
une heure et une éternité
Chapitre 7: une heure et une éternité
Quelques jours après que Dumbledore ait accepté de déplacer l'Armoire à Disparaître, elle a la réponse à leur question lorsque Drago entre dans une colère noire. Elle l'observe alors qu'il renverse des chaises dans une réserve des cachots, tressaillant lorsque des éclats de bois volent dans l'air, et a mal, mal, si mal à l’estomac.
Elle se dit que si elle était quelqu'un d'autre, une Gryffondor au cœur sensible, peut-être, elle aurait fait certaines choses différemment. Au lieu de commencer à espionner Drago au début de l'année, elle aurait essayé de le convertir au camp de Potter. Son camp, bien que ce soit encore une pensée étrange.
Mais elle n'est pas courageuse et elle n'est la sauveuse de personne. Drago va-t-il mourir à cause de la façon dont ils ont perturbé ses plans ? Elle pourrait lui dire que c'est elle, mais il semble si désespéré qu'elle ne peut écarter la possibilité qu'il la livre au Seigneur des Ténèbres pour pallier à ses échecs.
Elle sait au plus profond d'elle-même qui elle est. Elle ne risquera pas sa vie pour sauver celle de Drago. Elle a trop peur de mourir.
***
« Qu'est-ce qu'on lui fait ? demande-t-elle à Potter quelques jours après l'incident de la réserve. »
Ils sont à nouveau dans la salle de stockage.
« Il est trop impliqué. Ce n'est pas notre faute, dit Potter avec entêtement. Tu te souviens que j'ai entendu Rogue essayer de l'aider, avant les vacances, et qu'il l'a rejeté. Il ne veut pas d'aide.
–Il ne sait pas ce dont il a besoin, dit-elle sèchement.
–Il en sait autant que toi, non ? Il a choisi ça. Il pourrait aller voir Dumbledore s'il le voulait, ou quelqu'un d'autre. »
Elle se détourne de lui, furieuse.
« Peut-être qu'il ne peut pas. Il ne veut rien m'avouer, mais je pense que le Seigneur des Ténèbres a quelque chose sur lui, une certaine emprise sur lui - pas seulement des menaces de mort. Peut-être que c'est quelque chose sur sa mère, je ne sais pas. »
Il croise ses bras sur son torse, fronçant les sourcils.
« Même si c'est vrai, qu'est-ce qu’on va faire ? Il est déterminé à le faire, peu importe pourquoi il le fait. »
Elle se détourne de lui en signe de frustration.
« Je déteste ça. Il va tuer, ou être tué. »
À sa plus grande horreur, elle sent que ses yeux commencent à piquer à cause des larmes qui les envahissent.
« On essaye d'aider, en l'arrêtant. »
Elle entend un bruissement alors qu'il se rapproche un peu plus, puis sent sa main toucher timidement son épaule.
« On fait ce qu’on peut.
–On est pas des héros, dit-elle d’une voix étranglée et en le repoussant. Ne me mens pas. »
***
La fin de l'année scolaire se rapproche, et c’est à la fois une bénédiction et une malédiction : les jours qui rallongent, les collines qui verdissent, partout les fleurs qui éclatent au soleil…
Elle réalise que le fait d'avoir passé une partie de l'année à espionner a mis à mal son travail scolaire, et tente de rattraper son retard. Au cour de défense contre les forces du mal, elle voit Granger devenir folle d'inquiétude et de stress à cause des devoirs que leur donne Rogue. Pendant ce temps, Millicent fait une crise de panique à l'idée d'échouer à nouveau aux potions et deux élèves de cinquième année se retrouvent à l’infirmerie pour avoir utilisé trop de pimentine.
L'été est presque à portée de main. Daphné retourne en France et Tracey suit une sorte de cours d'été suite à l’insistance de son père Moldu. Quant à Pansy, Mère lui écrit des hiboux sévères pour lui dire qu'elle doit se décider et Père l'appâte en lui disant à quel point il serait utile d'avoir quelqu'un pour l'assister cet été, même si elle sait très bien qu'il a déjà trois assistants. Elle répond à son père qu'elle fera tout ce qu'il veut tant qu'elle pourra rendre visite à Prim en Amérique.
