Black Sunset

Harry Potter - J. K. Rowling
F/M
G
Black Sunset
Summary
"La dernière fois que Voldemort a eu du pouvoir, il a failli détruire tout ce à quoi nous tenions le plus…"Cette histoire est celle de Bellatrix, fidèle lieutenant de Voldemort ; et de Sirius Black, le plus rebelle des membres de l'Ordre. Deux Black, deux camps, une seule guerre… Et une gamine précipitée au milieu de la tourmente.
Note
Un immense merci à Petit Saumon pour m'avoir permis d'imaginer cette histoire, pour ses impressions et son soutien. Un sincère merci à Sun Dae V pour sa relecture attentive, sa correction méticuleuse et ses retours plus que motivants. Un dernier merci à Coco , parce qu'elle me prête gentiment son oreille à chaque fois que je parle de cette histoire.
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Chapter 17

Première Partie : Stars.

« I have seen peace. I have seen pain,
Resting on the shoulders of your name.
Do you see the truth through all their lies?
Do you see the world through troubled eyes?
And if you want to talk about it anymore,
Lie here on the floor and cry on my shoulder,
I'm a friend.»

(Cry - James Blunt)


Mardi 27 Janvier 1981, Résidence de Sirius Black, Londres.

Sirius sortit une première béquille à l'extérieur de la voiture qui les avait ramenés Judy et lui de l'hôpital, puis la seconde, avant de pivoter et de prendre appui pour se relever. Il commençait tout juste à prendre l'habitude de se déplacer grâce à ces engins moldus, mais l'épreuve des quatre marches qu'il devait gravir pour accéder à sa maison ne l'enchantait guère.

Surtout que Judy ne ferait rien pour l'aider.

Je t'accorde que votre preuve de stupidité part d'un bon sentiment, mais je crois qu'une leçon s'impose.

Passée sa frayeur après avoir découvert que Remus était un loup-garou avec l'aide de ce dernier, sa petite-amie s'était rangée à l'avis de Lily sur la question : étaient-ils tous cinglés ou avaient-ils simplement envie de mourir jeune ?

- Hey, Pat' ! Un coup de main ?

Sirius lui tendit sa béquille et laissa James passer un bras sous ses épaules. Il le porta presque jusqu'à son salon et il retrouva le fauteuil favori de son oncle avec satisfaction.

Après cinq jours à l'hôpital, sa maison lui sembla être l'endroit le plus accueillant au monde.

- Des nouvelles de Remus ? demanda-t-il à James tout en acceptant la bièraubeurre qu'il lui tendait.

Son meilleur-ami secoua la tête d'un air sombre et Sirius lui rendit son regard inquiet.

Après avoir quitté sa chambre à l'hôpital, et malgré le fait que James et Peter avaient tenté de le ramener à la raison, Remus avait rapidement transplané. Lily avait appris par Minerva McGonagall qu'il avait débarqué à Poudlard pour réclamer un rendez-vous avec Dumbledore. Pour des raisons de sécurité - on ne peut pas dire ce que l'on ne sait pas -, Dumbledore avait refusé de leurconfier où il avait envoyé le loup-garou, mais il ne pouvait s'agir que d'une mission d'infiltration dans une énième meute de loup-garous afin d'éviter qu'ils tombent dans le camp de Voldemort.

D'ordinaire, Remus s'arrangeait pour leur faire savoir qu'il était toujours en vie, mais vu les circonstances de son départ, ce ne serait peut-être pas le cas cette fois.

- Pas d'alcool, Sirius !

Joignant le geste à la parole, Lily attrapa sa bouteille en passant à côté de lui et lui donna un verre de jus de citrouille à la place.

- Quoi ? Pourquoi ?! s'insurgea-t-il en dévisageant la rouquine.

- Tu es encore sous médicaments jusqu'à la fin de la semaine… On ne mélange pas alcool et antibiotiques.

