
La soirée de Slughorn
Ce soir-là, quelques heures après les essais de Quidditch, la Salle Commune de Serpentard était étrangement silencieuse. On n’entendait que les plumes gratter. Le canapé en cuir noir était monopolisé par Tom, avec Abraxas Malefoy, Ayumi Hashimoto, Amyas Lestrange et Killian Dolohov. D’autres de son petit cercle était installé par terre. C’était un groupe moins nombreux que celui qu’il avait remarqué le lendemain de son arrivée, mais Harry était ébahit, triste et déçu en même temps, de voir qu’il y avait des années assez jeunes se faisant endoctriner. De là où était le survivant, il n’entendait pas ce que Riddle racontait, mais il semblait captiver tout le monde de sa voix envoûtante. Soudain, Tom leva les yeux et croisa son regard un bref instant. Celui-qui-a-survécu n’y vit que de la surprise et de la curiosité avant que celui-ci ne baisse la tête vers un ces camarades. Le futur mage noir avait remarqué qu’il avait observé son groupe, ce n’était pas bon. Quand Jedusor lui avait souhaité la bienvenue dans l’équipe de Quidditch de Serpentard en tant qu’attrapeur, et quand Harry lui avait serré main, il avait eu cette étrange sensation de signer un pacte avec le diable. Soupirant, il reprit son essai de potion. Puisque Dantalian Selwyn avait revendiqué un fauteuil de velours vert foncé près de la cheminée, Harry se voyait donc dans l’obligation d’être par terre sur ses genoux, profitant la douce chaleur de l’âtre, s’appuyant sur la table basse pour gribouiller avec sa plume sur un parchemin jaunit. En gros, quand les rois étaient là, ceux qui n’avaient pas de pouvoir dans la maison en était réduit à s’assoir sur le sol inconfortable. Une façon de te dire que tu n’étais rien, une des dures lois de Serpentard. Azazel Prince était en face de lui le regardant froidement.
_ Fais attention, lui dit-il simplement.
Harry leva un sourcil. L’Elu avait apprit qu’à Serpentard tout pouvait être sous-entendu et menaçant. Ce n’était pas seulement de la paranoïa ou de la méfiance, mais la réalité. Il fallait faire attention à ces mots et il fallait marcher sur des œufs tout le temps. On était très loin de la franchise de Gryffondor, non à Serpentard on menaçait sans menacer, on avouait ses méfaits sans les avouer et on faisait sans le faire. C’était pourquoi Harry se demandait si ce n’était pas menace.
_ Je veux dire, Tom n’aime pas les fouineurs, expliqua-t-il devant son expression se disant qu’effectivement ses propos auraient pus porter à confusion.
_ Je ne faisais que regarder, protesta Harry.
_ Eh bien ne regarde pas à l’avenir, ajouta Azazel d’un ton froid et sec. Donne-moi ton essais, je vais le corriger. Ton niveau en potion est déplorable.
_ Je sais, merci, rétorqua Harry d’un ton mordant en lui tendant son parchemin.
Azazel ne cessait de le rabaisser, même s’il trouvait qu’il progressait déjà en potion. C’était désagréable. Ce n’était pas ce qu’on appelait un ami. Comme un véritable Serpentard, ces propos sur Tom pouvait être interprété de deux façons. La première une menace, la deuxième une mise en garde contre le futur mage noir. Il n’avait fait que regarder le petit groupe de Tom ce n’était pas non plus la mort. Non, mais Harry devait bien reconnaître qu’il était curieux. Il aurait crût que le Seigneur des Ténèbres s’entourait de son cercle intime ou ses fidèles dans la Salle Commune et non pas d’élèves qui n’avaient rien à voir avec ça, qui sont des premières, deuxièmes ou troisièmes année ou encore des filles qui étaient clairement là pour ses beaux yeux. Que pouvait-il bien dire? Comment arrivait-il à capter les gens comme cela? Même si la personnalité de Tom le laissait présager, Dumbledore n’avait jamais réellement parlé de cet aspect-là. Cela rendait la version plus jeune de Voldemort extrêmement dangereuse. Harry le voyait, il avait un pouvoir énorme sur les gens et sur la maison Serpentard. Il aurait aimé être un rat pour écouter ce que Jedusor disait. Il trouvait cela fascinant.
_ Il faut que tu refasses ton essai, critiqua l’héritier des Prince en lui rendant son parchemin remplie de notes et raturé, le passage sur le mélange des racines d’harpagocitum avec les écailles de dragon en poudre ça ne va pas c’est un mélange explosif. Mais bien sûr bien dosé avec de la digital et des griffes de Sombrals ça pourrait faire un poison intéressant. En tout cas, tu ne dois pas le mentionner dans ton devoir, mais si tu veux creuser la question je te conseille le livre Mille et un poisons d’Aradia Mills, ou Potions de contrôle de Stan Wells.
En entendant les titres, Harry savait que c’étaient des potions de magie noire et il n’irait jamais voir ça. Celles-là semblaient mériter leurs titres de magie noire.
_ Merci, se contenta-t-il de répondre en reprenant son devoir.
_ Je t’ai mis les titres sur ta copie, demande à Slughorn une autorisation pour la réserve, dit-il en se levant.
_ Où vas-tu? J’ai besoin de toi pour discuter de certains points, s’étonna le survivant.
_ Débrouilles-toi je t’ai déjà bien mâché le travail. Je vais m’assoir avec le groupe de Tom, répondit-il d’un sourire malicieux.
_ Quoi, s’exclama Harry.
_ J’y vais de temps en temps, Tom est d’accord, répondit-il avec désinvolture. Il faut dire qu’avec son groupe là, ça m’a donné envie. Pas toi Cleeford?
Harry l’observa s’assoir aux pieds de Tom qui fit un horrible sourire triomphal. Le garçon-qui-a-survécu avait une lueur d’envie dans le regard. Il aurait aimé suivre Azazel pour savoir ce que disait Jedusor. Si seulement il avait sa cape d’invisibilité. Il secoua la tête pour chasser ses idées.
Soudain, juste à côté d’eux, une fille de Serpentard monta sur la table basse, écrasa de ses bottes en peau de dragon coûteuses son devoir, qu’Harry retira à la hâte, et se mit à crier en brandissant un journal: « GRINDELWALD A PRIT LYON EN FRANCE, IL SE RAPPORCHE. BIENTÔT IL DÉLIVRERA LA GRANDE-BRETAGNE POUR LE PLUS GRAND BIEN ! GLOIRE A GRINDELWALD ! GLOIRE A GRINDELWALD ! »
L’acclamation à la gloire de Grindelwald fut suivie par quelques élèves de Serpentard au grand dégoût d’Harry. La fille responsable de ce vacarme descendit à toute allure de la table basse et partie vers son dortoir, mais elle fut désarmée et immobilisée par un Tom victorieux.
_ C’est encore toi Clémentia Lestrange, articula-t-il froidement ce qui fit taire tout le monde. Qu’as-tu à dire pour ta défense?
Toute la Salle Commune retint son souffle. Le groupe de Tom avait encerclé la jeune fille de Serpentard. Jedusor faisait les cent pas comme un prédateur en faisant courir ses longs doigts blanchâtres le long de sa baguette magique.
_ Clémentia Lestrange, elle est complément folle. C’est habituel chez elle, mais ce n’est pas la seule à Poudlard à crier son adoration pour Grindelwald. Ils sont nombreux au château, lui murmura à sa grande surprise Dantalian Selwyn, certains pourraient être des espions, fais gaffe. Elle est une cousine éloignée d’Amyas Lestrange, elle vient d’une branche des Lestrange qui est en France et qui soutient activement Grindelwald.
Harry hocha la tête dans un mélange subtile d’excitation et peur, les yeux braqués sur la jeune Sang-Pur. Il savait que Grindelwald sévissait à l’époque, mais il n’avait aucune idée que la situation puisse être aussi grave et complexe. Le mage noir pouvait possiblement avoir des adeptes à Poudlard. A cette époque, il ne pouvait faire confiance à personne.
_ Je n’ai rien à dire pour ma défense parce que je soutiens Grindelwald, cria-t-elle avec une lueur de fanatisme dans les yeux, il vous fera voir la lumière pour le plus grand bien !
