
Chapter 2
J'étais là…
Où que soit ce « là ».
Je sentais mon torse se soulevait avec difficulté, une respiration après l'autre, lourdement. Une minuscule bataille pour survivre un souffle de plus. Juste de quoi espérer encore quelques secondes jusqu'à la prochaine respiration.
Derrière le bruit si violent de mon cœur dans mes oreilles, je percevais le bruit de l'eau qui tombe avec violence sur le sol.
Ou peut-être que je me persuadais les entendre alors que la pluie s'écrasait sur chaque parcelle de mon corps.
Pourtant, je ne frissonnais pas de froid, mon esprit n'était consacré qu'à respirer.
Une respiration après l'autre.
Cela n'avait d'autre sens qu'un profond instinct de survie qui était ancré en tout être vivant.
Encore.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
Il était là, un faible sourire arrogant sur le visage sans même le savoir, Tom traduisait de vieilles Runes trouvaient sur les murs d'une grotte en pleine Amazonie.
Cela ne faisait pas bien longtemps qu'il m'avait rejoint, mais déjà il était parvenu à me faire oublier quelques jours mon travail de négociateur afin de le suivre sur les traces d'anciens Sorciers.
Si c'était pour voir son visage à cet instant, alors je pouvais bien accepter de temps en temps de fuir mon quotidien.
Jamais je n'aurai crû le voir aussi détendu, heureux de partager son savoir avec moi, alors même que tout cela me dépassait complètement.
Seigneur des Ténèbres ?
Il avait raté sa vocation, il aurait dû être professeur ou chercheur.
Je dû retenir un rire quand le sois disant pire Mage Noir de tous les temps remerciait chaleureusement une Nymphe pour lui avoir donné la signification d'une Rune qui lui posait problème.
J'observais encore un instant la scène surréaliste, avant de replonger mon nez dans les papiers.
La vie était belle.
Encore et toujours, la seule chose qui me rattachait à la vie c'était ce geste, ce réflexe qui me semblait pourtant si difficile à présent.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
Parfois, parfois je me demandais pourquoi je souhaitais continuer à être négociateur.
Ce que l'on voyait dans les films, les séries, était si erroné.
Un négociateur ne parvient pas toujours à raisonner les « méchants ». Et les « méchants » avait généralement de très bonne raison pour agir de la sorte.
Désespérés de faire entendre leur voix, ils ne trouvaient plus que cette solution.
Je ne les excusais pas, mais je ne les blâmais pas non plus.
Qui sait comment on réagirait au pied du mur ?
Des fois je les comprenais, mais en même temps j'avais envie de crier quand je ne pouvais sauver des vies.
Je souhaitais secouer les militaires qui ne voyaient que la violence comme seule solution, alors même qu'ils ne faisaient que leur travail.
En même temps, je me souviens des visages soulagés des familles, des larmes de bonheurs ou de regrets.
Tout cela méritait les risques que je prenais, les images avec lesquelles je m'endormais parfois.
Tom disait que j'étais trop gentil.
Pourtant, il était bien le premier à me proposer son aide pour les négociations, ou même me lancer de puissantes protections. Je l'avais même vu faire une leçon aux Créatures sur comment me protéger sans que je ne le sache.
Croyait-il réellement que je ne reconnaissais pas des Runes quand j'en voyais ? Surtout quand elles se trouvaient sur la plupart de mes habits, bien que stratégiquement cachées dans les coutures ou motifs ?
Je m'étais sentis partir.
Définitivement.
Mais voilà que je vivais.
Inspiration.
Expiration…
Ex…
Insp…Inspiration.
Expiration.
Caché derrière un puissant sort de désillusion je regardais impuissant les militaires saccager notre chez nous.
Cinq ans envolées soudainement juste à cause de ses pourries de sorcier.
Cela ne leur avait pas suffi de nous suivre, de nous chercher eux même, de tenter de nous tendre des embuscades.
A présent nous étions déclarés comme des terroristes, des fous dangereux impliqués dans des trafics de femmes et d'enfants. Peu importait que l'on me connaisse en tant que négociateur. Peu importait que Tom fut vu à de nombreuses reprises pour aider lors de prise d'otage.
Nous étions maintenant plus que des ordures, des moins que rien, des personnes à abattre à vue.
