Fuir l'amour de peur qu'il ne se sauve

Carol (2015)
F/F
F/M
G
Fuir l'amour de peur qu'il ne se sauve
Summary
ceci est la version "française ; il est possible que j'ai laissé passer des fautes d'orthographede grammaire, de syntaxe , d'accord des temps etc.... je le fais pour les lectrices et lecteursfrancophonesmerci de votre éventuelle lecture ou relecturecertaines personnes peuvent être choques en découvrant la personne qu'est Carol mais c'est quelqu'un qui a été le souffre-douleur de sa mère et qui ne s'en remet pas...et parfois son côté cruel ressortavec moi il n'y aura pas de domination mais de l'égalité comme je l'ai sentie en visionnant Portrait d'une jeune fille en feu...Carol n'est pas dominatrice Thérèse n'est pas falote...
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Chapter 20

 

 

c’était un vieil hôpital comme il en existait encore dans toutes les villes de France, à la différence que dans une station balnéaire , l’activité était au maximum pendant la période des vacances . Au fil du temps on avait rajouté des annexes , du personnel et des parkings.

La nuit résonnait un peu du brouhaha des urgences où se côtoyaient surtout des touristes qui avaient trop bu et des enfants qui étaient trop longtemps au soleil. c’était l’agitation des mois d’étés où les vacanciers sont nombreux et exigeants.

Le personnel s’activait et oubliait un peu cette femme âgée discrète et qui reposait sur le dos , les mains des draps et fixant le plafond . C’était la plus charmant et la plus gentille des patientes ; elle avait été mise en gériatrie parce que l’aile psychiatrique était pleine.

 

Jacqueline réfléchissait aux événements qui l’avaient conduite une fois de plus dans cet hôpital...

Dominique , toujours Dominique...

Mère, bonjour Mère ....comment elle va la mère?

 

Il lui parlait toujours de cette façon et c’était si méprisant , si dédaigneux...

 

Je suis sûre que tu n’as pas pleuré la mort de Grand Maman....elle savait qui tu étais....rien

Bon ... j’ai un problème j’ai besoin de fric....tu ne veux pas ? Bien je viens sur place et on verra ce qu’on verra

 

 

S’y mêlaient les souvenirs d’une enfance triste et impitoyable ; y penser la plongeait toujours dans un maelström de peur....

La peur elle ne connaissait que ça et sa peur s’en allait quand arrivait Thérèse.

 

À chaque fois elle pensait avoir une armure... mais rien n’y faisait . Son fils s’insinuait toujours dans ses failles et frappait au cœur. Et seule Thérèse la défendait... sa Thérèse , sa fille unique et préférée... tant pis qu’elle ait choisi un chemin que le reste de la famille rejetait complétement.

 

En fait la famille n’existait plus ; à la mort de son mari elle avait été mise de côté et encore plus Thérèse... . elles étaient trop modestes et c’était un défaut impardonnable pour cette famille bourgeoise pour qui la religion et l’argent était un système de vie destiné à assurer la respectabilité d’une famille. Jacqueline avait toujours été accueillante et agréable mais ça ne suffisait pas parce que... trop modeste à leurs yeux... trop belle aussi... aux yeux de ces femmes au physique ingrat... c’est Thérèse qui lui avait soufflé à l’oreille... elles sont moches maman et elles sont jalouses

 

très vite Thérèse ne passa plus l’examen d’entrée et la mort de son père signifia désormais un ostracisme explicite à l’égard des deux femmes mais pas du fils...

 

Cette injustice la frappait profondément sa Thérèse si forte si courageuse si honnête ne méritait pas un tel traitement alors que Dominique était... si décevant. Mais il savait flatter les gens tandis que Thérèse pas...

Jacqueline savait d’instinct que si elle ne se défendait pas sa fille serait écrasée ; elle connaissait Thérèse ... Elle l’avait souvent consolée de la cruauté des religieuses.

Toute cette persécution avait créé un être douloureusement faible mais capable encore d’avoir de violents sursauts de révolte contre tout ce qui lui paraissait injuste... cette réelle empathie pouvait être un obstacle dans un monde prédateur. Sa fille serait elle assez forte pour s’imposer?... certainement mais elle avait besoin d’être pour quelqu’un et ça ne pouvait pas et ça ne devait pas être sa mère.