Tom braqua sa baguette sur elle en souriant. Il était impressionné par la façon dont Gellert Grindelwald arrivait à créer le fanatisme chez ses fidèles et supporters. Un jour, c’était lui que les gens admireront et craindront à la fois. Si le mage noir voulait ravager la Grande-Bretagne, il le combattrait. Il n’y avait pas la place pour deux Seigneurs des Ténèbres.
_ Humhum, se racla-t-il la gorge en le coupant, elle est en quatrième année c’est à moi de m’en occuper Tom.
_ Dantalian, s’exclama le mage noir d’un ton glacé.
Ils se confrontèrent du regard pendant plusieurs minutes. La tension était palpable. Ils se dévisagèrent avec mépris, se jaugeant l’un l’autre se demandant avec un soupçon de sadisme lequel allait céder en premier. Puis, à la surprise de tous, Tom éclata d’un rire froid en rangeant sa baguette.
_ En es-tu capable? interrogea-t-il glacial.
_ Bien sûr, répondit vivement Dantalian en fronçant les sourcils.
_ Prouves-le, ordonna Jedusor d’une voix impérieuse et aigüe. Ne me déçois pas.
Un frisson parcouru Harry. Le ton était tellement proche du Voldemort qu’il connaissait…La Salle Commune de Serpentard était mortellement silencieuse.
_ Tout d’abord, commença Dantalian d’une voix autoritaire, tout ce qui se passe dans la Salle Commune de Serpentard doit rester dans la Salle Commune de Serpentard, compris?
La foula hocha la tête comme des automates.
_ Voici ta punition pour avoir distillé l’idéologie mortifère du mage noir Gellert Grindelwald, prononça-t-il avec un dégoût non dissimulé.
Il lui lança un sort qui la suspendit dans les airs par la cheville tête en bas, comme le Levicorpus non-verbal. Puis, il bougea sa baguette, le corps de Clémentia Lestrange se déplaça sur un fil invisible parcourant, tête en bas, l’intégralité de la Salle Commune de plus en plus vite. De retour sur ses pieds, à terre, elle vomit. Les élèves de Serpentard éclatèrent de rire se délectant du spectacle.
_ Impero ! cria Dantalian les yeux sombres.
Clémentia Lestrange se mit à quatre pattes en léchant le sol chantant à tue-tête: « Grindelwald l’attardé, Grindelwald le dérangé, l’assassin de sorciers, il ravage des villages pour le PLUS GRAND BIEN, mais ce n’est pas grave puisqu’il tue pour le Bien, Grindelwald l’attardé, Grindelwald le dérangé… ».
Toute la Salle Commune était morte de rire. Mais la plaisanterie allait beaucoup trop loin, utiliser un Impardonnable sur une élève, lancé par un gamin qui n’avait que treize ans. A quel point Tom avait corrompu les plus jeunes avec la magie noire? Il ne pouvait pas laisser faire ça, il fallait qu’Harry intervienne. Mais tout le monde trouvait cela normal ici, se fit-il la réflexion. C’était une hystérique, fan de Grindelwald, et en plus une Lestrange comme Bellatrix. Il était partagé. Il trouvait le sort fascinant. Avoir le pouvoir de faire faire ce qu’on voulait…S’il seulement il pouvait lancer ce sortilège à Bellatrix. Si c’était une mangemort, la sauverait-il? Mais il ne pouvait pas laisser cette fille de quatorze ans comme ça, n’est-ce pas? Avant même qu’il est eu le temps de bouger, il sentit une main puissante se refermer douloureusement sur son avant-bras.
_ Tu ne bougeras pas Cleeford, murmura Tom d’un ton glacial à son oreille. Tu vas regarder la punition bien gentiment, comme les autres.
Harry fut inondé par une vague de terreur pure comme il n’en avait encore pas ressentit depuis son arrivée ici. Elle fut encore plus renforcée quand il aperçu les yeux rouges de Jedusor, pendant plus d’une minute, avant de reprendre leurs teintes habituelles. Comment savait-il? Et comment avait-il réussi à intervenir au moment précis où il allait faire quelque chose? C’était terrifiant. Il était tellement tétanisé de peur qu’il resta cloué sur place pendant tout l’Imperium, comme il le lui avait ordonné. Le garçon à la cicatrice avait l’impression d’être lâche, mais il ne pouvait pas se dégager de l’emprise du futur Voldemort. A présent, elle disait des obscénités sur Grindelwald, rampant sur le sol sans aucune dignité. Il voulait l’aider, mais il avait du mal à se sentir désolé parce qu’elle soutenait le mage noir allemand. Simplement, la culpabilité le tiraillait. Tom lâcha enfin son bras douloureux et alla féliciter Dantalian pour sa punition psychologique parfois plus efficace que la douleur physique. Tu ne m’as pas déçu, avait-il terminé avec une voix veloutée. L’héritier de Selwyn et roi de Serpentard était resté stoïque face à l’éloge, mais ses yeux le trahissaient en brillant de reconnaissance. L’intégralité des élèves présant observaient Dantalian Selwyn et Tom Jedusor avec admiration. Je suis tombé chez les fous, pensa amèrement le survivant remarquant Clémentia Lestrange pleurant dans un coin, brisée. Il ne fallut qu’un ordre de Tom pour que la foule se disperse. La plupart des Serpentards regagnèrent leurs dortoirs, Harry retourna à sa place initiale près de la cheminée.
_ Comment tu m’as trouvé?
Harry se tourna vers l’origine de la voix et y découvrir Dantalian Selwyn assit par terre à côté de lui, le visage faiblement éclairé par la lumière des flammes vacillantes. Le garçon à la cicatrice bougea inconfortablement, et s’éloigna. Le roi de Serpentard leva des sourcils interrogateurs.
_ Comment tu m’as trouvé, répéta Harry d’une voix basse et froide ne lui correspondant pas, tu me poses la question après que tu ais torturé cette fille.
_ Je ne l’ai pas torturé, je lui ai lancé un Imperium, dit-il d’un ton sec incroyablement calme.
_ Un Impardonnable, franchement.
_ Et qu’est-ce que j’aurai put faire d’autre Cleeford, hein? Un sort de magie noire qui l’aurait blessé n’aurait servit à rien, elle aurait continué à crier son adoration pour Grindelwald. Non, elle avait besoin d’être atteinte psychologiquement, d’être brisée pour éviter de répandre la propagande parce que c’est ça le problème.
_ Tu aurais simplement pu l’emmener à Dumbledore ou à Dippet, répliqua Harry irrité qu’on justifie si facilement l’utilisation d’un Impardonnable.
Dantalian éclata d’un rire triste, sans chaleur.
_ Dumbledore m’aurait rit au nez en disant qu’on ne peut pas renvoyer chaque enfant de Poudlard qui fait du prosélytisme pour Grindelwald, parce qu’il y en a trop. Dans le meilleur des cas, elle aurait eu quelques heures de retenue et alors? Ça n’aurait rien changé. Dippet se serait rangé à l’avis de Dumbledore comme toujours et parce qu’il ne prend pas assez au sérieux la menace que peut représenter Grindelwald. Non, il n’y a que nous qui pouvons changer ça, c’est quelque chose qu’on doit faire entre nous et personne ne peux nous aider.
_ Mais est-ce que ça justifiait…
_ Absolument, coupa Dantalian en lui tendant le journal qu’avait laissé Clémentia Lestrange, lit l’article, tu verras. La situation est grave.
Harry soupira de lassitude et se saisit du Sorcerer du Soir. En première page on pouvait voir une allée commerçante sorcière en flamme, avec des gens qui courraient, paniqués, la une titrait: «Premier raid de Grindelwald en France. Le début de la fin? » Il s’enfonça dans la lecture.
