
Chapter 25
Black Sunset
Première Partie : Stars.
Chapitre 25
« Sinking deeper into war, singing "freedom" as we fall.
Time to make a call, we're on our knees.
Once the truth is bent, we'll start our decent.
An inch a time for every lie.
Before we know it we can barely see…
We can fall without a fight or we can try to make it right.
But the rugged road to glory is hardly in our sight.
It's a long way back when you're halfway to hell. »
(Half Way to Hell - Sheppard)
Dimanche 5 Avril 1981, Hells Gate State Park, Etats-Unis.
Un paysage à couper le souffle se déroulait sous ses yeux, et Sirius ne savait plus vraiment où regarder. En contrebas de la route, une large rivière avait creusé des gorges impressionnantes - les seules de cette envergure dans tout le nord des Etats-Unis -, au-dessus de lui, la pierre abrupte ramenait tout ce qui l'entourait à sa place insignifiante. Partout, la végétation n'en finissait pas de dévoiler une nouvelle subtilité de vert, si bien que même le Gryffondor qu'il était n'en était pas encore écœuré. A l'horizon, une chaîne de montagnes ne cessait pas de rester aussi lointaine qu'une heure plus tôt et Sirius avait compris que ce n'était pas la destination finale.
La moto de Judy avalait les kilomètres de bitume depuis près de trois heures, durant lesquelles sa petite-amie lui avait donné plus d'une leçon de pilotage. La conduite en région montagneuse n'était pas sa spécialité et sa vieille Bonnie aurait sans doute calé plus d'une fois dans les nombreuses côtes qu'ils avaient gravies pour arriver jusqu'ici.
Une heure de plus s'écoula, rythmée par une nature sauvage et presque inchangée depuis des siècles, avant que Judy ne ralentisse à l'approche d'un parking fait de gravier à flan de falaise.
Il descendit difficilement, les jambes engourdies d'être resté trop longtemps assis. Judy semblait encore plus courbaturée que lui et grimaça quand elle se redressa, ses mains plaquées sur le bas de son dos, comme si son ventre était plus lourd que d'ordinaire.
- Ça va ?
- Ça va aller. Le vermisseau n'a pas arrêté de gigoter.
- J'espère que c'était d'enthousiasme !
Judy eut une moue sceptique mais saisit la main qu'il lui tendait, avant de le guider en direction d'un sentier qu'il n'avait même pas remarqué.
Le chemin s'enfonçait à travers des bois aux arbres immenses. L'odeur de la terre était entêtante et Sirius dut résister à l'appel de Patmol qui ne demandait rien de plus que de se perdre à travers les troncs, à la recherche d'un lapin ou d'un écureuil à poursuivre.
Leur randonnée ne dura pas plus d'une demi-heure. Le sentier s'arrêtait brusquement au bout d'une éminence rocheuse qui surplombait une impressionnante cascade. Sirius tendit un bras au-dessus du vide et sentit l'eau sur sa peau.
Il ne remarqua pas tout de suite que Judy ne l'avait pas emmené ici pour la vue.
Agenouillée au pied d'une stèle d'un gris mate, elle s'appliquait à enlever les feuilles et autres mauvaises herbes qui tentaient de coloniser le morceau de roche nue.
Delilah Liberté White
28 Mai 1936 - 11 Septembre 1967
Mère aimante, sœur adorée, âme-soeur irremplaçable.
Sirius s'agenouilla à sa droite et passa un bras autour de ses épaules, avant de conjurer un bouquet de roses blanches. Judy eut un léger sourire avant de changer leur couleur en un noir profond.
- Je ne t'ai jamais dit que Burt trouve particulièrement ironique que je me sois entichée d'un Black ?
- C'est pour ça que tu insistes pour que le bébé porte mon nom plutôt que le tien ?
Judy baissa les yeux vers son ventre de plus en plus rond, à tel point que sa veste de moto ne supporterait pas un sortilège d'extension basique de plus.
- Je laisse rarement passer une occasion d'embêter mon Oncle. Mon père est en plus ravi de voir son nom s'éteindre avec moi. Et puis, je sais aussi que Walburga ne mérite rien de mieux qu'un descendant au sang impur.
Sirius ne put retenir un éclat de rire, semblable à l'aboiement de Patmol, à la mention de sa génitrice, sachant pertinemment que cette idée devait lui donner des aigreurs d'estomac. Peut-être finirait-il par lui envoyer un faire-part à la naissance du bébé. Et une photo. Avec un peu de chance, le choc la tuerait. Ou alors la honte lui donnerait la force de mettre fin à une existence que personne ne regretterait.
- Pas de nom d'étoile alors.
Elle lui sourit et déposa un rapide baiser sur ses lèvres.
…
Jeudi 9 Avril 1981, Manoir Lestrange, Angleterre.
La fête était parfaitement à la hauteur des attentes du Maître.
La grande salle de réception du Manoir Lestrange était somptueusement décorée : des sphères de lumières diffusait un éclairage argenté, les rideaux étaient ensorcelés pour paraître fait d'une matière métallique, des compositions florales majestueuses égaillaient l'ensemble. Dehors, elle avait fait installer un voilage pour protéger la terrasse d'une possible averse. Des musiciens jouaient des mélodies classiques en sourdine et elle avait engagé toute une équipe de fins cuisiniers pour le repas. Le menu - une course de cinq plats tous plus savoureux les uns que les autres - avait déjà reçu de nombreux compliments.
