Black Sunset

Harry Potter - J. K. Rowling
F/M
G
Black Sunset
Summary
"La dernière fois que Voldemort a eu du pouvoir, il a failli détruire tout ce à quoi nous tenions le plus…"Cette histoire est celle de Bellatrix, fidèle lieutenant de Voldemort ; et de Sirius Black, le plus rebelle des membres de l'Ordre. Deux Black, deux camps, une seule guerre… Et une gamine précipitée au milieu de la tourmente.
Note
Un immense merci à Petit Saumon pour m'avoir permis d'imaginer cette histoire, pour ses impressions et son soutien. Un sincère merci à Sun Dae V pour sa relecture attentive, sa correction méticuleuse et ses retours plus que motivants. Un dernier merci à Coco , parce qu'elle me prête gentiment son oreille à chaque fois que je parle de cette histoire.
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Chapter 24

Black Sunset

Première Partie : Stars.

Chapitre 24

This is a tricky situation -
I've only got myself to blame
It's just a simple fact of life
It can happen to anyone -
You win - you lose
It's a chance you have to take with love
(It's a hard life - Queen)

Lundi 30 Mars 1981, St Luke's Magic Hospital, Idaho, Etats-Unis.

Sirius avait oublié à quoi ressemblait la vie normale.

Il avait oublié les rues animées, les passants insouciants, la joie de vivre qui s'emparait des esprits une fois les beaux jours de retour, les terrasses des restaurants remplies et les rares agents de police.

A côté de la petite ville où se trouvait l'hôpital dans lequel Judy avait prévu de donner naissance - refusant tout net d'accoucher en Europe, encore moins à Londres -, la capitale britannique et le reste du pays faisaient figures de villes fantômes. Depuis l'élection de Millicent Bagnold, la majorité des événements culturels avaient été annulés, aussi bien chez les moldus que chez les sorciers, les habitants restaient cloîtrés chez eux, même si les murs ne leur offraient qu'un refuge relatif, les touristes ne venaient presque plus, et un climat d'extrême méfiance était de mise.

Il avait oublié qu'il n'y avait pas si longtemps, il pouvait sortir de chez lui sans avoir à vérifier tous les cent mètres qu'on ne le suivait pas, qu'il pouvait transplaner sans avoir à rajouter des étapes intermédiaires pour fausser les pistes, qu'il pouvait faire confiance à ses meilleurs amis et attendre la même chose en retour.

Il serra les poings et essaya d'effacer sa dernière pensée. Il avait promis à Judy de ne plus ruminer Édimbourg pour le salut de sa pauvre santé mentale. La mise en pratique s'avérait toutefois plus compliquée… Il n'arrivait pas à oublier que les Mangemorts avaient attaqué Edimbourg précisément le jour où James, Lily et Harry s'y trouvaient, que le vieux quartier en particulier avait été visé, que tous ceux qui se trouvaient dans l'hôtel où ils séjournaient avaient été tués de sang-froid, allongeant une liste particulièrement longue de victimes où on pouvait lire le nom de Fabian et Gideon Prewett. Il n'arrivait pas à se défaire de cette étrange certitude que la taupe de l'Ordre du Phénix se trouvait dans les rangs des Maraudeurs et que si ce n'était pas lui et Judy, il s'agissait alors de Peter ou Remus.

Il avait envie de vomir à chaque fois qu'il y songeait.

Seulement Édimbourg avait été une épreuve plus dure que les autres. Peut-être parce qu'il s'était cru en sécurité dans un hôtel de luxe moldu où personne n'aurait dû avoir l'idée de les chercher, peut-être parce qu'il avait bien cru mourir au milieu de ces Inféris, parce qu'il était arrivé quelques secondes trop tard pour secourir Fabian Prewett, ou parce qu'il ne savait pas encore si Judy, Harry et Peter s'en étaient sortis malgré tout. Peut-être était-ce simplement parce qu'il avait retrouvé sa petite-amie effondrée au Parlement Ecossais et qu'il s'en voulait toujours de n'être pas parti la rejoindre aussitôt qu'ils s'étaient débarrassés des Inféris ?

Édimbourg avait été une nuit d'horreur. L'une des pires qu'il avait traversé depuis le début de la guerre. Savoir qu'ailleurs, d'autres profitaient d'une vie normale la rendait encore plus difficile à digérer, même s'il n'était pas mécontent de ne plus avoir à être constamment sur ses gardes.