« Vers 20h ce soir, les hommes de Grindelwald ont attaqué la ville de Lyon en France. Tout à commencé lorsque les moldus ont entendus plusieurs déflagrations dans la ville. Le gouvernement moldu français affirme que c’est un bombardement des alliés, alors que plusieurs destructions ont été enregistré dans la ville. On estime que 80 moldus seraient morts au cours de ses attaques magiques. Pendant ce temps, les hommes de Grindelwald attaquent le quartier des sorciers détruisant les maisons et massacrant les opposants à son idéologie. L’Allée des Merveilles Enchantées, l’équivalent du Chemin de Travers à Lyon a elle aussi été attaqué par les hommes de Grindelwald criant sa devise "POUR LE PLUS GRAND BIEN" en français, plusieurs sorts de magie noire ont mis le feu aux magasins créant en quelques minutes la panique et tuant plusieurs dizaines de sorciers. Il n’y a pas de doutes, la situation est grave. "Gellert Grindelwald se rapproche dangereusement de le Grande-Bretagne", nous explique un membre du Département des Relations Magiques Internationales voulant rester anonyme pour des raisons évidentes, "il arrive à endoctriner et fanatiser les foules dans toutes les couches de la population. Malheureusement, il faut s’attendre à ce qu’il ai réussi à infiltrer notre société et notre politique. C’est sa spécialité prendre les pays sans violence grâce à ses supporters et éliminer les opposants." Jusqu’où Gellert Grindelwald ira? Gagnera-t-il cette guerre côté sorcier? Le Ministère de la Magie anglais se dit très inquiet et va renforcer la sécurité sur le territoire. »
Le survivant reposa le journal, choqué. La situation était atroce, c’était bien pire que ce qu’il avait apprit dans ses livres d’Histoire de la Magie. Il était vingt-trois heures, le journal était sorti à vingt-et-une-heures, l’information était toute fraîche et visiblement Clémentia Lestrange était au courant. A quel point est-elle impliquée?
_ Tu comprends maintenant Cleeford? questionna Dantalian. Ça justifie ce que j’ai fait. A moins que tu sois pour Grindelwald?
_ Bien sûr que non, réagit-il au quart de tour.
_ Alors?
_ Même si je n’approuve pas cette méthode, dit Harry dégoûté par ce qu’il disait, je comprends pourquoi tu l’as fait.
_ La fin justifie les moyens, expliqua le roi Serpentard, contre Grindelwald, on ne peut pas se permettre d’être faible. Il peut être partout, même ton camarade peut être un espion de Grindelwald, Tom m’a appris ça et il a raison.
Jedusor semblait très opposé à Grindelwald, cela l’étonnait parce que franchement ils se ressemblaient beaucoup. Harry ne savait plus quoi penser. Devait-il fustiger quelqu’un qui luttait contre le mage noir allemand parce que ses méthodes étaient discutables? Si le monde des sorciers était déjà divisé à cette époque, ce n’était peut-être pas la peine de le diviser encore plus.
_ D’accord, je suis désolé je t’ai jugé un peu trop durement, s’excusa-t-il d’une voix fatiguée.
_ J’accepte tes excuses. Mais il faut que tu comprennes quelque chose Cleeford. Nous menons une guerre contre Grindelwald, nous les Serpentards sommes peut-être les seuls à pouvoir faire ce qu’il faut pour l’arrêter. Dans cette guerre, il n’y a pas de Bien ou de Mal, il n’y a que la victoire qui compte.
Harry médita sur ses paroles, pensif, fixant les flammes de l’âtre d’un regard vide. Il était venu ici pour se rapprocher de Tom et le tuer et maintenant, il était embarqué en tant que Sang-Pur dans une nouvelle guerre qui n’était pas la sienne. Il savait que Grindelwald avait fait pas mal de dégâts en Europe de l’Est, mais il ne savait pas qu’il en avait fait en France ou en Angleterre. L’époque où Tom Jedusor avait vécu en tant qu’élève était bien plus compliqué qu’il ne l’aurait cru.
_ J’entends ce que tu dis, prononça Harry lasse, sortant de sa contemplation en baillant, mais je crois que je vais aller me coucher.
Dantalian lui fit un signe de tête, et le garçon à la cicatrice alla à son dortoir. Il avait découvert que ses trois colocataires étaient des membres du cercle de Tom, à son grand désarroi. Il s’agissait d’Iberis Travers, de Julius Avery et de Bastianus Rookwood. Ils ne lui adressaient pratiquement pas la parole. En parlant avec le roi Dantalian, il avait vu un petit groupe quitter la Salle Commune en compagnie de Tom et bien sûr, son dortoir était vide. Soupirant, il ferma ses rideaux et s’endormit presque aussitôt. Chaque jour passé à Serpentard, était un jour où ses convictions morales étaient tout le temps remises en question. L’Elu se sentait lessivé et avait de moins en moins d’énergie pour lutter.
Etonnement, Harry se réveilla à cinq-heure-et-demie du matin, ce qui était beaucoup trop tôt. Il avait fait un cauchemar où il avait revu le cimetière à Godric’s Hollow et Bellatrix lui laissant un arrière-goût amère dans la bouche. Après avoir récupéré ses lunettes à tâtons sur sa table de nuit, il prit le gros volume Histoire de la Magie Irlandaise au XXe siècle et descendit dans la Salle Commune.
_ Bonjour, dit Tom d’une voix agréable assit sur le canapé, seul, un livre à la main. Tu es bien matinale Cleeford.
_ Bonjour, répondit le survivant par politesse.
Jedusor lui désigna un fauteuil en velours vert foncé. Le jeune Potter fronça les sourcils.
_ Tu es sûr? demanda-t-il incertain.
_ Il n’y a personne, se contenta de répondre Tom retournant à sa lecture.
Il hocha la tête et s’assit. Il devait bien reconnaitre que c’était confortable. Harry se plongea dans Histoire de la Magie Irlandaise au XXe siècle de Concordius Howard pendant que Riddle semblait absorber par S’abandonner à l’Obscurité d’Ignacio Chapman. Et ils lurent pendant plus d’une heure dans un silence total, lorsque le garçon à la cicatrice tomba sur un passage intéressant.
Il fut très surpris d’apprendre que l’Irlande était très avancée sur l’Angleterre et l’Ecosse à propos des sorciers nés-moldus. Les Sang-Purs avaient toujours une place dominante, mais les nés-moldus avaient leurs places. Ils ne subissaient pas de discriminations, ils étaient bien représentés dans les postes importants du mondes magiques et ils étaient écoutés. A tel point qu’en 1925, Dylan Stonewell devient le premier Ministre de la Magie né-moldu d’Irlande et de Grande-Bretagne. Alors que normalement cela aurait dût prévoir une période prospère, ce ne fut pas le cas. Le Ministre de la Magie irlandais a voté loi après loi réduisant chaque jour la liberté des sorciers. Il s’attaquait aux finances des Sang-Mêlés et des Sang-Purs à la branche irlandaise de Gringotts voulant mettre fin aux grandes fortunes, il détruisait chaque jour les traditions sorcières, il a même interdit le Quidditch par décret. Jusqu’au moment où de nombreuses familles de Sang-Purs de l’obscurité décidèrent d’entrer en résistance pour défendre leurs manoirs familiaux menacés de nationalisations, leurs patrimoines, leurs traditions, mais aussi l’héritage qu’ils donneront à leurs enfants. Une simple lutte pacifique évoluant rapidement en une véritable guerre civile. En 1930, Grindelwald se mêla au conflit en apportant tout son soutient aux familles de Sang-Purs de l’obscurité contre le Ministre de la Magie dictatorial qui dirigeait désormais par la peur. L’histoire s’interrompait en faisant une liste de plus deux cent familles de Sang-Purs. On pouvait y retrouver certains noms pas inconnus comme McMillan, Lovegood, Carrow, Croupton, Potter, Fawley, Wilkes ou encore Jugson. Bien sûr, Cleeford y était également ainsi que Towen. Avec Grindelwald, le combat fut violent, raids sur les villages moldus, attaques des quartiers sorciers et du Ministère de la Magie. Dylan Stonewell répliqua par la force en envoyant des tueurs, ainsi on apprit qu’en 1931, la jeune héritière de la famille Fawley, âgée de seize ans, fut assassinée d’un Avada Kedavra en pleine rue dans le Dublin moldu. Cet événement particulier mit le feu aux poudres. On apprit par la suite, que de nombreux Sang-Purs sont morts dans des conditions troublantes: empoisonnements, accidents de balai…Jusqu’au moment où un des manoirs de la famille Cleeford a été incendié en 1934. Une véritable tragédie, un feu magique monumental qui tua Ysolte et Fenius Cleeford, laissant un enfant orphelin derrière eux Harry Cleeford porté disparu, symbole de la résistance des Sang-Pur de l’obscurité en Irlande.