Le ton était sans appel, et Sirius comprit que Lily soutenait complètement Judy dans sa croisade pour lui faire amèrement regretter sa blessure. De leur côté, James, Peter et lui ne démordaient pas du fait que ce n'était définitivement pas grave et qu'ils recommenceraient dès que Remus cesserait de faire sa tête de mule.

Il supportait donc les manœuvres des deux femmes en attendant la parfaite guérison de sa jambe, ce qui ne prendrait plus très longtemps puisqu'il imbibait son pansement d'essence de Dictame.

En désespoir de cause, il se rabattit donc sur son paquet de cigarettes.

Peter les rejoignit dans la soirée, six boîtes de pizzas qu'il avait acheté en sortant de son travail sous le bras, mais la tête de quelqu'un qui a passé une très mauvaise journée. Il fallut attendre qu'il ait terminé son repas, complété par un gâteau préparé par Lily, et avalé deux bierraubeurres, pour le voir quitter son mutisme. James - incapable de voir un de ses amis souffrir en silence - avait quand même voulu savoir ce qui se passait. Peter avait baissé les yeux sur sa part de pizza et avait dégluti bruyamment.

- C'est compliqué au Ministère à cause de la mort des Bones.

Un lourd silence était tombé entre eux, et ils avaient tous échangé des regards abattus.

Sirius avait vidé son verre de jus de citrouille en souhaitant qu'il soit rempli de Whisky Pur Feu et Judy s'était tendue à ses côtés.

La nouvelle était tombée deux jours après la pleine lune, quand la fille des Bones - Amelia - avait découvert les corps de ses parents et de toute la famille d'Edgar dans leur maison à Nottingham, où ils avaient aménagé au début de l'année pour échapper aux menaces de Voldemort.

Le rapport des Aurors avait été formel sur la cause de leur mort, et le Royaume-Uni avait transféré toute la haine et la peur nourries par la guerre sur les loup-garous, sans voir que cette attaque avait sûrement été mise en œuvre par Voldemort. De nouvelles lois pour limiter les droits des lycanthropes allaient être votées en urgence pour rassurer la population, mais le mal était fait et les loup-garous étaient devenus les ultimes paria de la société sorcière, ce qui les pousseraient sans doute dans les bras ouverts de Voldemort.

Heureusement, la guerre étant un sujet exclu des conversations lorsqu'ils se retrouvaient, et Harry un petit garçon au rire facile, la tension s'était peu à peu évacuée.

Le temps d'une soirée, ils mettaient de côté les deuils de ce début d'année - les Evans, les Bones, ceux qui étaient tombés au combat - et leurs inquiétudes - qui mangeaient le peu d'espoir qui leur restait - de côté. Ils fêtèrent sa sortie de l'hôpital et les vingt-et-un ans - avec quatre jours de retard mais elle sembla s'en moquer - de Judy à grand renfort d'un délicieux Champagne que son Oncle Alphard avait acheté en France.

Merlin en soit témoin, ils avaient pour une fois l'impression d'être vivant dans un monde en paix.

Lily s'éclipsa une poignée de minutes pour coucher son fils à l'étage. A son retour, elle attira Judy sur le canapé à côté de Peter, lui volant au passage la cigarette qu'il venait d'allumer.

- Tu as des idées ? demanda-t-elle, libérant un nuage de fumée.

Judy se rencogna contre son siège et les détailla James, Peter et lui.

- Un renne, une sourie et un chat, dit-elle finalement en les désignant un par un.

Il fit de son mieux pour ne pas se sentir insulté, Peter eut l'air impressionné, et James garda un visage parfaitement impassible.

- Je serais curieux de savoir ce qui a guidé ton raisonnement, Adler.

- Ton surnom est Cornedrue et Sirius t'a offert des grelots à Noël pour compléter ta panoplie. Peter donne l'impression de prendre personnellement toute analogie aux rongeurs et adore le fromage. Lily appelle Sirius Chaton à tout bout de champ.

La rouquine se fendit d'un éclat de rire avant de lui adresser un clin d'oeil. Lily avait commencé à lui donner ce surnom pour le faire enrager, après que James lui ait parlé du secret des Maraudeurs. Bien évidemment, il avait répliqué avec Bichette, ce qui l'avait juste encouragée.