Sauf que Bellatrix sentait au plus profond d'elle-même que l'ambiance de la soirée allait bientôt changer.
Et elle avait hâte d'en finir avec les conversations lisses car trop polies, les sourires hypocrites, les félicitations légèrement moqueuses sur sa grossesse, et l'admiration portée à ses dons de maîtresse de maison.
Elle ne s'était pas surpassée pour si peu.
Aleth et Cathal Byrnes étaient la raison de cette fête magnifique. Elle les observait depuis leur arrivée. Elle, très élégante dans une robe prune au décolleté vertigineux sans être vulgaire, resserrée à la taille, ses cheveux blonds relevés dans un délicat chignon, se montrait charmante. Elle avait passé quelques minutes avec chaque invité et distribuait des compliments dignes d'une Poufsouffle. Lui, séduisant dans une robe de sorcier traditionnelle qui mettait sa carrure en valeur, semblait plus réservé. Il écoutait plus qu'il ne parlait, mais avait le mérite de toujours dire quelque chose d'intelligent quand il ouvrait la bouche.
Bellatrix s'était forcée à échanger des banalités avec eux, les interrogeant sur la santé de leur fille, essayant de découvrir où vivait la grand-mère, sans succès. Elle avait également dirigé la conversation sur la Cause. Cathal avait alors pris la parole, lui assurant leur soutien pour le Maître, leur fervente hâte de le voir accéder au pouvoir, et s'empressant de proposer nombres d'idées, surtout pour la réforme de Poudlard.
Elle les avait écoutés avec intention, cherchant des sens cachés ou des failles dans leur discours sans en trouver, avant d'insinuer sans se montrer discrète que le Maître avait bon espoir de faire tomber l'Ordre du Phénix et chacun de ses membres d'ici peu.
Il lui avait semblé que les deux s'étaient raidis, mais il s'agissait peut-être de ce qu'elle avait voulu voir.
- Bella, Il est arrivé.
Bellatrix sursauta lorsque la voix de son mari la sortit de ses pensées, avant de frissonner quand il déposa un baiser sur sa gorge, sans vraiment savoir si son excitation n'était pas plutôt due à l'anticipation. Elle avait hâte de voir le Maître se débarrasser - en public - de ces deux traîtres.
Elle laissa le soin à Rolf de tenir compagnie au Seigneur des Ténèbres, et s'empressa de congédier les musiciens sans diplomatie.
- Vous récupérerez vos instruments plus tard.
Le chef de la petite bande tenta d'argumenter, mais elle pointa sa baguette entre ses yeux.
- Ma réputation n'est basée sur aucune exagération, siffla-t-elle d'une voix glaciale.
L'homme devint livide et il fut le premier à quitter la scène, puis la salle. Bellatrix attendit qu'ils soient partis pour prendre la parole, sa voix amplifiée par un sortilège adéquat.
- Très chers invités, le Seigneur des Ténèbres nous fait l'immense honneur de sa présence ce soir. Joignez-vous à moi pour lui souhaiter la bienvenue.
L'assemblée, d'abord surprise, reprit ses applaudissements après une légère hésitation.
Le Seigneur des Ténèbres fit alors son apparition, plus charismatique que jamais dans une somptueuse robe d'un noir profond, taillée sur mesure, et doublée d'un riche tissu vert.
Bellatrix le détailla un peu plus ardemment que d'ordinaire, profitant que son attention soit accaparée par la petite foule devant lui. Tous les invités - des Mangemorts pour la plupart mais une large poignée d'alliés publics ou non - s'étaient rassemblés en un bloc compact. Bellatrix pouvait sentir la peur émaner de chacun d'entre eux. Pour certains, c'était la première fois qu'ils avaient à faire au Maître en personne.
Ils avaient toutes les bonnes raisons de ne plus se sentir en sécurité.
Par acquis de conscience, Bellatrix glissa un regard vers les différentes portes qui menaient dans la salle de réception et les trouva toutes fermées - par des sortilèges - et gardées par des Mangemorts de confiance.
Personne ne devait quitter la pièce avant que le Maître n'ait terminé.
- Mes chers amis… Quel plaisir de vous voir tous rassemblés ce soir. Votre soutien à notre Cause vous honore et sachez que je saurais récompenser votre fidélité lors de mon accession au pouvoir. Notre communauté aura besoin de leaders forts et compétents, et nombre d'entre vous ont déjà démontré qu'ils avaient ces qualités. Ensemble, nous saurons détruire ceux qui essayent de nous barrer la route. Le Ministère n'est composé que par des incapables, et sera bientôt à genoux, tant leur crédibilité est mise à rude épreuve et leur incompétence à nous stopper connue de tous. Nous redonnerons à notre pays son prestige passé, j'en fais le serment devant vous ce soir. Pour parvenir à instaurer cette société dont nous rêvons tous, nous devons toutefois unir nos forces pour une ultime bataille : anéantir l'Ordre du Phénix. Dumbledore ne cessera jamais de travailler contre nous. Sa bande d'illuminés pourrait donner des idées à d'autres et la dernière chose dont notre communauté a besoin est de la rébellion artificielle qu'ils essaient de diffuser dans le pays.