Le survivant resta songeur, en relisant de temps à autre certains passages. Le fait que ce soit un né-moldu qui est devenue un véritable dictateur, ce n’était pas quelque chose que l’on abordait à Poudlard dans les années 90. Pourtant, cette histoire dramatique de l’Irlande n’était pas si vielle que ça. Comme si cela était tout simplement absent des livres d’histoire. Était-ce la vrai raison pour laquelle Malefoy, Nott et les autres étaient puriste du sang? Encore une fois, dans cette nouvelle chronologie Harry Potter alias Harry Cleeford était spécial. Il était à l’opposé de sa propre personne, d’une famille sombre. Comment allait-il s’habituer à cela?
_ Cleeford, je voulais te dire que je suis désolé si t’ai effrayé hier, interrompit le cours de ses pensées une voix doucereuse.
Le jeune homme à la cicatrice leva ses yeux vers lui. Tom l’observait avec curiosité. Cela le rendit méfiant.
_ Ce n’est rien, dit-il désinvolte en faisant un geste de la main, tu m’as empêché d’agir comme un Gryffondor.
_ C’est vrai, avoua le mage noir d’un ton agréable. Dis-moi Cleeford, as-tu compris pourquoi?
Il y eu un long silence pendant lequel Harry essaya de cacher son dégoût, sans grand succès malheureusement.
_ Le roi Selwyn m’a expliqué le pourquoi et je comprends bien sûr, répondit celui-qui-a-survécu.
_ Mais? insista le futur Voldemort impérieusement.
Il y avait un son particulier dans le mot simple de Tom. Quelque chose qui semblait vouloir forcer le voyageur temporel à parler.
_ Je ne peux pas cautionner l’utilisation d’un Impardonnable, répondit-il malgré lui légèrement confus.
_ C’est bizarre que tu dises ça, déclara Tom avec un léger sourire sadique, j’ai pourtant sentit de la magie noire sur ta baguette. Si je ne te connaissais pas mieux, j’aurai dit que cela ressemblait à de l’énergie résiduelle du Doloris. Mais j’ai dû me tromper. N’est-ce pas Cleeford?
Harry blêmit. Comment savait-il? Il baissa les yeux.
Le sourire de Jedusor s’agrandit. Il le savait. Enfin, disons, que quand il avait eu la baguette de Cleeford entre les mains il avait sentit une légère énergie du Doloris. Il venait d’avoir la confirmation qu’il ne s’était pas trompé. C’était assez faible. Cela devait être le premier Doloris du garçon, qui pouvait, après réflexion, expliquer bien des choses sur son comportement. Un Impardonnable n’était pas anodin, et le Doloris, comme la plupart des sorts de magie noire, amplifiait la rage et la colère. Il ne le savait que trop bien, les arts sombres s’infiltraient si profondément dans l’esprit qu’ils pouvaient influencer les pensées, les idées, les décisions et même créer des hallucinations. Mais heureusement, on pouvait remettre de l’ordre dans ses pensées avec l’Occlumancie. Ceci dit, il était presque persuadé que le garçon avait lancé un autre sort de magie noire, mais il n’avait pas réussi à détecter de quel maléfice il s’agissait. Si seulement il pouvait amener le gamin à faire quelques sortilèges de magie noire en plus…
_ Probablement, dit Harry se ressaisissant trop tard.
_ Bien sûr, continua le mage noir d’un air victorieux et sardonique. Dis-moi es-tu au courant des dernières nouvelles sur Grindelwald?
_ Son attaque à Lyon? interrogea le survivant, voyant l’air étonné de Jedusor il poursuivit: je l’ai lu dans le journal que tenait Clémentia Lestrange hier Le Sorcerer du Soir.
_ Hum, et qu’en as-tu pensé?
Harry resta septique à la question. Est-il vraiment en train de parler d’un grand mage noir avec Voldemort? Que cherchait-il? Une fois de plus il n’arrivait pas à comprendre la logique qui se cachait derrière ce sourire malsain et sa voix douce.
_ Que c’était barbare, se contenta de répondre l’Elu.
Une fois de plus, un mince sourire se dessina sur les lèvres de Tom, agaçant Harry. Il aimerait tellement lui faire ravaler ce sourire.
_ Je suis d’accord avec toi. Développe, ordonna-t-il.
Le survivant leva un sourcil étonné. Très bien, s’il le lançait sur le sujet, il avait des choses à dire.
_ Eh bien, cela résume assez bien la situation. Il a attaqué les moldus, les quartiers sorciers et même leur équivalent du Chemin de Traverse. Chaque fois il a fait des morts et en plus il justifie ça avec son sloguant nauséabond Pour le plus grand Bien.
_ A ton avis pourquoi a-t-il fait cela?
_ Pour accroître son influence, répondit aussitôt Harry comme s’il était emporté. Il veut gouverner à la fois les moldus et les sorciers.
_ C’est là qu’il fait une erreur, commenta le jeune Seigneur des Ténèbres. Grindelwald veut révéler aux moldus notre existence pour mieux les contrôler, mais ça ne peut rien apporter de bon. Les moldus sont des êtres inférieurs, ils nous ont brûlés quand ils savaient pour nous, et pas plus tard que l’année dernière ils ont envoyé des bombes nucléaires sur le Japon qui ont fait des milliers de morts. Je ne vais pas pleurer pour eux, quant aux sorciers, aucun sang de Sang-Pur ne devrait couler, même si cela est pour le plus grand Bien. N’es-tu pas d’accord Cleeford?
Harry fronça les sourcils. Que devait-il répondre? Devait-il faire semblant d’être d’accord avec lui pour ne pas se le mettre à dos? Était-ce l’occasion rêvé pour se rapprocher de lui, mieux l’atteindre et le tuer? Mais, pouvait-il à ce point renier ses valeurs?
_ Oui bien sûr, approuva-t-il en se détestant pour ses paroles. Si le but était de prendre la France il aurait pu utiliser des moyens plus sournois vue qu’il se vente de prendre des pays entiers sans violence.
Une lueur étrange brilla dans les yeux de Tom.
_ Très perspicace Cleeford, félicita Jedusor d’un ton aussi doux que du miel, ce n’était pas pour prendre la France, mais c’était pour montrer à ses opposants ce qu’ils risquaient et pour montrer au Ministère de la Magie français qu’il pouvait attaquer Paris à tout moment s’ils ne se soumettaient pas.
_ Intelligent, commenta Harry impressionné malgré lui par l’ingéniosité de Grindelwald et par l’analyse de Tom.
_ En Angleterre il va sûrement tester une approche plus discrète pour prendre le pouvoir, et c’est pourquoi on ne peut pas le laisser faire. On ne veut pas de Grindelwald ici.
_ On, de qui parles-tu?
_ Moi et beaucoup de Sang-Pur de ce pays. J’ai aimé parler avec toi sur la politique sorcière Cleeford, dit Tom d’une voix douçâtre, même si nous n’avons pas réellement touché à l’essentiel, n’est-ce pas?
La question était dérangeante. Une fois de plus, Jedusor avait comprit qu’il avait délibérément changé de sujet. Il était trop intelligent pour son propre bien. Le survivant se contenta d’hocher la tête.
_ Tu devrais aller prendre le petit-déjeuner Cleeford, et reviens dans la Salle Commune après, conclu le futur mage noir.
_ Pourquoi?
_ Parce que je te l’ai ordonné, répondit-il sur le ton de l’évidence.
Il le détestait. Le voyageur temporel sortit de la Salle Commune d’une humeur massacrante. Il croisa le Baron Sanglant à qui il dit bonjour, même si celui-ci se laissait dériver dans les airs faisant semblant de somnoler. Le fantôme lui répondit d’un ton bourru, mais il n’avait plus engagé une conversation depuis le premier jour. Montant les marches quatre à quatre, arrivant au Grand Hall, il tomba presque né à né avec le quatuor familier de Poufsouffle.
_ Harry, comment vas-tu? interrogea Caelina d’une voix cristalline.
Le jeune homme à la cicatrice ne savait pas trop comment réagir. Les choses avaient été un peu tendu hier. Les deux garçons semblaient eux-aussi mal à l’aise, alors que les filles souriaient normalement.
_ Ça va, se contenta-t-il de dire. Et vous alors?