Elle est prise entre son désir de voir la fin de l'année scolaire et sa crainte de ce qui l'attend. Parfois, elle se sent comme si chaque jour est à la fois une heure et une éternité.
***
Un samedi après-midi, elle est allongée dans l'herbe près du lac avec Daphné et Tracey, tandis qu'elles se passent une flasque métamorphosée de façon à ressembler à un thermos de thé. Il ne fait jamais vraiment chaud à Poudlard, mais en ce mois de juin, c'est presque le cas, et aujourd'hui est l'un de ces jours qui lui fait penser qu'elle pourrait vraiment aimer cet endroit. Le soleil lui réchauffe le visage alors qu'elle ferme les yeux et écoute la conversation de Daphne et Tracey qui se racontent les derniers potins et de quelques élèves qui lancent un soiffle.
Soudain, elle entend un rire qui ressemble étrangement à celui de Potter. Ignorant la pensée qu’elle est à présent capable de le reconnaître à la voix, elle s’assoit.
Il est visiblement en train de se promener avec Weasley et Seamus Finnigan sur le chemin en contrebas, riant d'une imitation exagérée que fait Finnigan. Il a les cheveux en bataille, sa cravate est à moitié défaite, et il a l'air plus détendu qu'il ne l'a été depuis des semaines.
Comme au ralenti, il jette un coup d'œil sur le côté, et leurs regards se croisent au-dessus du sol couvert d’herbe. Elle devrait détourner le regard, mais elle ne le fait pas, et lui non plus. Ses yeux sont plus verts qu'elle ne les a jamais vus, et il y a quelque chose en eux qu'elle ne peut pas nommer. Elle se sent imprudente, stupide et elle sent en elle comme une étrange chaleur, et elle pense, pas pour la première fois, que Harry Potter a des yeux très dangereux.
C'est seulement lorsque Weasley et Finnigan tournent la tête et suivent le regard de Potter qu'elle est ramenée à la réalité. La confusion envahit le visage de Weasley, et elle sait qu'ils ont besoin d'une diversion.
Alors elle dit la première chose qui lui vient à l'esprit en prenant sa voix la plus moqueuse :
« Tu vois quelque chose qui te plaît, Potter ? »
Elle perçoit la compréhension dans ses yeux.
« Non, dit-il très lentement, et il y a à présent comme un sourire en coin sur son visage. Je te trouve aussi attirante qu'un Skrout à pétard, Parkinson. »
Pendant un bref instant durant lequel elle oublie où ils sont, elle sourit presque. Mais elle voit Finnigan grogner derrière Potter, et se reprend :
« Tu es juste dégoûté parce que je ne toucherai jamais un traître à son sang comme toi. »
Weasley secoue la tête, l'air dégoûté.
« Viens, vieux, dit-il avant d’entraîner Potter avec eux. »
Quand Pansy se retourne, elle trouve Tracey et Daphné la regardant fixement : Tracey dans une confusion totale, Daphné avec un regard entendu.
« C’était quoi, ça ? s’exclame Tracey. »
***
« Tu te soucies encore vraiment des traîtres à leur sang ? demande Potter quand il la voit dans le couloir quelques jours plus tard.
– C'est sur ça que tu te concentres en ce moment ? »
Elle se sent déçue, sans trop savoir pourquoi.
Il continue, nullement découragé.
« Alors ?
–Tu es stupide à ce point ? Je suis pratiquement une traîtresse à mon sang moi-même. Ou juste une bonne vieille traîtresse. Je n'ai pas le temps de m’intéresser à ce que font les autres. Tu n’as jamais entendu parler de quelque chose appelé faire semblant ? »
Dès qu'elle a fini de parler, elle réalise que c'est vrai.