Bellatrix ne quittait plus des yeux Cathal et Aleth Byrnes. Ils écoutaient le Seigneur des Ténèbres avec attention, hochaient la tête en même temps que d'autres, et ne semblaient pas avoir compris qu' Il était là pour eux.
- Nous devons nous montrer sans pitié avec l'Ordre du Phénix et chacun de ses membres. La seule solution à ce problème est la mort de ces traîtres. Ce soir, je vais nous débarrasser de deux d'entre eux.
Aleth Byrnes comprit une folle seconde avant son mari. Bellatrix vit la jeune femme se décomposer, puis saisir sa baguette, mais elle ne fut pas assez rapide. Déjà, Bartémius et Stan se chargeaient de les désarmer. Cathal tenta de défendre sa femme en assénant un coup de poing à Macnair. S'il le toucha au visage, Macnair répliqua aussitôt avec un puissant crochet qui vint cueillir le traître au ventre, l'obligeant à se plier en deux de douleur, sous les cris d'Aleth.
La foule autour d'eux s'écarta. Le couple fut mené au milieu de la pièce, à quelques mètres du Seigneur, puis on les força à s'agenouiller.
- Aleth et Cathal Byrnes, je vous accuse de trahison. Vous travaillez pour Dumbledore depuis plusieurs mois, si ce n'est des années.
Aucun des deux n'ouvrit la bouche. Seuls leurs regards osaient parler et Bellatrix lut énormément de défi dans celui de la femme et une glaciale acceptation dans celui de l'homme. Il s'était de toute évidence attendu à ce que leur mission se termine ainsi depuis longtemps.
Leur silence trouva un parfait écho dans celui, lourd, qui avait pris possession de tous les autres invités. Les Mangemorts connaissaient tous le sort qui serait réservé au couple dans peu de temps. Les autres peinaient encore à réaliser ce qui était en train de se passer sous leurs yeux.
- Je suis sûr que Dumbledore, en grand humaniste qu'il se vante d'être, vous a déjà prévenu de ce que vous risquiez. Toutefois, je vous laisse l'opportunité de mourir sans douleur si vous vous engagez à me livrer tout ce que vous savez sur l'Ordre du Phénix, et à me citer toutes les informations que vous avez transmis à notre ennemi.
Aleth et Cathal échangèrent un seul regard. Elle acquiesça en silence à sa question muette, puis il se redressa autant qu'on le lui permit, osant croiser le regard du Seigneur des Ténèbres.
- Vous n'avez jamais obtenu notre collaboration, ce n'est pas ce soir que cela changera.
Le Maître ne sembla pas surpris de la réponse. Il se contenta de faire apparaître un fauteuil ouvragé derrière lui, puis s'installa avec grâce, avant de conjurer des bancs rustiques de part et d'autre de la salle.
- Mes chers amis, je vous invite à prendre place. Mes fidèles Mangemorts, vous savez ce que vous avez à faire.
Bellatrix se demanda quelques secondes si elle devait rejoindre ses camarades au fond de la large salle, mais un second siège, plus modeste que le premier, apparut à la droite de son Maître et elle s'y glissa aussitôt.
Rabastan fut le premier à s'affranchir de son don aux traîtres. Caleth subit trois minutes de Doloris qui ne suffirent pas à le laisser inconscient. Aleth en reçut deux, et passa la première à retenir ses cris avec ce que les Gryffondors devaient appeler courage, et qu'elle considérait comme une fierté mal placée.
- Désirez-vous un rafraîchissement, mon Seigneur ?
- Une coupe de Champagne serait parfait. Tu as fait un excellent travail Bellatrix.
Bellatrix s'obligea à recevoir le compliment avec humilité, puis ordonna à Numéro 1 de veiller aux désirs de son Maître.
Il fallut une heure pour que chaque Mangemort passe devant le Maître et soumette les Byrnes à un sortilège de leur choix. La majorité se contentait d'un classique Doloris, lancé avec plus ou moins de conviction. Bartémius se démarqua en écorchant vif Cathal et en faisant éclater les yeux d'Aleth, en réponse à son regard provoquant. Macnair préféra couper quelques doigts et Travers se laissa aller à des coups de fouets sauvages. Il fallut réanimer le couple à plusieurs reprises, et même leur faire avaler une potion pour qu'ils ne meurent pas trop vite.
A la fin, Aleth et Cathal n'étaient plus que deux plaies sanguinolentes et suppliaient le Seigneur des Ténèbres d'achever leur souffrance.
Ce qu'il fit.
Après les avoir torturé jusqu'à la folie.
…
Samedi 19 Avril 1981, Brent Croos Shopping Center, Londres.
Sirius trouva le bar au bout d'une longue demi-heure passée à arpenter les étages et les allées, mais n'y entra pas immédiatement. Il préféra faire un tour dans la boutique de vêtements pour homme qui lui faisait face, et d'où il pourrait vérifier que personne ne le suivait, même s'il était certain que ce n'était pas le cas. Il était venu en moto, se garant sur un parking si grand qu'il craignait de ne jamais la retrouver. Suivant les conseils de Judy - qui semblait en savoir autant qu'un Auror sur les façons d'échapper à une filature - il avait emporté un pull de rechange, un deuxième sac à dos et trois casquettes différentes. Il fit mine de s'intéresser à un assortiment de lunettes de soleil et attendit pendant dix longues minutes, attentif au moindre comportement suspect. Après cela, il fit un tour dans la cabine d'essayage, changea casquette, sac et pull avant de ressortir et de gagner le bar.
