Black Sunset

Harry Potter - J. K. Rowling
F/M
G
Black Sunset
Summary
"La dernière fois que Voldemort a eu du pouvoir, il a failli détruire tout ce à quoi nous tenions le plus…"Cette histoire est celle de Bellatrix, fidèle lieutenant de Voldemort ; et de Sirius Black, le plus rebelle des membres de l'Ordre. Deux Black, deux camps, une seule guerre… Et une gamine précipitée au milieu de la tourmente.
Note
Un immense merci à Petit Saumon pour m'avoir permis d'imaginer cette histoire, pour ses impressions et son soutien. Un sincère merci à Sun Dae V pour sa relecture attentive, sa correction méticuleuse et ses retours plus que motivants. Un dernier merci à Coco , parce qu'elle me prête gentiment son oreille à chaque fois que je parle de cette histoire.
All Chapters Forward

Chapter 22

Black Sunset

Première Partie : Stars.

Chapitre 22

« And the battle's just begun
There's many lost, but tell me who has won
The trench is dug within our hearts
And mothers, children, brothers, sisters
Torn apart »

(Bloody Sunday - U2)


Jeudi 19 Mars 1981, Belfast, Irlande du Nord.

Bellatrix enfila son masque, savourant le contact du métal glacé sur son visage, et ajusta sa médaille sur sa robe pour que personne ne puisse la confondre avec un autre Mangemort. Rodolphus venait de lui passer un coup de cheminée, lui annonçant qu'il ne pourrait pas superviser l'attaque à Belfast à cause d'une cession exceptionnelle du Magenmagot : son absence serait bien trop suspecte. Il avait essayé de la convaincre de confier cette tâche à Rabastan, mais Bellatrix avait fermement refusé. L'attaque de ce soir était capitale. Ils n'avaient pas monté une telle opération depuis la Guerre des Géants, et il était grand temps que le pays se souvienne de ce dont ils étaient capables.

Rabastan ne pourrait jamais connaître le plan minutieux qu'elle avait mis au point durant un mois en une après-midi.

La tâche lui revenait donc.

Elle ramassa la petite fiole contenant un liquide vert presque luminescent, signe que sa grossesse suivait toujours son cours, puis quitta le Manoir par le réseau de Cheminée.

Elle réapparut au rez-de-chaussée d'un large bâtiment abandonné au milieu de la ville. Elle l'avait repéré dès le départ, attirée par les panneaux annonçant une destruction programmée dans quelques semaines. Barty, son visage caché par un masque aussi ouvragé que le sien, l'attendait entouré de quinze des nouvelles recrues. S'ils avaient tous reçu leur marque l'été de leur seize ans, ils n'obtiendraient un masque qu'après avoir prouvé leur valeur. Cette nuit, ils se contenteraient d'une simple cagoule de tissu noir.

Pour ne pas avoir à subir sa présence, Bellatrix avait envoyé Greyback gérer les deux bataillons d'Inféris dissimulés dans les égouts de la ville, Macnair se chargeait des Acromentulas qu'elle comptait libérer dans un internat et Rowle devait guider les trois Géants dans le quartier historique.

- Ma Lady, tout est en place.

Bellarix approuva d'un signe de tête.

- Allons-y dans ce cas. Je veux une véritable scène de carnage, rappela-t-elle aux jeunes qui s'agitaient avec nervosité, et celui qui ne me satisfera me servira de cobaye pour votre prochaine leçon de torture.

Jeudi 19 Mars 1981, Gloucester, Pays de Galle.

Sirius se précipita sur le Mangemort qui était en prise avec un sorcier avant même d'avoir vraiment terminé son transplange, prenant le risque de se désartibuler dans la précipitation.

Il courut droit devant lui, évitant les débris venant de l'effondrement d'un pan de mur et percuta l'homme au visage masqué de plein fouet. Surpris par cette attaque venue de nulle part, son adversaire tomba lourdement, et Sirius le maintint au sol avec force. Sa main trouva une brique et il asséna un revers impitoyable.