 

                     

Elle s’inquiéta de l’effet de son hospitalisation; Elle savait que sa fille allait prendre tous les risques pour venir et elle ne le voulait pas. S’il lui arrivait quelque chose... elle ne s’en remettrait jamais... jamais. Des larmes , doucement, coulèrent sur son oreiller tandis que dans le couloir le monde s’agitait et que les brancards roulaient.

Comme elle la voulait dans ses bras pour caresser ses cheveux châtain mordoré si épais...

 

ma Thérèse à moi

     =============================

 

 

 

Très vite, Thérèse et Carol se précipitèrent donc à l’intérieur.

Mais l’orage avait le plus rapide et les deux étaient mouillées au gré de la forte pluie qui s’abattait maintenant sur les carreaux de la grosse porte.

Chacune , adossée au mur de l’entrée, regardait l’autre et elles se régalèrent de leur sourire réciproque.

Encore sidérée par l’incroyable proposition de Carol Thérèse reprenait ses esprits... les éclairs zébraient brièvement le ciel et éclairaient deux femmes surprises et choquées. Elle jeta un œil sur la grande photo de famille qui tapissait un des murs ; trois Carol la regardaient. Carol était au centre de l’image dans une sage robe blanche tenant ses filles dans ses bras, comme elle était au centre de l’attention de Thérèse.

 

Thérèse ne s’était toujours intéressée qu’aux filles de son âge... seule Rindy aurait pu l’intéresser... non seule Carol attira son attention ...

 

 

 

« ai-je eu raison de lui proposer de l’emmener là bas?... comment puis je suis aussi heureuse alors que je suis trempée et que je déteste ça.. je dois être affreuse... ne suis-je pas allée trop loin en lui proposant de la conduire? »

Pensa Carol. Mais l’idée d’être en compagnie de cette jeune femme qui la projetait dans d’autres vies , d’autres possibilité , cette idée si dangereuse lui plaisait. Après tout elle aimait séduire en dehors des sorties dans les boîtes... que ce soit une jeune femme ne pouvait supposer aucun danger... tant que ça restait dans le virtuel et l’intellect... Pourquoi pas?

 

La forte humidité collait la robe contre son corps et elle en avait soudainement prit conscience....

Comme elle prit conscience de l’acuité du regard de la jeune femme elle en oublia ceux des autres, ceux des inconnus qui la plaquaient contre les murs.

Elle se sentait désirée mais respectée , mais aimée, mais voulue si fort qu’elle se sentit caressée ... les yeux de Thérèse détaillaient sa bouche , son cou , ses seins involontairement saillants et son ventre et revinrent sur les yeux bleus si étonnés , si abandonnés , si fascinés.

 

Carol reprends toi .. N’oublie pas ... le contrôle... toujours le contrôle

 

 

 

"plus je la vois , plus elle est belle... elle ressemble à une femme ... heureuse... comme elle est belle quand elle ne se contrôle plus » pensa Thérèse si surprise de contempler une Carol accomplie, celle qui se cache sous les oripeaux du samedi soir... elle en goûta la brièveté et l’intensité. Elle apprit aussi que les yeux bleus pouvaient être chaleureux et tendres... il faudra s’y arrêter et y repenser et surtout y rêver... en attendant mieux.

 

L’avoir des heures sous ses yeux serait un défi perpétuel , une tentation douce... comme l’amande amère participe du cyanure ... le poison d’amour , déjà, lui rappelait les souffrances passées... sa liaison avec Jackie destructrice mais tellement sexy... elle n’y avait jamais résisté... mais les pétales de roses cachaient bien les épines et elle s’en était sortie lessivée, atteinte , blessée. Elle ne voulait plus de la passion sauf si elle était partagée , sauf elle était promesse d’un monde meilleur... Elle voulait une amante, une amie, une confidente et ça n’était pas dans l’ordre d’importance.

Elle voulait donner et recevoir de la confiance et de l’amour tandis que Carol ne savait pas comment mettre fin à ce doux examen...