_ Après qu’on t’ai quitté hier on a eu un double cours de Forces du Mal avec Alderburry, c’était juste horrible, répondit Judith. Du coup, il a fallu que Ronan jette un sort de chatouille à un Gryffondor, Alderburry n’a pas apprécié et on est tous en retenue. On doit maîtriser le Protego pour lundi. Tu en septième année Harry, tu pourrais nous aider?
_ Je ne sais pas si…
_ Harry s’il te plait, dit-elle en le regardant avec des yeux de chiens battus.
L’Elu du monde sorcier avait apprit malgré lui, au cours de cette semaine, qu’il ne pouvait rien refuser à Judith Cooper, surtout quand elle prenait cet air-là. Elle était très belle avec ses yeux bleu clair et sa longue chevelure blonde vénitienne.
_ Euh d’accord, approuva-t-il, pas de problème.
_ Hum, se racla la gorge Caelina, je crois que Raj à quelque chose à te dire.
_ Je suis désolé, s’excusa-t-il d’un air contrit. Je pensais que tu étais comme nous, je ne pensais pas… Je ne voulais pas te blesser.
_ J’ai surréagi, avoua Harry embêté. C’est plutôt à moi de m’excuser, je, je ne sais pas pourquoi…
_ Parce que tu es Serpentard Harry, intervient Ronan d’un air de défît. C’est dans tes gênes. Tu n’es pas comme nous.
L’héritier Cleeford fronça les sourcils. Il n’aimait vraiment pas ce qu’il venait d’entendre de Ronan.
_ Qu’est-ce que c’est sensé vouloir dire? questionna-t-il sur un ton bien plus agressif qu’il ne l’avait voulu.
_ Rien, tempéra Caelina Bones, ce que Ronan voulait dire c’est que tu un Serpentard, mais ce n’est pas grave, tu es le bienvenue Harry. Nous sommes contents de t’avoir comme ami.
Le survivant sourit à la déclaration de la jeune brune. Il appartenait enfin à un groupe.
_ Merci, dit-il avec sincérité et émotion, rayonnant.
_ Alors, après le petit-déj à la bibliothèque? demanda Judith.
_ Non après le petit-déj je ne peux pas, répondit-il se souvenant de l’ordre de Tom.
_ Demain alors, conclu Caelina alors qu’ils se séparaient dans la Grande Salle pour aller à leurs tables respectives.
Ce matin-là, la Grande Salle était morne. Le ciel au-dessus des tables étaient parsemés de nuages gris et d’une fine pluie magique à l’image du crachin extérieur. Les bougies flottantes étaient éteintes. Les fantômes déambulaient sans leur joie coutumière. L’habituel tumulte était transformé en chuchotements incertains. La nouvelle de l’attaque de Grindelwald faisait la une de la Gazette du Sorcier et avait créée l’effroi dans la Grande Salle. Les visages étaient fermés et il y avait une certaine peur qui régnait. Dumbledore était curieusement absent et Dippet perdu dans ses pensées. Ce ne fut qu’une demi-heure plus tard que le groupe de Tom arriva à la table. Les Serpentards étaient encore choqués par ce qu’il s’était passé hier soir avec Clémentia Lestrange. Ils avaient en quelque sorte su avant tout le monde ce qu’il se passait. La situation était bien plus complexe que ce qu’Harry aurait cru. Il semblerait qu’il y avait des familles de Sang-Pur supportant Grindelwald à l’intérieur même de Poudlard. Les quatre maisons en avaient douloureusement conscience et regardaient leurs voisins avec suspicion. La une de la Gazette ce matin-là leurs avaient rappelés la triste vérité. Ils étaient en guerre et Grindelwald pouvait être partout.
Quand Harry arriva dans la Salle Commune il vit Tom lové dans le canapé avec une dizaine de personnes inhabituelles autour de lui. Il en reconnaissait certains. Ce n’était pas le cercle intime de Tom, n’est-ce pas?
_ Cleeford, lui dit Jedusor de sa voix lisse, je te présente l’équipe de Quidditch. Voici nos deux batteurs que tu connais déjà Erwan Rosier et Julius Dolohov, nos trois poursuiveurs Imogen Potter quatrième année, Abraxas Malefoy et Orion Black cinquième année, notre gardien Bastianus Rookwood troisième année et puis moi Tom Jedusor le capitaine. L’équipe, je vous présente le nouvel attrapeur Harry Cleeford. Faisons la fête!
A ces mots, des elfes de maison apparurent et installèrent des gâteaux apéritifs avec bière au beurre et wiskey pur feu. Harry devint nerveux en pensant que même à Gryffondor les fêtes surprises et interdites dans la Salle Commune étaient très rares. Il n’y avait que Fred et Georges qui tentaient occasionnellement le coup et encore il y avait toujours un élève pour les dénoncer à McGonagall, sauf après une victoire de Quidditch peut-être.
La matinée fut très décontractée, même le voyageur temporel bu un peu trop. Il était surpris que l’hériter de Serpentard approuve cela. Il le voyait même rire aux éclats avec ses camarades de Quidditch, un spectacle pour le moins déconcertant. Il voyait Riddle sous un nouveau jour. Une facette de sa personnalité que Dumbledore n’avait pas jugé bon de mentionner. Cette petite fête lui donna l’occasion de parler avec Imogen Potter, la seule fille de l’équipe dont les longs cheveux noirs indisciplinés rappelaient bien le trait caractéristique des Potter. Celle-ci évoqua évidemment le Quidditch disant qu’il y avait un Potter dans toutes les équipes à part Serdaigle. Quand il essaya d’en savoir plus sur sa lignée, elle resta évasive sur le sujet disant qu’elle venait d’une branche de la famille Potter éloignée considérée comme sorciers de l’obscurité.
_ Sa grand-mère est une Black, ajouta Orion, grand sourire, la désignant, c’est une cousine.
Orion Black, le père de Sirius supposait-il, lui souhaita très poliment la bienvenue. Puis, la conversation dérapa sur les Sang-de-Bourbe inférieurs aux Sang-Pur, Harry laissa dire sans intervenir, cela lui coûta beaucoup. Quand il commença à parler de traditions de Sang-Pur, des sièges du Magenmagot qu’il pouvait revendiquer, il s’aperçu vite qu’il n’y connaissait rien. C’est là qu’il appela toute l’équipe, Tom compris, à se réunir autour de lui.
_ Ne t’inquiète pas Cleeford, dit un des héritiers des Black, nous ne te laisserons pas tomber.
_ Merci, marmonna Harry se demandant si c’était une bonne chose.
_ Nous t’apprendrons tout ce que tu dois savoir, lança Abraxas avec un sourire éblouissant, n’est-ce pas Tom?
_ Bien sûr, cela va de soi, approuva-t-il de sa voix polit avec un léger sourire.
_ Nous veillerons à ce que tu fasses les bons choix, tu es un sorcier de l’obscurité Cleeford, tu nous appartiens, ajouta Erwan Rosier dans une discrète allusion à la conversation qu’ils avaient eu une semaine plus tôt.
Il y avait une lueur maniaque dans les yeux de Rosier. Harry blanchit. Dans quoi s’était-il embarqué en acceptant le poste dans l’équipe de Quidditch? Devait-il s’inquiéter?
La matinée passa très vite. L’après-midi, Harry reprit ses activités solitaires. Il était par terre dans la Salle Commune essayant de rattraper l’Arithmancie et les Rune Anciennes. Puis, avant même de s’en rende compte, le soir était déjà arrivé.
Tom arriva dans le dortoir pour venir chercher ses camarades de chambrées Iberis Travers, Julius Avery et Bastianus Rookwood, puis le détailla.
_ Tu ne peux pas y aller comme ça Cleeford, commenta-t-il froidement.
_ Mais ce n’est pas une soirée habillée, protesta Harry fronçant les sourcils.
_ Peut-être pas, mais pas négligée non plus. La cravate Cleeford.
_ Quoi?
Avec un léger coup de baguette de Jedusor sa cravate se réajusta et vira au vert foncé. Une autre secousse lissa les cheveux d’Harry en les faisant pousser un tout petit peu. Le survivant passa sa main dans ses cheveux pour constater qu’ils avaient complètement changés de substance. Il en resta comme deux ronds de flan, son nid noir de Potter indiscipliné était maintenant discipliné. Ce n’était pas ses cheveux.
