D'un Monde à l'Autre

Harry Potter - J. K. Rowling Anita Blake: Vampire Hunter - Laurell K. Hamilton
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D'un Monde à l'Autre
Summary
Hadrian "Harry" Potter a vécu une très longue vie, il a vu et apprit tellement de choses mais maintenant il s'ennuie. Il est temps pour lui de passer à autre chose.
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Chapitre 12

Chapitre 12

"Ivy s'écarta et leva la bougie au-dessus de sa tête pour éclairer leur chemin. Jean Claude se campa de l'autre côté de la porte, les obligeant à passer entre Ivy et lui pour entrer dans la maison. Il avait l'air de s'amuser, ce qui clairement déplaisait à Anita en voyant l'expression de son visage. Jason passa entre les deux vampires. Larry regarda, Anita haussa les épaules et avança à son tour. Il la suivit, de près, persuadé que tout se passerait bien s'il restait près d'elle. Hadrian fixa les deux vampires avant de passer à son tour.

La porte se referma derrière eux."

La porte se referma derrière eux sans que personne ne l'ait touchée, au moins pas avec les mains. Hadrian pouvait sentir le pouvoir jaillir et savait que cela n'était qu'un jeu pour mettre les humains sur les nerfs, il pouvait voir le stress augmenter chez Anita ainsi que Larry. Jason était comme à son habitude, confiant qu'il n'avait rien à craindre avec Jean Claude, mais aussi que Hadrian le protégerait en cas de besoin.

Dans la maison, l'air était immobile et sentait le renfermé, avec de légers relents de moisissure. Ils étaient dans un salon vide de tout meuble. Sur leur gauche, une arche donnait sur une pièce plus petite, Hadrian pouvait distinguer un lit fait mais couvert de poussière. Dans un coin, le miroir d'une coiffeuse reflétait le reste de la chambre.

Ivy marcha vers une porte, au fond du salon, l'ourlet de sa robe traçant un sillon dans la poussière qui couvrait le plancher. Un rayon de lumière filtrait sous le battant : de la lumière dorée et plus dense que celle de l'électricité. Le sorcier se dit qu'il ne fallait pas qu'un elfe de maison débarque dans cette maison, il deviendrait fou devant la saleté recouvrant le moindre recoin de cet endroit.

La porte s'ouvrit avant qu'Ivy l'atteigne. Une cascade de lumière s'en déversa ; elle leur parut d'autant plus brillante qu'ils étaient restés longtemps dans le noir. La silhouette d'un vampire se découpa sur le seuil. Il était petit et mince, avec un visage trop juvénile pour être séduisant, "mignon" semblait un terme plus approprié. Encore un gamin... et déjà mort. Hadrian savait que c'était une très mauvaise idée de changer des personnes trop jeune, surtout lorsque le cerveau n'avait pas finit d'être développé... Les enfants étaient les pires, les adolescents juste derrière... Ils restaient très rarement sain d'esprit, ne vieillissant jamais, et n'ayant jamais accès à certaines choses comme l'indépendance, la sexualité, ... c'était mauvais... Hadrian le fixa quelques instants. Il devait avoir au moins dix-huit ans au moment de son changement, puisqu'il était encore assez jeune pour avoir garder son bronzage de son existence humaine, et que la vampirisation de mineurs était illégale, mais il avait l'air si délicat, presque inachevé...

- Je suis Bruce, se présenta-t-il, embarrassé.

C'était peut-être à cause de ses vêtements. Il portait un smoking gris clair à queue-de-pie, avec un bande anthracite le long des jambes du pantalon. Ses gants blancs étaient assortis à ce qu'on pouvait voir de sa chemise. Son papillon et sa pochette étant rouges comme la robe d'Ivy. Ils ressemblaient à un jeune couple en route pour leur bal de la promo.

Deux chandeliers de la taille d'un homme encadraient la porte, répandant dans la pièce une lumière dorée fluctuante. Deux fois plus grande que le salon, la salle avait dû servir jadis de cuisine. Mais contrairement aux pièces de devant, elle avait fait l'objet d'un effort de décoration. Un tapis persan aux couleurs si vives qu'il ressemblait à un vitrail couvrait partiellement le sol. Les murs latéraux disparaissaient sous des tapisseries. La première représentait une licorne fuyant devant une meute de chien ; l'autre, une scène de bataille tellement passée qu'on distinguait à peine la silhouette des protagonistes. Des draperies de soie, pendues au plafond, masquaient le fond de la pièce. Il y avait une porte ouverte sur leur gauche.

Ivy posa sa bougie dans la bobèche vide d'un chandelier. Puis elle se campa en face de Jean Claude et leva la tête pour le regarder dans les yeux.

- Vous êtes si beau, susurra-t-elle en caressant les revers de sa veste. Je croyais qu'ils m'avaient menti. Que personne ne pouvait être si beau à ce point !

Elle commença à défaire un par un les boutons de nacre de la chemise de Jean Claude, en partant du col et en descendant jusqu'à sa ceinture. Lorsqu'elle atteignit le dernier, il écarta sa main. Ivy eut l'air de trouver ce geste très amusant. Elle se dressa sur la pointe des pieds, pressant ses deux mains sur ses avant-bras sur la poitrine de Jean Claude. Sa bouche entrouverte se tendit vers lui.

- Vous baisez aussi bien que vous êtes beau ? souffla-t-elle. On m'a dit que oui. Mais vous êtes tellement beau. Personne ne pourrait être un si bon coup.

Jean Claude posa délicatement les mains de chaque côté de son visage et lui sourit. Ses lèvres rouges entrouvertes. Ivy se laissa aller contre lui. Le vampire n'accentua pas la pression de ses mains. Pourtant le sourire d'Ivy disparut comme le soleil couchant englouti par l'horizon. Elle glissa lentement vers le bas pour se retrouver les deux pieds à plat sur le sol. Dans le berceau des mains de Jean Claude, son visage était dépourvu de toute expression.

Bruce la tira en arrière. Ivy trébucha et elle serait tombée s'il ne l'avait pas retenue. Elle cligna des yeux et promena autour d'elle un regard éberlué, comme si elle s'attendait à être ailleurs. Jean Claude ne souriait plus.

- Voilà longtemps que je n'avais pas été traité comme un vulgaire objet de plaisir. Très longtemps...

Ivy était affaissée dans les bras de Bruce, pétrifiée de frayeur. Elle repoussa son chevalier servant, se redressa de toute sa hauteur, puis tira les plis de sa robe rouge. La peur avait disparu de son visage. Il ne restait qu'une vague tension dans ses yeux.

- Comment avez-vous fait ça ? demanda-t-elle à Jean Claude.

Il était clair pour Hadrian que ce soir, Anita ne serait pas la seule à se croire meilleure que les autres si une petite vampire comme elle pensait tenir un Maître de la ville en son pouvoir, Jean Claude se cachait peut-être mais il restait plus puissant et plus ancien que Ivy, et il fallait être aveugle pour ne pas le voir... ou perdu dans sa propre importance. Si elle n'était pas capable de voir le pouvoir de Jean Claude, il était logique qu'elle pense qu'Hadrian était impuissant juste à cause de son cœur battant.

- J'ai des siècles de pratique, ma jeune amie.

- Vous n'êtes pas censé pouvoir hypnotiser un autre vampire.

- Ah bon ? répliqua Jean Claude, faussement étonné.

- Ne vous moquez pas de moi.

Hadrian se tenait dans les ombres, observant toujours ce qui se passait de lui, oublié par les autres. Il laissa une partie de sa magie le quitter pour fouiller la maison et savoir qui, ainsi que où, était sur place. Pour le moment il laissait les jeux de pouvoir à son ami qui avait l'air de s'amuser.

- On t'a demandé de nous conduire quelque part, mon enfant. Alors, fais-le.

Ivy se tenait devant lui, les poings serrés. Sous l'effet de sa colère, ses iris marron débordèrent sur le blanc de ses yeux, jusqu'à ce qu'elle ait l'air aveugle. Son pouvoir se déchaina dans la pièce, rampant sur la peau des humains et hérissant leurs poils comme un doigt qui aurait effleurés dans le mauvais sens. Hadrian vit Anita se redresser et instinctivement porter la main à son arme... Elle était clairement l'image de tirer d'abord et poser des questions ensuite.

- Non, Anita. Ce sera pas nécessaire, dit Jean Claude. Cette petite ne me fera pas de mal. Elle peut montrer ses crocs, mais à moins de vouloir mourir sur ce ravissant tapis, elle ferait mieux de se rappeler qui je suis. Le Maître de la ville !

Sa voix résonna dans la maison comme un grondement de tonnerre jusqu'à ce que l'air soit chargé d'échos si denses qu'ils eut l'air de respirer ses mots. Quand le son retomba, les humains tremblaient de tout leur corps. Ivy s'était ressaisie. Elle semblait toujours furieuse, mais ses yeux avaient repris leur aspect normal. Bruce lui avait posé une main sur l'épaule, comme s'il n'était pas certain de sa réaction. Ivy se dégagea et, d'un geste gracieux, désigna la porte ouverte, au fond de la pièce.