Il repéra immédiatement Madelyn McGonagall au milieu de tous les moldus. Elle avait beau n'avoir aucun vêtement sorcier sur le dos - pour autant qu'il puisse le deviner -, sa coiffure impeccable, son port de tête plus noble que celui de Walburga Black, et sa paire de lunettes de soleil clinquante attirèrent immédiatement son regard. A ses côtés, Benjy semblait parfaitement à l'aise, une bière devant lui. Sirius savait qu'il était le dernier : Figgs, Gideon et Fabian étaient morts, Marlène et Kingsley enchaînaient les gardes au Département des Aurors. Peter avait sûrement été enfermé aux archives puisqu'il n'avait pas de nouvelles depuis au moins trois semaines, et Remus était reparti en mission au milieu de loup-garous, français cette fois.
Il prit place autour de la table, commanda un whisky et se tourna vers Madelyn. Elle était à l'origine de cette petite réunion en dépit de l'interdiction de Dumbledore - la petite taupe qui traînait dans leurs rangs restait introuvable, Dumbledore ne voulait plus prendre le risque de se réunir, et il envoyait les ordres de mission via Fumseck ou bien un des Elfes de Maison de Poudlard - et il était curieux de savoir ce qu'elle avait à leur annoncer de si important.
- Je crois que je ne vous apprends rien si je vous dis que Dumbledore veut mettre fin à notre petit journal…
Sirius secoua la tête : la dernière distribution s'était soldée par la mort de Figgs et n'avait pas suscité le même engouement que les précédents numéros. Ils ne pouvaient pas se permettre de perdre d'autres membres de l'Ordre… et de toute façon, ils croulaient tous sous les demandes de filature de la part des Aurors. Sirius avait passé deux jours à suivre un Langue-de-Plomb sans rien découvrir, sinon que Rookwood menait une vie particulièrement déprimante.
- J'ai donc réfléchi à une autre approche… Messieurs, que diriez-vous d'une radio clandestine ?
Sirius échangea un regard d'abord surpris, puis intéressé avec Benjy.
- C'est une excellente idée, répondit Benjy.
- Je sais, dit-elle avec un large sourire que Sirius avait déjà surpris sur les lèvres de Minerva McGonagall, toujours suivie d'une réplique cinglante et d'une poignées d'heures de retenue à l'attention des Maraudeurs.
- Le contenu ne sera pas un problème, reprit-elle. Une émission hebdomadaire devrait suffire… Mais la diffusion risque d'être plus compliquée. Personne ne nous permettra d'avoir pignon sur rue.
Elle braqua son regard sur lui et Sirius fronça les sourcils, avant d'éclater d'un bref éclat de rire, qui ressemblait à l'aboiement de Patmol, en comprenant enfin pourquoi Madelyn McGonagall avait tant insisté pour qu'il soit présent.
- Très peu de personnes savent que mon Oncle possède l'autorisation d'émission de Culture Moldue.
- Alphard Black a fait ses études en même temps que ma Tante. Je crois qu'ils étaient officieusement amis.
Sirius eut un sourire triste l'espace d'une seconde. Il ignorait à quel point Minerva McGonagall et Alphard Black avaient bien pu être amis. Il savait toutefois que son Oncle avait toujours évoqué la professeur de Métamorphose avec le plus grand des respects, et que Minerva l'avait plusieurs fois menacé de convoquer son Oncle - son parrain, pour être précis - quand il dépassait les bornes. C'était elle qui lui avait annoncé son décès, un mois avant la fin de sa sixième année. Il lui avait trouvé les yeux brillants ce jour-là. Il comprenait un peu mieux pourquoi.
- Culture Moldue n'a pas émis une seule chanson depuis la mort de mon Oncle.
- Et bien nous allons changer cela, Black.
Il se rencogna contre le dossier de sa chaise, un sourire en coin sur ses lèvres, approuvant la décision de Madelyn en silence. Il ne voyait aucune raison de refuser l'utilisation de Culture Moldue aux profits de l'Ordre. Il avait été plus que surpris de se découvrir propriétaire d'une station de radio, encore plus de celle-ci, le jour de ses dix-sept ans, et il n'avait pas cherché à relancer la folle ambition de son Oncle - populariser et rendre accessibles les grandes œuvres musicales moldues aux sorciers - parce que trop occupé par la guerre. Madelyn avait raison. Il était temps de changer cela.
- J'ai une condition : Alphard devra faire partie du nom de l'émission.
Madelyn s'empressa d'accepter et Benjy de trouver un titre accrocheur.
- La guerre selon Alphard.
…
Mercredi 29 Avril 1981, Manoir Lestrange, Angleterre.
Bellatrix se cala un peu plus contre le torse de Rodolphus, savourant du bout des lèvres sa tisane brûlante, acceptant avec philosophie de ne pas goûter à l'excellent vin rouge que son mari et Stan avaient ouvert en l'honneur des trente-deux ans de Rolf. Elle aurait bien le temps de se rattraper plus tard…
Et son infusion n'était pas si mauvaise, surtout qu'elle devait protéger sa fille des maladies infantiles si elle se forçait à en avaler trois par jour.
