
Entre sang-purs
-Léwina, où as-tu mis les roses blanches ?
-Près de l’entrée, comme tu me l’avais demandé, mère, répond en soufflant l’adolescente.
Careen Malfoy était stressée et cela se voyait, et pour cause, aujourd’hui était le mariage de son premier enfant et seul fils : Lucius Malfoy. Ce dernier et sa future femme, Narcissa Black, se fréquentaient depuis plusieurs années maintenant. La première fois qu’il l’avait ramené à la maison, l’été de sa septième année, Careen Malfoy avait été tellement émue qu’elle avait cru pleurer. Il est vrai que pour conserver la pureté de leur sang, les deux familles avaient encouragé les enfants dans cette voix. Or, elle était persuadée que le mariage qui serait célébré ce soir ne serait pas seulement un mariage d’intérêts : Narcissa semblait vraiment apprécier son fils.
Careen et Léwina étaient arrivées plus tôt dans la journée afin d’aider aux préparatifs de la fête. Celle-ci prenait place dans une campagne tranquille où un rassemblement de sorciers ne serait pas découvert par des moldus. Enormément de personnes avaient été invités à participer à la soirée.
Léwina n’avait pas trop eu le choix : elle n’avait aucune envie d’être ici à célébrer une union dont le seul but était la pureté du sang. Elle voyait bien que son frère ne ressentait pas ce qu’on appelait l’amour pour sa future femme, il ne voyait en elle que le moyen de se créer une descendance pure et le moyen d’intégrer une des plus nobles et puissantes familles de sorciers : les Black. La seule consolation de Léwina était qu’elle aurait l’occasion de voir Sirius. Ce dernier avait longtemps hésité à s’enfuir avant la cérémonie de sorte à ne pas se retrouver au milieu d’un rassemblement d’une famille qu’il haïssait. Il savait qu’il en était la risée, que toute la famille allait le rabaisser et que s’il s’énervait, il en subirait ensuite les terribles conséquences. Néanmoins, il avait assuré sa présence à Léwina dans la lettre qu’elle avait reçue il y a deux jours. Or, il ne faisait pas parti du cercle proche de Narcissa, ainsi, il n’était pas encore arrivé.
-Léwina tu aurais au moins pu mettre une robe !
Cette dernière ne répondit même pas à sa mère, elle avait l’habitude de ce genre de remarques. Elle se regardait dans la glace et elle se trouvait tout à fait correcte. Elle avait laissé ses cheveux blond platine au naturel pour ne pas créer de scandales avec ses couleurs excentriques. Elle portait simplement un pantalon droit noir, une chemise blanche et un veston. Elle se forçait déjà à porter cette tenue qui ne lui plaisait guère, jamais elle n’aurait mis de robe !
Les premiers invités n’allaient pas tarder à arriver. Sa mère avait tenu à ce qu’elles les accueillent chaleureusement toutes les deux. Léwina était déjà ennuyée de devoir attendre debout pendant plus d’une heure afin d’accueillir tous ces sorciers qui se croyaient supérieurs par leur sang. Or, Sirius devait se trouver parmi eux : cela réchauffa quelque peu son cœur. Au-delà de ses sentiments, qu’elle pensait non-réciproques, Sirius était pour elle un ami précieux qui lui permettrait de faire passer la soirée bien plus vite. C’est ainsi qu’elle se posta à l’entrée du chapiteau, un faux sourire sur le visage.
Les premières sur le tapis rouge furent les deux sœurs ainées de Narcissa : Bellatrix et Andromeda Black. Léwina avait entendu de la bouche de Sirius que la première était l’une des personnes les plus détestables de sa famille, la seconde, néanmoins, était sa cousine préférée. En effet, elle avait tendance à être plus en accord avec les idées de son cousin plutôt que celui de ses sœurs et de sa famille. Néanmoins, elle ne le laissait pas paraitre au premier abord. Léwina les accueillis, la deuxième plus chaleureusement que la première et elles lui rendirent bien. Sur leurs pas arrivèrent leurs parents : l’oncle et la tante de Sirius, « cruels et méchants, imbus d’eux-mêmes et pensant que leurs filles vont faire régner sur le monde la supériorité des sang-purs » avait décrit le jeune Black. Léwina retrouva bien ses traits et dès la première seconde qu’elle les vu, elle ne les aima pas.