- Nous sommes censés vous emmener en bas. D'autres ... amis... vous y attendent.

Jean Claude fit une courbette théâtrale, sans la quitter des yeux.

- Après toi, ma douce. Une dame doit toujours être devant un gentleman, jamais derrière.

- Dans ce cas, votre servante humaine peut marcher à côté de moi.

- Et puis quoi encore ? cria Anita.

Hadrian eut subitement une envie de se frapper la main sur le visage en la traitant d'idiote, le genre d'action que l'on voit que dans les films en se demandant qui ferait ça dans la réalité... et bien il avait sa réponse... lorsque vous voyez une action si stupide que vous sentez le besoin de faire un geste tout aussi idiot.

Ivy tourna son regard vers elle, un regard innocent.

- Mais peut-être n'êtes vous pas une dame...

Elle avança vers elle avec un balancement de hanches exagérés.

- Nous auriez-vous amené une servante humaine qui n'est pas une dame, Jean Claude ?

- Anita est une dame. Marche près d'elle, ma petite, mais sois prudente.

- Qu'avez-vous à foutre de ce que ces trous de cul pensent de moi ?

- Si tu n'es pas une dame, tu ne peux être qu'une catin. Et tu détesterais savoir ce qui arrive aux catins humaines ici, répliqua-t-il, accablé, comme s'il en avait lui-même fait l'expérience et n'en gardait pas un très bon souvenir.

Ivy sourit en battant des cils. Anita plongea son regard dans le sien et lui rendit son sourire.

- Vous êtes humaine. Vous ne pouvez pas soutenir mon regard. Pas comme ça !

- Surprise, surprise...

- Nous y allons ? s'impatienta Jean Claude.

Ivy se rembrunit, mais elle passa la porte et descendit deux marches, en tenant sa jupe d'une main pour ne pas de prendre les pieds dedans. Puis elle regarda Anita par-dessus son épaule.

- Vous venez ?

Elle l'ignora et demanda à Jean Claude.

- Jusqu'à quel point dois-je être prudente ?

Larry et Jason s'approchèrent.

- Défends-toi s'ils font usage de violence. Mais ne sois pas la première à faire couler le sang ou à porte run coup. Défends-toi, mais n'attaque pas, ma petite. Ce soir, il s'agit d'un jeu. Les mises ne sont pas si élevés, à moins que tu les fasses grimper.

Et bien, il n'était pas dans la merde, pensa Hadrian, si tout ce bordel était sur les épaules d'une femme qui n'était pas capable de garder sa bouche fermée lorsque cela était nécessaire.

- Je n'aime pas ça du tout.

- Je sais, mais fais montre d'indulgence envers nous, ma petite. Pense à l'humain que tu veux sauver, et tente de contrôler ton impétuosité.

- Alors, humaine ?

Ivy attendait, tapant du pied telle une enfant capricieuse.

- J'arrive.

Anita ne courut pas pour la rattraper, elle prit tout son temps. Elle s'immobilisa en haut des marches pour regarder vers le bas. De l'air froid et humide leur caressait la peau charriant une odeur de renfermé et de moisissure. Alors que les deux femmes descendaient, les autres suivirent, Hadrian fermant la marche. Il était clair qu'ils se dirigeaient vers une cave sans aucune fenêtre d'après l'odeur. Les marches étaient larges, le bois encore brut et rugueux, comme si le charpentier n'avait pas eu le temps de le poncer et de le vernir. Les deux femmes avaient assez de place pour marcher de front, de même que Larry et Jason, ou les vampires, mais pour Hadrian cela aurait été un peu plus serrés en fonction de qui avait été avec lui. Pour sa taille et sa carrure, il était étrange qu'il arrive à se faire s'y bien oublier.

Alors qu'il était le dernier, il pouvait sentir la peur d'Anita d'ici, alors les autres surnaturels devaient aussi le sentir. Quelque part il pouvait la comprendre, alors que Ivy ne pouvait pas faire de mal à Jean Claude, ce n'était pas le cas pour Anita, il avait peut-être des problèmes avec la fille, il savait qu'elle ne se faisait pas d'illusions sur le pouvoir des vampires... enfin il l'espérait pour elle. Ivy était un bébé-maîtresse qui n'avait pas atteint l'apogée de son puissance, mais son pouvoir bouillonnait sous la surface.

- Si nous sommes toutes deux des dames nous devrions marcher ensemble. Venez, Anita, dit-elle en lui tendant la main. Descendez avec moi.

Il était clair que Anita n'était pas à l'aise et qu'elle désirait dégainer son Browning.

- La servante humaine de Jean Claude aurait-elle peur de moi ? lança Ivy.

Une décision dut être prise puisque la descente reprit. Les talons d'Ivy claquèrent sur les marches de bois alors qu'elle se hâtait de descendre. Il y eut une nouvelle pause lorsque Ivy s'arrêta pour saisir le bras droit d'Anita et la forcer à se retourner vers elle. Sa colère se déversa dans l'escalier en même temps qu'une vague de chaleur.

- Si tu lui fais du mal, Ivy, je considérerai que notre trêve est rompue, dit Jean Claude en glissant jusqu'à elles et en s'immobilisant une marche au-dessus. Et tu n'as pas envie que ça arrive.

Il laissa courir ses doigts le long de la mâchoire d'Ivy. Il y eut un éclair de pouvoir qui fit que la vampire lâcha l'exécutrice. Bruce se faufila entre eux, se penchant vers Ivy tel un petit ami inquiet. Et en sondant son visage, on voyait que c'était le cas. Hadrian était prête à parier que c'était elle qui l'avait transformé. Ivy le poussa si fort qu'il perdit l'équilibre et dégringola dans l'escalier. Les ténèbres l'engloutirent. Une vague de chaleur s'engouffra dans la cage d'escalier. Sur son passage, des flambeaux s'embrasèrent dans les torchères fixées aux murs. Une grosse lampe à kérosène suspendue au plafond s'alluma. Ses parois vitrés explosèrent et sa flamme nue dansa au bout de sa mèche.

- Seraphina te forcera à nettoyer, lâcha Jean Clause, comme si Ivy était une gamine capricieuse qui venait de renverser son verre de lait.

La vampire descendit les dernières marches en ondulant des hanches.

- Seraphina s'en moquera. Le verre brisé et les flammes ont tant d'usages intéressants...

La cave était noire. Murs noirs, plancher noir, plafond noir. Des chaînes étaient accrochées aux murs. Les menottes qui les prolongeaient paraissaient garnies de fourrure. Des lanières de cuir pendaient du plafond telles d'obscènes décorations. Dans toute la pièce, il y avait des instruments : chevalet, vierge de fer... Un filet d'eau coulait par une bonde ouverte, au centre du plancher. Larry descendit la dernière marche et s'immobilisa près d'Anita.

- C'est bien ce que je pense ?

- Si tu crois que ce sont des instruments de torture, oui...

- Je croyais qu'ils ne devaient pas nous faire de mal.

- C'est surtout censé nous effrayer...

- Et ça marche !

La déco n'était pas des plus attrayante, Hadrian devait être d'accord avec eux. Pour le moment, il laisserait Jean Claude et Seraphina jouer à leur jeu de pouvoir mais il se gardait le droit d'agir et de prendre la relève, il savait que son ami en avait conscience.

Une porte s'ouvrit sur leur gauche.

Un vampire entra, obligé de se plier en deux pour passer la porte. Puis il redressa sa silhouette impossiblement grande et monde, à la limite du cadavérique. Hadrian était grand, plus grand que la moyenne, de même que Jean Claude, mais ce vampire donnait l'impression de les dépasser en hauteur, peut-être était-ce à cause de sa maigreur qui accentuait sa taille. Il ne s'était pas encore nourri ce soir et ne gaspillait pas une goutte de son pouvoir pour se donner une apparence présentable.

Sa peau couleur de vieux parchemin était tendue sur ses os comme un film plastique étiré à craquer. Ses yeux enfoncés dans leurs orbites étaient bleus et morts comme ceux d'un poisson. Ses mains décharnées et osseuses aux doigts incroyablement longs, ressemblaient à des araignées blanches jaillissant de ses manches. Il approcha d'eux à grandes enjambées, les pans de son manteau volant derrière lui comme une cape, rappelant un maître de potion perdu depuis longtemps à Hadrian. Il était entièrement vêtu de noir ; seul sa peau et ses cheveux blancs coupés très court trahissaient sa présence. Tandis qu'il se déplaçait dans la pièce obscur, on eût dit que sa tête et ses mains flottaient dans les airs.

- Il utilise ses pouvoirs pour paraître plus effrayant, murmura Anita.

- En effet, ma petite.

Quelque chose dans la voix de Jean Claude força Anita et Hadrian à tourner les yeux vers lui. Un instant, ils lurent de la peur dans son regard.

- Que se passe-t-il, Jean Claude ?