James lui fit discrètement signe de se transformer, mais continua à accaparer l'attention de Judy.

- Pour être honnête, Adler, je suis déçu. La forme Animagus de Sirius est littéralement celle de Sirius.

- Il faut que tu arrêtes la bièraubeurre, Potter, tes phrases ne veulent plus rien dire.

Lily se pencha vers elle.

- Judy, tu sais à quelle constellation appartient l'étoile Sirius, pas vrai ?

A sa plus grande surprise, Judy pâlit étrangement et tourna lentement la tête vers lui. Quand elle vit l'énorme molosse qui l'avait remplacé dans le fauteuil de l'oncle Alphard, la panique se déploya dans son regard.

- Putain de bordel de merde ! lâcha-t-elle tout en se levant d'un bon, avant de se mettre à l'abri derrière le fauteuil où était assis Lily et Peter. Tu ne t'approches pas, gronda-t-elle d'une voix plus aiguë que d'ordinaire, sa baguette dans sa main gauche et son poing droit serré à en faire blanchir ses articulations.

Sirius la fixa à travers les yeux de sa forme Animagus, trop choqué de sa réaction pour retrouver sa forme humaine. Un silence épais s'installa dans la pièce, à peine troublé par le craquement du feu dans la cheminée.

- Tu n'as pas à avoir peur, Judy, tenta James. Il a l'air d'un ours mais je t'assure que Patmol a bien meilleur caractère que Sirius.

- Je déteste les chiens.

Patmol aboya en réponse et Judy recula d'un nouveau pas sans jamais le lâcher des yeux.

- Je déteste les chiens, répéta-t-elle d'une voix tremblante. Ils me… terrifient. Plus ils sont gros, pire c'est. Reprend ta forme humaine Sirius. S'il te plaît.

La frayeur qui suintait de chacun de ses mots sonnait comme une supplique et Sirius abdiqua, tout en songeant que si elle n'avait pas semblé aussi terrifiée, il se serait sans doute vexé.

Judy resta encore une longue minute retranchée derrière le fauteuil à le fixer avant de ranger sa baguette dans une poche intérieure de son gilet.

- Et bien c'est une première ça Pat'… Je suis formel, Judy, la majorité des personnes le préfère sous sa forme Animagus, nous y compris.

Judy eut un sourire crispé puis revint s'asseoir. Sirius l'attira sur ses genoux quand elle passa près de lui et elle s'accrocha à sa main comme si elle luttait pour retrouver son sang froid.

A la sentir tendue contre lui, presque sur le qui-vive, il comprit finalement que sa peur des chiens était très sûrement liée aux circonstances de la mort de sa mère. Il se traita mentalement de crétin pour ne pas l'avoir prévenue au lieu de se transformer dans son dos pour lui faire une surprise.

Il resserra son étreinte autour de sa taille et elle se détendit légèrement.

- Tu n'as rien contre les cerfs et les rats, pas vrai, Judy ? demanda Peter, une moue inquiète sur le visage.

- Cerf et rat ? Tu es mauvais joueur, Potter, je n'étais pas si loin que ça !

James lui lança un faux regard noir avant de se relever et de pousser la table basse. Sans un mot de plus, il se transforma, imité presque aussitôt par Peter qui grimpa sur le dossier du canapé, passant derrière Lily qui se tendit.

Judy se détendit tout à fait, et Sirius devina que son ironie était de retour avant même qu'elle n'ouvre la bouche.

- Peter est le plus mignon de vous trois, les gars.

Mardi 27 Janvier 1981, Manoir Lestrange.

Bellatrix vérifia une dernière fois son reflet dans le miroir, ajusta une mèche du chignon sophistiqué qu'un Elfe de Maison avait passé plus de deux heures à coiffer, puis passa sa lourde cape noire autour de ses épaules.

- Numéro 1 ! appela-t-elle en quittant sa chambre.

Un Elfe surgit de nulle part et s'inclina si bas que son nez toucha le sol.