Par la suite, Léwina eut l’occasion de revoir ses oncles, ses tantes et ses lointains cousins qui avaient été conviés à la fête et qu’elle détestait tous autant qu’ils étaient. Or, Sirius et sa famille n’avaient toujours pas passé le pas de l’entrée. Elle commença à s’inquiéter qu’ils ne viennent pas. « Il a peut-être changé d’avis au dernier moment, peut-être qu’il s’est passé quelque chose d’horrible chez lui » pensait-elle. Or, elle fut bientôt rassurée quand elle reconnut le visage de Walburga et Orion Black. Elle se rappelait du visage de la première grâce à leur cours de Défense contre les forces du mal où elle avait pu voir l’épouvantard de Sirius, qui n’était d’autre que sa mère. Le couple était bien contrasté : Walburga Black était une grande femme mince à l’air sévère, à la posture droite et au regard perçant, son mari étant tout son contraire, elle le dépassait d’une tête et demie, il était joufflu et avait l’air désintéressé. Léwina ne voyait que mal la ressemblance qu’ils avaient avec leur premier fils bien que ses sourcils semblassent être les mêmes que son père et son nez celui de sa mère. Néanmoins, la ressemblance avec le second était frappante. Regulus Black semblait être le mélange parfait de ses parents. Au final, seulement Sirius était en marge.
Comme ils n’avaient qu’un an de différence et étaient dans la même maison, Regulus et Léwina avaient déjà discuté plusieurs fois. Ce n’était pas un ange mais il semblait plus doux que ses parents. De plus, Sirius lui avait déjà parlé plusieurs fois de lui. Son frère suivait les idées de ses parents mais il le couvrait de temps en temps.
Sirius, justement, pénétra dans la salle à la suite de son frère. Léwina ne le lâcha pas des yeux : il était splendide. Il est vrai qu’elle l’avait toujours trouvé beau même lorsqu’elle s’interdisait de le penser. Il avait un charme naturel. Mais, ce soir il rayonnait. Ses cheveux ne semblaient pas autant en pagaille qu’habituellement et le costume qu’il portait lui allait à ravir. Leur regard se croisèrent et son cœur loupa un battement.
Sirius vint saluer Careen Malfoy avec un faux sourire plaqué sur le visage. Néanmoins, il changea rapidement d’expression en regardant Léwina, il lui lança un sourire resplendissant lorsqu’il lui serra la main pour la saluer de la manière la plus formelle qu’il soit. Léwina ne comprenait pas pourquoi tous les sentiments qu’elle ressentait étaient aussi présents, pourquoi son cœur battait aussi vite, peut-être que ne pas l’avoir vu pendant quelques temps y jouait un rôle.
-T’es pas mal ce soir, lance-t-il la regardant de haut en bas.
-Toi aussi, répond Léwina en l’imitant, donnant l’impression qu’elle ne l’avait pas déjà analysé de la tête aux pieds à la seconde où il était apparu dans son champ de vision.
Ils essayaient quelque peu de masquer leur proximité cependant leur énorme sourire ou leur poignée de main un peu trop douce et longue les avaient trahis.
Ensuite, Regulus salua Léwina et puis ce fut au tour de leurs parents. Léwina fut assez vite débarrassé du père mais la mère fut une autre histoire. Celle-ci fit courir son regard sur tout son corps, jugeant tout ce qu’elle voyait. La salutation qu’elle lui lança fut froide, voire méchante, et son regard était mauvais. Léwina ne mit pas très longtemps à comprendre ce que Sirius ressentait à son contact : cette femme était dangereuse.
Les Black s’éloignèrent ensuite sans un mot mais Sirius lança un long regard à Léwina qui voulait tout dire. Cette dernière resta encore quelques temps à l’entrée en compagnie de sa mère afin d’accueillir les derniers invités. Les minutes furent longues, d’autant plus que du coin de l’œil elle pouvait apercevoir Sirius qui ne la lâchait pas du regard. Elle avait chaud et ne cessait de rougir : que lui voulait-il à la fin. Elle se hâta d’accueillir les derniers invités afin de pouvoir le rejoindre mais lorsqu’elle tourna de nouveau la tête, il avait disparu.
-Il est passé où ce con, souffle-t-elle en faisant courir ses yeux dans l’assemblée ?
-J’espère que ce n’est pas de moi que tu parles quand tu dis « ce con » lance une voix derrière elle.
Elle se retourna pour tomber nez à nez avec Sirius, un grand sourire joueur sur le visage. C’était peut-être l’expression qu’elle préférait voir sur le visage du Black. Ses yeux pétillants et son sourire moqueur avaient quelque chose de séduisant.
-Non, pas du tout, répond-t-elle avec ironie.
Ses joues étaient légèrement rosées : il avait probablement du boire quelque peu.
-Alors, un avis sur la merveilleuse famille des Black, demande-t-il en se rapprochant d’elle pour que personne ne puisse entendre leur conversation ?