Une partie d'elle s'attendait à ce qu'il voie à travers son jeu et ses mensonges. Il est censé l'entendre prononcer les mots "traître", regarder de haut ou rire d'une blague stupide et savoir que.. : Pansy Parkinson la princesse de Serpentard n'est qu'une actrice jouant le rôle qu'elle doit jouer et que Pansy, la fille, est tout autre chose.
Quand a-t-elle commencé à attendre des choses de sa part ?
Son visage exprime une étrange expression.
« Tu n'es pas une traîtresse. Je veux dire, je ne sais pas pour le truc du traître à son sang, mais tu n’es pas une traîtresse... »
Satanés Gryffondor avec leurs satanés rêves.
« Bien sûr que je le suis. Je trahis Drago, ma maison, ma famille. Tu sais ce que les gens diraient de moi ? Ce qu'ils feraient ?
–C’est pas une trahison si c’est pour ta soeur, rétorque-t-il obstinément. »
Pendant un moment, elle ne sait pas quoi dire. Elle a quelque chose de dédaigneux et de sarcastique sur le bout de la langue, mais il la regarde si sérieusement, comme s'il y croyait vraiment, et elle pense : dans son monde, c'est peut-être vraiment comme ça.
« Tu es le seul à être assez fou pour penser ça, dit-elle enfin, mais sans sa colère habituelle. »
Étrangement, ses lèvres s’étirent en un sourire.
« Ouais, eh bien, mon opinion est la plus importante, n'est-ce pas ?
Elle roule des yeux.
« Oui, tu sais combien je vis pour ton approbation, Potter. Merlin, ton ego c’est vraiment quelque chose... »
***
Prim lui écrit à propos de ce qu'on appelle les PSATs et d’à quel point Matthew est ennuyeux, et demande pourquoi Pansy est si peu réceptive. Ce que Pansy voudrait le plus, c'est dire à Prim ce qu'elle fait, mais elle sait qu'elle ne le peut pas. Au lieu de cela, elle remplit sa lettre avec d'autres choses : les trois attaques de Détraqueurs dans la Gazette du sorcier la semaine dernière, les révisions pour les examens, un triangle amoureux entre des Serpentards de cinquième année, l’attirance malheureuse de Tracey pour un Serdaigle. Elle raconte une anecdote pour chacune de celles qu'elle aimerait pouvoir dire : Le visage pâle de Drago dans la salle de bains, le regard perçant de Dumbledore par-dessus ses lunettes, l'étrangeté de la Salle sur demande, Potter la regardant au-dessus du chemin couvert d’herbe…
Puis, un soir, à la toute fin du mois de juin, Potter envoie " surveille Drago " sur le galion. Elle a l'estomac qui se noue en le voyant. C'est ce qu'elle a essayé de faire toute l'année. Elle vérifie sa coiffure et son maquillage dans le miroir à côté de son lit, puis descend les escaliers.
À sa grande surprise, elle trouve Drago dans la salle commune, assis dans un fauteuil vert en velours face à la cheminée et serrant les bras de son fauteuil jusqu’à s’en faire blanchir les jointures. Il regarde fixement le feu. Potter ne peut pas avoir vu Drago, donc il doit lui demander cela pour d'autres raisons.
« Quelque chose d'intéressant là-dedans ? demande-t-elle en s'installant sur la chaise à côté de la sienne. »
Il lève les yeux, la remarque, mais ne répond pas.
Elle cherche quelque chose pour le distraire.
« Tu veux réviser pour les potions ? Je n'arrive toujours pas à comprendre le principe de Rotter, et je sais que tu le comprends beaucoup mieux que moi. »
Parfois, il aime bien lui montrer ses connaissances en potions.
« Non, dit-il laconiquement. J'ai d'autres choses à faire. »
Il regarde toujours le feu.
Elle pense savoir que sont ces autres choses.
« Drago, murmure-t-elle en baissant la voix. Qu'est-ce que tu fais ? Laisse-moi t'aider, s’il te plait.
–Non. »
Elle peut voir ses doigts s’enfoncer dans le velours du fauteuil.