_ Beaucoup mieux, commenta Tom avec ce léger sourire insupportable.
Il fit de même avec les autres, retouchant leurs couleurs de chaussures, lissant leurs robes d’école parce qu’il fallait être impeccable ou encore en mettant un sortilège faisant briller leurs chevalières de Sang-Pur. C’était ça, Tom Jedusor voulait tout contrôler jusqu’à leurs apparences. L’Elu n’aimait pas cela.
_ Nous sommes prêt à partir, déclara Riddle au bout d’un moment. Maintenant, vous vous tenez droit, vous êtes polis et vous ne faites pas honte à la maison de Serpentard. Cleeford, tiens-toi droit, réprimanda-t-il sévèrement comme s’il était un enfant.
_ Quoi, mais…, commença-t-il à protester.
_ Ne me défis pas, coupa-t-il d’une voix glaciale.
Harry ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit. Il y avait un scintillement cruel dans les yeux du jeune mage noir qui le dissuada. Le survivant détourna les yeux, et baissa la tête, soumis. Il se détestait pour cela, mais il n’avait pas la force de s’opposer à lui. Pas encore. Et, quelque part, c’était plus facile.
Le voyageur temporel suivit ses quatre comparses. Il s’arrêtèrent dans la Salle Commune pour prendre au passage Abraxas Malefoy, Killian Dolohov, Ayumi Hashimoto, Erwan Rosier, Amyas Lestrange, Alcandrus Nott et Azazel Prince. Puis, ils allèrent dans le couloir des cachots, plus loin que la Salle Commune. Ils s’enfoncèrent dans l’obscurité et prirent une petite allée montante qu’Harry n’avait jamais vu. Ils arrivèrent enfin devant un grand portrait. C’était un vieil homme, tout ridé avec une barbe blanche nouée dans le bas et de saisissant yeux verts émeraude. Il semblait regarder la petite foule d’un air amusé.
_ Tom, tu as amené toute ta petite troupe avec toi, dit la peinture intriguée.
_ Pas tout le monde, répondit-il.
Les yeux du portrait se braquèrent tout d’un coup sur Harry.
_ Je ne crois pas te connaitre jeune homme.
_ Je suis Harry Cleeford, de la très noble et très ancienne maison Cleeford, se présenta-t-il.
_ Hum, dit-il songeur, laisse-moi me présenter à mon tour, je suis le véritable chef de ta maison, moi, le grand Salazar Serpentard.
Le survivant écarquilla les yeux de surprise.
_ Bienvenue dans la Salle Communal, tu as l’autorisation de venir quand tu veux pour étudier, foie de Salazar Serpentard. Passez une bonne soirée jeunes gens.
Sur ce le portrait pivota sur la droite laissant un trou béant. Ils le traversèrent et atterrirent dans une énorme salle avec deux autres pièces en enfilade. De grands lustres en cristal ornaient les plafonds peint de peintures de différentes nuances de verts et de doré. D’immenses serpents s’enroulaient autour de colonnes monumentales qui semblaient soutenir le plafond. Un vaste parquet très bien entretenu en acajou paraissait s’étendre sur des kilomètres. De majestueuses statues en or agrémentaient ici et là l’espace. La salle était pleine à craquer. Des sorciers, tous en robes de sorciers s’étendaient à perte de vue. La rumeur des conversations, plus forte que jamais.
_ Magnifique, n’est-pas, murmura Tom.
_ Oui, avoua Harry impressionné, je n’avais pas idée qu’il existait une telle pièce à Poudlard.
_ Ces pièces ont été créés par Salazar Serpentard pour permettre aux étudiants de travailler et de se retrouver dans un cadre plus intime que la Salle Commune.
Le survivant n’avait jamais entendu parler d’une telle pièce à son époque. Était-elle abandonnée ou y avait-il des choses sur les Serpentards de son époque qu’il ne connaissait pas?
_ Impressionnant, le portrait de Salazar c’est un vrai? interrogea-t-il.
_ Oui, et il y en a d’autres.
_ Où?
_ Ah ça c’est un secret Cleeford, dit-il d’une voix velouté un léger sourire mystérieux flottant sur ses lèvres.
_ Cleeford vous avez pu venir, s’exclama Slughorn en se précipitant vers eux, Tom vous êtes là aussi.
_ Bien sûr professeur, répondit Riddle d’un sourire séduisant, je ne manquerai cela pour rien au monde.
Le professeur de potion regarda prudemment autour de lui, et tendit un petit flacon au liquide pourpre à l’Elu.
_ C’est votre potion de vision correctrice, buvez-là vite et virez-moi ces horribles lunettes, commenta le professeur.
Harry prit la fiole. Il hésita un instant. Une potion de magie noire. Devait-il? Ne devait-il pas? C’était gênant d’avoir les yeux de Jedusor et Slughorn braqués sur lui attendant qu’il la boive. Il ne pouvait décemment pas dire à Horace qu’il avait travaillé pour rien. Il enleva ses lunettes qu’il mit dans une poche de sa robe de sorcier, puis prit la décision. L’ancien Potter déboucha la bouteille en enlevant le bouchon de liège et bu la potion d’une traite.
Ses yeux se mirent à piquer horriblement et il pleura comme une madeleine. Cela dura bien dix minutes pendant lesquelles le professeur de potion lui dit que c’était normal. Puis, la douleur et les larmes s’estompèrent. Quand il releva son visage ruisselant d’eau, il vit parfaitement net. Harry sourit. Il n’aurait plus à porter de lunettes.
_ Merveilleux, s’exclama Slughorn remuant sa baguette magique pour sécher ses larmes. Il faut que je vous présente à un vampire Sanguini. Un vieil ami.
_ Non professeur, je…
_ Mais si, mais si, venez avec moi. Tom je reviendrai vers vous plus tard, je vous présenterai à la merveilleuse Elisa, elle a écrit un ouvrage méconnu sur les effets des quartiers de lune dans les rituels de magie noire. Je suis sûr qu’elle vous dédicacera son livre.
Harry passa la soirée à aller de personnes en personnes. Il y avait de tout. Employé du ministère, joueur de Quidditch, journaliste, écrivain à succès ou moins connu. Il était étonné de voir qu’il y avait aussi Raj et Ronan ainsi que plusieurs Gryffondors et des Poufsouffles. Il fallait bien reconnaitre que Slughorn faisait les choses en grand. Il était déjà une heure du matin, il était épuisé, et le professeur des potions le traîna jusqu’à une jeune femme châtain avec des yeux marrons d’une très grande beauté. Lorsque le professeur les laissa seul, elle lui tendit la main. Sang-Pur, pensa automatiquement Harry.
_ Bonsoir, je suis Amamélis Mulciber de la très noble et très ancienne maison Mulciber.
_ Bonsoir, Harry Cleeford de la très noble et très ancienne maison Cleeford. Slughorn n’a pas donné beaucoup de détails, il a dit que vous travaillez au ministère.
_ C’est ça je travaille au Département des Mystères. Il m’a dit que vous aviez du mal à trouver votre voix.
_ Oui, je voulais devenir Auror, mais…
_ Oh, ne me parlez pas des Aurors, coupa-t-elle. C’est un sale boulot, vous n’êtes pas considérés et vous vous faites traiter comme de la merde.
_ Vraiment? demanda Harry édifié.
_ Surtout qu’en ce moment ils ont à faire avec Grindelwald, les heures supp ne sont pas payés et le budget, eh bien le budget il diminue chaque année au Bureau des Aurors.
_ Je n’en avais aucune idée.
_ Croyez-moi, dit-elle sur le ton de la confidence, ne faites pas cette erreur.
_ Que faites-vous au Département des Mystères? interrogea-t-il curieux.
_ Je suis une spécialiste des artefacts sombres.
_ C’est-à-dire?
_ Eh bien, je suis une Mulciber je viens d’une famille de Sang-Pur de l’obscurité, et mon travail est de me charger de recenser les artefacts sombres. Bien sûr, si une de nos familles est en possession d’un de ces artefacts nous fermons les yeux, mais des familles très anciennes ont perdu certains objets au cours des siècles dans le monde moldu. Parfois ils réapparaissent dans une brocante ou dans un fait d’actualité. Mon travail est alors de récupérer l’objet pour que notre monde ne soit pas découvert côté moldu et le restituer à la famille. Il arrive parfois que la famille soit éteinte, dans ce cas il est stocké dans nos entrepôts du Département des Mystères et il est étudié. Parfois il arrive aussi que des artefacts sombres nouvellement créés soient introduit dans le monde moldu par pure malveillance.
