
Observations
Échange de Fluides
Chapitre 3 : Observations
Poudlard était comme d'habitude, mais quelque chose semblait différent cette année et ce n'était pas seulement le fait qu'Hermione soit désormais en cours d'ASPIC. Ou peut-être que tout était dans sa tête, peut-être que c'était elle qui était différente.
Snape enseignait la Défense Contre les Forces du Mal cette année. Cela semblait étrangement approprié compte tenu de la façon dont elle ressentait sa magie masculine, bouillonnante sous sa peau. Ses sorts étaient un peu plus tranchants, un peu plus vicieux qu'avant.
L'étudiante resta en arrière après la première leçon, demandant aux autres d'aller, sans l'attendre, en Sortilèges. Le professeur Flitwick était indulgent, du moins avec elle, même si elle devait arriver quelques minutes en retard.
"Professeur ?"
Il vocalisa un bref son en guise de réponse, prit un essai et commença à faire des gestes pour le noter. Il avait certainement perfectionné l'art d'ignorer soigneusement les personnes auxquelles il ne voulait pas faire attention.
S'abstenant à peine de taper du pied d'agacement, elle expira, compta à rebours à partir de dix et fonça.
"Pourquoi puis-je ressentir votre magie et vos émotions ?"
Il s'immobilisa alors, ne levant toujours pas les yeux, mais elle put sentir la pointe d'inquiétude et de préoccupation. C'était réel, alors. C'était vraiment ses émotions et il savait pourquoi.
Ses yeux rencontrèrent enfin les siens, son regard noir ne trahissant rien.
"Miss Granger. Ce n'est ni le moment ni le lieu."
Griffonnant quelque chose sur une note, il la lui tendit, sans baguette.
"Les deuxièmes années arriveront bientôt."
Hochant la tête en réponse, elle rangea la note dans son livre et se dirigea vers la salle de cours de Sortilèges.
C'est réel c'est réel c'est réel, son esprit ne cessa de lui répéter en boucle. Elle entendit à peine les paroles du professeur Flitwick et ne put pas se concentrer avant que la moitié du cours ne soit passée. Elle dut se maîtriser lorsqu'ils arrivèrent à la partie pratique, après avoir incinéré un balai par erreur au lieu de le faire danser.
La note la convoquait à son bureau plus tard dans la nuit et elle se débarrassa des autres en disant qu'elle devait aller à la bibliothèque pour un livre d'Arithmancie. C'était étrange de se rendre au bureau qu'Ombrage avait utilisé l'année dernière. Il avait cependant enlevé tout le rose, probablement avec un apriori extrême, pensa-t-elle, et maintenant cela semblait presque être une salle normale avec seulement quelques images horribles sur les murs pour effrayer les premières années.
La pièce était cependant actuellement vide. Il y avait un morceau de parchemin sur le bureau. Hermione le ramassa, mais il était également vierge. Sur un pressentiment, elle lui lança un Revelio complexe.
Mon bureau habituel. Vous avez cinq minutes.
« Enfoiré », marmonna-t-elle dans sa barbe, commençant à marcher très rapidement pour arriver aux cachots à temps, pas de course dans les couloirs, Miss Granger, admonesta sa préfète intérieure. D'une main sur la balustrade de l'escalier, elle essaya de projeter son urgence au château, demandant son aide. Il était plus bienveillant qu'espiègle aujourd'hui et les escaliers s'alignèrent pour la faire descendre rapidement au niveau des donjons.
Elle y parvint avec une demi-minute d'avance et frappa à la porte. Il se tenait devant le bureau, immobile comme une statue, baguette sortie.
Un mouvement de sa baguette ferma la porte derrière elle et Hermione put sentir les couches de protections s'installer, faisant bourdonner sa peau.
"Qu'est-ce que vous savez ?"
Il était impassible comme toujours.
Elle ne devait pas être surprise par son attitude abrupte, pas après cinq ans de son tutorat.