« Drago, dit-elle, avec plus d'insistance cette fois. Tu n'as pas à faire ça. »
Cela attire son attention, et ses yeux gris se posent dans les siens.
« Tu ne sais pas de quoi tu parles, siffle-t-il.
« Si, et je veux t'aider Drago, c'est tout ce que je veux faire. »
Il secoue la tête.
« Tu ne sais rien, Pansy, grogne-t-il.
–Drago, s'il te plaît, dit-elle en se penchant en avant. On peut aller voir Dum-
–Tu dois arrêter de t'en mêler, siffle-t-il en se penchant également en avant. J'ai essayé de te tenir à l'écart, de te garder en sécurité, mais tu n’as pas voulu arrêter.
–Ce n’est pas toi, insiste-t-elle.
–C'est toi qui m'a dit comment je devais lui obéir toute cette année, qui m'a encouragé, et maintenant ça ? gronde-t-il. »
Elle tréssaille. Il a raison.
« Je n’ai jamais voulu que cela arrive, je n’ai jamais voulu ça.
–Tu ne sais rien, dit-il sèchement. »
Elle peut voir d'autres élèves les regarder.
Il fait un mouvement pour se lever.
« Je t'aime, dit-elle désespérément en se levant elle aussi. »
Elle ne l'aime pas, mais elle a tellement besoin qu'il reste dans cette pièce qu'elle est prête à dire ou à faire n'importe quoi à ce stade. Elle sait dans son sang que si elle le laisse sortir de cette pièce, quelque chose de grave va se produire. Qu'est-ce qu'un mensonge en plus de tous ceux qu'elle a déjà racontés ?
« Si tu m'aimes, alors tu me laisseras partir. »
Le regard dans ses yeux semble mort, et elle a tellement, tellement peur.
« Attends, dit-elle en attrapant son bras. »
Il fait un pas en arrière pour se mettre hors de sa portée et regarde au loin, à travers la pièce.
« Je te l'ai dit, Pansy, dit-il en haussant la voix. C'est fini entre nous. Arrête d'essayer de me faire changer d'avis. Tu as l'air désespérée, et c'est pathétique, putain. »
Il prononce ces trois dernières phrases d’une voix forte, et elle réalise qu'elles ne sont pas vraiment pour elle. Il se retourne et sort de la pièce.
Quand elle revient à elle, elle se rend compte que toute la salle commune la regarde fixement. Deux filles de quatrième année ont rapproché leurs têtes, chuchotant entre elles. Blaise a l'air choqué, ce qui est très rare, et Theodore Nott arbore une expression confuse. Tracey et Millicent ont la même expression d'horreur sur le visage.
Elle n'a pas le temps de penser à la raison pour laquelle il l'a humiliée, ou à la façon dont il a dit « j’ai essayé de te garder en sécurité ».
Elle ignore Tracey et Millicent qui commencent à se lever de leurs chaises et se dépêche de sortir de la salle commune. Elle n'a pas le temps d'aller voir Potter, elle doit aller voir Dumbledore lui-même.
Mais lorsqu'elle arrive devant sa porte, la gargouille l'informe que Dumbledore est sorti. Elle a envie de crier par frustration. Elle tourne sur elle-même et réfléchit. Elle va devoir aller voir Rogue et prier pour que Dumbledore ait raison. D'après le message de Potter, elle pense qu’il est probablement sorti ou distrait quelque part.
Elle arrive au bureau du professeur Rogue et frappe à la porte.
« Professeur Rogue ! Professeur Rogue ! »
La porte s'ouvre brusquement et elle manque de trébucher. Le professeur Rogue se tient dans l'embrasure de la porte, une expression colérique sur le visage.
« Quoi ? grogne-t-il.
–C'est une urgence, Drago est en train de faire quelque chose. S'il vous plaît, Professeur, vous devez l'arrêter ! »
Son expression change et il la regarde de ses yeux sombres et calculateurs.
« Très bien, Miss Parkinson. Savez-vous où il est allé ?