- Que peut faire Numéro 1 pour Lady Lestrange ?

- Est-ce que tout est prêt ?

- Tout a été fait selon les ordres de Lady Lestrange, Lady. Lord Lestrange est déjà dans le hall, Lady.

- Tu as plutôt intérêt à ce que tout se passe bien, Numéro 1. Si la moindre chose va de travers…

Elle laissa sa phrase en suspens, sachant pertinemment que son Elfe de Maison savait à quoi s'en tenir. Bellatrix prit la direction de la salle de réception et ne fut pas déçue du spectacle qui l'attendait : de lourdes tentures vertes, brodées d'argent, masquaient tous les murs tandis qu'une reproduction fidèle de la Marque des Ténèbres occupait une grande partie du plafond. Elle s'approcha du trône de son Maître et le toucha du bout des doigts avec déférence. Le contact du métal froid sur sa peau termina de la rassurer : ce qu'elle vivait était bien réel.

Aujourd'hui, son Maître lui faisait l'honneur inestimable d'organiser une de ses réunions dans son humble demeure.

L'horloge sonna vingt heures et Bellatrix s'empressa de quitter la pièce.

Le Maître était toujours le premier à entrer.

Elle rejoignait tout juste Rodolphus quand le Seigneur des Ténèbres fit son apparition.

Bellatrix baissa la tête avec respect. Il passa devant eux sans un mot et il s'en fallut d'une dizaine de minutes avant que le dernier Mangemort n'arrive.

Bellatrix ajusta alors son masque et prit la tête du cortège. Chacun trouva sa place dans le cercle puis s'agenouilla.

- Mes chers amis, dit le Lord, nous commençons cette année en beauté et cela n'aurait pas été possible sans vos efforts. Les attaques menées ces derniers mois ont été exécutées dans les règles qu'exige notre Cause et je suis particulièrement satisfait du soin que vous mettez à laisser des scènes de carnage derrière vous. Ce soir, mes louanges s'adressent tout particulièrement à notre hôte: Lady Lestrange, levez-vous et approchez.

Bellatrix s'exécuta et vint se placer à la droite de son Maître, le cœur battant si fort qu'il menaçait d'exploser.

- Mercredi dernier, notre lutte acharnée contre l'Ordre du Phénix a connu une grande avancée et nous devons cette victoire à Bellatrix Lestrange. L'attaque des Bones va nous assurer la loyauté de tous les loup-garous de ce pays.

Il se leva et Bellatrix se demanda pourquoi.

- Je sais reconnaître la valeur de mes Mangemorts et parmi tous ceux qui m'ont juré obéissance et loyauté, tu es celle qui ne m'a jamais déçu. Ton dévouement pour la Cause est admirable et c'est pourquoi j'ai décidé de faire de toi mon premier lieutenant. Tes ordres auront désormais force de loi, Bellatrix.

Bellatrix se redressa de toute sa hauteur et releva le menton, même si son regard restait baissé.

Le Maître passa autour de son cou un lourd pendentif sur lequel était gravé la Marque des Ténèbres.

- C'est trop d'honneur, Maître, dit-elle en s'agenouillant. Merci.

Vendredi 30 Janvier 1981, Résidence de Sirius Black, Londres.

Sirius fut réveillé par un désagréable bourdonnement dans ses oreilles, suivi par des bruits sourds venant du rez-de-chaussée. Le réveil annonçait à peine sept heures du matin mais il se leva aussi vite que son cerveau endormi et sa jambe blessée le lui permettaient. Il attrapa un tee-shirt sur la chaise où s'entassait des vêtements et l'enfila tout en descendant les escaliers.

- J'arrive… marmonna-t-il.

Les coups cessèrent et les pleurs d'un bébé les remplacèrent. Sirius sentit le sang se glacer dans ses veines et il défit les charmes aussi rapidement qu'il le put.

Lily apparut dans l'encadrement de sa porte, Harry dans ses bras, James nulle part en vue. A son visage torturé par l'angoisse et ses yeux brillants de larmes, il imagina tout de suite le pire.