"Euh… Je peux ressentir vos émotions, et je pense que j'ai un peu de votre magie mélangée à la mienne. Je n'ai aucune idée du pourquoi. Monsieur."
Elle omit avec tact de mentionner son irritation croissante avec ses amis.
"En avez-vous parlé à quelqu'un ?"
Elle secoua la tête.
"J'ai un cahier, j'ai commencé à cartographier ce que je ressentais pour en voir les schémas. Je n'en ai parlé à personne. Le cahier est protégé. Monsieur."
Il se pinça l'arête du nez avec deux doigts, les yeux fermés. Ses émotions étaient partout. La peur était dominante mais il y avait tellement d'autres émotions qu'elle n'arrivait pas à leur donner un sens. Il avait l'air étrangement calme pour quelqu'un qui ressentait tant de choses, pensa-t-elle. Était-il toujours comme ça ?
Ses yeux s'ouvrirent brusquement, cherchant les siens.
"Vous pouvez sentir mes émotions maintenant ?"
Hermione hocha la tête.
"Peur, autre chose... Inquiétude ?"
Le professeur soupira.
"Vous devez apprendre l'Occlumencie, Miss Granger. Je ne vois pas d'autre moyen. C'est malheureux mais les effets devraient s'estomper avec le temps. En fait, j'aurais supposé qu'ils avaient déjà disparu. J'aurai besoin d'un Serment de Baguette de votre part, de ne dire à qui que ce soit ce que vous êtes sur le point d'apprendre."
Elle le fit, sa magie – et la sienne, apparemment – s'enroulant autour d'elle, le serment s'installant dans sa peau en un clin d'œil.
Il se déplaça sur le côté du bureau et tapa quelques briques. Elles s'écartèrent pour révéler un couloir sombre. Il ne la regarda pas pour voir si elle le suivait, alors bien sûr, elle devait se démener pour rattraper son retard. Un geste de la main de Snape illumina les appliques murales.
Le couloir était plus long qu'il n'y paraissait, ou peut-être que la magie y était impliquée. Certaines des dimensions ne correspondaient pas, de toute façon. Plissant les yeux pour garder le malaise à distance, elle se précipita après ses longues enjambées jusqu'à ce qu'il s'arrête devant une autre porte et se tourne pour lui faire face, levant un sourcil.
"Pas un mot, écrit, parlé, pensé, mimé ou signé à qui que ce soit, compris ? Je n'ai jamais invité un élève ici auparavant."
Bien sûr, elle hocha la tête, se mordant la lèvre d'anticipation. Le professeur l'invitait-il vraiment dans ses appartements personnels ?
D'un geste de l'homme, la porte s'ouvrit, puis un autre mouvement fit s'allumer les lumières. Ils se retrouvèrent dans un salon assez grand.
La pièce n'était pas grand-chose. Il y avait une table à manger en bois sombre avec deux chaises, qui était chargée de journaux et de cahiers de Potions, ainsi qu'un recoin qui semblait contenir une petite kitchenette. Il y avait également un fauteuil en velours vert foncé usé et un canapé en cuir noir à trois places devant une cheminée. Rien d'extraordinaire ou d'élaboré, mais avec cet air bien usé d'un espace qui convient à son utilisateur.
Avec hésitation, Hermione se dirigea vers le canapé, car la table semblait être un lieu de travail en cours et le fauteuil paraissait trop intime, d'une certaine manière. Elle se sentit nerveuse, ou peut-être était-ce lui, mais rien ne le trahissait dans son expression stoïque habituelle. Quand elle se tourna pour s'asseoir, elle remarqua enfin les étagères de livres qui couvraient tout le mur près de la porte, du sol au plafond. Elle couina de surprise, sans le vouloir, ayant vraiment hâte d'aller les inspecter. Une flambée de fierté repoussa les sentiments de nervosité. Ce ressenti était totalement celui de Snape, au moins. Il devait trouver irritant et angoissants de l'inviter ici autant que de l'accepter, réalisa-t-elle soudainement.
"Thé ?"