Ils avaient passé une excellente soirée, loin des grands banquets que Ranatus avait toujours organisé pour fêter les anniversaires de ses fils. Le décès du patriarche était bien trop récent pour une grande fête et Bellatrix s'était contentée d'inviter Narcissa, Lucius, Rabastan, Karkaroff et Dolohov. Ils avaient dégusté un excellent repas, accompagné d'une musique prodiguée par des musiciens plus que doués. Les invités étaient partis après un digestif - les Malefoy pour retrouver leur fils, Karkaroff et Dolohov parce que le maître leur avait donné une mission - et Bellatrix se réjouissait de ne plus avoir à se comporter comme la parfaite Lady Lestrange.
Elle avait ôté ses talons et s'était enfoncée dans un fauteuil, bientôt rejoint par son mari. Elle feuilletait un volume de Magie Noire tandis que les deux frères disputaient une partie d'échecs. La majestueuse radio diffusait des mélodies connues en sourdine, et Bellatrix n'y prêtait aucune attention, jusqu'à ce qu'elle repère la voix de Celestina Warbeck.
Cygnus Black avait été un admirateur assidu de la fameuse la Chanteuse Ensorcelante et Bellatrix avait été forcée d'écouter ses chansons depuis son plus jeune âge. Les années aidant et une relation compliquée avec son père avait fini par lui faire détester le talent de la sorcière.
Elle reposa son livre avec un soupir agacé et rejoignit l'appareil pour le tapoter du bout de sa baguette.
- Bonjour ou Bonsoir, vous êtes sur Culture Moldue ! Notre radio est de retour pour soutenir tous ceux qui se battent contre Lord Voldemort ! Ne ratez pas notre émission exceptionnelle : La Guerre selon Alphard ! Demain, vingt heures, sur les ondes magiques !
A la première écoute du message qui se répétait en boucle, Bellatrix crut avoir mal compris.
Au deuxième, elle se retint de justesse de faire exploser la radio. Elle avait appartenu à Ranatus et elle ne souhaitait pas détruire les objets qu'il avait tant chéri de son vivant. Elle se força donc à garder son sang froid, essayant de se convaincre qu'il y avait une explication - une plaisanterie sûrement - derrière tout cela.
Culture Moldue était une radio sans grande influence, qui avait existé durant une dizaine d'années, financée par un mécène qui avait de toute évidence de l'argent à perdre. Elle en avait entendu parler, comme tout le monde, mais ne l'avait jamais écoutée. Elle rêvait déjà d'annihiler la civilisation moldue à l'époque.
Elle ne remarqua pas immédiatement que la voix qui annonçait un retour dont toute leur communauté se serait bien passé, n'était pas toujours la même.
Une femme, puis un homme. Une deuxième femme. Un couple qui prononçait un mot chacun.
Un nouvel homme.
Qu'elle connaissait.
- Bonjour ou Bonsoir, vous êtes sur Culture Moldue ! Notre radio est de retour pour soutenir tous ceux qui se battent contre Lord Voldemort ! Ne loupez pas notre émission exceptionnelle : La Guerre selon Alphard ! Demain, vingt heures, sur les ondes magiques !
Il y avait derrière chacun de ces mots une diction parfaite, que rien ne pouvait vraiment effacer, et qui témoignaient d'une éducation que seuls reçoivent les Sang-Purs. Bellatrix attendit que cette même voix revienne pour se convaincre qu'elle ne rêvait pas.
Il y avait des années qu'elle n'avait pas entendu aussi distinctement la voix de Sirius, mais sa mémoire n'avait pas oublié le cousin avec qui elle avait grandi, et qui les avait tous trahis.
Le reste des personnes impliquées se déduisaient ensuite trop facilement : Potter et sa Sang-de-Bourbe, des membres de l'Ordre du Phénix dont Madelyn McGonagall si elle devinait juste.
Finalement, sa colère prit le dessus et le poste de radio traversa la bibliothèque, puis la fenêtre fermée pour terminer sa course sur la terrasse ouest, trois étages plus bas.
…
Jeudi 30 Avril 1981, Centre d'Emission de Culture Moldue, Ecosse.
Sirius en était à son troisième tour dans la ville choisie comme lieu de rendez-vous, et il n'avait toujours pas trouvé la rue que lui avait indiqué Madelyn McGonagall… En prenant en compte le peu de choix qu'il avait à sa disposition, il espérait qu'elle se soit trompée. Sinon, son sens de l'orientation venait de l'abandonner, et il devrait ajouter cet handicap au vent et à la pluie qui balayait, à nouveau, le pays.
Il dépassait un pub au ralenti quand un sifflement aigu attira son attention au bout de la rue. Une silhouette encapuchonnée se découpait sur les murs de pierre claire et il reconnut aussitôt James à sa façon de s'appuyer contre le mur.
- Tu as pris ton temps, Black !
- Est-ce que tu sais combien d'heures il me faut pour venir ici ?!
James eut le bon goût de ne pas lui éclater de rire à la figure et il coupa le moteur, avant de lancer plusieurs sorts pour que sa moto n'attire pas les regards.
- Tu aurais pu transplaner.