Pitié, pas James, pria-t-il, sa main serrée sur sa baguette pour ne pas s'écrouler tout de suite.

- James est ici ? demanda Lily d'une voix suppliante.

- Non… Il devrait ?

Lily continua à bercer Harry d'un bras, sa deuxième main volant dans ses longues mèches carmin, les emmêlant d'avantage.

- Je… Il…

- Vous vous êtes disputés ?

Elle secoua la tête, la lèvre inférieure de plus en plus tremblante, et il l'attira contre lui pour ne pas la voir s'effondrer.

- Je ne sais pas où il est, lâcha-t-elle entre deux sanglots. Je pensais qu'il serait venu te trouver.

Si Sirius n'avait pas la moindre idée de ce qu'il se passait, il était toutefois sûr d'une chose : ce devait être très grave pour que James disparaisse au lieu de venir se plaindre de ses malheurs.

Malgré l'inquiétude, il attendit que Lily ait cessé de pleurer pour la libérer. Il l'emmena dans son salon où Judy les rejoignit une poignée de secondes plus tard, des questions plein les yeux et une inquiétude sincère sur le visage.

- Bichette, qu'est-ce qu'il se passe ? demanda-t-il avec patience.

Lily essuya ses joues humides mais garda le silence, berçant un Harry qui ne cessait pleurer malgré les efforts de sa mère. Sirius remarqua que Lily le fixait comme si elle avait peur que quelqu'un vienne le lui arracher.

- Lil's ? insista-t-il en attrapant ses épaules pour la ramener dans la réalité. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Elle ouvrit la bouche, mais Harry se remit à pleurer de plus belle, se tortillant comme pour se libérer de l'étreinte de sa mère. Sirius se pencha pour le prendre et Lily lui lança un regard sauvage, reculant pour protéger son fils. L'inquiétude manqua de lui faire perdre son sang froid à son tour. Il ne comprenait pas ce qu'il se passait. La disparition de James était de mauvaise augure, le comportement de Lily ne lui ressemblait pas, et il avait un mauvais pressentiment concernant Harry. Il fut tenté d'appeler Remus et Peter à la rescousse, avant de se souvenir que le premier était aux abonnés absents et le deuxième d'aucune aide quand il s'agissait de consoler Lily.

Judy lui apporta une solution sous la forme d'un verre d'eau contenant une dose de Filtre de Paix. Lily s'en saisit et le descendit d'un trait, les pleurs ayant sûrement rendu sa gorge sèche. En l'espace de quelques minutes, sa respiration retrouva sa profondeur et elle relâcha son emprise sur Harry, qui se calma à son tour. Il observa sa petite sœur sombrer dans le sommeil avec un pincement au cœur, même s'il savait que c'était sûrement la meilleure chose qu'elle puisse faire en cet instant. Il récupéra Harry puis le tendit à Judy.

- Je pense savoir où est James. Je vais essayer de comprendre ce qu'il se passe. Tu peux t'occuper de lui ?

Judy cala le petit garçon contre elle et hocha la tête.

- Sois prudent…

Il se retint de faire une promesse qu'il était incapable de tenir, puis rejoignit l'étage pour s'habiller. Moins de cinq minutes plus tard, il décollait avec sa Bonnie en direction du sud-est de l'Angleterre.

Le trajet lui prit à peine une heure et il atterrit sur une route de campagne balayée par le vent du large qui emmenait avec lui le sel de l'océan.

A une centaine de mètres, une large bâtisse de brique rouge était cachée au milieu d'arbres immenses. Il gara sa Bonnie au pied du portail. Il lui fallut un moment pour rassembler son courage avant d'entrer. Ni lui, ni James, n'étaient revenus depuis le décès de Fleamont et Euphémia. James avait emmené les objets de valeurs à Gringotts et ils avaient soigneusement protégé la maison contre d'éventuels voleurs avec l'aide de Remus, Lily et Peter. Malgré tous les bons moments qu'ils avaient passé dans cette maison, leur décès était encore trop récent pour qu'ils y rentrent le cœur serein.