Un bruit d'os brisé lui tira un rictus et il se releva aussitôt, sa baguette au clair, et se tourna vers la victime du Mangemort.

Il ne faillit pas le reconnaître.

Ses cheveux châtains étaient bien plus longs et sales, une barbe lui mangeait le visage, et il avait un regard sauvage que l'approche imminente de la Pleine Lune n'expliquait qu'à moitié.

- Remus ?!

Le loup-garou essuya sa lèvre ensanglantée avec sa manche, ses yeux ambres braqués sur lui. Son silence buté lui donna l'impression de recevoir un coup de poing.

Il décida de ne pas s'en formaliser. Remus était têtu et parfois stupide. Arrivé à la veille de la pleine lune, il était systématiquement stupide.

- Qu'est-ce que tu fiches ici, Lupin ? demanda-t-il tout en tendant une main pour l'aider à se relever.

- J'ai entendu qu'il y avait un attentat par la radio moldue. Alors je suis venu aider.

A sa plus grande surprise, Remus n'accepta pas son aide. Il se redressa en grimaçant, ses yeux évitant les siens.

- Les combats se concentrent deux rues plus loin, marmonna-t-il finalement en désignant le bout de la ruelle.

Sirius aurait voulu dire quelque chose ou au moins rappeler à Remus qu'il était toujours son ami, et que tous ses efforts pour le tenir à l'écart étaient voués à l'échec. Après tout, il était le plus obstiné des Maraudeurs.

Seulement, ils étaient coincés au cœur d'une nouvelle attaque qui frappait Gloucester depuis un peu plus d'un quart d'heure, et les dégâts étaient déjà considérables. D'autres attaques avaient lieu à Belfast, Édimbourg et Londres. Ils ne pouvaient pas perdre du temps quand des moldus et des sorciers étaient en train de mourir non loin.

Et il avait des Mangemorts à liquider au plus vite.

Il suivit Remus en silence, ses sens aux aguets pour ne pas se faire surprendre par des tirs ennemis. Une rue plus loin, ils passèrent à côté de nombreux cadavres que Sirius refusa de regarder. Déjà, les éclairs de lumière réclamaient toute son attention et les cris des victimes étaient autant d'appels à l'aide. Il sortit l'arme de poing de sa ceinture, ôta la sécurité, puis se mit à courir. Un premier Mangemort tenta de lui barrer la route et il tira sans plus chercher à comprendre. Son cerveau, conditionné par près de quatre ans de guerre, oublia les notions de pitié et de fatigue. Il échangea des sortilèges, des coups de poings et finit par vider son chargeur. Son pistolet devint alors un merveilleux moyen d'assommer ses adversaires.

Il croisa des membres de l'Ordre - Figgs, les frères Prewett, Emmeline Vance -, sauva Benjy Fenwick d'un Avada qui venait droit sur lui en le plaquant contre un mur, se battit contre le début d'un incendie dans un immeuble tandis que plusieurs moldus appelaient à l'aide deux étages plus haut.

Il ne réalisa pas vraiment que dans chacune de ses attaques, Remus n'était pas à ses côtés. Tandis que les Mangemorts battaient en retraite avec l'arrivée d'un détachement d'Aurors et de Tireur d'Elite, il chercha son meilleur ami des yeux sans le trouver nulle part. Il crut qu'il était tombé et la panique lui fit reparcourir la rue qu'il avait si difficilement remonté.

- Black, qu'est-ce que tu fous ! l'appela Fabian.

- Tu as vu Remus ?

- Lupin ? Pas que je sache ! Ramène-toi, on a besoin d'aide ! Ces fumiers ont lâché des Inféris dans l'hôpital moldu !

Sirius fit un dernier tour sur lui-même, faisant de son mieux pour étouffer l'angoisse qui essayait de le submerger, se répétant des hypothèses qui sonnaient comme des conneries.

