Léwina aimait aller chez les Lei
Léwina aimait aller chez les Lei. Elle aimait leur maison petite et chaleureuse, elle aimait cette sensation de chaleur, les couvertures douces, les canapés mielleux, les tables où il fallait se serrer pour que tout le monde rentre. Léwina aimait aller chez les Lei mais cela était sûrement parce que Léwina détestait être chez elle.
Elle était née dans la famille Malfoy, ses parents, Abraxas et Careen Malfoy étaient des gens de caractères qui avaient tenu à donner à leur enfant une éducation stricte et basée sur les mérites plutôt que sur l’amour. Des enfants, ils en avaient eu deux : Lucius et six ans plus tard, Léwina. Les deux enfants se ressemblaient beaucoup : dans ses premières années de vie, Léwina était la copie conforme de Lucius au même âge.
Cette dernière se souvenait du début de sa vie comme une période heureuse. Son père était très occupé par son poste au ministère et était donc très rarement à la maison. Sa mère invitait sans cesse ses amies et elles passaient des heures à discuter. Léwina et son frère étaient ainsi livrés eux-mêmes : ils s’occupaient, jouaient ensemble, rigolaient. Notamment, ils aimaient jouer à cache-cache. En effet, le manoir Malfoy était si grand que ces parties étaient toujours très longues : elles amusaient beaucoup les deux enfants. Malheureusement, leur bonheur fit de courte durée : l’entrée à Poudlard de Lucius avait jeté un froid dans la famille. En effet, Abraxas Malfoy était devenu de plus en plus exigeant envers ses enfants et même envers sa femme : il était devenu méchant et presque violent. Régulièrement, il avait des sautes d’humeur où il attrapait sa baguette et s’amusait à exploser tous les objets qu’il croisait dans le manoir. Careen Malfoy avait peur de lui et elle lançait toujours un petit regard à sa fille pour que celle-ci parte se cacher dans ces moments-là. Léwina n’avait que quatre ou cinq ans à l’époque pourtant elle se rappelait que trop bien ces moments de terreur qu’elle avait passé à pleurer dans le coin de sa chambre où elle espérait qu’il ne la trouverait jamais. C’était pire quand son frère revenait à la maison pour les vacances : Abraxas s’était mis en tête d’élever Lucius de manière à le faire devenir comme lui. Il ne lui laissait aucun répit, n’hésitait pas à le baffer quand ce dernier ne se montrait pas assez volontiers. Malheureusement, leur père avait réussi sa tâche à merveille : Lucius Malfoy était devenu la copie conforme de ce dernier. A ce moment, leurs premières différences physiques se montrèrent. Léwina avait de très longs cils, des lèvres rouges et une expression faciale qui différait celle de son frère. Ce dernier avait changé. Il ne jouait plus avec Léwina, il ne rigolait plus qu’avec ses autres amis de Poudlard, il apprenait en secret la magie noire, il haïssait les moldus et les nés-moldus. Il put alors facilement prendre la place de son père lorsque ce dernier mourut de la dragoncelle.
Careen ne s’était jamais remarié mais Léwina l’avait déjà vu avec plusieurs hommes. Madame Malfoy était plus gentille que son défunt mari, elle était certes sévère et stricte mais elle aimait ses enfants, or, elle n’arrivait que très peu à montrer son amour. Pourtant, Careen n’était pas non plus une sainte. Elle vouait elle aussi un intérêt à la magie noire et détestait les née-moldus. C’était des valeurs qui lui avaient été inculpés par ses propres parents et elle l’avait transmis à ses enfants.
Léwina, quant à elle, était différente. Contrairement à son frère qui avait tout de même reçu un peu d’amour étant le premier enfant, elle n’avait jamais connu autre chose qu’un père violent et qu’une mère absente. Rapidement, bien avant Lucius, elle s’était endurcie et n’avait jamais vraiment été une petite fille. En effet, depuis qu’elle était née son père ne lui jamais inspiré rien d’autre que de la terreur : elle l’avait toujours détesté lui et détesté ses idées. Par pur instinct de contradiction, elle aimait les nés-moldus. Sa mère avait quand même réussi à lui faire supprimer cette idée de sa tête et l’avait remplacé par la haine, néanmoins seulement pendant quelques années. Dès son entrée à Poudlard, Léwina s’était liée d’amitié à Arthur Lei, un sang-mêlé qui avait réussi à lui montrer la vérité sur cette idéologie et elle avait repris ses croyances d’origine : les sorciers et les moldus étaient égaux.