La végétation avait profité de l'absence d'Euphémia - reine du jardin - pour devenir anarchique. Il repéra toutefois un chemin à travers les herbes hautes et fut au moins rassuré sur un point : James était passé par ici.

Et il y avait de bonnes chances pour qu'il y soit encore.

En passant la porte d'entrée, il ôta veste de cuir, chaussure et rangea le tout dans le vestibule par habitude. Il ignora la salle à manger à gauche et le salon à droite, et emprunta le large escalier qui desservait l'étage. Ses pas le conduisirent vers l'ancien bureau de Fleamont.

Adossé contre l'un des larges fauteuils de cuir brun, James était assis à même le sol, ses coudes reposant sur ses genoux et son visage caché par ses mains. Une bouteille de Skotch moldu bien entamée à ses côtés. Il conjura aussitôt un Patronus qu'il envoya rejoindre Judy afin qu'elle puisse rassurer Lily.

- Fous-moi la paix, Black, grogna-t-il d'une voix pâteuse avant même qu'il n'ait fait un pas dans la pièce.

Il l'ignora, sachant pertinemment que si James avait vraiment voulu rester seul à contempler ses malheurs, il n'aurait pas pu franchir le portail.

- Lily est chez moi, dit-il en s'asseyant sur le canapé qui lui faisait face. Elle est morte d'inquiétude.

Un silence buté lui répondit. Il soupira.

- On sait tous les deux que tu finiras par me dire ce qui se passe, Potter… reprit-il en sortant son paquet de cigarettes de la poche arrière de son jean. Et j'ai toute la journée devant moi.

James éprouva sa patience pendant une longue heure, qu'il passa à voir diminuer le niveau d'alcool dans la bouteille de Scotch, tout en essayant de comprendre ce qui pouvait bien être à l'origine de sa réaction et de celle de Lily.

L'Ordre du Phénix avait pris un sérieux coup depuis la mort des Bones et Dumbledore essayait désespérément d'endiguer le mouvement de haine contre les loup-garous, expliquant avec patience à qui voulait bien l'écouter que Voldemort était le seul à blâmer, et que les nouvelles lois allaient offrir de nouveaux alliés au camp adverse. Fol-Oeil avait suspendu les réunions tant que son département n'aurait pas découvert comment Voldemort avait pu retrouver les Bones à Nottingham.

Leur lutte s'était donc compliquée, mais la situation n'était pas aussi catastrophique que l'été dernier. James ne pourrait décidément pas lui expliquer qu'il en avait assez d'être laissé de côté - ils l'étaient tous - et si la menace de Voldemort planait plus que jamais au-dessus de l'Ordre du Phénix, elle ne visait personne en particulier, encore moins les Potter qui faisaient profil bas depuis presque un an.

- Est-ce que tu crois aux Prophéties, Pat' ? demanda-t-il finalement en redressant la tête vers lui.

Sirius trouva son regard trop rouge et trop suppliant pour y voir un bon signe.

- Tu as suivi l'option de Divination comme moi, Cornedrue… On a compris dès le premier cours qu'il fallait juste avoir de l'imagination pour avoir une bonne note.

- Ouais… Mais est-ce que tu crois que certaines choses sont écrites d'avance ? Qu'importe ce que l'on peut faire, elles se réaliseront quand même ?

- Tu sais très bien que tes parents exceptés, ceux qui essayent de me dicter ma conduite peuvent aller se faire foutre. Le Destin et les diseuses de bonne aventure compris.

Le silence retomba et James lui donna l'impression de contempler sa réponse. Des larmes semblèrent sur le point de s'échapper, mais il se frotta les yeux et renifla sèchement.

Sirius serra les poings malgré lui, se préparant à encaisser la suite de ses confidences.

- Dumbledore est venu nous voir hier, avoua-t-il du bout des lèvres. Il… Il y a une Prophétie… Harry pourrait être celui qui vaincra Voldemort, Pat'…

Sirius eut l'impression d'avoir avalé un sac de glaçons. Il fixa le vide pendant une poignée de secondes, peinant à analyser la situation. L'annonce de James défiait toute logique, même la sienne.