Il est peut-être déjà à l'hôpital. Ou alors blessé, mais en sécurité. Il a dû transplaner quand les Aurors sont arrivés, pour ne pas se faire repérer. Il ne fait pas bon d'être loup-garou ces derniers temps…

Il n'était certainement pas mort. Il ne pouvait pas mourir à Gloucester !

Il rallia l'hôpital moldu au pas de course. La Marque des Ténèbres se détachait nettement au-dessus de la ville, signe que les Mangemorts en avaient terminé avec eux. La température qui commençait à chuter lui appris que les Détraqueurs venaient clamer les âmes de ceux trop faibles pour se défendre.

En entrant dans le bâtiment encerclé par des moldus blessés de tous âges, il faillit vomir.

L'endroit grouillait littéralement d'Inféris, comme si tous les moldus qui avaient perdus la vie au début de l'attaque avaient été ramenés à la vie pour attaquer ceux qui avaient survécu. Il y avait plus de morts ici que partout ailleurs, l'odeur de sang était entêtante et les cris de douleur un supplice.

Un gamin d'une dizaine d'année tentait encore de s'échapper en rampant, laissant une large traînée de sang derrière lui. Il se précipita pour essayer de le sauver - il connaissait quelques sorts de Médicomagie, appris sur le tas auprès de Lily - mais fut frappé par l'impuissance quand il fit basculer le garçonnet sur le dos.

Ses intestins pendaient lamentablement de son ventre, et le bras qu'il pressait sur sa plaie béante était dérisoire. Il se contenta d'un Stupéfix, incapable de lancer un Avada, et espéra qu'il abrégeait au moins les souffrances du petit garçon.

Il se releva, une haine indicible dans le cœur, réarma son arme de poing et reprit le combat.

Jeudi 19 Mars 1981, Belfast, Irlande du Nord.

Le bruit des explosions et des tirs moldus était omniprésent. Bellatrix le sentait résonner à travers son corps à chaque salve. Le sol vibrait sous ses pieds, mettant son équilibre au défi, et la lumière des flammes surpassait celle des sortilèges.

L'attaque ne se passait pas comme prévue. Les moldus avaient riposté avec beaucoup plus de rapidité et de puissance que partout ailleurs, comme si une fraction de leur armée ne quittait jamais la région. En moins d'une demi-heure, la ville avait été envahie par des hommes en tenue kaki juchés sur leur énorme voiture. Les Géants avaient à peine réussi à les ralentir et les Inféris avaient été décimés.

Stan et elle avaient même dû battre en retraite, avant d'être séparés quand un bâtiment avait explosé.

Bellatrix savait qu'il serait plus raisonnable de créer un Portoloin pour regagner la sécurité. Elle n'aurait même pas dû être là en premier lieu. Elle faisait courir des risques insensés à sa fille.

Seulement, abandonner n'était pas dans sa nature.

Des cris lui parvenaient malgré le boucan provoqué par les armes moldus. Elle pouvait encore laissé une empreinte sanglante sur la ville.

Un groupe d'une dizaine de moldus était au prise avec trois Inféris qui avaient survécu aux balles des soldats moldus. Un homme armé d'un lourd fusil protégeait des femmes, quelques enfants et un vieil homme.

Ils ne l'avaient pas encore repérée et elle en profita.

Son premier Avada frappa une fillette à peine sortie de l'enfance.

La balle qui la toucha en pleine épaule la projeta violemment au sol. Sa tête heurta quelque chose de dur et des étoiles dansèrent l'espace de quelques secondes devant ses yeux. Elle se redressa malgré tout, la douleur drainait son énergie en même temps que le sang imbibait ses vêtements.

Il lui semblait que la lumière avait disparu. Des formes sombres dansaient partout autour d'elle sans qu'elle puisse décider de ce dont il s'agissait. Les sons lui parvenaient par vagues étranges sans qu'elle ne puisse les comprendre.

Elle tituba en avant, la souffrance dans son épaule gauche était insoutenable, et l'appel de l'inconscience était difficile à ignorer.

Elle redressa la tête et croisa un regard identique au sien.