- Les règles n'ont pas changé. Ne dégaine pas d'arme. Ne porte pas le premier coup. Ils ne peuvent pas nous faire de mal, sauf si nous les enfreignions.

- Pourquoi avez-vous si peur tout à coup ?

- Ce n'est pas Seraphina...

- Qu'est-ce que ça veut dire ?

Il éclata de rire. Mais ce n'était pas joyeux ou plein de luxure comme il savait si bien le faire... Non c'était froid et plein de dérision... Amer...

- Ça signifie, ma petite, que je suis un imbécile.

Hadrian ne savait pas trop ce qui se passait, ne s'intéressant pas vraiment à la politique vampire autre que si cela dérangeait sa vie et son peuple mais il voyait que Jean Claude n'allait pas bien, et ce vampire faisait partit de son peuple en tant qu'ami donc s'il devait s'en mêler, il allait le faire... Il montrerait qu'il n'était pas juste un simple joueur...

Le rire de Jean Claude explosa, comme si le son s'accrochait aux murs et se fragmentait. 

- Où est Seraphina ? demanda-t-il. 

Ivy et Bruse sortirent de la pièce. Hadrian gardait un œil sur la scène, il ignora où ils allaient, mais ça ne pouvait pas être pire qu'ici. Le grand vampire les étudia de ses yeux aussi inexpressifs que ceux d'un cadavre. Quand il prit la parole, il vit qu'Anita ne put s'empêcher de sursauter. Il avait une voix basse et profonde, comme celle d'un acteur ou d'un chanteur d'opéra. Pleine d'une résonance qui n'était pas due à ses pouvoirs vampiriques. Comme dans un numéro de ventriloque ou un mauvais doublage, on s'attendait à voir ses lèvres fines remuser à contretemps, mais ce ne fut pas le cas. 

- Vous devez passer par moi avant que Seraphina vous reçoive. 

- Tu me surprends, Janos, lança Jean Claude en finissant de descendre les marches. Tu es plus puissant que Seraphina. Comment expliquer que tu la serves ? 

- Quand tu la verras, tu comprendras. Maintenant, venez donc vous joindre à nous. La nuit commence à peine, et je veux tous vous voir nus et sanguinolents avant l'aube. 

- Qui est ce type ? demanda Anita. 

Jean Claude s'immobilisa sur la dernière marche. Jason resta prudemment derrière lui. Personne n'av ait hâte de voir que les attendait dans ce sous-sol. Le vampire tourna son regard mort vers elle. 

- Je suis Janos. 

- Et je vous félicite. Mais selon les règles, vous ne pouvez pas nous toucher. A moins que quelque chose m'as échappé....

- Il est très rare que quelque chose t'échappe, ma petite, fit Jean Claude. 

- Personne ne vous fera de mal sans votre consentement, dit Janos. 

- Dans ce cas, nous n'avons rien à craindre, répliqua Anita. 

Janos sourit, et la peau de son visage se tendit comme du papier. Un instant, Hadrian crut que ses os allaient le déchirer. Son sourire était joliment hideux. 

- Nous verrons. 

Jean Claude descendit la dernière marche et avança dans la pièce. Jason le suivit. Après quelques secondes d'hésitation, Anita fit de même, Larry lui emboîta le pas comme un brave petit soldat. Le sorcier les fixa, il sentait que la soirée allait finir dans le sang. Il suivit. 

- Cette salle... C'était ton idée, n'est-ce pas, Janos ? demanda Jean Claude. 

- Je ne fais rien sans l'accord de ma maîtresse. 

- Seraphina ne peut pas être ta maîtresse. Elle n'est pas assez puissante. 

- Et pourtant, je suis ici. 

Jean Claude contourna le chevalet el laissant courir une main blanche sur son bois sombre. 

- Seraphina n'a jamais été portée sur la torture. Elle a beaucoup de défauts, mais le sadisme n'en fait pas partie. 

Il s'immobilisa devant Janos. 

- Je pense que tu es le maître ici, et qu'elle te sert de couverture. Comme c'est elle qui règne officiellement sur la ville, on vient la défier. Quand elle mourra, tu trouveras une autre marionnette. 

- Je te jure que Seraphina est ma maîtresse. Considère cette salle comme la récompense accordée à un fidèle serviteur. 

Janos promena autour de lui un regard de propriétaire, tel un marchand admirant ses étagères bien garnies. 

- Et quel sort nous réserve le "fidèle serviteur" ? 

- Encore un peu de patience, mon garçon. Tu ne tarderas pas à le découvrir. 

Il était étrange d'entendre quelqu'un appeler Jean Claude "mon garçon" mais sûrement pas autant que pour Anita puisque le sorcier était déjà bien plus vieux que lui, Janos était lui-même un enfant pour le Maître de la Mort. Il donnait l'impression de connaître le vampire depuis longtemps... peut-être quand il était un bébé vampire. 

- Où m'emmenez-vous ? Vous me faites mal ! cria une voix féminine. 

Ivy et Bruce revinrent par la porte dérobée, traînant une jeune fille entre eux. Au sens littéral du terme. La malheureuse laissait pendre ses jambes comme un chien, quand on essaie de l'emmener chez le vétérinaire. Mais elle devait peser cinquante-cinq kilos toute mouillée, et elle n'était pas de taille à ralentir deux vampires. Ses cheveux blonds coupés au carré effleuraient ses épaules. Elle avait de grands yeux rougis d'avoir trop pleuré, et la figure striée de coulées de mascara. Ivy semblait beaucoup s'amuser. Bruce, pas autant que ça, il avait clairement peur de Janos. 

La fille regarda Janos en silence pensant une seconde, puis elle hurla. Ivy la gifla d'un air absent, comme elle aurait flanqué une tape à un chien trop bruyant. La fille gémit et se tut, le regard rivé sur le sol, des larmes dégoulinant le long sur ses joues. 

Deux autres vampires entrèrent, encadrant une seconde fille, qui ne se faisait pas traîner. Celle-là avait les yeux brillants de colère derrière ses lunettes, le dos très droit et es poings serrés. Elle était petite et un peu potelé, mais pas vraiment grosse, comme s'il avait suffi d'une poussée brun terne, comme ses petits yeux et les taches de son qui constellaient son visage. En revanche, sa personnalité n'avait pas rien de terne. 

- Pitié, Lisa, relève-toi !

Elle paraissait presque aussi gênée que furieuse. Mais la fille blonde se contenta de sangloter de plus belle. Les deux vampires de sexe féminin qui venaient de les rejoindre n'étaient pas jeunes. Vêtues de cuir noir, toutes les deux frôlaient le mètre quatre-vingts. La première avait de longs cheveux blonds tressés dans le dos, la seconde des mèches brunes qui tombaient autour de son visage. Leurs bras nus étaient fins mais musclés. Elles ressemblaient à des "gardettes du corps" sorties d'un film d'espionnage. 

Mais le pouvoir qu'elles irradiaient n'avait rien d'un effet spécial à deux ronds. Il se déversa dans la pièce comme un torrent d'eau glacée. Quand il frappa de plein fouet, Hadrian le laissa couler sur lui, cela ne faisait pas grand chose contre la fournaise qu'était sa propre magie et le froid de celui de la Mort. Il vit Anita avoir le souffle coupé et entendit Larry lâcher un petit cri. 

- Vous faites quoi ici : tenir une hôtellerie pour vampire de plus de cinq siècles ? lança la femme qui ne savait pas garder la bouche fermée. 

Tout le monde se tourna vers elle. Les deux buveuses de sang lui firent un sourire fort déplaisant, la fixant comme si elle était un chocolat de Noël et se demandant à quoi elle était fourrée. Caramel mou ou noisette dure ? 

- Vous avez quelque chose à ajouter ? demanda Janos. 

- Vous ne pouvez pas amener deux mineures ici et vous attendre que nous ne fassions rien. 

- Anita, nous nous attendons à ce que vous fassiez des tas de choses...

- Qu'est-ce que c'est censé signifier ? 

- Premièrement ces jeunes femmes ne sont pas mineures, n'est-ce pas mesdemoiselles ? 

La brune le regarda en silence. Lisa secoua la tête sans détacher le regard du plancher. 

- Dites-lui votre âge, ordonna Janos. 

Aucune d'elles ne répondit. Ivy tira sur les cheveux de Lisa, assez fort pour qu'elle crie. 

- Dix-huit ans ! J'ai Dix-huit ans ! 

Ivy et Bruce la lâchèrent, et elle s'écroula sur le sol. 

- Ton âge, grogna une des vampires. 

Les yeux de la brune s'écarquillèrent derrière ses lunettes. 

- J'ai dix-neuf ans. 

- D'accord, elles sont majeurs. Mais un humain non consentant reste un humain non consentant, quel que soit son âge. 

- Auriez vous l'intention de faire la police ici ? demanda Janos, amusé. 

- Non, mais je ne resterai pas les bras croisés à vous regarder les malmener. 