–Non, mais je pense que c’est quelque chose en rapport avec Dumbledore. »
Il tire sur sa cape.
« Retournez aux cachots, miss Parkinson. Je vais chercher Draco. Vous avez fait votre devoir. »
Elle hésite un instant.
« Maintenant ! dit-il d'un ton sec. Il n’ait plus temps de jouer aux héros inutiles et stupides, et vous le savez. »
Elle le sait. Une fois que le professeur Rogue est hors de vue, elle envoie un message sur le gallion: « drago parti ».
Elle se réfugie ensuite dans le dortoir des filles, mais quand elle arrive là-bas, elle ne peut s'empêcher de faire les cent pas en pressant ses mains pour essayer de les faire s’arrêter de trembler.
« Qu’est-ce que tu fais ? demande Daphné en émergeant de la salle de bain.
–Rien, dit Pansy en continuant de faire les cent pas devant son lit, puis en s'y effondrant la tête la première. »
Elle pousse un petit cri dans son couvre-lit.
Elle sent le lit s’affaisser à côté d’elle lorsque Daphné s’y assoit.
« Pansy. S’il te plait. »
Pansy ne répond pas, enfonçant son visage plus profondément dans le tissu. Elle aimerait pouvoir disparaître de cette temporalité. Elle ne peut pas le dire à Daphné. Elle ne peut pas sauver Drago. Elle ne peut rien faire.
« Est-ce que c’est à propos de Drago ? demande Daphné. Blaise a raconté qu’il t’a crié dessus tout à l’heure dans la salle commune. »
Pansy relève un peu la tête.
« Oui. Non. »
Elle se retourne et se couvre le visage de ses mains.
« Je ne peux pas te le dire, je suis désolée, Daphné, mais je ne peux pas. »
Pansy peut sentir Daphné s’allonger près d’elle.
« C’est un Mangemort, n’est-ce pas ? chuchote-t-elle.
–Oui, dit Pansy. »
Ça n'a pas d'importance si elle le lui dit - Drago a passé son début d’année à laisser entendre qu'il était un Mangemort dans toute la salle commune. C'est tout le reste qui va lui attirer des ennuis.
Daphne ne dit rien pendant une longue minute. Pansy essaie d'imaginer ce qui se passe en ce moment, mais elle n'arrive pas à rassembler les pièces du puzzle. Dumbledore et Potter sont-ils ensemble à l'extérieur du château ? Et si c'est le cas, comment Drago va-t-il tuer Dumbledore ou Potter ? Ou bien Drago sait-il que Dumbledore est parti et essaie-t-il de faire autre chose ou de tuer quelqu'un d'autre ? Comment le professeur Rogue le retrouvera-t-il ?
Pansy laisse ses mains tomber de son visage et tourne la tête pour regarder Daphné.
« Daphne ? J'ai besoin que tu me distraies. N'importe quoi. Je t'en supplie, s'il te plaît. »
Elle peut voir Daphné la jauger du regard.
« D'accord. »
Elle se lève du lit et fouille dans son sac.
« Si tu es vraiment sérieuse, tu peux relire mon devoir de sortilèges. Cherche juste des fautes de grammaire ou d’autres trucs du genre. »
Elle lui sort également une plume.
« Tiens. »
Pansy la prend à contrecœur. Elle se force à commencer à lire les mots sur la page, même si, dans son état troublé, ils ressemblent un peu au langage des êtres de l’eau. Daphne disparaît, puis réapparaît cinq minutes plus tard. Elle présente une pile de papiers à Pansy.
« Ce sont ceux de Tracey et Millicent et ceux d'une fille de cinquième année avec qui elles étaient. Elles disent que tu es la meilleure, au fait.
–Bien. Merci. »
Les minutes passent très lentement. Chaque fois que son esprit se met à vagabonder ou qu'elle commence à regarder par les fenêtres, elle force ses yeux à revenir sur la page. Tu ne peux rien faire, se dit-elle. Tu ne peux pas. Elle a toujours été une piètre duelliste, et c'est un miracle qu'elle soit acceptée en Défense contre les forces du mal niveau ASPICS.