L'air se bloqua dans sa gorge et elle cligna des yeux pour se convaincre qu'elle ne rêvait pas.

Son double lui faisait face. Son bras gauche pendait, inerte, le sang était partout sur elle et sa robe verte devenait de plus en plus rouge entre ses jambes, comme si tout le sang que contenait son ventre démesurément enflé s'échappait à gros bouillons de son corps.

Son double leva son bras valide et Bellatrix réalisa avec horreur qu'elle pointait une arme moldue sur elle.

Son instinct de survie fut plus fort que l'inconscience et elle attaqua la première. Elle enchaîna les sortilèges, sa magie de plus en plus sombre. Son double tira à son tour, sans que Bellatrix ne sente le moindre impact, signe qu'elle restait la plus forte. Elle s'apprêtait à lancer un Avada au moment où deux bras la saisissaient par l'arrière. Elle se débattit de toutes ses forces, incapable de savoir s'il s'agissait d'un ami ou d'un ennemi, puis la sensation d'un Portoloin la saisit au nombril.

Le sortilège de mort quitta sa baguette au moment où elle réapparut, heurtant une jeune recrue de plein fouet sans qu'elle ne le réalise vraiment, trop occupée à chercher son double pour l'achever avant qu'elle ne blesse sa fille.

Seulement, ses ennemis aux formes floues avaient disparu : il n'y avait qu'elle, le cadavre de la jeune femme qu'elle venait de tuer et la personne qui l'avait forcée à quitter la ruelle. La douleur revint, plus violente que jamais.

On la relâcha et elle tituba sur quelques pas avant de tomber à genoux et de vomir tout ce que son estomac contenait.

- Ma Lady, nous devons battre en retraite. Les moldus sont partout. Il faut partir.

Elle releva la tête et trouva Bartémius Junior à ses côtés. Il semblait inquiet et l'aida à se relever. Il lança un sortilège pour stopper le saignement de son bras, puis l'attrapa à nouveau par la taille.

Ils disparurent, pour de bon cette fois.

Vendredi 20 Mars 1981, Résidence de Sirius Black, Londres.

Sirius resserra son étreinte autour des épaules de Judy, son visage enfoui dans la courbe de son cou, son odeur épicée chassant celle de la mort qu'il avait trop respirée dans la nuit.

Chaque mission, chaque attaque, se concluait maintenant par son retour chez lui, suivi presque instantanément des bras de Judy. Il savait qu'elle passait la nuit à l'attendre, morte d'inquiétude. Elle savait qu'il ne pouvait pas rester à ne rien faire quand ses amis se battaient pour sauver des vies.

- Je vais bien, souffla-t-il pour la énième fois.

Même s'il mentait. Il n'allait jamais bien quand il revenait. Il se blessait rarement, ou du reste, jamais gravement. Des bleus, des coupures, des doigts cassés, rien qu'un bon sortilège ne puisse guérir en quelques secondes. Psychologiquement, c'était une autre histoire. L'habitude - Merlin, il détestait réaliser que la guerre était devenue son quotidien et se battre sa principale occupation - aurait dû l'endurcir, mais chaque nouvelle attaque apportait une nouvelle nuance d'horreur. Cette fois, le visage du gamin de l'hôpital allait le hanter pendant des nuits, le poursuivant dans ses rêves pour lui faire regretter de n'avoir pas su le sauver, d'être arrivé trop tard. Les autres blessés qu'il avait secouru ne seraient pas plus tendre avec lui. Les Inféris avaient fait énormément de dégâts, sûrement aidé par des Mangemorts puisque des pièces emplies de patients avaient été balayées par des explosions magiques, créées par de la Magie Noire. Même la maternité dans une aile isolée avait subi des pertes. Il avait fait tout ce qui lui était possible pour sortir les femmes et les nourrissons des décombres, mais il avait parfois été trop tard.