- Vous avez une très haute opinion de vous-même, Anita. Beaucoup d'assurances. Cela me plaît. Il est toujours divertissant de briser quelqu'un qui a de la volonté. Les faibles plient, pleurent et rampent, mais les braves demandent presque toujours qu'on leur fasse du mal. 

Il tendit sa main décharnée. 

- Voulez-vous que je vous fasse du mal ? 

Hadrian la vit tendre sa main vers son arme, elle allait la sortir. Soudain, Jean Claude se dressa à côté d'elle, une main autour du poignet de Janos, qui eut l'air impressionné. Il ne l'avait clairement pas vu bouger. Anita laissa retomber sa main. 

- Vous ne devez pas nous toucher. Vous avez promis. 

Janos se dégagea lentement de l'étreinte de Jean Claude. 

- Seraphina tient toujours ses promesses. 

- Dans ce cas, que font ces deux jeunes filles ici ? 

- Veux-tu dire que ces humains... 

Janos désigna Anita et Larry. Les vampires ne faisaient pas attention à Hadrian qui se cachait parmi les ombres. 

- ... ne resteraient pas les bras croisés à nous regarder torturer des inconnues ? 

Il semblait surpris, mais pas franchement mécontent. 

- Malheureusement, oui, répondit Jean Claude. Comme Anita vient de le mentionner. 

- Et s'ils s'opposent à nous, tu interviendrais pour les protéger ? 

- En cas de besoin. 

Janos sourit, et on entendit sa peau craquer sous la pression de ses os. 

- Magnifique. 

Hadrian vit un frisson courir le long du dos de Jean Claude. Merde, il allait devoir agir ! 

- Ces deux jeunes filles sont venues ici de leur plein gré. Elles savaient ce que nous étions, et elles ont accepté de nous aider à divertir nos invités. 

Anita fixa la brune. 

- C'est vrai ? 

Une vampire lui posa une main sur l'épaule. Doucement, mais cela suffit à la faire répondre : 

- Nous sommes venues de notre plein gré, mais nous ne pensions pas...

La main de la vampire serra plus fort. La brune se tordit de douleur, mais elle n'émit pas un son. 

- Elles sont venues de leur plein gré, et elles sont majeures, résuma Janos. 

- Alors, que va-t-il se passer maintenant ? demanda Anita. 

- Ivy, enchaîne celle-là par là, ordonna Janos en désignant une paire de menottes doublées de fourrure, à gauche de la porte. 

Ivy et Bruce forcèrent Lisa à se lever et la poussèrent ver le mur. 

- Dos face au centre de la pièce, je vous prie...

Anita se rapprocha de Jean Claude. 

- Je n'aime pas ça du tout, murmura-elle tout en sachant que les autres entendraient quand même. 

- Moi non plus ma petite. 

- Ne pouvons-nous pas les arrêter sans rompre la trêve ? 

- Non, Sauf s'ils menacent de s'en prendre directement à nous. 

- Que se passera-t-il si je romps la trêve ? 

- Ils tenteront de nous tuer. 

Il y avait cinq vampires dans la pièce, dont trois plus vieux que Jean Claude. Si elle levait le petit doigt, ils perdraient mais... 

La blonde sanglota et se débattit quand Ivy et Bruce l'attachèrent au mur. Elle tirait très fort sur ses bras. Sans la fourrure des menottes, elle se serait fait saigner les poignets. Une femme entra dans la cave par la porte latérale. Elle était grande, plus encore que Jean Claude. Sa peau avait la couleur d'un café où on a versé une double dose de crème. Ses longs cheveux noirs tressés lui tombaient jusqu'à la taille. Elle portait une combinaison de cuir noir moulante qui ne laissait pas grand-chose à l'imagination. Ses talons martelaient le sol d'une manière très humaine. Mais elle n'était pas humaine. 

- Kissa, la salua Jean Claude. Tu es toujours avec Seraphina. 

Il semblait surprise. 

- Nous n'avons pas tous autant de chance que toi. 

La voix de Kissa était épaisse comme du miel. Une odeur épicée planait dans l'air. On ne pouvait pas dire si c'était son parfum ou une illusion. Son visage aux pommettes hautes ne portait pas trace de maquillage. Pourtant, elle était très belle. Elle irradiait la sexualité à l'état pure, s'il n'avait pas connut les Veelas dans sa première vie il aurait pu craquer. 

- Je suis désolé que tu sois encore là, Kissa. 

- Economise ta pitié, Jean Claude. Seraphina a promis que je pourrais m'amuser avec toi avant que Janos brise ton corps si délicieux. 

Six vampires, dont quatre plus vieux que Jean Claude...

- Enchaînez l'autre fille ici. 

Janos désigna une deuxième paire de menottes à droite de la porte. La brune secoua la tête. 

- Pas question ! 

Elle se jeta à terre et utilisa tous ses muscles. Pas pour se débattre, mais pour rester là où elle était. Elle se débrouillait beaucoup mieux que sa copine. Deux vampires âgées de plusieurs siècles, et assez puissantes pour que leur proximité fasse clairement grincer les dents de Anita, durent l'empoigner et la porter jusqu'au mur. Alors, elle hurla, ses cris rauques et rageurs se succédant comme si elle ne devait jamais s'arrêter. La vampire brune la cloua contre le mur, l'autre lui attachant les poignets. 

- Je ne peux pas regarder ça, souffla Larry. 

Tout près de Anita, il ignorait peut-être que les vampires étaient capable d'entendre ses chuchotements. Non que ça ait eu la moindre importance. 

- Moi non plus. 

Elle avait l'air de croire qu'ils allaient tous mourir. Jean Claude se tourna vers eux, comme s'il les avait sentis porter leur main à leurs flingues. 

- Ma petite, monsieur Kirkland, ne dégainez pas vos armes. Ils n'ont pas l'intention de commettre un acte illégal. Ces jeunes sont venues pour les divertir. Ils ne tueront pas. 

- Vous en êtes sûr ? demanda-t-elle. 

- Je ne suis plus sûr de rien, mais je crois qu'ils tiendront parole. Ces jeunes filles sont effrayées et un peu contusionnées, mais jusqu'ici, ils ne leur ont pas fait de mal. 

- Pas fait de mal ? lança Larry. 

Il était outré. Super, pensa Hadrian, une autre âme sensible... 

- Les vampires ont une conception très particulière du mal, n'est-ce pas, Jean Claude ? lâcha Anita amèrement. 

Et c'était repartie... Il fallait vraiment qu'elle apprenne lorsqu'elle devait parler ou se taire, et surtout quand c'était le moment d'ouvrir sa putain de bouche ! Le vampire soutint son regard. 

- Ne me fixe pas de cet air accusateur, ma petite. Souviens-toi que c'est toi qui m'as demandé de te conduire ici. Ne rejette pas la faute sur moi. 

- Trouvez-vous nos divertissements si ennuyeux ? questionna Janos. 

- Nous nous demandions surtout si nous allions vous tuer maintenant ou attendre encore un peu, répliqua Anita calmement. 

Il gloussa. 

- Allez-y Anita, rompez la trêve ! Je vous en prie. J'adorerais avoir un prétexte pour tester un de mes nouveaux gadgets sur vous. A mon avis, vous résisterez longtemps. Cela dit, ce sont parfois les fanfarons qui cèdent les premiers. 

- Je ne fanfaronne pas, Janos. Je dis la pure vérité. 

- Elle est persuadée de ce qu'elle avance, déclara Kissa. 

- En effet, fit Janos. Il émane d'elle un parfum de sincérité aussi incongru que savoureux. 

Lisa avait cessé de se débattre. Affaissée dans ses chaînes, elle balbutiait des paroles incohérentes. La brune était immobile, les poings serrés pour tenter de contrôler ses tremblements. 

- Ces jeunes filles sont venues ici en quête de sensations fortes. Et nous allons leur en donner pour leur argent, promit Janos. 

Les deux vampires ouvrirent des panneaux dans les murs noirs. Chacune en sortit un fouet. Les filles ne pouvaient pas les voir, heureusement...

Rester inactif n'était pas quelque chose que Hadrian pouvait faire lorsqu'il voyait le mal devant lui, malgré la longueur de sa vie il avait toujours sauvé les autres... surtout les innocents... Les deux filles avaient beau être majeur, elles restaient des enfants pour lui. Alors deux enfants et la torture... Cela frappait un peu trop proche de chez lui. Il décida qu'il était temps de se montrer et alors qu'il allait sortir de l'ombre, Anita parla. 

- Si vous n'essayer pas de nous pousser à rompre la trêve, qu'espérez-vous donc ? 

- Oh, des tas de choses, Anita, dit Janos. 

- Que voulez-vous Janos ? 

- N'est-ce pas à toi de négocier au nom de tes serviteurs ? demanda-t-il à Jean Claude. 

- Anita se débrouille très bien toute seule. 

Nouveau rictus de Janos. 

- Si tu le dis...

Les deux vampires approchèrent des filles en brandissant leurs fouets pour qu'elles puissent les voir. 