Thérèse en profita: » je voudrais te demander quelque chose »

 

La poitrine de Carol se souleva plus que d’habitude et elle-même s’interrogeait :

« Je t’en prie... demande moi

 

-je... »

 

Mais soudainement, Margot et Rindy arrivèrent avec deux serviettes éponge qu’elles avaient prises dans la commode de l’entrée:

« oh maman tu vas friser comme un mouton » cria Margot réjouie du simple bonheur d’avoir sa maman avec elle et de la sentir bien.

« oh Thérèse il faut venir plus souvent....je n’ai jamais vu autant de soleil dans ses yeux ».

 

Carol , soulagée de l’interruption, ne put s’empêcher de se pencher et de prendre encore une fois sa Margot dans ses bras :

« Chèrie tu vas me faire rougir... Thérèse reste dormir à cause du temps... elle ne doit pas prendre de risque n’est-ce pas?

 

-alors Thérèse qu’est-ce que tu en penses ? J’ai raison ...

Maman est toujours plus belle encore quand elle sourit et quand elle est mouillée et ruisselante... tu devrais voir les jours de pluie... j’oublie toujours le parapluie... oui Thérèse doit rester parce que je ne veux pas que tu t’inquiètes »

 

Thérèse détourna les yeux et réprima un sourire irrésistible à ces mots involontairement audacieux pour qui les entend dans un certain contexte... elle eut la vision de Carol offerte à ses caresses. Elle ne répondit pas...

 Margot s'énerva:

"tu dois répondre quand on te pose une question"

Mais Thérèse resta muette  ; elle s'attardait sur ce rêve , sur cette chimère, sur son odeur qui ne pouvait être que..

Carol s'approcha et posa une main sur son épaule :

"voyons il y a quelqu'un ?" et elle planta ses yeux dans ceux , rêveurs, de Thérèse.

"oui ..euh "

 

Le soleil Margot a parlé du soleil

 

"c'est vrai…oui Margot ta maman a le bleu dans les yeux parce que les gens du Nord ont dans les yeux le ciel  bleu qu'ils n'ont pas dehors….c'est pour ça qu'il pleut…souvent"

 

N'importe quoi …je dis n'importe quoi mais ce n'est pas faux….

 

"maman dépose moi…Thérèse tu viens de dire une bêtise…mais c'est vrai le visage de maman brille quand elle te voit…elle sourit chaque fois qu'elle dit ton prénom…..enfin il me semble"

 

Et Margot, les  yeux écarquillés  saisit la main de sa maman pour la rassurer   Thérèse vécut la scène comme si elle en avait écrit le scénario; elle se reconnut dans Margot qui voulait toujours protéger sa maman. Elle admira le plus charmant des couples qu'elle n'ait jamais vu ; il fallait s'habituer c'est tout.

Margot semblait être de son côté …Thérèse s'agenouilla devant elles:

"Margot tu as raison de protéger ta maman  mais  je ne lui ferais jamais de mal … je te le jure sur la tête de Garp mon  chat blanc"

 

-pourquoi me ferais-tu du mal?..., demanda Carol , tu m'inquiètes..

 

-sur un malentendu….ou une incompréhension…tout est parfois si précaire" mais Thérèse ne voulut pas troubler Carol et elle termina sa phrase sur un sourire.

 

Carol se sentit défaillir  un peu, s'affaiblir un rien;  être près de Thérèse , parfois, suscitait en elle d'étranges mouvements de ceux que l'on fait quand on longe un sentier étroit le long d'une falaise…. On a peur , on voudrait être ailleurs mais on continue tant grande est la force d'attraction du vide et l'envie de se vaincre soi-même. Elle avait pris la

petite dans ses bras alors que c'était Thérèse qu'elle voulait…. Et elle eut honte de cette pensée et le pouce  frôla la cicatrice de l'index.

 

Quand  une voix retentit de la cuisine :

"vous venez…je vous attends" c'était Rindy.

"on arrive un moment" répondit Carol qui se tourna vers Thérèse et passa la main dans son dos comme pour l'encourager:

"je vais te montrer ta chambre…prends tes sacoches et tu me suis"

Carol se dirigea vers le grand escalier  de chêne clair et Thérèse la suivit. Elle n'avait pas trop de ses yeux pour admirer autour d'elle.