Et puis, il n'avait jamais revu Remus. Il ne savait pas ce qu'il était advenu de son meilleur ami. Pour tout ce qu'il en savait, le loup-garou était peut-être mort, peut-être prisonnier de Voldemort. Il aurait aimé lui envoyer un Patronus mais il avait été incapable d'en conjurer un après la nuit d'horreur qu'il avait passé. Il se contenterait d'une lettre pour lui, et d'une pour Lily, en espérant que Remus répondrait à leur sœur plus facilement qu'à lui.

En espérant qu'il soit encore vivant et qu'il ait juste décidé de se comporter comme le plus grand crétin ayant jamais marché sur Terre depuis le grand James Fleamont Potter lui-même.

Il sentit Judy sursauter dans ses bras et il la libéra légèrement, ses yeux cherchant les siens sans les trouver. Elle avait un regard absent mais un sourire émerveillé sur les lèvres.

- Donne-moi ta main, souffla-t-elle.

Il obtempéra sans vraiment comprendre. Elle souleva le large pull qu'elle avait pris dans son armoire, puisque la courbe que faisait son ventre s'était considérablement accentuée en l'espace d'un mois, et qu'elle râlait tous les matins contre ses vêtements devenus trop étroits.

Elle apposa sa main sur son ventre, juste en-dessous de son nombril, et il oublia la guerre l'espace d'une minute.

Sous la peau de Judy, le bébé était en train de bouger, et cette preuve de vie chassait les visions de la mort qu'il supportait de plus en plus mal.

- Tu le sens ? demanda-t-elle.

Il hocha vaguement la tête, sachant que s'il parlait maintenant, sa voix tremblerait.

Vendredi 20 Mars 1981, Manoir Lestrange.

Bellatrix se réveilla difficilement. Un regard autour d'elle lui apprit qu'elle se trouvait dans sa chambre, mais elle n'avait aucun souvenir d'être arrivée là.

Elle voulut se redresser, mais deux mains appuyèrent avec force sur ses épaules, lui arrachant une grimace de douleur.

- Reste allongée, Bella.

La colère contenue de Rodolphus sonnait étrangement comme une menace.

- Que s'est-il passé ? marmonna-t-elle.

- Tu as failli mourir, voilà ce qu'il s'est passé ! Tu n'aurais jamais dû aller à Belfast !

Bellatrix tourna la tête vers lui. Son mari était enfoncé dans un fauteuil, l'air sombre de ses mauvais jours sur ses traits nobles.

Elle voulut demander ce qu'il s'était passé à Belfast, quand un souvenir passa l'espèce d'engourdissement dû aux potions qu'on lui avait fait ingurgiter. Sa main se resserra sur son ventre et la peur s'immisça dans chacune de ses cellules, serrant sa gorge et lui donnant l'impression que son cœur battait directement dans ses oreilles. Elle se souvenait vaguement d'une femme qui en voulait à sa fille et de son armée d'ombre et…

Rodolphus eut une exclamation agacée.

- Notre enfant va bien, mais tu as perdu beaucoup de sang et cela aurait pu très mal tourner pour vous deux ! Je ne veux plus que tu partes te battre, Bellatrix. C'est trop dangereux dans ton état ! Après tout ce que tu as traversé pour être enceinte, tu ne peux pas risquer ta chance !

Bellatrix cessa de l'écouter dès qu'elle fut rassurée sur la santé de sa fille. Elle se fichait bien des mises en garde de Rodolphus. C'était après tout de sa faute si elle avait été obligée de partir mener l'attaque sur Belfast. Elle restait dévouée à la Cause et sa fille venait de lui prouver qu'elle était une guerrière en survivant à sa première bataille.

- Comment s'est terminée l'attaque ? interrogea-t-elle quand Rodolphus eut terminé sa diatribe.

Il la dévisagea avec rancoeur.

- Belfast a été un fiasco total. Nous avons largement sous-estimé le nombre de soldats moldus. Ils ont rapidement contre-attaqué et trois des jeunes recrues sont décédées, ainsi que les Géants. Les Acromentulas ont eu le temps de saccager l'internat où elles ont été lâchées mais les gamins moldus se sont défendus ! Il n'y a presque pas eu de morts !