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Lisa, affolée. 

- Des fouets, répondit son amie brune d'une voix qui, contrairement à son corps, ne tremblait pas. 

Les deux vampires reculèrent d'un pas, sans doute pour bénéficier de l'allonge nécessaire au maniement de leurs instruments de torture. 

- Allez-vous enfin me dire ce que vous voulez ? lança Anita. 

- Etes-vous familière avec le concept de "correction par procuration" ? 

- Je sais qu'autrefois, les héritiers d'une famille royale avaient des serviteurs qui recevaient le fouet à leur place quand on les avait punis. 

- Excellent ! la félicita Janos. De nos jours, peu de gens ont des notions d'histoire. 

- Mais quel rapport avec ces filles ? 

- Elles vont recevoir le fouet à la place des deux jeunes hommes qui vous accompagnent. 

Les deux vampires déroulèrent leurs fouets et les firent claquer. Elles ne touchèrent par les filles, mais la brune poussa un cri étranglé quand une lanière siffla près de son oreille. La blonde se plaqua contre le mur en sanglotant :

- Pitié, pitié, pitié. 

- Ne leur faites pas de mal, implora Larry. 

- Seriez-vous prêt à prendre leur place ? demanda Janos. 

Hadrian vit la lumière se faire sur le visage d'Anita, elle avait enfin comprit où il voulait en venir. 

- Vous ne pouvez pas nous toucher sans notre accord. Espèce de fils de pute pervers !

- Répondez-moi, mon garçon. Seriez-vous prêt à prendre leur place ? 

Larry hocha la tête. Anita lui saisit le bras. 

- Non. 

- Le choix lui appartient ! lança Janos. 

- Lâche-moi, Anita. 

Ils se regardèrent dans les yeux. Il était temps d'agir. Il sortit de l'ombre et parla :

- Larry... Tu n'as pas idée de ce qu'un fouet peut faire à la chair humaine. 

- Oh, nous pouvons y remédier, assura Janos avant de comprendre que ce n'était pas Jean Claude ou Anita qui avait parlé. 

Il se figea et se tourna vers la source de la voix. 

- Qui... Qui êtes-vous ? 

C'était assez sympathique de voir les vampires choqués alors qu'ils pensaient avoir le contrôle de la scène. Ils avaient tous bougé pour le fixer. 

- Bonjour Janos... Je me demande encore combien de temps il aurait fallut pour remarquer ma présence. Mais bon... Ma patience a des limites. Et votre petit jeu... atteint clairement les miennes. 

Hadrian fit un geste de la main et un bouclier transparent apparut devant les filles, empêchant les deux vampires de s'approcher. Elles cognèrent contre la barrière invisible. 

- Larry, Jason, je vous prierais d'aller détacher les filles du mur. Vous pourrez passer ne vous inquiétez pas !

Les deux hommes le fixèrent avant de s'avancer mais les deux vampires grognèrent et bloquèrent le passage. 

- Mesdames ! Déplacez !

Il vit qu'elles ne voulaient pas alors un autre geste et elles furent plaquées contre un mur. 

- Bien... La voie est dégagée les garçons. 

Ils firent ce qu'on leur demandait. Rapidement les deux filles étaient au sol, se tenant l'une à l'autre. 

- Vous pourrez revenir. Mesdemoiselles, vous êtes en sécurité là où vous êtes !

Il vit la brune faire un petit signe de tête pour confirmer qu'elle avait entendu. 

Hadrian se tourna vers celui qui avait eu le contrôle jusque maintenant. 

- Et voilà sans rompre la trêve ! Maintenant continuons je vous prie !

- Qui êtes-vous ? Vous n'étiez pas là depuis le début !

- Bien sûr que si ! Mon nom ne vous concerne pas ! Je le dirais à votre maîtresse donc amenez nous à elle ! 

- Vous... 

- Je sais ce que vous aviez prévu pour eux deux mais je vous le dis clairement Jason est sous ma protection et rien ne lui arrivera sans mon accord !

- Je dois continuer ! Les deux filles doivent être puni pour les deux garçons ! Et vous ne m'en empêcherais pas ! Vous n'êtes qu'un humain... Vous avez peut-être quelques pouvoirs mais par rapport à nous ce n'est rien !

- Croyez ce que vous voulez mais je vous promet qu'à la fin ce n'est pas moi qui rencontrerez la Mort ce soir ! 

- Est-ce une menace ? 

- Non une promesse ! Vous vous trouvez trop près de la ligne pour votre sécurité ! Reculez avant qu'il ne soit trop tard ! 

- Had... Hadrian... Que voulait-il faire ? 

- Rien qui ne te préoccupe Jason car cela n'arrivera pas ! Maintenant Janos, faîtes sortir les deux vampires qui se cachent ! 

Encore une fois, il était choqué... Il fit un geste et deux vampires sortirent de derrière un rideau qui devait mener à une autre salle. 

- Voici Bettina et Pallas, je les gardais pour le jeune loup....

Hadrian étudia les deux femmes, elles avaient une poitrine généreuse et la taille mince, l'une avait un visage de sorcière et l'autre les yeux un trop petits, mais c'était de simples détails Elles n'étaient pas franchement belles, simplement séduisantes comme peuvent l'être certaines femmes très grandes avec des jambes interminables. Un détail qui aurait largement suffi, si elles avaient été humaines. Perplewe, Jason fronça les sourcils. 

- Cela n'aurait pas été trop mal... 

- Jason ! 

- Aurais-tu changer d'avis si j'avais précisé que tu devais le faire ici, par terre, devant nous tous ? demanda Janos. 

- Vous auriez fouetté les filles ? 

Janos hocha la tête. 

- Je peux encore le faire...

- Il faudrait que tu puisses les approcher..

- Un tour de passe-passe... Et si tu meurs, cela disparaît...

- Mais pour cela, il faudrait déjà que tu sois capable de me tuer et cela romprait clairement la trêve ! 

Hadrian laissa une partie de sa magie s'éloigner de lui pour surveiller les vampires, il était clair que Janos ne voulait pas seulement que les filles couchent avec Jason, il y avait quelque chose d'autres. Sa magie de la mort effleura les trois vampires et une réponse lui fut souffler dans son esprit...

- Je vois... Ainsi tu es l'un d'eux... Vous êtes si rares...

- Tu sais mon ange

- Que Janos est vampire qui est capable de se putréfier, de même que les deux demoiselles ? Bien sûr... Je pense que cela aurait été assez traumatisant pour mon louveteau et comme il est sous ma protection je ne peux pas laisser son esprit être brisé donc j'aurais considéré cela comme une rupture de la trêve !

- Cela ne concerne que le premier sang, s'exclama Ivy. 

- Mon enfant... Que ce soit l'esprit ou le corps... Pour moi cela n'a pas d'importance...

- Comment oses-tu ! 

- Comment j'oses ? Vous n'êtes tous que des enfants pour moi alors tu vas te taire avant que je décide que tu as besoin d'être puni pour ton irrespect ! Maintenant je veux que nous continuions... La nuit avance et le temps se disperse ! 

Il eut un silence avant qu'il ne soit brisé par Anita. 

- Que veut-il dire ? Vampire putréfié ? 

- Il parle de ça !

Les filles commencèrent à pourrir devant eux, Jason fit un pas en arrière puis vint se mettre derrière Hadrian. 

- Est-ce une illusion ? 

- Non ma petite...

- Et ça ? demanda-t-elle en touchant le bras de Jean Claude. 

- Non plus... Les deux formes sont réelles, et comme l'a dit mon ange, ils sont rares. 

- Et dangereux ! Une balle ne suffit pas toujours mais le feu... Le feu fonctionna à coup sûr ! 

- Je ne peux pas vous laisser passer tant que les filles ne sont pas puni... ou les garçons s'ils prennent leur place ! Mais quelqu'un devra subir la punition ! dit Janos. 

- Janos... Arrête de croire que tu es tout puissant ici... Les filles sont maintenant protégées et les autres sont sous ma protection... A moins que tu désire me défier alors tu as perdu ... 

Janos fixa l'homme devant lui, il ne sentait qu'un humain, mais il avait vécu longtemps et ce n'était pas en étant stupide alors il pouvait dire qu'il était dangereux mais l'était-il autant qu'il voulait le faire croire. 

- Bien ! Je te défit ! Tu n'as aucune chance de me vaincre, dit-il calmement. 

- Cela reste à déterminer, tu ne crois pas ? 

Janos sourit à s'en faire craquer la peau. 

- Si... par miracle... tu triomphais, qu'exigerais-tu de moi ? 

- Que tu laisses passer ceux qui m'accompagnent ainsi que les deux filles sans qu'on leur fasse de mal !

- Et si je gagne, à quoi aurais-je droite ? 

- Que veux-tu ? 

- Tu sais très bien ce que nous voulons. 

- Dis-le !

- Vous renoncerez à votre droit  de passage. Nous pourrons faire de vous ce que nous désirons ! 