Arthur avait toujours été très mature et lors de leur première année, elle le considérait presque comme un grand frère alors qu’ils avaient le même âge. En effet, Arthur avait grandi avec son frère et sa sœur, tous deux plus âgés et avait vite muri. Il était très ouvert d’esprit et il avait aidé Léwina à devenir pareil. Un lien très fort les unissait : ils étaient plus que des amis qui partagent tout, ils avaient grandi ensemble, appris et évolué ensemble. Ils se sentaient comme les deux faces d’une seule et même personne.
Une fois, Léwina s’était questionné sur la nature de ses sentiments envers Arthur, elle lui en avait fait part et il lui avait avoué qu’il s’était, lui aussi, déjà posé la question. Mais, au final, ils se considéraient comme des frères et sœurs. D’ailleurs Arthur sortait avec Anna Kanofa depuis la troisième année.
-J’aime vraiment beaucoup Remus, déclare Arthur.
En ces vacances d’été, Léwina avait fui le manoir familial pour rejoindre la chaleureuse maison des Lei. Elle comptait bien y passer les deux semaines qu’il restait avant qu’ils ne rejoignent Poudlard pour leur cinquième année. Elle attrapa une poignée de bonbons qui étaient devant elle, elle adorait le sucre et était très gourmande.
-T’inquiète pas, Arthur, je crois que tout le monde a remarqué. A chaque fois que tu le voies, tu ne peux pas t’empêcher de te coller à lui. Tu l’as dit à Anna j’espère, rigole Léwina.
-Bien sûr, répond-t-il, Anna et moi c’est différent, c’est tellement évident. Anna c’est… C’est comme mon âme-sœur, elle me complète parfaitement et je l’aime. Mais Remus ce n’est pas pareil, j’ai l’impression que sa vie a été tellement dure. Tu as vu toutes les cicatrices qu’il a, à quel point son corps est frêle quand tu le prends dans tes bras et il a l’air si fatigué ! J’ai envie de le rassurer et de lui promette tout et n’importe quoi pour qu’il aille mieux.
-T’as vraiment le don de te faire des amis toi, je ne pensais pas que le timide Remus Lupin pouvait avoir une personnalité pareil et être aussi à l’aise avec toi.
-C’est plutôt vrai, se vante Arthur. Mais t’es pas en reste non plus, j’ai l’impression que ça a plutôt bien matché avec Lily Evans, je me trompe ?
-Cette fille est marrante et elle a un caractère de feu.
-Qui aurait cru, commence Arthur avant de faire une longue pause…
-Aurait cru quoi ?
-Qui aurait cru qu’on se rapproche autant des Gryffondor et surtout de tous ces maraudeurs.
-Totalement. Emmeline, d’ailleurs a bien accroché avec Dorcas Meadowes de Serdaigle.
-Bien accroché est un euphémisme je crois, avoue Arthur.
-A vrai dire j’ai un peu de mal à dire ce qu’elle ressent mais il est sûr que Dorcas est amoureuse d’elle, elle la regarde d’une manière si particulière.
-Un couple étrange elles feraient ces deux-là. L’une bruyante tandis que l’autre très réservé et discrète.
-Mais d’une certaine manière, elles se complètent : toutes les deux sont curieuses par nature, elles sont attentives et déterminées. Je suis persuadée qu’elles seraient très bien ensemble.
Léwina adorait les Lei, l’inverse était tout aussi vrai. Owen et Rose étaient, pour elle, les meilleurs frère et sœur que l’on puisse imaginer. Owen était d’une loyauté et d’une gentillesse à toute épreuve. Rose, quant à elle, était un modèle de réussite, elle excellait dans tout ce qu’elle essayait. Les parents d’Arthur étaient également très sympathiques mais surtout ils s’aimaient et aimaient énormément leurs enfants. Le point commun des Lei, qui avaient tous des caractères très différents, était sans nul doute l’ouverture d’esprit et c’est pourquoi ils avaient accueilli Léwina à bras ouverts et n’avaient jamais porté le moindre préjugé sur elle ou sur sa famille.
Dès sa première venue, l’été de sa première à sa seconde année, elle s’était approchée des parents Lei d’un pas peu rassuré, ayant peur de ce qu’il pourrait dire. Mais elle avait été très surprise, quand le père d’Arthur lui avait gentiment tendu sa main et avait dit avec un sourire amical « Léwina Malfoy, n’est-ce pas ? ». La mère d’Arthur, une moldue, était alors sortie de derrière les fourneaux avec ses gants pour ne pas se brûler, elle aimait faire la cuisine sans magie, et lui avait demandé si elle aimait les cookies.