Bellatrix n'en crut pas ses oreilles. Elle avait tout préparé avec autant de minutie que d'ordinaire. Les sorciers qu'elle avait interrogé lui avait bien entendu parlé de l'armée mais elle avait compris qu'ils faisaient référence à une base située à l'extérieure de la ville, pas à des soldats prêts à faire feu à chaque instant. De quoi était donc fait ces Irlandais ?!

Elle ravala la honte qui lui brûlait les joues. C'était la première fois qu'elle décevait son Maître et elle savait que sa punition serait à la hauteur de son échec cuisant.

- Et les autres attaques ? souffla-t-elle.

- Des réussites. Celle de Gloucester a particulièrement ravi le Seigneur des Ténèbres.

Bellatrix serra les dents et maudit Travers en silence.

Il m'a ordonné de venir le voir une fois que tu serais réveillée. Le Médicomage t'interdit de quitter ton lit jusqu'à nouvel ordre, et je t'ai pris ta baguette pour être certain que tu ne décides d'effrayer les Elfes quand ils te rappelleront les consignes de ta convalescence. Numéro 1 a pour ordre de toujours rester dans la même pièce que toi.

Elle n'eut même pas le temps de lui cracher le fond de sa pensée au visage qu'il quittait déjà la pièce sans un regard en arrière.

Dimanche 22 Mars 1981, Arrière salle de la Tête de Sanglier, Pré-au-Lard, Ecosse.

Deux mains se posèrent brusquement sur ses épaules et Sirius sursauta violemment, manquant de faire basculer la chaise sur laquelle il se balançait depuis une dizaine de minutes, attendant aussi patiemment que possible que les membres de leur petit journal arrivent.

- Félicitation, Black !

- Quand est-ce qu'on fête ça ?

Fabian Prewett s'installa à sa droite, révélant un large sourire, et Gideon à sa gauche, le regard brillant d'une malice dont il avait appris à se méfier.

- Qui vous l'a dit ? s'étonna-t-il tout de même.

- Peter, répondit aussitôt Gideon.

- Mais on l'a peut-être fait boire un peu pour lui arracher de vilains secrets sur James et toi, ajouta Fabian.

Sirius retint de justesse une grimace, sachant très bien qu'il s'agissait de la vérité et que Peter devenait une vraie pipelette après deux bièraubeurres. C'était d'ailleurs un miracle qu'il n'ait pas raconté à la moitié de la maison Gryffondor que Remus était un loup-garou du temps de Poudlard. Il chercha son meilleur ami du regard sans succès, avant de se souvenir que Queudver arrivait de plus en plus souvent en retard aux réunions de l'Ordre, pour repartir aussitôt. Son travail aux Archives se révélait être aussi contraignant que les gardes sans fin des Aurors, et Sirius était soulagé que son Oncle Alphard lui ait légué tout son or, lui permettant ainsi de pouvoir entièrement consacrer son temps à l'Ordre.

Et que Godric en soit témoin, il était plus décidé que jamais à faire tomber Voldemort et ses lèches-bottes.

- Il paraît même qu'il y a un pari en cours, Black. Fabian et moi, on mise sur une fille.

Il ouvrit la bouche pour protester, mais Gideon lui coupa la politesse, l'étincelle de malice devenant une flamme ardente. Il sut qu'il n'allait pas apprécier sa réplique avant même qu'elle ne quitte sa bouche.

- Et on mise même qu'elle brisera le cœur du petit Harry dans une quinzaine d'années.

Trop épouvanté à l'idée d'une telle éventualité - sans savoir si c'était la perspective d'avoir à gérer une peine de cœur venant de son filleul (si Harry ressemblait à James, ça allait être la fin du monde) ou de sa fille (Merlin, il avait assez brisé de cœurs pour savoir à quel point les filles se transformaient en furies une fois blessées) - qu'il ne trouva même pas une réponse acide à balancer au visage des jumeaux Prewett pour les faire taire. Sa mine déconfite leur tira des éclats de rire tonitruants et quand il releva la tête pour trouver un soutien - n'importe qui, même Alberforth Dumbledore ferait l'affaire - ce ne fut que pour croiser l'oeil de Madelyn McGonagall en face de lui.