- Qu'il en soit ainsi ! 

Hadrian sentit la magie envahir la pièce pour que la promesse soit tenue. 

- Jean Claude, recule s'il te plait ! Jason rejoins le !

Puis le sorcier s'avança et se plaça devant Janos, se faisant ainsi face à face au centre de la pièce. Hadrian avait les pieds écartés et plantés dans le sol comme s'il s'apprêtait à se battre physiquement. Son adversaire avait adopté une posture nonchalante. 

- Tu vas tout perdre... Tu n'es qu'un humain... Jean Claude, que mijotes-tu à le laisser faire ? 

- Tu connais pas mon ange comme moi Janos... J'ai confiance en lui !

Hadrian secoua la tête. 

- Le défi a été lancé et accepté. Qu'attends-tu Janos ? Aurais-tu enfin peur de moi ? 

- Peur de toi humain ? Jamais ! 

- Assez parlé...

 Bien que basse et douce, la voix d'Hadrian porta dans toute la pièce. Elle monta à l'assaut des murs pour retomber comme une pluie noire chargée de colère. Jason éclata d'un rire qui n'avait aucune des qualités de celui de Hadrian. 

- Dansons donc ! 

Le silence s'abattit si brusquement sur la cave que l'on aurait pu croire qu'ils étaient devenus sourds. Puis ils se rendirent compte qu'ils entendaient toujours les battements de cœur des humains et du loup. Des volutes d'air chaud montèrent entre les deux qui se tenaient au milieu de la pièce, comme sur une route goudronnée en pleine canicule. Mais ce qui se déversa sur la peau des autres n'était pas de la chaleur mais du pouvoir ! Un maelström de pouvoir ! Le vent qui émanait des deux adversaires faisait voler leurs cheveux en arrière. 

Hadrian ne laissa qu'une partie de sa magie s'écouler de lui, il tenait Janos immobile le forçant à se fatiguer. Le problème de ce genre de défi était que c'était qu'une question de pouvoir, rabaisser l'autre avant d'être soi-même rabaissé. Il augmenta la force de son pouvoir et força Janos à tomber à genoux devant lui. Subitement il entendit du bruit, les choses dégénéraient avec les autres et il entendit Jean Claude parler. 

- Mon ange... Ils ont rompu la trêve ! Ivy a blessé ma petite 

Bien... 

- Janos... Vous avez perdu ! Tu aurais dû retenir l'enfant...

Hadrian projeta le vampire contre le mur juste au moment où un vampire l'attaqua par derrière. Il tendit la main en arrière et attrapa la tête qui venait de le mordre et l'arracha de lui. 

- Bien bien... Mon pauvre enfant... S'il y a bien quelque chose que tu n'aurais pas dû faire c'est cela... Même un vampire putride comme toi ne peut pas survivre à mon sang si je le donne pas volontairement ! 

Et en effet, c'était Bettina qui l'avait attaqué, sûrement pour protéger son maître, mais maintenant le venin de Basilic la tuait à petit feu, elle brûlait de l'intérieur. Pallas attaqua à son tour, cherchant à le mordre. Hadrian leva sa main et fit monter la protection de sa mère... Les mains de la femme lui attrapèrent le bras et brûlèrent instantanément se transformant en cendre, et cette brûlure, sans aucune flamme, se déplaça petit à petit sur le reste de son corps, avançant vers le haut de ses bras... Elle tomba près de sa compatriote et se mit à hurler avec elle. Deux vampires de moins ! Enfin presque trois puisque Janos était toujours affalé contre le mur. 

Hadrian se tourna vers le reste de la pièce. Anita se battait avec Ivy, Bruce s'était plaqué contre un mur, il avait clairement peur et Kissa se tenait près de la sortie ne sachant clairement pas comment agir. Jean Claude fixait les autres vampires. Le sorcier laissa sortir sa magie de la mort et elle éclata dans la cave. 

- Stop ! Maintenant je veux rencontrer Seraphina ! Cela suffit ! 

Au moment où il disait cela un petit foulard blanc accroché à un bâton était apparut près de l'endroit où se trouvait Kissa. 

- Qu'est-ce ? 

- Un drapeau de trêve ma petite... 

- Pouvons-nous parler ? 

Une voix d'homme, dans le couloir... 

- Que faisons-nous ? demanda Larry. 

- C'est un drapeau de trêve ! redit Jean Claude. 

- Une trêve qu'ils ont tout fait pour que nous la brisions et qu'ils ont eux-mêmes rompu au final ... Bien ! 

Magnus, Hadrian avait vu sa photo, il était le Fae qui avait été accusé des meurtres et qui s'était enfuit, apparut devant eux. Il était entièrement vêtu de blanc, du smoking aux chaussures. Le tissu semblait luire contre sa peau bronzée. Ses longs cheveux étaient attachés sur sa nuque par un ruban blanc. Il tenait toujours son drapeau improvisé à la main, et se déplaçait d'une démarche gracieuse, presque identique au glissement des vampires. Larry avait sortit son arme et la braquait sur lui. 

- Restez où vous êtes, ordonna-t-il. 

Il semblait effrayé mais déterminé, et son bras ne tremblait pas. 

- Nous avons déjà dit que les balles en argent ne marchent pas sur les Feys, fit Magnus. 

- Qui a prétendu que ce flingue contenait des balles en argent ? répliqua Larry

Un bon mensonge. Hadrian voyait son estime pour le garçon augmenter de quelques crans. 

- Anita ? 

Le regard de Magnus dépassa Larry comme s'il n'était pas là. Pourtant il s'immobilisa. 

- A votre place, je ferais ce qu'il dit, Magnus. Que voulez-vous ? 

Il sourit et écarta les bras, sans doute pour montrer qu'il n'était pas armé. Mais il savait, et Larry aussi, de même que les autres, qu'il était assez dangereux sans ça. 

- Je n'ai pas l'intention de vous faire de mal. Nous savons qu'Ivy a rompu la trêve la première. Seraphina vous présente ses plus sincères excuses. Elle demande que vous alliez directement dans sa salle d'audience. Il n'y aura plus de tests. Nous avons fait preuve d'une incroyable grossièreté face à un maître en visite. 

- Allons-nous le croire ? lança Anita à la cantonade. 

- Il dit la vérité, déclara Jean Claude. 

- Laisse-le passer, Larry. 

Le garçon jeta un coup d'œil à Hadrian qui hocha la tête, et fit ce qu'on lui demandait. Larry baissa son flingue, l'air contrarié. Magnus s'avança dans la pièce en souriant. Il le dépassa et lui tourna ostensiblement le dos. Son arrogance était palpable. Il s'arrêta à un mètre du reste du groupe. Magnus baissa son regard sur la réanimatrice, amusé et vaguement surpris. 

- Qu'est-ce que vous fichez ici ? demanda brusquement Anita. 

Jean Claude la regarda. 

- Apparemment, vous vous connaissez. 

- C'est Magnus Bouvier. Et je ne comprends pas ce qu'il fout avec eux. 

Magnus desserra sa cravate et écarta le col amidonné de sa chemise. Anita le fixa et pencha la tête sur le côté comme si elle pensait à quelque chose puis elle leva les yeux pour regarder son cou. 

- Merde alors ! Pourquoi ? 

Il baissa les yeux sur elle puis tourna son regard vers Jean Claude. 

- Je pourrais vous demander la même chose...

- Je... Non...

- Ha... Et bien il y a plusieurs raisons mais aucunes ne sont vraiment altruiste. 

Magnus défit son ruban et laissa ses cheveux se répandre ses épaules. Sans quitter Anita des yeux, il se tourna vers Jean Claude et se mit à genoux en ramenant ses cheveux en arrière et lui offrit son cou. 

- Non, dit Jean Claude. 

- Que se passe-t-il ? demanda Larry. 

D'un haussement d'épaules, Magnus défit sa veste de smoking et la laissa glisser à terre. Il déboutonna sa manche droite, le releva jusqu'à son coude et tendit son poignet à Jean Claude. Sa peau était lisse, dépourvue de la moindre marque. Jean Claude prit sa main et la porta à ses lèvres. Anita détourna les yeux, clairement elle voulait croire qu'il ne passait rien. Mais le vampire ne fit qu'effleurer le poignet de Magnus de ses lèvres puis le lâcha. 

- C'est une offre très généreuse, mais je serais complètement soul si je buvais votre sang...

Hadrian lui avait envoyé une petite alerte dans son esprit qui disait clairement "Non !", il sentait que Magnus avait vu quelque chose qu'il ne devait pas et cela finirait mal pour Jean Claude s'il en prenait possession... Comme s'il avait prit le sang d'une licorne contre son gré et avait donné son sang à un vampire juste après cela aurait fait suivre la malédiction... Qu'avait fait Magnus ? Puis cela prit sens pour le sorcier, il avait trouvé celui qui aidait la monstruosité emprisonnée ! 

A genoux devant lui, Magnus le regardait toujours. 

- Vous ne voulez pas me goûter ? 