La main de Judy se glissa dans la sienne, et il réalisa qu'il avait cessé de se perdre dans la contemplation du centre-ville animé depuis bien longtemps. L'hôpital était en vue et Grant Adler se stoppa en douceur sur une place de parking : l'homme avait arrêté de conduire comme un inconscient à la seconde où il avait appris que sa fille unique était enceinte. Sirius était soulagé de ne plus à avoir à se cramponner à la poignée de la porte à chaque fois qu'il montait à l'arrière de l'énorme voiture.

- On vous attend ici, lâcha Burt.

Sirius hocha la tête et sortit du véhicule en même temps que Judy, et regretta aussitôt d'avoir pris sa veste en cuir. Les températures étaient bien plus clémentes que ce dont il avait l'habitude, et il comprit un peu mieux pourquoi Judy avait enfilé un pantalon de toile légère et un t-shirt fleuri.

- Lily t'a expliqué ce qu'était une échographie ? souffla-t-elle tandis qu'il passait un bras autour de ses épaules.

- C'est pour voir si le bébé va bien ?

- Exact.

Sirius avisa son sourire tordu et s'interrogea sur ce qu'elle ne lui disait pas. James et Lily avaient fait des échographies pour Harry, puisque Lily s'en était remis à la médecine moldue pour sa grossesse, moins pour rassurer sa propre mère que pour éviter que son état ne s'ébruite trop dans le monde sorcier. James et Lily se faisaient déjà discrets à l'époque, il ne les voyait qu'au cours des repas du dimanche, et cela l'avait sûrement sauvé d'autres détails sur les grossesses qu'il n'était pas prêt à entendre. S'il avait su, il aurait peut-être écouté James avec un peu plus d'attention l'année dernière…

Le docteur Wilson les accueillit avec un air satisfait moins d'une demi-heure plus tard, comme s'ils avaient changé d'avis grâce à son discours avisé sur l'avortement, et non pas parce qu'ils étaient trop frondeurs pour leur propre bien.

- Miss Adler, comment vous sentez-vous ?

Judy eut un large sourire, celui qui faisait naître une paire de fossettes au creux de ses joues, et une de ses mains glissa sur son ventre.

- Parfaitement bien.

Le docteur Wilson se livra quand même à un interrogatoire pointu, qu'il réussit à suivre parfois difficilement.

- Je vais vous examiner dans ce cas… Souhaitez-vous connaître le sexe de l'enfant ?

Sirius dévisagea le docteur moldu avec des yeux ronds, avant de se tourner vers Judy. Il devait avoir mal entendu. Il savait très bien que les sorciers ne demandaient pas le sexe d'un enfant à naître, pour la bonne et simple raison que le sortilège permettant de le déterminer était de la Magie Noire.

Judy lui offrit un clin d'oeil et son sourire tordu pour seule réponse.

- Ce petit s'est donné tellement de mal pour assurer la surprise jusqu'ici que ce serait dommage de le stopper à mi-chemin… Sirius ?

Encore à moitié assommé par la question, il se contenta de hocher la tête. Aussi loin qu'il était concerné, il se contenterait d'un enfant en bonne santé

Comme la fois dernière, ils rejoignirent le lit et le chariot surmonté d'une télé. Judy s'installa et releva son t-shirt pour découvrir son ventre. Sirius prit place à ses côtés, sa main gauche attrapant la sienne.

Contrairement à la fois dernière, Judy était détendue, son large sourire toujours sur ses lèvres et de l'impatience dans le regard. Elle ne fixait pas le plafond mais la télévision avec attention, et il se décida à l'imiter.

Il ne s'attendait pas à ce qu'il vit apparaître.

Après une succession de formes floues, une silhouette gris clair se détacha sur le fond noir et il crut avoir une hallucination.

Parce que ce n'était pas possible. Il n'était pas en train de voir le bébé avant même qu'il ne naisse.

Puis la silhouette bougea.

Putain de bordel de merde.

Il voulut baisser les yeux vers Judy, juste pour vérifier qu'il ne rêvait pas, mais il se retrouva incapable de détourner le regard de l'écran.

Le bébé avait déjà tout d'un petit être humain. Une large tête, deux bras, deux jambes, une colonne vertébrale et…

L'image bougea et une tâche plus foncée que les autres semblait vibrer.

- Ah, voici son petit cœur.