Elle aimait les grands portraits qui représentaient toute la famille et qui prenaient toute la place de libre. Il était impossible d'en rajouter. Elle aima aussi le jaune d'ocre clair  et la patine légère du chêne de la cage d'escalier , une couleur qu'elle ne s'attendait pas à trouver dans une maison aussi majestueuse .

 Elle avait été injuste avec Carol car là; à cet étage , elle se dévoilait . La tendre douceur qui émanait de la décoration la fit s'arrêter au sommet des marches.

"pourquoi ici il n'y a pas la politesse distante de la décoration du bas?

"c'est l'étage des chambres ; si la cuisine est le cœur  battant de la maison , les chambres en sont le cœur aimant et secret. C'est là que tout se passe.."

Thérèse voulut poser une question mais se tut fascinée par le mouvement des hanches de la blonde.

 

Et la chambre à l'œil de bœuf en est  elle la matrice  ?

 

 

Thérèse  traversa le palier dans un brouillard et déposa ses sacoches dans la chambre d'amis que lui avait indiqué Carol . Elle enleva son blouson alors que Carol restait adossée à la porte. Elle brossa sommairement ses cheveux avec ses doigts

Sous des yeux amusés et charmeurs.

 

"Carol si je pouvais…je n'ai pas mangé depuis ce midi...j'ai faim et je vais me lever cette nuit pour manger"

 

Carol se mit à rire :"mais bien sûr..je manque à mes devoirs de maîtresse de maison…va à la cuisine…je ne veux pas de somnambule chez moi

-mais je voudrais enlever mes bottes et me mettre à l'aise…je peux?

-Thérèse tu es ici chez toi"

Carol, aussitôt, se maudit d'avoir été aussi directe…

"enfin tu vois ce que je veux dire…regarde dans cette armoire il y a des tenues d'intérieur très confortables...sers toi et rejoins nous…et il y a des mocassins…ah je te préviens je ne suis pas un cordon bleu".

Thérèse qui ouvrait l'armoire :

"pas grave je le serais pour deux…"

 

Carol se sentait impatiente … impatiente de voir Thérèse  dans sa maison...dans le même temps elle ne comprenait pas ce qui la rendait ainsi…comment allait elle réagir vis-à-vis de ses filles? Et ses filles …

 

Elle descendit et alla vers le jardin mais elles étaient déjà rentrées; assises dans le grand canapé de la bibliothèque elles s'arrêtèrent de lire quand Carol fit son entrée:

"les filles vous venez à la cuisine …Thérèse a faim et elle va se préparer un en-cas..

-pour nous deux aussi" répondirent à l'unisson Rindy et Margot.

 

 

Thérèse resta longtemps interdite dans la chambre; elle devait s'adapter à ce qui dessinait pour le futur. Le mieux était de ne pas penser et d'aller droit devant. Elle choisit dans l'armoire un pyjama  chinois en satin rouge et des petits mocassins noirs puis elle se brossa les cheveux . Elle prit le pain qu'elle avait emmené avec elle pour son petit déjeuner

au Sables ainsi que ses fromages préférés et son saucisson sec.

 

Carol ne l'avait pas attendue et Thérèse s'arrêta sur le palier…où était sa chambre? L'envie de pénétrer dans son intimité

La saisit très fort et elle ne bougea plus. Dans sa tête une véritable valse hésitation …allait elle oser ouvrir toutes ces portes dont certaines pouvaient la plonger dans un état dont elle ne saurait pas se dépêtrer ? Était il correct d'agir ainsi?

Ce n'était pas son habitude de pénétrer ainsi dans l'intimité des gens…mais elle s'approcha d'une porte à peine ouverte ; mais son cœur battait si fort qu'il lui semblait remplir l'espace.

 

Ne le fais pas

 

Elle rejoignit donc le rez de chaussée les tripes nouées et se dirigea vers la cuisine…et ce fut clairement un choc.

D'abord on y accédait par trois marches descendantes.