Tom resserra son emprise sur mon bras, je vis des Tisseuses guetter de leur repaire au plafond, prêtent à venir prêter main forte dans le cas où le sort de désillusion lâchait.
Si je ne pouvais plus être négociateur pour la police, alors je le serai dans l'illégalité la plus totale.
Je pouvais le faire…
Contin…éternelleme…
Inspi..Inspiration…
Expi…ration…
In…
E…
J'avais mal, si mal.
J'avais comme l'impression que des milliers de petites aiguilles se faufilaient sous ma peau afin de toucher le moindre de mes nerfs.
La douleur était un supplice, pourquoi ?
J'entendais mes hurlements, mais je ne me sentais pas les pousser.
Je voulais fuir, fuir ses mains sur ma peau, fuir ses mots, fuir la plume qui gravaient dans ma peau d'innombrables signes.
On me parlait, on tentait de me rassurer, mais je ne sentais que cette plume qui marquait ma chair.
J'e..n ét…capa…
I…pir…
Ex…In..expi…
In…
Expiration !
Cinq années de fuites.
Des larmes, mais aussi de petit instant de bonheur.
Tout cela pour quoi ?
Mes parents étaient morts il y a deux ans des mains de ses maudits Sorcier Blanc.
J'avais cru toucher le fond, mais à présent je sais que ce n'était pas le cas.
Je voyais le sang couler des blessures de Tom sans pouvoir rien faire. Il hoquetait, je baignais dans son sang, mais je ne pouvais pas le sauver. Transpercé de part en part de trop nombreuses balles, c'était même un miracle qu'il ait su nous Transplaner.
Il agonisait, et je ne pouvais que pleurer.
Hystérique, tremblant, couvert de sang mais sans la moindre blessure, j'étais inutile.
-Ne me laisses pas Tom. S'il te plait, ne me laisse pas.
Je voyais du mouvement autour de moi, les Créatures apparaissaient une à une, certaines aussi blessées, elles avaient couvert notre retraite.
-Faites quelque chose. Comme avec moi, sauvez-le ! M'entendis-je supplier alors que je savais qu'il était trop tard.
-Nous ne pouvons rien Jessy. Je suis désolé.
Je ne sais pas qui me répondit.
Je m'en fichais un peu.
Je sentis la dernière expiration de Tom.
Je vis ses yeux si beau, semblables au sang dans lequel je baignais, se fermer.
Sans que les mots ne franchissent ses lèvres je compris qu'il me demandait pardon.
Pardon pour tout.
Mais je n'avais rien à lui pardonner.
Je hurlais le visage tourné vers le ciel.
Je hurlais ma colère, ma rage, ma tristesse.
Je ris, hystérique tout en sanglotant.
J'enfouis mon visage contre son corps sans vie.
Je ne pouvais que respirer l'odeur du sang et de la poudre.
Et, je pleurais.
Je pleurais encore et encore.
Si longtemps…
Je n'allais pas mourir.
Je refusais.
Je mis toute ma volonté à reprendre un rythme plus normal.
Je plongeais au plus profond de moi afin de trouver la force de continuer. Et si je devais me focaliser sur ce feu qui semblait brûler mes entrailles en tentant de fuir mon corps, je le ferais.
Tout pour me forcer à rester lucide, souffrir n'était rien si je pouvais vivre.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
Je m'installais contre le Serpent Arc-En-Ciel, il s'enroula autour de moi, resserrant ses anneaux à la limite de la douleur. Une façon de me faire savoir que j'étais toujours en vie, qu'il était là pour moi.
Je posé ma joue contre ses écailles, fermant les yeux.
Je l'entendis siffler une comptine, une vieille comme le monde parlant d'un Serpent désirant manger le soleil. Son sifflement résonnait dans tout son corps, m'emportant dans le pays des songes.
Il me faisait mal, si mal, il léchait ma peau avec violence, il s'insinuait en moi sans douceur.
Je le sentais parcourir chaque fibre de mon être, il était fou furieux.
Non, pas fou furieux, juste apeuré.
Chaque souffle que je manquais le rendait un peu plus agité.
Chaque profonde inspiration que je prenais le faisait ronronner de bonheur. Il roucoulait, m'encourager, il se resserrait sur moi, m'étouffait, mais m'offrait en même temps un second souffle.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
J'offris un petit bac d'eau à la Fée tremblante devant moi.