Quand les tambourinement réguliers de son rythme cardiaque s'élevèrent de la machine moldue, il sentit une première larme rouler le long de sa joue et il s'agrippa à la main de Judy.

Lundi 30 Mars 1981, Bureau de Cygnus Black, Londres.

Bellatrix changea à nouveau de position, essayant sans succès d'atténuer les fourmillements dans ses jambes. La sensation était hautement désagréable, mais elle ne songeait même pas à s'en plaindre. Tout comme les nausées matinales, ses sautes d'humeur et sa poitrine parfois douloureuse, ses jambes lourdes et son incapacité à rester debout trop longtemps étaient autant de signes qui lui rappelaient que sa grossesse suivait son cours. Elle avait supporté des douleurs si intenses quand son corps avait rejeté la vie, qu'elle accueillait avec bonheur celles qui témoignaient que tout se passait pour le mieux.

Elle espérait toutefois que le Maître les reçoive rapidement.

Une succession de bruits secs lui firent tourner la tête et elle trouva Pettigrow en train de se ronger les ongles à la façon d'un animal. Ce lâche n'avait-il donc aucune éducation ?

Il eut le bon sens d'arrêter en surprenant son regard noir et il glissa ses mains dans les poches de sa robe de sorcier.

Bellatrix ne savait pas encore si elle devait le croire.

Elle s'était rendue avec Bartémius la veille pour obtenir des explications concernant le fiasco d'Édimbourg. Les Potter avaient réussi à s'échapper avec une facilité insultante, et leur petit bâtard n'avait été aperçu nulle-part, quand bien même Pettigrow leur avait assuré que l'enfant serait de la petite fête. Pire, le petit traître n'avait pris part à aucun combat !

Elle en avait naturellement conclu que Pettigrow avait joué un double jeu dangereux, les prévenant d'un côté de la présence des Potter à Édimbourg, mais aidant le fils Potter à s'échapper de l'autre.

Évidement, Pettigrow s'était confondu en excuses - Bartémius n'avait même pas eu besoin de sortir sa baguette magique pour obtenir ses aveux - expliquant que la petite-amie de son cousin était aussi présente, et qu'elle avait été désignée pour emporter l'enfant loin de l'hôtel. Pettigrow n'avait soit disant rien pu tenter pour leur rapporter l'enfant, ou avait plus vraisemblablement manqué de cran quand il avait dû liquider la Sang-de-Bourbe.

Bellatrix était bien décidée à le mener au Maître pour lui faire payer son incompétence, sinon sa traîtrise, mais Pettigrow l'avait alors surpris avec une information inédite…

Deux noms.

Deux noms qu'elle ne connaissait que trop bien puisqu'ils appartenaient à un couple d'alliés à la Cause qu'elle avait croisé à de nombreuses fêtes et même invité dans sa propre demeure.

La série de Doloris que Bartémius avait lancé à Pettigrow pour lui faire passer le goût du mensonge avait eu pour seul effet de lui faire répéter, encore et encore, qu'il était certain de ce qu'il avançait. Qu'il les avait vus après une réunion de l'Ordre. Qu'il avait compris qu'ils jouaient un double jeu depuis plus d'un an.

Incapable de faire complètement confiance à un homme qui avait trahi ses idées une première fois, et craignant de passer à côté d'une information capitale, Bellatrix avait décidé de laisser le Seigneur des Ténèbres décider s'il disait, ou non, la vérité.

Finalement, la porte du bureau où Il traitait ses affaires courantes, s'ouvrit. Bellatrix fut la première à en passer le pas, suivie de Pettigrow, Bartémius fermant la marche. Arrivée au milieu de la pièce, elle s'agenouilla pour marquer son respect. Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas eu le privilège d'être invitée ici par son Maître pour une leçon de Magie Noire ou une mission destinée à elle seule.

- Quel est le motif de cette petite réunion, Bellatrix ?

Elle se releva, les yeux fixés sur le sol, gardant pour plus tard son besoin d'apercevoir son visage séduisant.

- Pettigrow a quelque chose d'important à vous dire, mon Seigneur.

Il s'avança vers le traître, s'arrêtant à seulement quelques pas. Pettigrow était toujours agenouillé au sol - ce qui était la seule position où il était à sa place - et tremblait - fidèle à lui même - de tous ses membres.