L’héritier Cleeford ne pouvait s’empêcher de trouver cela passionnant.
_ Quand vous dites que vous faites de la recherche dessus…
_ Ah, mais je ne peux pas tout vous dire monsieur Cleeford, répondit-elle en souriant. Si vous êtes vraiment intéressé par l’aspect recherche vous devriez faire un complément d’étude.
_ Un complément d’étude?
_ Oui, une Académie après Poudlard.
_ Ça existe? demanda-t-il excité.
_ Oui, bien sûr, d’où sortez-vous? Ah oui c’est vrai, j’oubliais, hésita-t-elle quelques instants en le regardant droit dans les yeux, votre condition monsieur Cleeford. Pour intégrer une Académie après Poudlard, vous devez avoir la plupart de vos Aspic et au moins deux Optimals dans la spécialité que vous choisirez. Vous devez également avoir beaucoup d’argent, mais ce n’est pas un soucis pour nous, n’est-ce pas? Evidemment vous devez aussi avoir des recommandations de plusieurs de vos professeurs et de plusieurs professionnels. A ce propos Cleeford, je ne sais pas si vous savez que nous sommes parents?
_ Quoi? s’exclama-t-il choqué.
Non, non, non, pas possible. Pas avec ces Mulciber qui étaient mangemorts à son époque.
_ Parle moins fort, merlin que c’est vulgaire, dit-elle gênée en jetant un regard furtif autour d’elle. Ta grand-mère était Séraphina Mulciber. Nous sommes cousins.
_ Mais alors, un rapport avec Tertius Mulciber? questionna-t-il inquiet.
_ Plus ou moins, je suis également sa cousine, mais très éloignée, reconnu-t-elle. Vue que vos parents ne sont plus de ce monde je serais tout à fait dans mon droit de vous revendiquez.
_ Revendiquer, répéta Harry sans comprendre fronçant les sourcils.
_ Le droit de revendication est un doit chez les Sang-Pur pour adopter un proche qu’il soit éloigné ou non. La seule condition est qu’il est du sang de la famille qui veut le revendiquer.
_ Quoi, mais j’ai dix-sept ans, protesta-t-il n’appréciant pas le tour que prenait la conversation.
_ Oui vous avez dix-sept ans et aux yeux de la loi sorcière vous êtes majeure, mais chez les Sang-Pur vous êtes mineur jusqu’à vingt-deux ans. D’ailleurs vous ne pouvez récupérer vos sièges au Magenmagot qu’à vingt-deux ans ainsi que votre titre de Lord, vos coffres et votre fortune. Vous êtes encore un enfant Cleeford, laissez-moi prendre soin de vous, argumenta-t-elle en mettant une main compatissante sur son épaule.
Le contact était si doux, si réconfortant. En quelque sorte elle se proposait d’être le parent qu’il n’avait jamais eu. C’était très troublant. Mais une Mulciber quand même!
_ Non merci, répondit-il sèchement, je ne tiens pas à être revendiqué comme une vulgaire possession.
_ C’est comme ça chez les Sang-Pur, les enfants sont considérés comme des possessions.
_ Mais je ne suis pas un enfant, discuta-t-il véhémentement.
Elle eu un petit rire amusé.
_ Ce que tu peux être jeune Harry, dit-elle en lui ébouriffant les cheveux. Je peux t’appeler Harry?
_ Oui, soupira-t-il avec hésitation.
_ Ecoute tu n’as pas à t’inquiéter. De toute façon je ne suis même sûr de pouvoir obtenir l’autorisation auprès du ministère, répliqua-t-elle. Je vais me renseigner.
_ Je vous ai dit que je ne voulais pas…
_ Chut, fais-moi confiance? coupa-t-elle en serrant doucement son bras.
Harry se mit en colère. Non, il ne pouvait pas faire confiance à quelqu’un de la famille Mulciber. Il était venu dans cette époque pour tuer Tom Riddle avant qu’il ne devienne le Seigneur des Ténèbres, pas pour vivre la triste vie d’un Sang-Pur Harry Cleeford. Dans peu de temps, il aurait trouvé un moyen de le tuer et de se venger de la mort de ses parents, et tout cela n’aura plus aucune importance. Il n’avait pas de temps à perdre avec ces futilités. Il se dégagea violemment.
_ Je ne fais confiance à personne, rétorqua-t-il froidement.
_ Tu es bien Serpentard, se contente-t-elle de dire le visage indéchiffrable. Puisque nous en sommes là, penses à ce que tu pourras gagner. Mon compagnon Neptune Carrow et moi nous t’aimerons et nous te fournirons une famille, tu te feras des connections sociales dont tu manques cruellement sur le sol anglais, tu auras aussi plusieurs sièges vacants des Mulciber et des Carrow en plus de ceux des Cleeford au Magenmagot, sans parler des coffres dont tu hériteras.
Une lueur d’inquiétude feinte passa subrepticement dans ses yeux. Le survivant ne put s’empêcher de ressentir une immense joie. A part Sirius, personne ne s’était inquiété pour lui, bien sûr il y avait eu Dumbledore, mais là c’était quelqu’un qui voulait prendre soin de lui comme un parent. C’était étrange. Il y avait eu aussi les Weasley, Molly était formidable, bien sûr, cependant il pouvait sentir qu’elle ne le traitait pas comme ces enfants parce qu’il était le survivant. Et puis, elle s’attendait toujours à ce qu’il joue les garçons tristes et héroïques. Il ne s’était jamais donné la peine d’examiner les rites et traditions de Sang-Pur. Ron et lui en avaient conclus que ça n’en valait pas la peine. Pourtant, il était un Sang-Mêlé, son père était un Sang-Pur. Il ne connaissait presque rien des Potter, mais il savait que son grand-père s’était marié à une Black et qu’ils étaient vraiment versés dans les traditions Sang-Pur, son père avait mit fin à tout ça. Mais alors pourquoi les Malefoy ou même Andromeda ne l’avaient jamais revendiqué quand ses parents sont morts? Dumbledore encore. Le vieil homme avait gardé le secret et tout le monde croyait qu’il avait été adopté par une famille de sorciers de la lumière.
Si le voyageur temporel récapitulait, c’était lui qui avait le plus à gagner. Alors, où était le piège? Il avait l’impression que le véritable Harry Cleeford, s’il existait, accepterait sans hésiter, mais lui Harry Potter était méfiant. Enfin, tout cela n’aurait plus d’importance puisqu’il serait bientôt de retour à sa chronologie.
_ Je tombe de fatigue je dois y aller, esquiva-t-il la suite de la conversation.
_ Oui, bien sûr, je comprends. Je te tiens au courant.
Harry hocha la tête se disant que c’était tout tranché. Il traversa deux pièces bondées de monde et sortit dans le couloir par le tableau de Salazar Serpentard. Là, dans la demie-obscurité, il trouva un Serpentard de dos et un Gryffondor face à face.
_ Sale Sang-de-Bourbe, cria le Serpentard.
Le jeune Gryffondor pâlit et sortit sa baguette. Harry par réflexe porta également la main sur la poche intérieure de sa cape où était rangé sa baguette.
_ Ne te comportes pas comme un Gryffondor, retentit une voix derrière lui.
Le survivant fit volteface pour se retrouver né à né avec le portrait de Salazar Serpentard qui le regardait d’une manière incisive.
_ Je ne peux pas laisser ça se passer, déclara l’ancien sauveur du monde sorcier.
_ Et pourquoi pas? Tu n’es pas préfet, répondit-il avec des orbes sombres.
Un duel s’était engagé entre les deux congénères. Après un énième sort dévié par le Serpentard par un Protego, Harry n’y tenait plus.
_ Reste-là Cleeford, ordonna la voix sévère de Salazar.
_ Mais…
_ Il n’y a pas de mais, répliqua sèchement le portrait du vieux sorcier. Ce Serpentard aurait dû être plus discret je te l’accorde, mais tu ne vas pas trahir la maison et prendre la défense d’un Sang-de-Bourbe, n’est-ce pas?