 

C'était comme la cuisine de la ferme du père de Gaëlle mais en plus grand et en plus beau. Les murs étaient de briques noir jaune et rouge vieillies ; seul le mur longeant le grand évier était carrelé de zellige blanc. Le plan de travail était de marbre tandis que tout le reste de la cuisine était en  chêne clair comme celui de la cage d'escalier et du palier.

Un superbe piano professionnel de cuisson prenait une grande place tandis qu'une traditionnelle cuisinière en fonte à bois prenait place dans un coin. Il y avait des placards partout et on devinait une pièce attenante. Une superbe batterie de casseroles en cuivre recouvrait un des murs. Au dessus d'un billot de boucher s'alignait toute une collection de couteaux de cuisine.

Au milieu une très grande table où trois personnes l'attendaient ; en esprit elle y rajouta sa maman et le rêve fut parfait

 

"dis , petit Chaperon rouge , tu es encore dans les nuages?

 

-oui Margot…j'espère que le loup n'est pas là car il me croquerait….mais tout est si beau…ça doit un vrai plaisir de cuisiner dans un pareil décor avec ces appareils." les yeux émerveillés de Thérèse couraient dans toute la pièce.

 

Rindy qui lisait toujours leva la tête de son magazine "comme tous les français…des obsédés de la bouffe…de la bonne bouffe…ils te séduisent avec une assiette dans les mains et une toque sur la tête"

 

"tu aimes cuisiner ?" demanda Carol qui croquait  avec une certaine sensualité involontaire, pensait Thérèse, muscat de Hambourg et chasselas et pêches de vigne disposés dans un grand saladier de bois…

 

"oui" et elle déposa sur la table le grand pain de deux kilos que Gaëlle lui avait donné et le sac en jute avec les fromages et le saucisson sec.

 

"mais là je n'ai pas très envie...alors je vous propose des tartines de fromage accompagnées de fruits et du pain de Gaëlle"

"maman on mange du fromage le soir ?

-en France oui"

"où sont les assiettes et les couverts?" demanda Thérèse.

Carol se leva , ouvrit le haut d'une armoire pour y prendre le nécessaire et prit le beurre dans le garde manger; elle frôla Thérèse qui était bien trop occupée à ne pas se blesser avec le redoutable couteau. Elle bénit le pain de la pointe du couteau et coupa de larges tranches.

"que fais tu ?' s'enquit Carol

"ma grand-mère faisait ça à chaque fois et , même si je n'y crois pas, je trouve que c'est un geste spécial que j'aime perpétuer à une époque où on gaspille tant…parce qu'il faut respecter le pain et ceux qui le pétrissent"

 

Rindy croisa le regard interrogateur de sa mère , mais il semblait que tout le monde avait soudainement faim … un silence complice remplit la cuisine pour que s'accomplisse ce festin nocturne.

 Carol apprécia cette charmante réunion qui se déroulait devant elle ; Rindy à ses côtés , Margot et Thérèse en face d'elles. Elle lui sourit souvent, se moquant gentiment quand un raisin écrasé qui gouttait sur le menton de Thérèse lui rappela les mûres qu'elle mangeait quand Thérèse , sur sa moto, lui laissa le passage en un geste suranné.

 

"tu te promènes souvent avec de quoi manger?

-non mais je savais qu'en arrivant il n'y aurait rien à manger chez maman…elle se nourrit de biscuits…donc j'amène ce qu'il faut…tu es bien sûre de vouloir me conduire là bas et de rester le temps de la sortir de l'hôpital?"

"ça se trouve où ?" s'enquit Rindy auprès de Thérèse

"800 kilomètres …on arrivera en pleine nuit"

 

Margot s'arrêta de manger et reposa bruyamment son verre d'eau :

"tu pars? …tu pars encore ? Je viens avec toi"

Carol fronça les sourcils :

"il n'en est pas question ..ça n'est pas pour rire

-ben…je pleurerais mais je viens avec toi , je veux rester avec toi…je veux être avec toi partout"

 

Elle quitta sa place et se plaça près de Carol qui eut une moue dubitative vers Thérèse qui se tourna vers la petite.