- Aleth et Cathal Byrne travaillent pour l'Ordre, Maître, murmura-t-il d'une voix trop aiguë. Je les ai vus de mes propres yeux avoir un rendez-vous avec Dumbledore.

Le Seigneur des Ténèbres se figea, puis sortit sa baguette magique. Pettigrow se mit à sangloter en surprenant son geste.

- Je vous promets que je vous dit la vérité, Maître. Je les ai vus !

Un geste de la part du Seigneur des Ténèbres lui imposa le silence, puis Bellatrix observa le délicat geste que fit le poignet de son Maître, cherchant dans ses souvenirs à quel sortilège il pouvait bien correspondre.

- Je te crois, Queudver, souffla-t- Il finalement. Et je te remercie de cette information. Je crois même que tes efforts méritent une récompense. Bellatrix se chargera de te trouver une épouse dans les mois à venir. Les noces auront lieu dès que je serais à la tête du Ministère. Bartémius, tu peux raccompagner notre ami chez lui.

Les deux hommes s'exécutèrent en silence, non sans s'incliner une dernière fois avant de quitter la pièce. Bellatrix profita que son Maître soit perdu dans ses pensées pour le détailler rapidement. Elle remarqua aussitôt les cernes qui soulignaient son regard noir et sentit une pointe d'inquiétude serrer son estomac. C'était le premier signe d'une quelconque faiblesse qu'elle apercevait chez son Maître depuis qu'elle avait rejoint ses rangs. Elle faillit lui demander si quelque chose le troublait - et lui proposer de l'aider - mais elle ne savait que trop bien qu'il ne fallait pas froisser sa fierté, qu'importe les circonstances.

- Cette nouvelle est très fâcheuse, souffla-t- Il finalement. Les Byrnes pourraient très bien avoir donné des idées à d'autres. Nous allons devoir faire d'eux un exemple. Une famille si ancienne… Quel gâchis.

Bellatrix garda son avis sur les Byrne pour elle. Si Cathal Byrne descendait d'une grande famille de Sang-Purs Irlandais, sa femme était une Sang-mêlée opportuniste, Gryffondor de surcroît. Ils avaient eu une fille ensemble qu'ils ne se donnaient même pas la peine d'élever eux-mêmes, laissant cette tâche à la grand-mère maternelle.

- Bellatrix, je compte sur toi pour organiser une petite fête d'ici la fin de la semaine prochaine. Invite tous nos alliés. Je me chargerai personnellement de Cathal et Aleth Byrne.

- Maître, si je puis me permettre, ils ont une fille. Peut-être…

- Non. Le moment venu, je la ferais placer dans une famille qui saura lui donner l'éducation que mérite son Sang et lui inculquer les bonnes valeurs. En attendant, je vais m'arranger pour que personne d'autre n'ait envie de trahir. Je veux une fête magnifique, Bellatrix. Que personne ne puisse douter de mon pouvoir.

Comprenant qu'il était temps pour elle de prendre congé, Bellatrix s'inclina profondément et quitta la pièce. Elle regrettait que sa grossesse l'empêche d'être celle qui ferait payer leur trahison aux Byrne, mais le Maître continuait à lui confier des missions malgré son état, signe qu'elle était toujours utile à la Cause.

Mercredi 1er Avril 1981, La Colline, Rowlfer, Idaho, Etats-Unis.

- Sirius ! Sirius réveille-toi !

Sirius ouvrit les yeux difficilement et il lui fallut plusieurs longues secondes pour se souvenir où il était. A ses côtés, Judy continuait de le secouer.

- Sirius, il faut qu'on aille à l'hôpital ! J'ai des contractions !

La panique dans la voix de Judy le réveilla bien mieux que tout le reste. Il se redressa vivement, batailla pour allumer la lumière et la trouva pâle, ses mains crispées sur son ventre et de la peur dans ses yeux bleus.

Une petite voix lui rappela que le bébé n'était pas prévu avant quatre longs mois et que ce n'était pas bon signe si Judy avait des contractions maintenant. Il dut prendre sur lui pour ne pas paniquer, même s'il n'avait pas la moindre idée de ce qu'il devait faire.

- Va prévenir mon oncle et mon père ! Il faut qu'ils m'emmènent à l'hôpital!