- Tu vas être papa, Black ?

- Possiblement, grogna-t-il.

Elle haussa les sourcils et se redressa sur sa chaise, visiblement surprise, avant de serrer les lèvres, imitant le tic de sa tante.

- C'est Minerva qui va être ravie. La paire Black-Potter de retour au château… J'espère pour elle que ce sera une fille.

Cette dernière remarque lui tira un sourire en coin et il se rencogna contre le dossier de sa chaise.

Leur table finit par se remplir. Si les Londubats et les Potter ne seraient pas là, Benjy était toujours fidèle au poste, plus décidé que jamais à porter leur journal à bout de bras. Ils avaient également recruté Marlène, qui elle-même avait insisté pour que Kingsley - son petit-ami en plus d'être un collègue Aspirant Auror - soit de la partie. Enfin, Ambrose Figgs et Peter complétaient leur équipe.

Sirius laissa Benjy mener la réunion. Ils s'étaient organisés par hiboux pour gagner du temps - la présence d'une taupe dans l'Ordre rendait les réunions dangereuses - et les articles sur les attaques d'Édimbourg, de Gloucester, de Londres et de Belfast étaient déjà écrits. Dumbledore leur avait fait parvenir un énième appel à la résistance pour essayer de recruter d'autres volontaires. Ambrose Figgs avait demandé à sa sœur, une Cracmol bien intégrée chez les moldus, de leur faire un résumé de ce que pensaient les moldus de cette guerre. Enfin, James lui avait donné un article qui prenait la défense des loup-garous, conjointement écrit avec Lily. Le couple Potter avait même insisté pour signer de leur nom, échos à leurs anciennes déclarations publiques du temps où Voldemort n'avait pas encore décidé de les exterminer.

Merlin, cela faisait un an que James et Lily faisaient profil bas, mais il avait l'impression de faire référence à une autre décennie tant les choses avaient changé depuis. Un an plus tôt, la guerre se traduisait par quelques attaques, à peine une par mois, et Voldemort concentrait ses efforts sur des manœuvres politiques pour obtenir le pouvoir en plaçant ses fidèles à des postes clef. Depuis, Millicent Bagnold avait gagné les élections grâce au soutien de Dumbledore, et Voldemort avait répondu par la Guerre des Géants. Désormais, les attaques semblaient revenir toutes les semaines, frappant des grandes villes moldues comme des villages sorciers, la méfiance était omniprésente, le ministère était affaibli par des guerres intestines et la communauté magique à deux doigts d'une guerre civile.

Un an plus tôt, il était un séducteur sans scrupules, Regulus était encore vivant, Harry pas encore né, Judy ne faisait pas encore partie de sa vie, les Maraudeurs étaient plus unis que tout et la guerre ressemblait aux querelles entre Serpentards et Gryffondors qui avaient rythmé ses sept années à Poudlard.

- Sirius, tu feras équipe avec Ambrose, l'interpella Madelyn. C'est sa première mission de distribution, il lui faut un binôme aguerri. Vous serez avec le groupe de Peter et Benjy sur le Chemin de Traverse.

Sirius sortit de ses pensées pour hocher la tête et offrit un petit sourire à l'homme. Ambrose Figgs avait une bonne quarantaine d'années, presque plus de cheveux, une silhouette frêle et d'après ce qu'il avait cru comprendre, des compétences très moyennes en duel. Il était toutefois bon en sortilèges puisqu'il travaillait sur le Chemin de Traverse chez un artisan ébéniste. Sirius savait qu'il devrait jouer les gardes du corps pendant que son coéquipier de la soirée se chargerait d'enchanter la pile de journaux qu'ils devaient répandre dans la célèbre rue commerçante.