La jeune femme hocha la tête. Il jeta de la poudre de cheminette dans la cheminée et appela les cuisines avant de sceller l'âtre afin qu'il n'accepte pas les appels. Un elfe transplana rapidement pour leur livrer un service à thé avec deux tasses et des sablés. Snape versa d'un coup de baguette, ajoutant un trait de lait à la sienne juste comme elle l'aimait, et s'installa dans le fauteuil avec sa tasse.
Avait-il observé ses habitudes de thé, au fil des ans ? En y réfléchissant, elle savait comment Snape prenait son thé. Avec du lait, comme elle, mais occasionnellement avec du sucre quand le pli entre ses sourcils était plus profond que d'habitude. Partager des repas dans la même salle pendant cinq ans avait dû marquer les esprits, après tout.
"Merci Monsieur."
Elle sirota son thé et essaya de s'abstenir de poser des questions, récitant les douze utilisations du sang de Dragon dans son esprit pour empêcher ses pensées de s'emballer dès qu'elles apparaissaient.
Après avoir vidé la moitié de sa tasse, il commença enfin à parler.
"Miss Granger. Vous avez été grièvement blessée lors de cette cascade insensée au Ministère. Vous en avez assez fait, vous le savez ?"
Elle hocha la tête.
"Je m'abstiendrai de dire quelque chose de désobligeant sur l'intelligence de Potter, cette fois, compte tenu du résultat. Vous avez failli mourir, Miss Granger. Vous l'auriez fait, si Poppy n'avait pas eu le bon sens de réclamer mon aide."
Il se pencha en avant, les coudes sur les genoux, les paumes jointes près de son menton.
"Cette blessure que vous avez eue… J'en ai déjà vu comme ça avant, et ça tue généralement en moins d'une heure."
"J'ai réussi à lancer un sort de Silence sur Dolohov avant qu'il ne m'attrape."
Il hocha lentement la tête. "Ceci expliquerait cela. Vous souvenez-vous de quoi que ce soit concernant le sort ?"
Elle secoua la tête. "Ginny a dit que c'était une lumière violette mais je ne sais pas, Monsieur. Comment est-ce lié à ce qui se passe avec ma magie, si je peux me permettre ?"
Le Serpentard se pencha en arrière, les lèvres pincées de mécontentement. Puis il prit une profonde inspiration, se calmant. Elle put pratiquement sentir son esprit se concentrer, probablement parce qu'elle se trouvait dans un cadre aussi intime sans aucune autre distraction.
"J'ai lancé tous les contre-sorts, préparé plusieurs potions pour vous, et Poppy a fait tout ce qu'elle pouvait pour vous soigner. Quand je suis revenu plus tard dans la nuit, il était évident que ce ne serait pas suffisant. Vous étiez mourante, Miss Granger."
Il leva la main et invoqua sans baguette un livre, silencieusement, sans le regarder.
"Vous êtes Née-Moldue. Vous connaissez sûrement les transfusions sanguines. Savez-vous pourquoi elles ne sont pas pratiquées dans le monde magique ?"
Son esprit commença à s'emballer, essayant de se souvenir d'étranges extraits de discussions mélangés à ce qu'elle avait appris de ses parents. Les transfusions sanguines étaient monnaie courante, banales. Pourquoi les sorciers ne les feraient-ils pas ?
"Je ne peux pas le dire, Monsieur."
L'homme lui tendit le livre. Il était petit et semblait bien utilisé mais pas ancien. "Du Sang Et de la Magie", en était le simple titre. Il croisa ses mains, posant ses coudes sur ses genoux, pendant qu'elle le regardait. Il n'y avait pas d'index et elle ne pouvait pas commencer à le lire pendant qu'il parlait encore, alors elle le mit sur ses genoux.
"Comme vous l'avez peut-être deviné, je vous ai transféré une partie de mon sang, en espérant que cela vous donnerait l'avantage magique afin de combattre la malédiction de Dolohov. Une potion de Régénération Sanguine n'aurait pas fait la même chose. Pouvez-vous comprendre pourquoi, Miss Granger ?"