Il se leva aussi vite que possible, manquant de tomber en se prenant les jambes dans la couverture et heurta de plein fouet l'armoire. Ignorant la douleur, son ridicule, et le fait qu'il ne portait rien d'autre qu'un caleçon, il quitta la caravane de Judy en courant, traversa le jardin et ouvrit la porte de la maison à la volée. Encore mal réveillé et tout proche de la panique, il contempla la cuisine, incapable de se souvenir où se trouvaient les chambres de Burt et Grant. Il allait se résoudre à ouvrir chaque porte qu'il croiserait quand Grant surgit du salon, une batte de baseball à la main.

- Judy a des contractions ! s'exclama-t-il avant que Grant n'ait l'opportunité de l'agonir d'injures pour l'avoir réveillé. Il faut aller à l'hôpital.

Malgré le manque de lumière, Sirius était convaincu d'avoir vu Grant blêmir avant qu'il ne se précipite dans le salon, suivi de la plus longue phrase qu'il l'avait entendu prononcer depuis le début de la semaine.

- Burt ! Réveille-toi ! Judy a des contractions ! Il faut qu'on l'emmène à l'hôpital !

Sirius resta planté dans la cuisine, incapable de décider s'il devait rejoindre Judy ou rester avec les deux hommes. Incapable de reprendre son sang-froid. Il n'était pas médicomage, mais il savait que ce n'était pas bon signe. Il était beaucoup trop tôt pour le bébé naisse. Et si le bébé ne survivait pas ? Si Judy ne survivait pas ? Si…

- Je te dis que c'est une fausse alerte, Grant !

- Judy ne ferait jamais ça !

- Que tu crois ! Cette petite ne respecte aucune limite le jour du 1er Avril ! Rappelle-toi l'année où on a failli lancer tous les secours de l'Etat à sa recherche, parce qu'elle était soit disant perdue au milieu du parc du Yellowstone ? Et… Qu'est-ce que ? Oh, le blanc-bec !

Un coup sec derrière son crâne le ramena à la réalité et il se rendit compte qu'il fixait Burt et Grant, avec un air plutôt stupide en plus du reste.

- Comment une fille aussi intelligente a pu tomber amoureuse d'un crétin pareil me dépasse, grogna Burt en passant à côté de lui.

Ils rejoignirent la caravane en marchant d'un bon pas. Sirius essayait de prendre exemple sur l'attitude composée de Burt, mais il savait très bien qu'il était aussi dépassé par les évènements que Grant. Il espérait vraiment qu'il s'agisse d'une fausse alerte. Au moins pourrait-il se préparer pour la fois où Judy accoucherait pour de vrai.

Merlin, il avait comme envie de vomir.

- Et bien ce n'est pas trop tôt ! Il faut que je vous prévienne à l'avance la prochaine fois ? J'aurais eu le temps d'accoucher de triplets !

Judy était installée dans la pièce qui lui servait à la fois de cuisine, salon et salle à manger, parfaitement calme et détendue, son sourire tordu sur ses lèvres et une étincelle de malice dans les yeux.

Sirius sentit sa bouche s'entrouvrir sous la surprise.

- Qu'est-ce que je disais ? remarqua Burt en se tournant vers Grant. Une fausse alerte.

- Judy…

Le grognement de Grant ressemblait à celui d'un fauve particulièrement énervé et Sirius se décala par mesure de sécurité.

Judy choisit d'éclater de rire.

- Il est minuit passé. Le 1er Avril a commencé depuis dix sept minutes pour être précise. Et je suis au sommet de ma forme. Que la fête commence.

Trop choqué par le pur machiavélisme de Judy et encore sous les contrecoups de la peur et la panique, Sirius laissa le soin à Grant de lui faire une leçon de morale. Une fois que les deux hommes furent partis, il prit soin de lancer un très sérieux tu vas me payer ce coup-là, Adler ! a vant deretourner se coucher en espérant que tout ça n'était finalement qu'un mauvais rêve.

En se réveillant le lendemain matin, il comprit très vite que son aventure nocturne n'était qu'un léger avant-goût. Il se retrouva à court d'eau chaude après s'être soigneusement savonné et se rinça donc en un temps record, pour réaliser qu'il avait eu raison de trouver étrange la couleur verte du savon puisque la même couleur s'était accrochée à sa peau.

Le massacre se poursuivit au petit déjeuner: le lait était caillé, le café n'en avait que le nom et il était presque certain que les céréales étaient des croquettes pour chien - auxquelles Patmol fit honneur -.

