bras et, les yeux brillants de reconnaissance, regarda Jacqueline :

« hey bien on a de la chance d’avoir des filles aussi gentilles n’est-ce pas ? »

Jacqueline prit la main de sa fille et la serra contre son cœur :

"c’est bien vrai ; ce sont des dons du Ciel et elles méritent d’être heureuses elles aussi".

Le regard de Thérèse, le cœur battant aux tempes , naviguait entre les deux femmes adultes voulant les réunir en un seul regard. Ses deux amours étaient là et c’est ce qui comptait.

 

Margot qui était la seule à avoir échappé à cet enfer qu’est le harcèlement et la cruauté se souvint alors de son attitude envers l’un des garçons de sa bande... à son retour, elle le protégerait ; c’était juré. Elle ne ferait pas souffrir , elle n’abîmerait pas la vie de quelqu’un pour s’imposer dans la bande de ses copains . Elle prit aussi la décision de suivre des cours de judo à toutes fins utiles.

 

Cet après-midi là , dans la chambre banale d’un vieil hôpital décrépi ,au centre de ce cercle sacré, il y eut le dévoilement d’un meilleur et possible futur pour chacune. Les interactions multiples et envisageables remplirent leurs cœurs ; il ne pouvait pas y avoir de retour en arrière car ces affections naissantes pleines de vigueur , quelques soient leurs motivations, étaient de celles qui seraient toujours vivantes en dépit des faiblesses de certaines et des aléas de la vie.

Les méandres d’un fleuve finissent toujours par s’unir à la mer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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