Harry ne savait même pas pourquoi cela l’étonnait. Après tout il avait le grand Salazar Serpentard devant lui, l’ennemis juré des Sang-de-Bourbe. Trahir la maison, ses morts résonnaient étrangement à ses oreilles. Alors ça y était. Malgré tous ses efforts le moment était venu. Maintenant qu’il était à Serpentard il devait adhérer à cette idéologie horrible.
_ Que se passe-t-il ici? hurla la voix du professeur Alderburry qui interrompit le duel juste à temps alors qu’un sortilège de magie noire se dirigeait droit vers le Gryffondor.
_ Merde, murmura Harry.
_ Ne t’affole Cleeford, commenta le tableau de Serpentard, et n’oublis pas mon garçon, prends la défense de Serpentard ou sinon...
La voix menaçante du fondateur plana dans l’air. Harry comprenait très bien ce qu’il n’avait pas dit.
_ Professeur, commença le Gryffondor, c’est ce sale serpent qui a commencé. Il m’a traité de Sang-de-Bourbe.
_ Quoi, mais n’importe quoi, c’est lui qui a sortit sa baguette magique et qui a entamé le duel, cingla-t-il.
_ Sans doute pas sans raisons. Néanmoins, monsieur Samson, répliqua le professeur Alderburry d’une voix tranchante, ce que vous vous dites ne m’intéresse pas, en revanche se lancer dans un duel dans les couloirs est interdit. Quant à vous monsieur Cleeford, pourquoi ne pas avoir averti le professeur Slughorn?
Harry resta figé quelques instants. Ça ne lui était même pas venu à l’esprit. Au lieu d’agir comme un stupide Gryffondor, il aurait pu revenir à la fête et prévenir Slughorn. Ou même Riddle.
_ Je venais juste de sortir professeur, mentit-il à toute vitesse.
Le professeur ne semblait pas tellement convaincu par sa réponse.
_ Je vois. Peut-être pourriez-vous nous éclairer sur ce que vous avez vu?
Le survivant jeta un rapide coup d’œil au portrait de Salazar qui le regardait avec froideur et curiosité. Il avait un choix à faire.
_ Lorsque je suis sorti du portrait j’ai aperçu mes camarades de Gryffondor et de Serpentard se disputer. Le Gryffondor a soudainement sorti sa baguette et a commencé le duel. Mon camarade de Serpentard n’a fait que se défendre. J’allais intervenir quand vous êtes arrivés.
_ Et comme je l’ai dit monsieur Cleeford, ce n’était pas à vous d’intervenir, conclu le professeur Alderburry d’un ton acide. Au moment où le duel à commencer vous auriez dû chercher un professeur ou un préfet. Monsieur Samson, c’est visiblement à vous qu’il incombe cette situation désastreuse, je retire 250 points à Gryffondor pour duel dans les couloirs et deux semaines de retenue avec moi. Quant à vous monsieur Greengrass vous devriez éviter les conflits avec les autres maisons, retenue pour vous, samedi prochain à six heures, dans mon bureau.
L’élève de Serpentard blanchi.
_ A six heures samedi, répéta-t-il hagard.
_ Oui monsieur Greengrass, la prochaine fois vous y réfléchirez à deux fois avant de participer à un conflit le soir dans les couloirs. Bien, maintenant messieurs, si vous permettez, je dois voir Horace. Bonne nuit.
_ Bonne nuit professeur, saluèrent-ils en cœur.
Sur ces entrefaites le professeur Alderburry entra dans la salle par le tableau de Salazar Serpentard juste à côté d’Harry. Le Gryffondor partit sans demander son reste.
_ Tu as fait ce qu’il fallait, commenta le portrait du vieil homme qui l’observait avec inquiétude.
_ C’est juste que…, commença-t-il.
Le jeune sorcier ne savait pas s’il pouvait se confier à Serpentard. Il se sentait bizarre comme s’il avait trahi quelqu’un. Avait-il vraiment prit la défense d’un Serpentard qui avait insulté un né-moldu? C’était comme s’il avait défendu Malefoy face à Hermione. Est-ce que c’était ce que Serpentard faisait?
_ Juste que quoi?
_ Non, rien, répliqua-t-il en soupirant.
_ Tu as montré que tu étais loyal envers ta maison mon garçon, je ne vois pas ce que tu as à te reprocher. Il faut que tu saches un truc sur Serpentard. Il peut y avoir des conflits entre les membres de la maison, il peut y avoir des combats internes pour le pouvoir, mais à la minute où on sort de la Salle Commune, si l’un de nous est menacés ou attaqués c’est toute la maison qui est menacée ou attaquée. Tu comprends?
_ Oui, répondit Harry étonné par la ferveur dans les yeux de l’ancien tableau.
_ Tu donnes ta vie à Serpentard et si l’un deux est en difficulté tu lui viens en aide comme tu as fait ce soir. Ceux qui enfreigne cette règle, ne font pas long feu. Mais tu es un Serpentard de bout en bout Cleeford, et je ne doute pas que tu es assez malin et rusé pour voir où est ton intérêt. N’est-ce pas mon garçon?
Les yeux verts du fondateur luisaient dans l’obscurité et semblaient le transpercer du regard. Harry détourna les yeux. Ce que lui avait révélé le grand sorcier en face de lui, expliquait bien des choses. Contrairement à Gryffondor, Serpentard n’était pas juste un dortoir, c’était beaucoup plus que ça. C’était une sorte de secte dont il ne pouvait pas se sortir. Il s’aperçu qu’il avait jugé Malefoy et les autres un peu trop rapidement.
_ Bien sûr Salazar Serpentard, répondit-il.
_ Garçon intelligent, répliqua le tableau avec un sourire de contentement en triturant sa barbe. Tu devrais prendre congé mon garçon et si tu veux parler à ton fondateur revient quand tu veux.
Le voyageur temporel hocha la tête et prit la direction du dortoir. Mais alors qu’il était presque arrivé, il fut rattrapé par le jeune Serpentard qui avait insulté le Gryffondor plus tôt.
_ Je voulais te remercier d’avoir pris ma défense, entendit-il.
Le survivant fit volteface se tournant vers lui. Il avait du mal à camoufler tout le mépris qu’il ressentait à cet instant, pourtant il se força à sourire, à faire semblant.
_ C’était normal, répondit timidement le garçon à la cicatrice d’une voix qu’il n’espérait pas trop froide, lui tendant la main. Harry Cleeford, septième année.
_ Saphorien Greengrass, quatrième année, répondit-il en lui serrant la main. J’en parlerai à mon roi Dantalian et le bruit courra dans la Salle Commune.
_ Ce n’est pas la peine, rétorqua-t-il sèchement cette fois-ci, je n’aime pas l’attention.
Le garçon eu un petit rire.
_ Ce n’est pas un problème d’attention Cleeford, Serpentard tout entier se demandait si tu étais vraiment l’un d’entre nous. Tu vois contrairement aux premières années qui ont le temps de faire leurs preuves, toi tu viens d’arriver.
Harry médita sur ses paroles et ne dit rien de plus jusqu’à ce qu’ils pénètrent dans la Salle Commune. Epuisé, il regagna son dortoir après un rapide au revoir, se regardant dans la glace du cabinet de toilette. Ce qu’il vit le glaça. Il y avait un beau jeune homme aux yeux verts sans lunettes avec sa cicatrice, ses cheveux noirs parfaitement lisses plus long que d’habitude, une chevalière d’Héritier brillant de mille feu, une robe d’école aux couleurs de Serpentard impeccables sans plis et une cravate verte foncée bien ajustée. Harry Potter n’arrivait pas à se reconnaître dans ce reflet. C’était lui et en même temps pas lui. Il avait l’air d’un aristocrate, d’un Sang-Pur, avec cette grâce surnaturelle qui les caractérisaient si bien. Il n’était pas si différent de ses camarades de chambrée Iberis Travers, Julius Avery et Bastianus Rookwood. Un Serpentard comme un autre avec une haute ascendance. Ce n’était pas le Sang-Mêlé Harry Potter dans ce miroir. Mais alors qu’était-il devenu? Qui était-il? Harry Cleeford?