Moins d'une heure après s'être levé, il était donc d'extrême mauvaise humeur. De peur de tomber sur une autre surprise de Judy, il décida de ne quitter la caravane sous aucun prétexte. Avec un peu de chance, il pourrait attendre que la journée passe.

Sauf qu'il n'était pas connu pour sa patience et il avait horreur de s'avouer vaincu.

Godric, le 1er Avril avait toujours été le jour des Maraudeurs. Ils préparaient une grande blague, qui demandait des mois de réglages minutieux, et tout le monde avait vite appris à se méfier de James, Peter, Remus et lui ce jour là. Ce à quoi se livraient Judy et Burt n'avait rien à voir. Ce n'était pas des blagues - ou du reste, il ne trouvait pas ça drôle - mais uniquement des mauvais coups dignes des deux Serpentards qu'ils ne se cachaient pas d'être. Il ne pouvait pas rester assis toute la journée et attendre que la tempête passe. Il était un Maraudeur. Il avait une réputation à tenir. Il…

Il regrettait amèrement qu'aucun de ses trois acolytes ne soient à ses côtés. Si James avait été là, ils auraient déjà un plan. Peter serait parti en reconnaissance et Remus aurait déjà terminé de distribuer les rôles.

Sirius grimaça. Il était seul sur ce coup. Il était hors de question qu'il demande de l'aide à Burt ou Grant - aucun ne la lui accorderait de toute façon - et si Judy le prenait pour cible, toute idée d'alliance était à oublier.

- Allez Black, marmonna-t-il tout en ouvrant le tiroir le plus proche à la recherche de quoi écrire.

S'il se débrouillait bien, il pourrait recréer quelques unes des meilleures blagues qu'ils avaient inventé à l'intention des Serpentards.

Sauf qu'il trouva bien mieux dans le tiroir.

Un petit miroir rectangulaire qu'il avait offert à Judy des mois de cela était rangé à côté de rouleaux de parchemins et de deux livres de cuisine magique. Il sentit un sourire en coin étirer ses lèvres.

James Potter !

Il dut réitérer son appel une dizaine de fois avant que James ne daigne lui répondre. Il vit les yeux de son frère s'écarquiller.

Sirius? Qu'est-ce qui t'ait arrivé ?

- C'est le 1er avril ici.

James fronça les sourcils avant d'éclater de rire et de se détourner.

Viens voir ça, Lils ! Je t'assure que ça vaut le détour.

De Lily, il ne vit qu'un seul oeil vert et de longues boucles d'un rouge foncé, avant d'entendre son rire.

J'adore cette fille!

- Votre sympathie fait plaisir à voir, vous deux!

James se fendit d'un clin d'oeil avant de retrouver son sérieux.

Tu veux un coup de main si je comprends bien ?

- Ce serait sympa…

Leur conciliabule de guerre dura une demi-heure, durant laquelle Sirius retourna chaque recoin de la caravane pour voir ce que Judy possédait en ingrédients pour une possible potion - c'est-à-dire pas grand chose - mais il trouva un stock de colorant alimentaire d'après Lily. James lui livra une bonne dizaines d'idées et insista pour qu'il fixe le miroir sur lui afin de pouvoir assister de loin aux représailles. Un sortilège de désillusion, un sac plein de divers objets et ses sens aux aguets, il quitta la caravane.

Commence par la maison Patmol. Et méfie-toi, elle doit être piégée.

Je sais, Cornedrue !

Il choisit de passer par la porte de derrière, celle qui ouvrait sur un débara où Grant rangeait les diverses marchandises qui allimentait ses traffics, du reste c'était ce que Judy lui avait expliqué à demi-mot.

En souvenir de ce que Judy lui avait appris lorsqu'ils avaient piégé le Manoir Black, il commença par les toilettes et les ensorcela pour qu'elles crachent sur quiconque les approcheraient. Il transforma toutes les bouteilles du placard en crapeaux et les serviettes en serpents.

Au fond de lui, il se doutait qu'il trichait en utilisant la magie, mais personne ne lui avait laissé le temps de se préparer à une guerre de mauvais coups moldus.

Il se glissa ensuite dans une des chambres - celle de Burt si ses souvenirs étaient exacts - et lança un sortilège aux draps pour qu'ils attaquent l'homme. Dans l'armoire, il attrapa une chemise et un pantalon pour plus tard, avant de passer à la chambre suivante.