Exténuée, elle se laissa glisser dans celui-ci.
Autour de nous, tous s'activaient pour soigner les blesser, libérer les prisonniers, achever ceux trop endommagés par les expériences des Humains ou des Sorciers.
Jusqu'où iront-ils ?
Bientôt, nous étions en diapasons.
Lui, moi, cela n'existait plus.
Nous n'étions qu'un tout qui luttait pour survivre.
Une inspiration après l'autre, nous gagnions du terrain sur la mort.
Pas grand-chose, nous ne grappillions qu'une seconde de plus à souffrir, une seconde de plus à agoniser, une seconde de plus à espérer.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
-Arrêtes cette folie Potter. Que gagnes-tu à me pourchasser encore et encore ?
Tu as dévoilé l'existence du Monde Sorcier aux Moldus. Tu les as informés des faiblesses de tant de Créatures. Tu as même offert des Sorciers venant d'Azkaban à leurs scientifiques pour faire des recherches.
A quel moment est-ce pour le bien ?
-Nous avons besoin de savoir ce qui pousse un Sorcier à devenir mauvais.
Nous ne souhaitons pas une nouvelle Guerre.
-Pas une nouvelle Guerre ? Vous étiez en paix avant de vous décider à vouloir nous exterminer Tom et moi-même. Il n'y avait nul Guerre avant que tu ne veuilles supprimer toute trace de Créature de la planète.
-Vous parcouriez le Monde à la recherche de Magie Anciennes.
Nous avons compris votre petit manège. Sauver des Moldus pour les enrôler derrière.
Vous avez même réussi à retourner l'intégralité des Créatures contre les Sorciers.
-Tu vis dans le passé, tu ne vois que ce que tu désires voir. Tu refuses que les gens puissent changer, alors que tu n'es plus que l'ombre de toi-même.
Que deviendra le Monde Sorcier une fois que tu auras réussi à me tuer ? Une fois que les Créatures ne seront plus ?
Penses-tu réellement que les Moldus vous laisseront vivre parmi eux en connaissant votre existence ? Es-tu si stupide ?
-Ils ne vous traquent que grâce à notre aide. Nous pouvons à tout instant rompre tout contact avec eux et reprendre notre vie séparée.
-Pas avec ce qu'ils ont appris, pas avec les expériences que j'ai pu voir.
Potter, vous ne cohabiterez pas, vous ne pourrez plus vous cacher.
-Suffit, je vois que des négociations étaient une utopie. Je n'ai pas de temps à perdre avec des palabres.
-Négociations ? Tu ne désires que notre tête sur une pique.
-Nous nous verrons sur le champ de bataille Aniel.
Nous avions pris le rythme.
Ne pas se précipiter.
Doucement, mais surement.
Nous ne cherchions pas à vivre.
Notre seul but était la survie.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
-Ils se réunissent.
-Je sais.
-Ils savent où nous nous trouvons.
-Je sais.
-Demain…
-Demain est un autre jour.
Ne veux-tu pas regarder se coucher de soleil avec moi ? J'ai l'impression de ne pas l'avoir fait depuis si longtemps.
Sans un mot le Serpent Arc-En-Ciel posa sa tête à mes côtés.
-Tu as raison, c'est un beau coucher de soleil.
-N'est-ce pas ?
Demain…
Si nous voyons demain, alors nous penseront à autre chose.
Juste, nous continuons, car nous étions là à respirer.
Lentement, mais surement.
Nous étions là, présent encore pour la prochaine inspiration.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
Le ciel était gris.
Les nuages bas.
Il se mit à pleuvoir.
La pluie continuait à tomber sur nous.
Imperturbables face à notre combat.
Mais nous nous en fichions.
Inspiration.
Expiration.
Inspiration.
Expiration.
Le charme nous cachant du monde extérieur s'effondra soudainement.
Les deux camps se toisèrent.
Nous étions clairement en infériorité numériques. Chassés, exterminé, rat de laboratoires, nous n'étions plus nombreux.
Mais allions nous abandonner ?
Non, nous avions une fierté à défendre.
Nous vendrons chèrement notre peau.
Survire ?
Ce n'était plus suffisant.
Nous vivrons.