- J'ai horreur de transplaner. Comment vont Lily et Harry ?
- Ça peut aller.
Sirius soupira face au manque d'enthousiasme de son meilleur ami mais décida de ne pas faire de remarque. Il n'était pas venu dans ce trou perdu pour remonter le moral de James ou jouer les psychomages. Il devait relancer Culture Moldue, attirer un maximum d'attention et faire en sorte que les Mangemorts ne les retrouvent pas trop rapidement. Pour ce dernier point, il avait sciemment laissé Remus et Peter de côté.
James le mena à travers des ruelles réservées aux piétons. Ils traversèrent une cour encombrée de gravas et de mauvaises herbes, puis entrèrent dans un bâtiment à moitié en ruine.
- Madelyn n'a pas trouvé mieux ?! grogna-t-il avant de se prendre les pieds dans un bout de ferraille.
- Madelyn est experte dans l'art de disparaître, Black ! Je pense que je sais ce que je fais.
La voix claire de la jeune femme avait le même ton sec que sa tante et il remit ses critiques à plus tard. Benjy lui fit un vague signe de la main, trop occupé à tourner autour du matériel qu'ils avaient récupéré dans les anciens bureau de Culture Moldue à Pré-au-Lard une semaine plus tôt.
Il faillit ne pas remarquer la femme qui se tenait à l'écart, installée sur une chaise - qu'elle avait dû conjurer - comme s'il s'agissait d'un trône. Elle donnait l'impression d'être bien plus impressionnante que ce que laissait supposer sa silhouette menue. Ses cheveux blonds, parsemés de nombreuses mèches blanches, étaient coiffés en un chignon compliqué, ce qui accentuait son port de tête digne des plus grandes familles de Sang-Purs. Il lança un regard interrogateur vers James qui eut un sourire en coin.
- C'est Sarabeth Byrnes, souffla-t-il.
Sirius la détailla avec plus d'attention, cherchant dans sa mémoire le souvenir qu'il avait gardé d' l'avait croisée à plusieurs reprises lors des fêtes dans les grandes familles, lorsqu'il vivait encore sous le toit des Black, mais n'avait pas pu lui adresser la parole parce que Walburga et elle se haïssaient. Il n'avait jamais eu le fin mot des origines de la haine qu'elles se portaient, sans pouvoir s'empêcher d'admirer de loin une femme que sa génitrice abhorrait.
- Qu'est-ce qu'elle fait ici ? murmura-t-il à la seule intention de James.
Malheureusement, sa voix grave et le silence qui régnait dans la large pièce vide rendirent son commentaire immanquable. Madelyn se racla la gorge et Byrnes eut un étrange rire.
- Moi aussi je suis contente de vous revoir, Monsieur Black. Combien d'années cela fait-il ?
- Au moins cinq. Et Sirius sera suffisant. Je laisse les Monsieur Black à Orion.
- Il est décédé, n'est-ce pas ?
- Précisément.
Elle eut un sourire, puis conjura une nouvelle chaise à ses côtés. Sirius comprit le message implicite et vint la rejoindre, laissant le soin à James, Madelyn et Benjy de terminer les derniers préparatifs. L'émission ne devait commencer que dans deux heures et quoiqu'en dise son frère, il était en avance.
- Madelyn avait besoin de quelqu'un pour clôturer l'émission et Minerva m'a invitée pour elle.
Sa réponse ne l'étonna pas. Minerva McGonagall était bien plus influente qu'elle ne le laissait voir, et il savait qu'elle se chargeait de parler de l'Ordre du Phénix à des personnes qui pourraient devenir de solides alliés sans pour autant souhaiter s'engager.
- Vous savez que ça va vous attirer des ennuis, pas vrai ?
Elle perdit son sourire et afficha une expression dure qui lui fit froncer les sourcils.
- Tu as connu Cathal et Aleth Byrnes ?
Il haussa les sourcils, surpris. Il avait vaguement entendu parler du couple du temps où il était encore l'héritier Black. Les Byrnes était une famille de Sang-Purs irlandais et faisaient parti des rares personnes que Walburga avait décrété fréquentables - Sarabeth exceptée -. Sa fugue et la guerre s'étaient chargées de le tenir éloigné de ces mêmes fréquentations, mais Ronalda Pettigrow avait relégué les ragots les plus indiscrets. Il savait qu'ils avaient eu un enfant, quelques années de ça, et aussi qu'ils s'étaient déclarés pour Lord Voldemort.
- De loin. Ou de près. Les Mangemorts ont cette sale manie de porter un masque et je ne suis pas toujours certain de savoir à qui j'ai à faire.
Sarabeth Byrnes plissa les lèvres, comme si elle dégustait un met particulièrement amer, sans réussir à l'émouvoir. L'époque où il faisait dans la diplomatie n'avait pas encore commencé.
- Ils n'étaient pas Mangemorts. Juste un soutien. Financier surtout. Et ils travaillaient pour Dumbledore.
Ce qui explique un peu mieux l'invitation de McGonagall.
Il garda pour lui ses doutes quant aux véritables allégeances des Byrnes. Pour autant qu'il en sache, ils pouvaient très bien avoir berné Dumbledore.
- Cathal était mon fils. Je lui dois au moins ça.