 

 

"Margot , dit Thérèse, ce n'est pas pour jouer…ce n'est pas vraiment la place d'une petite fille" et Carol apprécia le ton autoritaire et tendre avec lequel Thérèse s'adressait à sa fille.

 

"je ne suis pas une petite fille , je vais avoir 11 ans…je dois m'occuper de maman quand tu seras à l'hôpital…les filles prennent toujours soin de leur mère…on fait la même chose toutes les deux

 

-Carol il y a de quoi dormir pour trois personnes…et Margot a raison"

 

Carol devait se décider ; si Margot était là…rien ne pourrait arriver…faire plaisir à Thérèse et à sa fille…

Il est vrai qu'elle avait proposé un peu vite de l'aide à Thérèse sans penser qu'il pouvait y avoir comme une gêne.

"c'est d'accord Margot mais tu nous obéis à toutes les deux ok?

"youpy oui maman à toutes les deux…j'aurais deux mamans" . les yeux frondeurs Thérèse ne put retenir un rire sarcastique:

"tu vois Carol la vérité sort toujours de la bouche des enfants"

Carol pinça la lèvre inférieure et évita de regarder Thérèse:

"Margot au lit maintenant…tu n'as plus faim?

-je n'ai plus faim maman ; je ferais ma valise demain d'accord?

-d'accord chèrie…les filles rangez tout ; je ne veux pas que Jeannette ait du travail supplémentaire demain matin"

 

Margot s'approcha de Thérèse et se haussa sur les pointes des pieds:

"Bonne nuit et à demain

-à demain Margot"

Elle fit de même avec Rindy et accompagna sa maman dans l'escalier  .

"on ne se quitte plus maman

-juré mon amour"

 

Les filles mirent la cuisine en ordre .

"Rindy je peux me faire chauffer du lait?

-bien sûr…"

Rindy hésita:

 

"je ne sais pas si tu as saisi ce que fait maman pour toi

-explique

-elle déteste conduire et elle va faire 1500 kilomètres pour te rendre service… tu l'aimes toujours? Ça ne passe pas?"

 

Thérèse ramassa toutes ces précieuses informations … Carol faisait quelque chose qu'elle détestait et elle le faisait pour elle Thérèse. Elle leva les yeux au ciel comme pour une révélation:

 

"plutôt mourir que l'oublier…elle est en moi et elle y reste… tous les jours je me demande comme l'affranchir de ses peurs…qu'elle me fasse confiance…alors je représente quelque chose pour elle?

-elle devra d'abord se convaincre qu'elle le mérite et qu'elle se laisse aller…avoir confiance en elle., ce qu'il lui faut…je pense que tu l'as ébranlée dans ses convictions et dans ses choix de vie, Rindy sourit, en tout cas tu ne lui es pas indifférente…sa gentillesse était pour moi et ma petite sœur….tu es la chanceuse Thérèse"

 

Rindy lui montra où étaient les casseroles pour le lait :

"tu sais sa mère l'a systématiquement  broyée pour qu'elle perde toute  confiance en elle-même et dans les autres aussi… elle n'a aucune expérience en ce qui concerne le sentiment amoureux…dis toi bien que tu as à faire à une femme vierge dans sa tête…tu es la première personne qui lui manifeste tant d'attentions…à part ma sœur et moi"

Thérèse hocha la tête :

"j'ai donc tout à lui apprendre

-oui et toi apprend à la connaître et j'ai hâte que ça marche parce que tu sais…pendant des années je l'ai soutenue à bout de bras … je donnerais ma vie pour elle mais qu'elle me laisse vivre la mienne…

-je crois que c'est ce qu'elle veut non?

-elle le veut et , en même temps, elle me vide….elle doit être heureuse pour que je le sois… Margot prend le même chemin… nos vies sont abîmées avant même de commencer.."

Thérèse ne put que se mettre à l'unisson :

"je …. Je ressens la même chose vis-à-vis de maman…on veut les aider mais ….on s'épuise. Cependant je sais que maman le sait et elle essaye de se faire toute petite…et je m'en veux de lui faire ressentir ça…c'et ma mère quand même"

 

Rindy tourna la tête et, méfiante, elle posa sur Thérèse un regard sans indulgence:

"encore une question… mais tu l'aimes vraiment ou simplement parce qu'elle est belle et que tu la désires?..