-C’est bien ce à quoi je m’attendais d’après ce que tu m’avais raconté, elle marqua une pause le temps de trouver ses mots, ta mère fait froid dans le dos.
Sirius eut un sourire triste.
-Si seulement elle faisait juste peur.
Un silence s’installa. Léwina voyait aisément toute la douleur qu’il ressentait et qu’il avait pu ressentir. Depuis qu’il lui avait tout raconté, il avait fait tomber le masque avec elle et s’autorisait à se montrer sous sa véritable nature. Bien sûr, il restait toujours Sirius Black, le plus grand farceur de Poudlard, mais la tristesse et la douleur se montraient de temps à autres. La Serpentard détestait ses situations, elle ne savait pas comment porter assistance à son ami, elle ne savait pas le consoler, trouver les bons mots. Alors, souvent elle se contentait d’être une oreille attentive et de le prendre dans ses bras, le laissant pleurer sur son épaule. Mais elle avait la rage, la rage de ne pas réussir à le consoler, de ne pas faire payer ceux qu’il l’avait fait souffert au centuple.
Ils étaient marrants ici, debout l’un face à l’autre avec une certaine distance entre eux, au milieu de cette fête où tout le monde dansait.
-J’ai entendu que le buffet serait ouvert d’ici quelques minutes, on pourrait peut-être manger un bout et s’éloigner ensuite de toute cette pourriture, propose Sirius qui ne semblait clairement pas dans son élément au milieu de tous ces gens qu’il haïssait tant ?
-Je suis du même avis, répond-t-elle.
Ils se dirigèrent alors vers le buffet et se jetèrent sur les petits fours. Léwina était en train de se moquer de Sirius qui grimaçait car il venait de manger quelque chose pas à son goût lorsque quelqu’un les rejoignit. Andromeda Black ressemblait énormément à sa sœur aînée Bellatrix dans son apparence mais dégageait quelque chose de bien différent. Il y avait dans son regard une douceur naturelle qui mettait tout de suite en confiance. Andromeda les salua et commença directement la conversation avec Sirius, ça faisait longtemps qu’ils n’avaient pas eu l’occasion de se voir. Léwina écouta ce qu’ils se racontaient mais elle ne parla que très rarement. En effet, il était difficile de s’imposer entre ces deux cousins.
Léwina eut l’occasion de remarquer qu’Andromeda, à l’image de ce qu’elle renvoyait, était quelqu’un de très sympathique et avec les idées à l’opposé de celles de sa famille. En effet, elle était pratiquement fiancée à un sorcier né-moldu du nom de Ted Tonks. Ce futur union était bien sûr complètement rejetée par les Black mais cela ne faisait ni chaud ni froid à Andromeda qui ne souhaitait que guère rester en contact avec les gens de sa famille.
Avant de s’enfuir de la fête, Sirius avait proposé à sa cousine de les accompagner. Or, cette dernière avait refusée : elle souhaitait encore discuter quelques instants avec sa sœur avant qu’elle ne quitte le concon familial.
C’est ainsi que seuls, Léwina et Sirius, s’éclipsèrent du chapiteau. Ils avaient été le plus discrets possible, malheureusement, il s’était quand même fait repérer par Regulus. Or, le hochement de tête qu’il leur avait adressé signifiait qu’il ne dirait rien et qu’il ferait comme s’il n’avait rien vu.
Sirius attrapa alors la main de son amie et se mit à courir sous les plaintes de celle-ci. Il riait à gorge déployée, il se sentait libre. Cette dernière arrêta alors de se plaindre lorsque le rythme de leur course ralentit et elle se mit à rire aussi, le rire de Sirius était très communicatif.
Ils se laissèrent tomber sur une étendue d’herbe, devant eux se dressait un paysage des plus appréciable. La pleine lune rayonnait et éclairait toute la vallée. Une brise s’était levée et la température chaude de l’été commençait à descendre.
Les deux adolescents n’avaient pas arrêté de rire, l’alcool qu’ils avaient bu devait sûrement aider. Léwina, qui n’en avait pas abusé, fut la première à se calmer. Ils étaient proches mais pas assez pour se toucher, néanmoins, elle ne fit rien bien que l’envie de coller son corps au sien se faisait grandement ressentir. Sirius finit par se calmer à son tour et s’allongea dans l’herbe tandis que son amie restait assise. Ils restèrent dans le silence quelques secondes, appréciant doucement le calme que faisait preuve la campagne.
-J’aimerais bien vivre quelque part comme ici, c’est calme, c’est tranquille, déclare alors soudainement Sirius et regardant l’étendue devant lui.