Jean Claude secoua la tête. 

- Le sang a été offert. 

Magnus se redressa et s'avança à nouveau vers Anita. Ses cheveux lui cachaient une moitié de la figure, dévoilant seulement un de ses yeux turquoise qui brillait comme un joyaux à travers ses mèches. Aucun humain n'avait des yeux de cette couleur... 

- Un litre de sang, une livre de chair, chuchota-t-il, son visage proche du sien. 

Puis il se pencha comme pour l'embrasser. Elle se jeta en arrière et déséquilibrée, faillit tomber en arrière mais se rattrapa. Magnus s'avança encore plus près, mais elle lui enfonça le canon de son Browning entre les côtes.

- Reculez ou je tire, menaça-t-elle. 

Il battit en retraite, pas très loin. Elle se redressa en gardant son flingue sur lui d'une seule main. 

- Bon sang, qu'est-ce qui vous prend ? 

Jean Claude éclaira sa lanterne. 

- Janos a parlé de nous prendre du sang et de la chair, ce soir. A titre d'excuse, Seraphina nous offre du sang et de la chair.... 

Magnus était toujours devant eux et passait les mains dans ses cheveux pour les ramener en arrière. 

- Vous avez refusé les offrandes de paix de Seraphina. Refusez-vous également ses excuses ? 

- Conduisez nous à Seraphina, et vous aurez rempli votre mission, dit Jean Claude. 

Magnus ne quitta pas des yeux la petite brune. 

- Et vous, Anita ? Suffira-t-il que je vous conduise à Seraphina ? Accepterez-vous ses excuses ? 

- Pourquoi le ferais-je ? 

- Anita n'est pas une maîtresse ! cria Jean-Claude. C'est mon pardon et celui de mon ange que vous devriez implorer !

- Je fais ce qu'on m'a ordonné, répliqua Magnus. Anita aurait défié Ivy en duel de volonté. Et Ivy aurait perdu...

- Et que suis-je alors ? Vous continuez à me manquer de respect alors que j'ai défié Janos, vaincu mais aussi détruit deux vampires... coupa Hadrian. 

- Je suis désolé mais on ne m'a rien dit sur vous ! répondit Magnus en le fixant. 

- Vous offrez chair et sang à Jean Claude et sa servante humaine, mais c'est moi qui gagne et je ne reçois pas le respect que l'on me doit ! Aurais-je des excuses pour avoir menacé mon protectorat ? Ma patience a des limites que vous êtes en train de franchir alégrement. 

Hadrian n'était pas du genre à se mettre en avant, cela n'avait jamais été le cas, même si avec le temps il avait apprit à accepter le fait qu'il ne serait jamais quelqu'un de normal, mais lorsqu'il y avait des innocents en danger il n'y avait pas grand chose capable de le stopper, surtout lorsque ces mêmes innocents étaient des enfants et là une des cibles qu'il avait était un pédophile vampire, le deuxième n'était pas vraiment le soucis mais le premier... Non il allait l'arrêter et ce n'était pas des stupides jeux politiques qui allaient l'en empêcher. Il s'avança vers les deux filles, toujours sur le sol, et posa une main sur chacune de leur tête pendant un instant, une fois qu'il eut finit elles se levèrent et quittèrent la pièce par le chemin qu'ils avaient prit pour arriver ici. 

- Où...Où vont-elles ? 

- Elles partent. Elles ne se souviendront pas de ce qui s'est passé ici, juste qu'il ne faut pas faire confiance à des inconnus et aller n'importe où avec eux sans aucune protection. Elles seront protégées jusqu'à ce qu'elles soient en sécurité. Maintenant passons à la suite Magnus avant que je commence sérieusement à m'énerver !

Magnus le fixa et fit un signe de tête avant de revenir vers Anita et Jean Claude. 

- J'espère que leur départ vous montreras notre bonne foi. 

Il revint l'entrée du couloir et leur fit signe. 

- Vous venez ? 

Tous se fixèrent et commencèrent à le suivre, Hadrian ferma la marche. 

Des draperies de soies recouvraient les murs, on ne pouvait voir s'il y avait des entrées cachées derrière elles. Mais au bout du couloir, elles avaient été écartées pour révéler un trône dans le coin droit, au fond de la pièce. Il n'y avait pas d'autre mot. "Chaise" n'aurait pas rendu justice aux dorures et aux joyaux incrustés dans le bois. 

Une multitudes de coussins étaient éparpillés sur le sol comme pour accueillir un harem ou une famille de petits chiens toilettés et enrubannés. Mais ils étaient vides. On eût dit une scène de théâtre avant le lever de rideau. Une tapisserie avait été poussée sur le côté, révélant une porte tenue ouverte par un morceau de bois triangulaire. L'air printanier pénétrait par l'entrebâillement, chassant l'odeur de pourriture. Soudain le vent devint plus froid et souffla plus fort. Hadrian redressa la tête en sentant le picotement sur sa peau, il laissa pulser sa magie pour ressentir ce qui l'entourait. 

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Larry. 

- Des fantômes, répondit Anita qui avait les muscles de ses épaules et de ses bras se contractant. 

- Des fantômes ? Qu'est-ce qu'ils foutent ici ? 

- Seraphina peut invoquer des spectres, expliqua Jean Claude. Une capacité unique au sein de notre communauté...

Kissa apparut sur le seuil. 

- Seraphina vous invite à la rejoindre dehors. 

Magnus se laissa tomber sur les coussins avec la grâce d'un gros chat. Visiblement, ce n'était pas la première fois qu'il se pelotonnait là. Il avait ses petites habitudes. 

- Vous ne venez pas ? lui demanda Anita. 

- J'ai déjà vu le spectacle. 

Jean Claude marcha vers la porte. Jason le suivit deux pas en arrière, comme un brave toutou. Larry prit le même chemin, Anita dût faire de même avec Hadrian qui continuait à fermer la marche. Le vent froid soulevait leurs cheveux comme s'il avait des mains. Il était presque vivant. Hadrian accepta leur présence. Les fantômes n'avaient rien d'effrayant, il les avait côtoyé depuis qu'il y avait onze ans. Mais il ne pouvait pas en dire autant de la personne qui les avait invoqués. Il voyait clairement les mains tremblantes de la petite réanimatrice, de son assistant et du petit loup, il y avait aussi la ligne tendu sur les épaules du vampire. 

Ils franchirent le seuil et descendirent deux petites marches de pierre. Des rangées d'arbres fruitiers rabougris se dressaient derrière la maison. Un mur de ténèbres se découpait dans le fond du verger. Un mur d'ombre si dense que je ne pouvais pas voir à travers, les branches nues se détachant dessus comme en plein jour. 

- Qu'est-ce que c'est ? demanda Anita. 

- Certains de nous peuvent tisser des voiles d'ombres et de ténèbres autour d'eux, répondit Jean Claude. 

- Je sais. J'ai déjà vu ça quand Coltrain s'est fait tuer. Mais c'est un putain de mur !

- Assez impressionnant, reconnu le vampire. 

Une étincelle blanche apparut derrière les ombres. Des rayons de lumière froide transpercèrent les ténèbres et les consumèrent comme du papier. Quand les derniers lambeaux d'obscurité furent retombés, une silhouette pâle se tenait entre les arbres. Même à cette distance, personne n'aurait pu la prendre pour une humaine. Elle ne faisait d'ailleurs pas d'effort pour s'en donner l'air. Une phosphorescence blanche planait au-dessus de sa tête comme un nuage scintillant ou un néon décoloré long de plusieurs mètres. Des formes aux contours imprécis grouillaient à l'intérieur. 

- C'est ce que je pense ? demanda Larry. 

- Des fantômes, fit Anita. 

- Et merde ! 

- Tu l'as dit. 

Les fantômes se déployèrent parmi les arbres. Ils s'accrochèrent aux branches mortes comme une nuée de bourgeons précoces, si des bourgeons avaient pu remuer et luire. De nouveau, l'étrange vent plaqua leurs cheveux en arrière. Une longue ligne de formes lumineuses piqua vers le sol et fonça sur eux. 

- Anita ! beugla Larry. 

- Ignore-les. Ils ne peuvent pas te faire de mal tant que tu ne leur prêtes aucune attention, répondit froidement Hadrian immergé dans sa propre magie. 

Il fit apparaître un bouclier autour d'eux. Le premier fantôme était grand et mince, avec une bouche qui ressemblait à un rond de fumée. Il frappa le mur translucide mais n'approcha pas plus près. 

- Que... Qu'est-ce qui se passe ? demanda Jason. 

- Continuez à avancer et ignorez-les !

Les fantômes s'approchaient de plus en plus, entourant le bouclier mais ne pouvant pas approcher des quatre se trouvant à l'intérieur. 

- Ignorez-les Chaque fois que vous leur prêtez attention, vous leur donnez un peu plus de pouvoir pour se manifester, expliqua le maître de la mort. 