La porte verrouillée et un coup d'oeil à travers la serrure lui apprit que Grant Adler s'y était retranché avec des provisions et sa solide batte de baseball à portée de main.

Avec sagesse, il décida de rejoindre le salon. Lorsqu'il le trouva vide, il commença à s'inquiéter sur un point: où étaient donc passés Judy et Burt ? Si la guerre à laquelle ces deux là se livraient chaque année était aussi impitoyable que ce que lui avait raconté Judy, ils ne pouvaient avoir disparu.

A moins que la maison soit un terrain de jeu si miné que ni l'un, ni l'autre n'y passait la journée pour éviter les divers pièges.

Après avoir enchanté le fauteuil pour qu'il emprisonne la personne qui s'assiérait dessus, il gagna la cuisine en se promettant d'être encore plus prudent dans le domaine de Burt.

Il ne lui falllut que quelques minutes pour métamorphoser les verres en poussins, les assiettes en souris et les couverts en cafards. Un autre sort l'assura que les chaises se reculleraient d'elles-mêmes au moment où quelqu'un voudrait poser ses fesses, tandis que la table serait prise de tremblements.

Bien, c'est ce que j'appelle une phase 1 rondement menée Pat'.

Sirius grimaça. La phase 2 s'annonçait un peu plus compliquée à réaliser et risquait de se conclure par son assassinat. Judy n'allait pas apprécier qu'il touche à sa moto.

Mercredi 1er Avril 1981, Manoir Lestrange, Angleterre.

Bellatrix allait définitivement avoir une fille.

Salazar, il en allait de sa santé mentale.

- Bella, je peux entendre tes nerfs lâcher un à un depuis ici. Tu régleras cela plus tard.

Elle se redressa pour adresser un regard particulièrement noir à son mari et reprit la liste qu'elle avait dressé.

Bien qu'une liste qui ne comprenait qu'une seule entrée n'était pas vraiment une liste.

- Personne n'acceptera jamais de marier sa fille à ce crétin. Pettigrow n'a pas d'intelligence, pas de charme, pas de charisme, pas d'argent et encore moins de physique. Tant que le Maître ne sera pas installé au pouvoir, il n'a aucun statut à mettre en avant.

Voilà pourquoi elle aurait une fille. Marier une fille était beaucoup plus simple. Surtout que la sienne serait l'héritière d'une famille influente. Si tout se passait comme prévu, elle serait même influente elle-même. Sans oublier qu'elle hériterait sans nul doute possible du physique avantageux des Black et des Lestrange.

Sa fille croulerait sous les demandes d'alliance avant d'avoir quatorze ans, elle en était convaincue.

Rodolphus se leva avec un soupir et vint la rejoindre à sa table de travail.

- Alecto Carrow, vraiment ? s'étonna-t-il après avoir lu par dessus son épaule.

Bellatrix grinça des dents. Oui, vraiment. Et elle savait d'avance qu'elle se voilait la face avec une fausse issue de secours. Les Carrow étaient dévoués à la Cause, et toujours prêts à satisfaire le Seigneur des Ténèbres, mais Narcissa lui avait raconté que le frère et la soeur entretenaient une relation bien trop tendre, même pour des jumeaux. Il était étonnant qu'une grossesse n'ait pas encore donné raison aux rumeurs. Convaincre Alecto de se marier avec Pettigrow frôlait l'impossible.

- Une alliance avec une Sang-Pure est vouée à l'échec, Bellatrix… Ce vaurien n'en sera jamais digne de toute façon. Mais il doit bien avoir quelques Sang-Mêlées qui seraient ravies de faire une entrée dans la cour du Seigneur.

Bellatrix releva la tête, une moue pensive que Rodolphus se chargea d'effacer d'un baiser.

- Je vais laisser traîner une oreille ou deux pour toi au Ministère, souffla-t-il contre ses lèvres. Je suis convaincu que Pettigrow aura même l'embaras du choix.

Une autre fois, elle aurait ardemment répliqué que cela lui paraissait fortement improbable - Rodolphus n'avait rencontré Pettigrow qu'une seule fois et il n'avait pas eu le privilège de le voir dans toute la splendeur de sa lâcheté et de sa médiocrité - mais Rodolphus avait repris possession de ses lèvres. Ses mains aux longs doigts fins s'appliquèrent à effacer la tension dans ses épaules avant d'en créer une bien plus agréable en effleurant sa poitrine.

- Rolf, gémit-elle.