« Je sais » fut la seule réponse de Léwina. Bien sûr qu’elle le savait, Sirius lui en avait déjà parlé et depuis elle ne pouvait s’empêcher de penser à quoi pourrait ressembler une vie à deux dans un lieu comme celui-ci.
-Dit Léwina, elle se tourna vers lui, pourquoi t’aime pas Eleanor ?
Elle leva alors les yeux au ciel, pourquoi venait-on encore l’embêter avec cette Eleanor.
-Quoi ? Tu veux sortir avec elle, tu veux mon consentement, demande Léwina exaspérée ?
-Ça serait une idée, répond simplement Sirius en haussant les épaules.
Léwina crut sentir son corps faire un saut de trente étages pour au final s’écraser au sol. Elle détourna le regard et tourna le dos à son ami afin qu’il ne voie pas la grimace qu’elle fit. Néanmoins, elle tenta de donner à sa voix l’air le plus naturel possible :
-Tu envisages sérieusement de sortir avec elle ?
-Je ne sais pas… Je sais qu’elle m’aime bien et elle accepterait sûrement.
-Bien sûr qu’elle t’aime bien !
C’est la colère qui prit alors place en Léwina. Elle se tourna vers lui et lança d’une manière un peu agressive :
-Non mais tu ne vas pas commencer à sortir avec tous les gens qui t’aiment bien !
Mais le Gryffondor ne sembla rien remarquer aux changements d’humeur soudains de son amie.
-Je ne pense pas qu’il y en ait tant.
-Sirius, arrête, la moitié de Poudlard accepterait de sortir avec toi si tu venais leur demander. Tu sais très bien que t’es considéré comme le canon de beauté.
Il laissa échapper un petit rire et ses yeux se plantèrent alors dans le regard de Léwina, comme par magie, toute sa tristesse et sa colère disparurent.
-Et toi, t’en pense quoi ? Je suis le plus beau de Poudlard ?
-Ce n’est pas ce que j’ai dit Sirius, déclare-t-elle d’un ton ferme en le quittant du regard.
-Ce n’est pas ma question Léwina, l’imite-t-il.
Elle marqua une pause le temps de réfléchir à sa question. Bien sûr qu’à ses yeux Sirius Black était le plus beau de tout Poudlard. A vrai dire, pour elle, Sirius Black était le plus beau de tous. Surtout quand il y avait cette petite étincelle dans son regard. Mais elle ne pouvait pas le balancer comme ça. Même si Sirius avait l’air de planer un peu, il n’allait pas tout oublier comme par magie le lendemain.
-Non, James est plus beau.
Sirius éclata de rire :
-Si James était plus beau que moi ça se saurait.
-Des paroles si méchantes envers ton meilleur ami, lance-t-elle ironiquement.
-Il sait que je suis le plus beau de nous deux.
Devant l’air faussement sérieux du Gryffondor, les deux amis se mirent à rire.
-Et moi, demande Léwina à son tour, tentant désespérément sa chance, je suis la plus belle de Poudlard ?
Sirius eut l’air de réfléchir et se mit à regarder les étoiles.
-L’une d’elles en tout cas très certainement.
Le silence s’installa de nouveau. Le cœur de Léwina battait à vive allure dans sa poitrine. Sirius finirait par la tuer, c’est certain.
Léwina se sentait idiote d’être sensible à tout ce que Sirius disait, surtout elle qui s’était toujours revendiqué indépendante. Maintenant, le moindre mot de Sirius pouvait la faire changer d’avis et elle détestait ça. De plus, il lui paraissait très irréaliste qu’il partageait ses sentiments. La réponse qu’il venait de lui donner voulait tout et rien dire. Il avait très probablement juste ne pas voulu la blesser puisqu’elle était son amie.
Sirius ne lui donnait pas assez de raisons d’espérer une réciprocité des sentiments. Alors, elle se promit alors de les taire au plus profond d’elle, de les cacher, de les étouffer jusqu’à ce qu’ils disparaissent. Cela prendra certainement du temps mais elle y arrivait, elle en était sûr. Enfin, jusqu’à ce que la voix de Sirius ne la ramène à la réalité :
-Léwina… J’ai froid, se plaint-il !
Elle le regarda alors, il était toujours couché sur le sol et tendait les bras vers elle. Léwina souffla en se rapprochant de lui, elle était faible, elle le savait. Ses sentiments à détruire pouvaient bien attendre encore un temps se dit-elle alors qu’elle passait ses bras autour du corps de Sirius en sentant sa chaleur contaminer tout son corps.