Mangemort ou non, Sirius eut un sourire désolé pour la femme auquel elle répondit par un regard grave, semblable à celui de nombreux proches de victimes de Voldemort. La liste était devenue effroyablement longue depuis cinq ans, et personne ne pouvait se vanter de n'avoir perdu aucun être cher. Voldemort décimait des familles entières, frappait des innocents, et faisait preuve d'une cruauté sans précédent quand il s'agissait d'anéantir quelqu'un qui se dressait sur son chemin. Ce soir, ils allaient commencer par leur rendre hommage, à tous. Les noms des victimes tourneraient en boucle sur Culture Moldue entre chaque émission et ils diffuseraient des classiques moldus évoquant le prix d'une guerre et l'importance de continuer à se battre, malgré tout. Il fallait montrer à tous ces gens ce que Voldemort essayait de leur prendre.
Il abandonna Sarabeth à ses pensées pour rejoindre James autour de la table bancale qui accueillerait leur réunion. Il faisait semblant de relire le texte que Lily et lui avaient écrit. Sirius le connaissait assez pour savoir que la seule chose qui le préoccupait - la sécurité de Lily et Harry exceptée - était les événements d'Edimbourg. Ils n'avaient pas pu en discuter depuis, préférant faire profil bas pour ne pas attirer l'attention des Mangemorts.
- Peter ou Remus ? souffla James après un long moment de silence.
Sirius déglutit difficilement à la douleur dans le regard de son frère, même si elle était jumelle de celle qui le rongeait de l'intérieur depuis plus d'un mois.
Il s'était posé la question. Des milliers de fois. Il avait essayé d'être objectif - sans jamais y réussir parce qu'il s'agissait de deux personnes pour lesquelles il serait bien capable de mourir - il avait cherché les signes d'une trahison qui se déroulait de toute évidence sous ses yeux - il avait disséqué chaque réunion, rencontre et bataille depuis la naissance de Harry, et ses souvenirs étaient tous devenus amers - et il avait trouvé plus de questions que de réponses.
Qui ? Parce qu'il espérait encore que ce ne soit ni Peter, ni Remus, même s'il y croyait de moins en moins.
Pourquoi ? Pourquoi Lunard ou Queudver trahiraient James et Lily ? Ils étaient amis depuis plus de dix ans, ils avaient vécu le pire et le meilleur ensemble, et ils étaient liés comme des frères à travers le Secret des Maraudeurs. Alors pourquoi ? Remus était bien trop intelligent pour se faire acheter par les mensonges de Voldemort sur une quelconque place des loup-garous dans la société que ce tordu comptait créer s'il réussissait. Peter s'était toujours montré loyal envers eux. Il n'avait pas assez de confiance en lui pour se présenter à Voldemort et conclure un marché au-dessus de la tête d'un enfant.
- Qu'en pense Lily ? répondit-il, la mort dans l'âme.
- Qu'il faut être un menteur prodigieux pour ne pas attirer l'attention de Dumbledore, et qu'il faut également avoir des nerfs d'acier pour ne pas s'effondrer sous la pression. Tous les bons espions ont ces qualités.
Sirius se frotta le front d'un geste compulsif avant de perdre sa main dans ses longues mèches noires, fermant les yeux pour reprendre le contrôle.
Judy lui avait servi le même discours. Elle avait même acheté un livre de psychologie pour l'aider dans ses recherches. Il aurait aimé pouvoir se voiler la face encore un peu plus longtemps, mais la supercherie durait depuis plusieurs mois déjà, et il avait promis de faire l'impossible pour protéger son filleul de Voldemort.
De Remus et Peter, il n'y en avait qu'un seul qui avait l'habitude de vivre avec un lourd secret et d'inventer des mensonges pour cacher sa condition.
- Remus, conclut-il en rouvrant les yeux.
James serra les dents mais échoua à masquer la lueur brillante de son regard. Sirius serra son épaule avec force.
- Innocent tant qu'on ne l'a pas trouvé coupable, d'accord Pat' ? dit-il d'une voix tremblante.
Sirius acquiesça en silence.
Le temps qui les séparait du début de l'émission se mit à filer. Vers dix-neuf heures trente, chacun se retrouva avec un micro devant lui et Madelyn leur confia le programme de la soirée. Tout comme James, Benjy et Madelyn avait prévu un discours à réciter. Sarabeth Byrnes chanterait une chanson de son choix à la fin de l'émission. Ils passeraient quelques morceaux. Il ne surprit personne en déclarant qu'il improviserait quelque chose le moment venu.
A vingt heures, Benjy tapota le boîtier devant lui. De rouge, il s'illumina de vert, et l'introduction de la musique Star Wars s'éleva en fond sonore.
- Sorciers et sorcières de tout horizon, bienvenus sur Culture Moldue, commença Madelyn d'une voix posée.L'émission de ce soir est un peu particulière, puisqu'il s'agit de la première diffusion en direct depuis quatre ans. Elle est d'autant plus particulière car il s'agit d'une toute nouvelle émission : La Guerre Selon Alphard. Vous l'aurez sans doute compris : nous allons parler de la Guerre, la vraie, celle qui déchire notre communauté depuis trop d'années maintenant, mais nous parlerons aussi de l'espoir qui nous reste de voir Lord Voldemort échouer à instaurer le Chaos.