Lorsqu'elle arrive à la fin de toutes les rédactions et qu'elle les rend à Daphné, il s'est écoulé presque une heure depuis qu'elle est allée voir Rogue. Tu ne peux rien faire, se répète-t-elle, mais les mots sont plus faibles à présent. Elle ne peut pas s'en empêcher. Elle doit voir ce qui se passe.
« Il faut que j’aille faire quelque chose, Daphné. Ne me suis pas - je te promets que tout ira bien. »
Elle ne donne pas à Daphné une chance de vraiment répondre. Quand elle est à l'extérieur de la salle commune, elle s'arrête, réfléchissant. Où serait-elle, si elle était Draco ? Elle ressent une pointe de désespoir. Elle n'en a aucune idée.
Un couple qu'elle ne reconnaît pas s'approche de l'entrée des cachots.
« Est-ce que vous avez vu quelque chose d'étrange ce soir ? demande-t-elle quelque peu impoliment. »
Ils se regardent.
« On voulait aller à la tour d'astronomie, dit la fille en rougissant légèrement. Mais il y avait beaucoup de bruit, alors on a dû aller près du lac.
–La Tour d'Astronomie ! "Merci, crie-t-elle par-dessus son épaule au couple ahuri en commençant à courir dans le couloir. »
La distance entre la Tour d'Astronomie et les cachots ne lui a jamais semblé aussi interminable.
Il fait nuit à la tour quand elle y arrive, avec seulement le clair de lune et les étoiles pour éclairer les murs de pierre. Elle s'attendait à un duel ou à des cris, mais c'est calme. En plissant les yeux, elle peut voir la silhouette d'une personne près de la base de la tour. Elle s'approche doucement - elle est toujours sous le sortilège de désillusion, mais le moindre bruit pourrait la trahir.
À quelques mètres, elle reconnaît les cheveux noirs en désordre qui ne peuvent appartenir qu'à une seule personne. Il est agenouillé devant une forme étrange.
« Potter, siffle-t-elle. »
Elle se retire le sortilège et fait quelques pas en sa direction, avant de voir ce qu'il y a devant lui.
C’est Dumbledore.
Il repose là, étendu, et si elle ne voyait pas l'angle bizarre que forment ses bras, elle pourrait penser qu'il est juste en train de dormir. Mais ensuite, elle remarque que son chapeau est de travers et que ses vêtements sont déchirés. Il a dû être assommé, et elle ne comprend pas pourquoi Potter est agenouillé là, sans même bouger - il faut qu'ils aillent voir Madame Pomfresh, il faut qu'ils le disent à quelqu'un…
Elle ne peut pas laisser l'autre possibilité pénétrer dans son esprit. Dumbledore est l'un des plus grands sorciers que le monde des sorciers connaisse. L'histoire de la façon dont il a tué Grindelwald fait partie des légendes. Il était déjà célèbre avant sa naissance. L'idée que quelqu'un puisse l'abattre, le faire tomber de cette façon, est impensable.
Mais elle voit alors que ses lunettes ne sont presque plus sur son nez aquilin, et d'une certaine manière, c'est ce détail qui lui retourne l'estomac, c'est ce qui lui fait penser que peut-être...
Elle trébuche sur les derniers pas.
« Potter, dit-elle. »
Il ne lève pas les yeux, il les garde rivés sur Dumbledore. Il est plus pâle qu'elle ne l'a jamais vu.
« Potter. »
Elle s'agenouille à côté de lui. Il ne répond toujours pas. Elle se penche plus près de lui et lui touche l'épaule. Elle prie sur tout ce qu'on lui a appris dans son enfance pour que ce ne soit pas vrai...
« Harry. Harry. »
Il tourne finalement la tête, comme s'il se réveillait d'un rêve.
« Pansy. »
Il y a tellement de douleur dans ses yeux qu'elle en a le souffle coupé, et c'est la confirmation qu'elle craignait.
Dumbledore est parti.