- Dumbledore a complètement perdu la boule ! s'écria-t-il. Harry a six mois ! Il ne sait même pas marcher ! Il pourrait très bien être un Cracmol pour autant qu'on en sache !

James soupira d'un air abattu et but une nouvelle gorgée de Scotch.

- C'est ce que j'ai dit à Dumbledore, marmonna-t-il. Mais Voldemort a l'air d'y croire dur comme fer et il ne laissera personne se dresser en travers de sa route.

Il ne comprit pas tout de suite où voulait en venir James.

- Ce salaud veut tuer Harry ?!

- A en croire Dumbledore…

Sirius s'affala contre le dossier de son fauteuil et se frotta le front d'un geste compulsif, cherchant une issue à ce merdier sans en voir aucune. Voldemort voulait tuer son filleul, et probablement James et Lily plus que jamais. Il était incapable de s'imaginer un monde où James, Lily et Harry n'étaient plus. La seule perspective que l'un des trois disparaisse le laissait paralysé par l'angoisse au point que respirer lui demandait un effort surhumain. Il eut envie de pleurer mais résista pour ne pas offrir une victoire de plus à la seule peur qui le rongeait depuis qu'il s'était engagé dans l'Ordre du Phénix aux côtés de James, Peter, Remus et Lily.

Et si jamais l'un d'entre eux tombait ?

Par réflexe, il transforma sa peur en une prodigieuse colère qui chassa le froid dans ses entrailles et raviva son foutu courage de Gryffondor dans son cœur.

- On va le protéger, James, gronda-t-il en plantant son regard dans celui de son meilleur ami. Je te promets que cet enculé ne touchera pas un seul de ses cheveux, quoique cela pourra me coûter.

Vendredi 30 Janvier 1981, Manoir Lestrange.

Bellatrix se réveilla avec le soleil et s'étira à la manière d'un chat, savourant les légères courbatures qui nouaient ses muscles. Elle glissa un coup d'oeil au corps nu de son mari près d'elle et sourit en se souvenant de la nuit qu'ils avaient passé ensemble.

Elle ne s'était jamais sentie aussi femme que depuis le Solstice d'hiver…

Finalement, elle se décida à se lever et, sans se soucier de sa nudité, gagna la salle de bain.

- Numéro 1, appela-t-elle à voix basse pour ne pas réveiller Rodolphus.

Son Elfe de Maison apparut aussitôt.

- Lady Lestrange a appelé Numéro 1 ?

- Fais moi couler un bain. Ensuite, tu feras préparer le petit-déjeuner.

- Tout de suite, Lady.

L'Elfe commença à s'activer et Bellatrix oublia bien vite le petit serviteur. Comme chaque matin depuis le Solstice, elle saisit une fiole contenant une potion transparente, ôta le bouchon puis se piqua le bout de son index à l'aide d'une aiguille. Bientôt, une bulle de sang rouge gonfla et elle l'a fit tomber dans la potion.

- Le bain est prêt, Lady.

Bellatrix fit signe à l'Elfe de disposer et se glissa avec délice dans une eau parfumée à la température idéale. Bientôt, la chaleur et le bien-être qui pulsaient dans chaque fibre de son être finirent par détendre jusqu'à son esprit.

Elle s'assoupit.

Bellatrix fut réveillée par un délicat baiser sur ses lèvres. Ses yeux papillonnèrent mais elle ne fut pas surprise de trouver Rodolphus agenouillé à côté du bain.

Elle remarqua tout de suite son expression étrange.

- Qu'il y-a-t-il ?

Son mari se contenta de lui tendre le test de grossesse qu'elle avait utilisé un peu plus tôt.

Un sourire éclaira alors son visage et elle passa un bras autour du cou de Rodolphus pour l'embrasser à perdre haleine.

Surpris, il lâcha la fiole et elle se brisa dès qu'elle touche le sol, projetant un liquide vert sur le marbre délicat.

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