Ce jour-là, elle n’avait pas reçu la moindre remarque sur son nom de famille et personne ne l’avait regardé avec méfiance comme si elle allait s’attaquer à eux dans la seconde.
Léwina avait trouvé dans les Lei une véritable famille.
*****
Le soir venu, après avoir diné dans la joie et la bonne humeur sous les blagues incessantes de la mère d’Arthur, Léwina et lui remontèrent à sa chambre où ils se mirent en pyjama. Pour l’occasion, le clic-clac de la chambre d’Arthur avait été converti en un lit pour son invitée. Ils s’allongèrent dans leur lit respectif et discutèrent de sujets dont ils avaient plus ou moins l’habitude d’aborder.
-Tu penses que t’es cent pourcents hétéro toi, demande Léwina les mains sous son oreiller et regardant d’un œil distrait le plafond ?
-Je ne sais pas trop, je ne me suis jamais vraiment posé la question je crois. Avant Anna j’étais trop petit et maintenant je suis avec elle donc ce n’est pas trop le moment pour aller flirter avec des mecs.
-Effectivement.
-C’est quoi cette question, relève soudainement Arthur ! Et toi alors ?
-Je ne sais pas trop. Je crois que je ne fais pas trop attention au genre de la personne. En fait, à Poudlard, quand je trouve des gens beaux ou attirants, je m’en fous qu’un ce soit un gars ou une fille.
-Ca m’étonne pas trop si tu veux tout savoir, finit par souffler Arthur.
-Ah bon ?
-Tu te rappelles de Kloé, la Poufsouffle ?
-Oui, très bien.
-Je suis désolé mais tu ne la regardais pas comme tu regardes une amie.
Bien sûr que Léwina se rappelait de Kloé, c’était le premier crush qu’elle avait eu en arrivant à Poudlard, il faut dire que Kloé était une véritable passionnée et la Léwina de cette époque ne trouvait rien d’aussi intéressant que l’entendre parler pendant des heures.
-D’ailleurs ça fait très longtemps que je ne l’ai pas vu, se questionne Arthur.
-Son oncle et sa tante sont morts, ils ont été tués par des Mangemorts, sa famille a fui vers la France, elle est à Beauxbâtons maintenant.
Un silence s’installa dans leur conversation. A Poudlard, sous la protection de leurs professeurs, ils oubliaient souvent que le Seigneur des Ténèbres prenait en puissance, ses partisans se multipliaient et les crimes qu’ils commettaient également. Lorsqu’ils étaient chez les Lei, c’est une réalité dont ils prenaient conscience. La mère d’Arthur connaissait la magie mais elle était une moldue et mariée à un sorcier : elle était en danger. Léwina savait que cela effrayait Arthur. Ce dernier se rassurait en se disant que son père, Owen et Rose étaient tous trois de très bons sorciers et qu’ils sauraient la défendre mais cette peur ne quittait jamais vraiment son esprit.
Léwina était moins craintive sur ce sujet et pour cause : elle avait probablement un sang plus « pur » que la moitié des serviteurs de Voldemort. Néanmoins, elle ne supportait pas les crimes qu’ils commettaient et à leur sortie de Poudlard, les deux amis projetaient de se battre contre les forces du mal.
Arthur eut besoin de détourner son esprit de ces pensées sombres, il relança alors la conversation :
-Après on grandit, on apprend de nouvelles choses et on change. Regarde-toi, tu n’es plus la Léwina que j’ai rencontré pour la première fois dans le Poudlard Express. Tu es sûr de toi, tu aimes te faire entendre, tu oses montrer tes sentiments. Tu n’es plus cette personne énervée contre le monde qui ne fait que se renfermer sur elle-même. Bon bien sûr, continue Arthur, plus sur le ton de la moquerie cette fois-ci, tu as toujours cette tête déplaisante quand quelqu’un vient te parler.
Léwina rigola, Arthur revenait toujours à cette histoire de visage mais Léwina ne pouvait rien y faire. D’ailleurs, elle ne l’avait jamais su avant que ce dernier lui fasse remarquer. Mais Arthur n’avait pas tort, Léwina avait beaucoup changé depuis la première fois qu’ils s’étaient parlés dans le Poudlard Express et cela était aussi beaucoup grâce à lui.
Dans cette période troublée, entre la guerre et l’adolescence qui les faisait changer, leur cœur et esprit étaient mis à rude épreuve. Mais, s’il y avait bien une chose dont Arthur et Léwina étaient certains : ils resteraient ensemble.