Il déposa un baiser sur sa gorge avant de la soulever de sa chaise pour la déposer avec douceur sur la table. Il ne lui fallut pas longtemps pour lui faire oublier sa mauvaise humeur.

Mercredi 1er Avril 1981, La Colline, Rowlfer, Idaho, Etats-Unis.

- Black, je vais te tuer !

Sirius ne put retenir son éclat de rire. Judy arrivait pourtant droit sur lui, les joues rouges de colère et ses longs cheveux blonds parcourus d'étincelles de magie intuitive. La dernière femme qu'il avait réussi à mettre dans un tel état de colère était Lily, quand il lui avait annoncé tout penaud que James - enfin Cornedrue - était introuvable, mais certainement en train de cuver une gueule de bois mémorable sous sa forme Animagus quelque part dans la Forêt Interdite.

Et il avait survécu.

- Franchement Adler, tu ne croyais pas qu'après le coup de cette nuit tu allais t'en sortir aussi facilement, si ?

Elle assortit son regard noir à un grognement qui se voulait intimidant… Sauf qu'il avait affronté un loup-garou de mauvaise humeur plus de fois qu'il ne voulait bien s'en souvenir. Il daigna tout juste hausser un sourcils.

- On ne touche pas aux motos ! C'est la règle ! Et pas de magie non plus ! Burt va découper ton corps en morceaux quand j'en aurais terminé avec toi ! Et mon père y mettra le feu !

Tu as commencé Adler ! Sans me donner les règles du jeu en plus! La moindre des choses aurait été de me prévenir !

- Le 1er Avril tombe le premier avril tous les ans espèce de crétin !

- Certainement. Mais je pensais que la petite gué-guerre n'était qu'entre Burt et toi. Où vous étiez partis, d'ailleurs ?

La journée touchait à sa fin. Après avoir installé - magiquement - la moto de Grant dans les branches d'un des immenses sapins qui bordaient le jardin, puis déposé celle de Judy sur le toit, il avait lâché un épouvantail ensorcelé dans la maison. Si on faisait la liste de tous ses méfaits de la journée, il avait largement rendu la monnaie de sa pièce à Judy et Burt. Sauf qu'il ne les avait pas vus de la journée et qu'il avait même commencé à s'inquiéter.

- Je vais tuer cet abruti de blanc-bec!

Sirius tourna la tête au rugissement de Grant et dut faire appel à son courage de Gryffondor pour ne pas s'enfuir, avant de manquer d'éclater de rire en voyant l'homme - trempé de la tête au pied - se diriger vers lui, l'épouvantail accroché à sa jambe droite.

- Chacun son tour, Papa! répliqua Judy.

Sauf que son ton était nettement moins colérique que quelques secondes plus tôt, et qu'il la connaissait assez pour deviner le sourire qu'elle essayait de cacher. Au risque de se prendre un méchant coup de poing dans le ventre, il passa un bras autour de sa taille et l'attira contre lui.

- Tu m'as manqué, murmura-t-il à son oreille.

Elle leva les yeux au ciel mais se laissa aller dans son étreinte.

- Libère mon père avant qu'il ne te tue pour de vrai.

Sirius attrapa sa baguette magique dans la poche arrière de son jean et leva le sortilège qui donnait autant de grippe à l'épouvantail, avant de sécher magiquement les vêtements de Grant.

- Le vert ne te va pas du tout au teint, se moqua-t-elle.

- Le rose jure horriblement avec le tien.

- Quoi ?

Sirius s'éloigna précipitamment d'elle alors qu'elle portait les mains à ses cheveux. Il ne lui fallut pas longtemps pour répliquer à son tour et si elle était nettement moins douée que lui en métamorphose, il ne pouvait lui refuser son talent pour les sortilèges. Il se retrouva trempé, avec des cheveux hirsutes, une démarche approximative et une odeur nauséabonde collée à la peau. Il se vengea bien sûr, Burt se vengea également pour ses placards, ses draps tueurs et les toilettes cracheuses en ouvrant le tuyau d'arrosage, Grant trouva une poudre colorée dans ses cartons qu'il lança à la volée. Le jardin ressembla bientôt à un marécage multicolore et ils s'écroulèrent, victime d'un fou rire digne d'une terrible bataille de polochons entre Maraudeurs.

Sirius ne réalisa que bien plus tard qu'il n'avait pas songé à la guerre une seule fois durant toute une journée.

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