- Alberforth et moi, on va se charger de Pré-au-Lard. Les Prewett vont aller sur Godric's Hollow, Shacklebolt et McKinnon s'occupent du Ministère de la Magie.

Un exemplaire du journal, une large feuille pliée en quatre et recouverte de caractère d'imprimerie moldu, atterrit devant lui. Sirius s'appliqua à en dupliquer le plus possible sans altérer le contenu. Quand le symbole de l'Ordre du Phénix ressembla plus à un corbeau entouré de flammes qu'au magnifique Phénix, il arrêta le massacre.

Il était une heure du matin quand Madelyn McGonagall jugea qu'ils avaient assez de journaux. Sirius glissa une dizaine de paquets miniaturisés dans les poches de sa veste en cuir, se servit une dernière rasade de Whisky-Pur-Feu, attira Peter dans une accolade, avant de quitter le bar du frère de Dumbledore en saluant les autres d'un geste de la main. Il refusa de songer que peut-être, certains ne seraient pas là à la prochaine réunion.

Figgs et lui firent plusieurs étapes entre Pré-au-Lard et Londres pour ménager leurs forces et brouiller les pistes si jamais ils étaient suivis.

Le Chemin de Traverse était littéralement désert, conséquence du couvre-feu qui était de mise depuis la mort des Bones. Sirius ragea de ne pouvoir se transformer en Patmol pour être plus discret. Figgs et lui étaient vêtus de noir et longeaient les murs. Sirius avait exclu l'utilisation d'une désillusion, encore pour conserver des forces et éviter que Figgs soit pris entre deux feux s'ils venaient à être attaqués. L'homme aurait dû être formé par l'un des Aurors de l'Ordre, au moins sur les techniques élémentaires de sécurité, mais les Aurors étaient débordés… Benjy et Peter couvraient la première moitié de la rue principale et l'entrée de l'Allée des Embrumes. Figgs et lui devaient se charger des nombreuses petites rues qui s'enfonçaient dans le quartier sorcier.

Sirius s'échinait à ensorceler les journaux pour qu'ils se glissent sous les portes des maisons environnantes, en plus de se disperser dans la rue dans quelques heures, quand Figgs lui serra l'épaule.

- Je crois que j'ai entendu des bruits de pas, lui souffla-t-il.

Sirius se figea et tendit son ouïe d'Animagus sans rien percevoir. Il se releva tout en secouant la tête, supposant qu'il s'agissait d'un mauvais écho dans la rue.

Le souffle de l'explosion le propulsa plus de dix mètres en arrière et il percuta la porte d'une maison de plein fouet. Ses poumons se vidèrent d'un seul coup, sa tête fit un bruit sourd et seule sa lutte pour inspirer à nouveau l'empêcha de sombrer immédiatement dans l'inconscience. Il ignora le sifflement atroce dans ses oreilles et se redressa difficilement, cherchant sa baguette qui lui avait sauté des mains. Au loin, il y avait des éclairs de couleurs et il ne réalisa pas tout de suite que plusieurs venaient dans sa direction.

Il savait qu'il devait s'enfuir, le plus vite possible, surtout qu'il était sans aucun doute possible blessé, ce qui jouerait contre lui dans un duel.

Mais il ne pouvait pas abandonner Figgs.

Un nouvel éclat - vert cette fois - lui permit de repérer sa baguette. Il s'en saisit et roula sur lui-même, cherchant son coéquipier à travers sa vue trouble, rampant pour offrir une cible plus difficile à toucher.

Son entêtement finit éventuellement par payer, même s'il s'étonna de ne pas être déjà mort quand il effleura un pan de tissu sur sa gauche. Il s'en saisit et tira avec force.

Figgs bascula et Sirius se retrouva nez-à-nez avec son visage dont il manquait une bonne partie.

Il n'y avait plus rien à faire pour lui désormais.

Sirius combattit son envie de vomir et se glissa sous la forme de Patmol pour s'éloigner le plus vite possible. Il n'était définitivement pas en état de transplaner.

Forward
Sign in to leave a review.