 Si tu la réduis à sa beauté physique tu es comme les mecs et ça ne m'intéresse pas...dis moi ce qui se passe parce que si ça n'est pas sérieux casse toi…va t'en…je ne veux pas qu'elle souffre"

 

Thérèse  se sentit coupable …il fallait s'expliquer, dissiper le malentendu…   déjà:

"au départ je ne l'aimais pas , je l'ignorais mais elle était quelque fois si"

 

Rindy regardait Thérèse de haut et pas parce qu'elle était déjà plus grande:

"belle évidement ..

-tu te trompes …elle était si … agressive à notre égard… à l'égard des filles comme moi…bien sûr qu'elle est belle …d'ailleurs sa beauté excusait toutes ses outrances… la beauté autorise tout… même le pire"

 

Rindy recula:

"si agressive …comment?

 

-elle dansait devant nous en nous provoquant et elle riait … j'avais parfois l'impression de quelqu'un de déséquilibré…"

 

Rindy secoua la tête :

 

"j'ignorais que ça allait si loin de sa part…continue…raconte"

 

La poitrine de Thérèse se souleva plus vite …:

"un moment j'ai ignoré ses provocations et je l'ai regardée sans la quitter des yeux …elle était toujours terriblement sexy et sa vue me chamboulait à chaque fois…et puis elle partait dans la backroom et alors je quittais le dancing…j'ai beaucoup pleuré de rage et puis j'ai réalisé que je l'aimais…et j'ai arrêté de sortir…la souffrance à ce niveau n'est pas ma tasse de thé

 

-pourquoi ? C'était un moyen de la voir"

Thérèse se frappa la poitrine:

"parce qu'un jour je suis allée dans la backroom et j'ai vu….je suis partie…j'ai compris que mon pauvre amour ne suffirait jamais à la sauver parce qu'elle ne voulait pas l'être…et puis des semaines plus tard n'y tenant plus j'y suis retournée, je l'ai vue et je lui ai parlé….veni vidi mais je n'ai pas vaincu…je n'ai même pas convaincu"

 

Rindy écoutait ; Thérèse était la première personne qui lui parlait des "sorties" de Carol.

"elle m'a parlé de votre rencontre…elle est revenue changée.

-c'est vrai ? C'est étonnant…..pour revenir à cette soirée alors je me suis dit qu'elle s'infligeait ce traitement parce qu'elle n'avait pas le choix… maman , elle, plongeait dans une dépression immense qui , parfois, me dépassait"

La voix de Thérèse vacillait et tremblait :

" je pense qu'elle souffre de quelque chose d'indicible et qu'elle gère comme elle peut …dans l'outrance et la provocation…maman c'est des crises de pétage de plomb et de violence…"

 

Rindy allait parler quand Carol arriva :

 

"bon voilà Margot est couchée….oh attention le lait déborde"

 

Elle courut arrêter le gaz. Thérèse s'avança:

"c'est pour moi …je dois attendre qu'il refroidisse"

Carol , le regard amusé ,prit une tasse et versa le lait :

"oui c'est mieux d'attendre… de quoi parliez vous ? Ça avait l'air si intense… et si triste"

 

Thérèse prit tout de suite la parole :

« Oh ... de ce que j’allais faire dans la boulangerie... quand je parle de ça je ne sais pas m’arrêter... triste je ne pense pas... enfin si... je parlais de maman et de son état... mais maintenant je ne veux plus parler de ça... je revis encore et encore, et murmurant presque,... je sais ce que je vais voir demain ». L’angoisse l’envahit de nouveau...

Alors , sous les yeux de Rindy , Carol souffla sur la tasse et , avec le plus tendre des gestes , l’offrit à Thérèse qui la saisit des deux mains comme une offrande. La jeune femme sortit de sa torpeur malsaine et sourit tristement à

Carol qui  posa la main sur une épaule défaite:

 

« Tiens prends ton lait et tu montes dans ta chambre , il y a une salle de bain privative , tu te rafraichis ....et tu m’appelles

On parlera »

 

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