Il lui avait donné les indices, elle en était sûre.
"La potion ne ferait que… amplifier les propriétés que mon sang possède déjà, Monsieur ? Et si cela n'avait aucun effet contre la malédiction, alors la potion de Régénération n'en aurait pas non plus."
Il hocha la tête, une fois.
"Un peu simplifié, mais c'est cela. Les groupes sanguins sont un autre facteur que je n'ai pas eu le temps de vérifier. Si cela n'avait pas fonctionné, vous seriez morte de toute façon, mais le mien est généralement compatible avec les autres. La transfusion vous a également donné de ma magie, et ma magie combat les malédictions des ténèbres depuis plus longtemps que vous ne vivez. Mélangée à la vôtre, elle pouvait se débarrasser de la malédiction."
Hermione considéra cette réponse. Cela avait du sens, de la même manière que la magie avait du sens, ce qui ne voulait pas dire grand-chose.
"Je suis O positif, Monsieur. Donc ça a marché parce que vous aviez déjà rencontré la malédiction ?"
"Pas tout à fait, mais ça a aidé. O positif, bien, comme moi. Malheureusement, cela donne aussi au receveur une certaine sensibilité aux émotions du donneur quand nous sommes suffisamment proches, et c'est le principal problème car apparemment l'Occlumancie ne réduit pas cette connexion au silence. Les effets devraient s'estomper avec le temps, mais jusque-là, j'ai besoin que vous appreniez l'Occlumancie. Personne ne doit connaître cette connexion. Ni le Directeur, ni vos amis, ni les Mangemorts qui essaieront de vous capturer dans les rues quand vous êtes en train d'acheter des bonbons et des cadeaux pour vos amis."
Elle frissonna. Pourquoi devait-il être si morbide ? Il ne plaisantait même pas, elle pouvait le dire.
"Le Directeur ne peut pas nous trouver ici ?"
Il secoua la tête.
"Pas dans mes quartiers, pas avec la Cheminette désactivée. Ne le regardez pas dans les yeux, c'est un Legilimens très accompli."
Son esprit recommença à tournoyer. Couches sur couches d'informations qui nécessitaient un examen attentif. Ses actions alors, son comportement maintenant, ce qu'elle avait déjà compris et ce qu'il ne dévoilait pas. Probablement beaucoup, compte tenu du sujet.
"Mais est-ce que je ne ressentirai pas encore vos émotions si j'apprends l'Occlumancie ?"
Il inclina légèrement la tête, déplaçant son regard vers la cheminée.
"Malheureusement, si mais au moins la connexion ne sera pas révélée si quelqu'un essaie de faire levier. Le concept est suffisamment étrange pour que personne ne le cherche dans votre esprit, mais si on tombe dessus…"
Hermione respira profondément. Cela avait du sens, et elle n'était jamais opposée à apprendre plus de magie. Elle pouvait sentir qu'il était sincère, ou du moins qu'il était profondément mal à l'aise avec la situation actuelle.
"Merci Monsieur."
Ses yeux se posèrent sur les siens et il avait presque l'air confus.
"Vous m'avez sauvé, au prix de grands risques personnels. Encore une fois. Merci. Je ferai tout ce que je peux pour garder vos secrets en sécurité, Monsieur."
Il hocha la tête, sèchement. Ils finirent leur thé, discutant d'un programme pour les leçons d'Occlumancie.
En partant, elle le félicita pour son poste de professeur de Défense, sentant sa surprise avant qu'il ne tapote sa baguette au-dessus de sa tête afin de la désillusionner pour sa randonnée jusqu'à la tour de Gryffondor.
La jeune femme veilla bien trop tard, lisant le livre qu'il lui avait prêté sous la lumière de sa baguette avec les rideaux tirés autour de son lit. C'était fascinant, avec encore un autre témoignage de l'étrangeté du monde magique par rapport à celui des Moldus.
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