- Je tiens à rassurer nos auditeurs que Athéna se porte comme un charme même si elle vient d'appeler le plus grand psychopathe de notre temps par le nom qu'il s'est donné, intervint Sirius à la volée. Voici donc un premier mythe complètement infondé : prononcer Voldemort ne tue pas.
- Merci Sniffle pour cette intervention. Je vais en profiter pour faire les présentations de mes invités ce soir : tout d'abord Franklin.
Benjy se fendit d'un sourire avant de répondre par un petit bonjour.
- Ensuite Monty.
- Bonsoir tout le monde, salua James.
- Et la très grande Sarabeth Byrnes qui nous fait l'honneur de nous accompagner tout au long de la soirée.
- Tout le plaisir est pour moi, Athéna.
- Maintenant que les présentations sont faites, je vais commencer par une rétrospective de notre conflit, afin que chacun puisse se faire une idée d'où nous venons, et vers quoi Voldemort rêve de nous mener.
- Un cimetière ?
- Merci, Sniffle.
Le regard noir que lui servit Madelyn ne fit que l'encourager et il passa les deux heures suivantes à lâcher un commentaire qu'Euphemia Potter n'aurait pas manqué de juger déplacé avant de rire avec son mari. James fit une lecture poignante sur les raisons qui les avaient poussés, Lily et lui, à s'engager dans l'Ordre du Phénix. Benjy se chargea de faire la comparaison entre leur guerre et celle qui avait touché l'Europe moldue trente-cinq ans plus tôt, insistant sur la résistance remarquable du Royaume-Uni durant toute cette période, et Sarabeth Byrnes rendit hommage à son fils et à sa belle-fille.
- Un dernier mot sérieux pour la fin, Sniffle ?
Sirius abandonna son sourire et prit à peine le temps de réfléchir à ce qu'il allait dire.
- Je n'ai pas prévu de joli discours donc rien de ce qui va suivre n'est sûrement dans le bon ordre, mais je suis certain que vous comprendrez le message. Voldemort n'est pas un ami qui vous veut du bien. Lui et ses minions terrorisent notre communauté depuis trop longtemps, juste parce qu'ils pensent que leur sang si pur les rend supérieurs. J'ai participé à de nombreuses batailles ces dernières années. Je les ai vus tuer des enfants moldus sans même hésiter. Où est la pureté du sang dans tout cela ? Nous valons tellement plus que ce qu'ils veulent nous faire croire et nous pouvons les arrêter. Cette émission se veut la porte-parole de la résistance. Je ne vous demande pas de postuler pour l'Ordre du Phénix dès demain, mais simplement de faire quelques gestes pour soutenir les moldus. Lancer des sortilèges de protection sur les maisons de votre voisinage, sur les hôpitaux, les écoles. Protéger ceux qui peuvent encore l'être. Et ne tombez pas dans l'idéologie de la haine. Et n'oubliez pas, contre l'oppression, rien de tel qu'un bonbon au citron. A la prochaine camarades.
- Merci Sniffle. Surveillez Culture Moldue. Nous vous tiendrons au courant de la prochaine diffusion. Sarabeth, c'est à vous.
Sarabeth Byrnes se pencha au-dessus de son micro magique antique :
- Je dédis ce morceau à ma petite-fille. Puisse-t-elle grandir dans un monde en paix pour lequel ses parents se sont sacrifiés.
Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu´on enchaîne?
Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c´est l´alarme.
Ce soir l´ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes.
Sirius quitta la table et rejoignit l'extérieur pour fumer une cigarette. La voix de Sarabeth Byrnes portait particulièrement bien dans le bâtiment abandonné.
Montez de la mine, descendez des collines, camarades!
Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades.
Ohé, les tueurs à la balle et au couteau, tuez vite!
Ohé, saboteur, attention à ton fardeau : dynamite…
James le rejoignit et il lui tendit son paquet sans s'étonner que James refuse de se servir. Son frère avait été bien trop malade quand il avait essayé, et Lily ne s'était toujours pas lassée de se moquer de lui à chaque fois qu'elle allumait une cigarette.
C´est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frères.
La haine à nos trousses et la faim qui nous pousse, la misère.
Il y a des pays où les gens au creux des lits font des rêves.
Ici, nous, vois-tu, nous on marche et nous on tue, nous on crève…
- On s'en est bien sorti, non ? remarqua James.
- Ouais… Faire le show, ça a longtemps était notre spécialité.
Ici chacun sait ce qu´il veut, ce qu´il fait quand il passe.
Ami, si tu tombes un ami sort de l´ombre à ta place.
Demain du sang noir séchera au grand soleil sur les routes.
Sifflez, compagnons, dans la nuit la liberté nous écoute…
En rangeant son paquet dans la poche intérieure de sa veste, il effleura un papier glacé qu'il sortit avec précaution.
- Qu'est-ce que c'est ? lui demanda James.
Sirius la déplia : l'image n'était qu'en noir et blanc, et on devinait juste une silhouette, mais il aimait l'idée d'avoir un aperçu de son enfant avec un peu d'avance.
- Ta filleule, répondit-il en tendant l'image de l'échographie à son frère.
Lorsque les yeux de James se posèrent sur la photo, Sirius eut l'impression de retrouver le gamin qu'il avait été avant la guerre.
Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne?
Oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh oh…