Cela ne pouvait durer alors Hadrian sortit du bouclier et laissa les fantômes l'approcher. Ils l'entourèrent en un instant, le touchant, le caressant, essayant de prendre possession de lui. Il laissa sa magie de la mort s'écouler de lui. Un fantôme percuta son dos, il eut l'impression qu'un bloc de glace lui traversa le corps. Il aurait dû ressortir par sa poitrine mais à la place il fut aspirer dans sa magie. Les fantômes suivirent le chemin du premier et petit à petit ils disparurent. Il leva les yeux et vit les autres le fixer. 

Jason avait les yeux écarquillés d'horreur. Il n'allait clairement pas bien depuis qu'il avait comprit ce qu'on avait voulu de lui. Larry et Anita le fixaient avec des grands yeux choqués, ne s'attendaient pas à ça. 

Jean Claude continua à marcher vers la silhouette blanche d'un pas gracieux et nonchalant, faisant comme s'il n'y avait rien d'étrange autour de lui. Les trois autres suivirent. Le vampire les guida entre les arbres nus, les fantômes rampant sur leurs branches tels des serpents, à chaque pas que faisait Hadrian, l'un d'eux entrait en lui sans jamais ressortir. Jean Claude s'immobilisa à deux mètres de la vampire. 

- Salutations, Seraphina. 

- Salutations, Jean Claude. 

Elle portait une robe blanche toute simple dont les plus soyeux tombaient jusqu'à ses pieds. Des gants blancs couvraient presque entièrement ses bras. Ses cheveux gris striés de mèches blanches étaient tenus pas un bandeau d'argent et de perles. Ou peut-être un diadème... Il n'était pas vraiment calée en matière de bijoux féminins. 

Son visage ridé était délicatement maquillé, mais pas assez pour cacher son grand âge. Elle avait dû être changée tard dans sa vie. 

- Passerons-nous à l'intérieur ? demanda-t-elle. 

- Si tu veux, répondit Jean Claude. 

- Tu peux m'escorter comme dans le bon vieux temps. 

- Mais ce n'est plus le bon vieux temps, Seraphina. Nous sommes tous les deux des maîtres à présent. 

- Beaucoup de maîtres me servent, Jean Claude. 

- Moi, je ne sers que moi-même. 

Elle hocha la tête.

- Je comprends. Mais ça ne t'empêche pas de te conduire en gentleman. 

Jean Claude prit une inspiration assez profonde pour qu'il soit entendu des humains. Il lui offrit son bras, Seraphina enroulant une main gantée autour de son poignet. Les fantômes flottaient derrière elle comme une immense traîne. Ils les effleurèrent, un souffle qui leur picota la peau, puis s'élevèrent jusqu'à trois mètres du sol. 

- Vous pouvez marcher avec nous, dit Seraphina. Ils ne vous molesteront pas. 

- Comme c'est réconfortant, grinça Anita.

Elle n'avait pas l'air de se rendre compte de ce qui arrivait aux fantômes qui entraient dans le corps du sorcier, sinon elle n'aurait peut-être pas agit comme elle le faisait. Elle était si certaine de son pouvoir qu'elle se croyait toute puissante. Maintenant il savait qui mordait Magnus et avait donc assez au sang de la créature. 

Elle se tourna vers Anita et lui sourit. C'était difficile avec le clair de la lune et la phosphorescence qui émanait d'elle, mais il semblait que ses yeux étaient gris, ou peut-être bleus. Mais il n'y avait pas besoin de voir leur couleur exacte pour ne pas aimer ce qu'ils exprimaient. 

- J'étais très impatiente de faire ta connaissance, nécromancienne. 

- J'aimerais pouvoir en dire autant. 

Son sourire ne bougea pas d'un iota comme si son visage était un masque délicatement sculpté. Hadrian fixa la femme, il avait encore une fois était rejeté comme quantité négligeable, car son pouvoir était différent de celui d'Anita qui était incapable de le cacher, mais grâce à cela elle masquait une bonne partie du sien. Seraphina se détourna et entra dans la maison. Jean Claude l'aida à monter les marches, comme si elle en avait besoin. Les fantômes entrèrent dans la maison, certains passant par la porte et d'autres se contentant de traverser les murs. Ils lévitèrent vers le plafond et rebondirent doucement comme des ballons gonflés à l'hélium, où se laissèrent glisser le long du mur, derrière le trône. Dans la lumière des bougies, ils étaient aussi translucides que des bulles. 

Seraphina prit place sur son trône. A ses pieds, Magnus était pelotonné dans les coussins. Une lueur de colère brilla dans son regard et disparut aussitôt. Il n'aimait pas être le jouet de Seraphina. 

- Viens t'asseoir près de moi, Jean Claude, dit Seraphina en indiquant les coussins du côté opposé à celui de Magnus. 

- Non ! lâcha Jean Claude. 

Ce simple mot était un avertissement. Lentement, Hadrian s'avança pour se tenir plus près du vampire. Seraphina éclata de rire. Avec ce son, son pouvoir brisa les digues qui le contenaient pour déferler sur eux tous. Il fonça tel un cheval lancé au galop, faisant vibrer leurs corps, asséchant leur bouche et coupant leur souffle. Hadrian pouvait voir que le contrecoup faisait beaucoup de mal à Anita, elle n'avait pas l'habitude de ce niveau de puissance et surtout pas lancé sur elle, Seraphina n'avait pas besoin de la frapper pour la faire souffrir, il lui suffisait de rester sur son trône et de lui balancer son pouvoir. Hadrian pouvait aussi jouer à ce jeu. Il se déplaça pour se tenir devant le groupe et déploya sa magie, prenant de plein fouet la force de la maîtresse de la ville, mais ce n'était pas grand chose par rapport à ce qu'il était capable de manier par lui-même s'il en avait le désir. Il était aussi clair qu'elle n'avait pas l'habitude de gérer de tel niveau, elle fonçait et n'avait aucune subtilité. Subitement le pouvoir écrasant de Seraphina reflua comme l'océan à marée basse. 

- Belle illusion mais pas suffisant pour me faire tomber, fut la seule chose qui fut dîtes. 

- Une illusion, chuchota Anita. Une putain d'illusion. 

- Oui, ma petite. 

Jean Claude se détourna d'elle pour s'approcher de Larry et de Jason, toujours figés dans leur transe. Hadrian fixait toujours la femme sur son trône. Les fantômes formaient un nimbe lumineux autour de Seraphina. Très impressionnant, mais pas autant que ses yeux. Un instant, il semblait qu'ils étaient deux puits sans fond. Mais les yeux du sorcier aussi étaient impressionnant car maintenant ils brillaient d'une lueur verte, leur donnant une impression d'un autre monde... 

- Alors tu peux soutenir mon regard... Mais qui es-tu ? 

- Janos ne t'a pas dit que je l'avais vaincu... Je me demande bien pourquoi...

- Alors c'est toi... Celui qui a empêcher les miens de punir les filles... Tu as gâché mon amusement. 

- Et vous avez rompu la trêve.... Quel dommage. 

- Qui es-tu ? Je sens... Je sens la mort qui t'entoure comme la petite nécromancienne mais c'est aussi différent... plus ancien... plus puissant... Ne veux-tu pas me rejoindre ? Devenir mien....

- Je n'obéis à personne... Pour moi tu n'es qu'une enfant qui joue avec ce qu'elle ne comprend pas... Tu étais une réanimatrice avant d'être changée n'est-ce pas ? Pas assez puissante pour être une nécromancienne mais cela explique ton pouvoir sur les fantômes même si toi et moi savons comment tu arrives à en avoir autant... Tu es peut-être une maîtresse aujourd'hui mais tu triches pour avoir ton pouvoir... 

- Comment oses-tu ? Je suis la Maîtresse de la Ville, je commande à des maîtres et j'ai un Feys à mes pieds... 

- Mais pour cela tu t'es maudit ! Chaque acte a des conséquences et le prix doit être payé !

Juste à ce moment-là deux vampires entrèrent dans la pièce. 

- Ah, Janos, Ivy, comme c'est gentil de vous joindre à nous ! 

Janos entra d'un pas glissant, suivit de près par Ivy. Son visage était toujours aussi pâle mais moins décharné. Même s'il aurait eu du mal à se faire passer pour un humain, il avait l'air un peu moins monstrueux que lorsqu'ils l'avaient vu pour la première fois. Et il semblait complètement remis de leur affrontement...

- Et merde ! 

- Quelque chose ne va pas, nécromancienne ? demanda Seraphina. 

- Je déteste gaspiller des balles. 

De nouveau, elle émit un gloussement sourd. 

- Janos est très talentueux ! Et Ivy se débrouille assez bien. 

Quand il passa devant eux, on pouvait voir du sang dans le dos de sa chemise et des trous dans le haut de Ivy... Janos mit un genou à terre au milieu des coussins. Ivy l'imita. Tête baissée, ils restèrent immobiles, attendant que leur maîtresse daigne leur prêter attention. Kissa s'approcha de Magnus. Elle semblait inquiète. Quelque chose de déplaisant se préparait. 

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