Black Sunset

Harry Potter - J. K. Rowling
F/M
G
Black Sunset
Summary
"La dernière fois que Voldemort a eu du pouvoir, il a failli détruire tout ce à quoi nous tenions le plus…"Cette histoire est celle de Bellatrix, fidèle lieutenant de Voldemort ; et de Sirius Black, le plus rebelle des membres de l'Ordre. Deux Black, deux camps, une seule guerre… Et une gamine précipitée au milieu de la tourmente.
Note
Un immense merci à Petit Saumon pour m'avoir permis d'imaginer cette histoire, pour ses impressions et son soutien. Un sincère merci à Sun Dae V pour sa relecture attentive, sa correction méticuleuse et ses retours plus que motivants. Un dernier merci à Coco , parce qu'elle me prête gentiment son oreille à chaque fois que je parle de cette histoire.
All Chapters Forward

Chapter 16

« When the hour is nigh
And hopelessness is sinking in
And the wolves all cry
To fill the night with hollering »
(Bleeding out - Imagine Dragons)


Mercredi 21 Janvier 1981, Résidence des Bones, Nottingham.

Le soleil basculait lentement au-dessus de la ville de Nottingham. Bellatrix le fixa du coin de l'oeil jusqu'à ce qu'il disparaisse derrière le château qui trônait au sommet d'une légère colline, puis reporta son attention sur le petit manoir que les Bones occupaient.

Pettigrow avait tenu son délai, et après avoir passé une journée dissimulée par une cape d'invisibilité que le Maître lui avait confié en compagnie de Bartémius Croupton, Bellatrix avait été obligée d'admettre qu'il n'avait pas menti.

Elle était toutefois déçue des Bones : sa mère lui avait appris à ne pas les sous-estimer, arguant qu'il ne fallait pas se fier au fait que chacun de ses membres - ou presque - soit passé à Poufsouffle. Les Bones avaient un sens pratique reconnu qui leur avait permis d'atteindre des postes très demandés au Ministère.

Oswald et Edgar Bones semblaient échapper à cette règle.

La menace du Seigneur des Ténèbres, suivi de l'enlèvement de la petite Cracmolle, auraient dû les inciter à la prudence la plus élémentaire. Décider de faire habiter tout le monde sous le même toit n'était pas prudent, et même tout à fait stupide.

- Mes louveteaux sont en place.

Bellatrix tourna vivement la tête vers Fenrir Greyback et retint de justesse une moue dégoûtée et un mouvement de recul.

Elle haïssait ce sauvage depuis leur première rencontre - durant laquelle il avait posé sur elle un regard affamé avant de se lécher les lèvres avec provocation, sans qu'elle n'ait réussi à savoir s'il s'agissait là de faim ou de désir - et elle n'avait pas été ravie quand le Maître lui avait imposée cette collaboration, arguant que Greyback avait réclamé de la chair fraîche à chaque Pleine Lune en échange de sa loyauté.

Elle avait donc été obligée de revoir ses ambitions à la baisse pour l'attaque des Bones et elle regrettait de ne pas pouvoir régler ses comptes avec Denise avant que celle-ci ne meure.

- Très bien, répondit-elle finalement.

Elle repéra rapidement l'un des louveteaux de Greyback : un garçon d'une dizaine d'années, vêtu simplement d'un short malgré le froid glacial, attendait avec une impatience flagrante que le soleil termine sa course pour dévoiler la pleine lune.

Bellatrix vérifia l'heure et décida qu'elle pouvait lancer l'attaque. Elle estimait que les protections de la maison ne devraient pas leur poser trop de résistance, non plus que les Bones seraient en état d'affronter huit Mangemorts, et il fallait se laisser une marge d'erreur pour éviter qu'ils ne se retrouvent enfermés avec les Bones et une dizaine de loup-garous déchaînés.

- Barty, les barrières anti-transplanage sont en place ? demanda-t-elle à l'intention du jeune homme qui faisait définitivement partie de toutes ses sorties.

- Je les ai posées moi-même, Lady. Ils seront pris au piège comme des rats.

Bellatrix songea aux cheminées condamnées par leur contact au Ministère et acquiesça avec un sourire.

- Allons-y dans ce cas.

Dans même ensemble, Rabastan, Mulciber, Karkaroff, Avery, Macnair, Croupton Junior et elle se lancèrent à l'assaut des protections du bâtiment. Bellatrix usa de tous les sortilèges que le Seigneur des Ténèbres lui avait généreusement appris à maîtriser. La Magie Noire percuta violemment l'architecture magique qui entourait la maison. Au bout de quelques minutes, un dôme aux reflets bleutés apparut et Bellatrix accentua la pression, sachant que la fin était proche.

Lorsque les sortilèges se brisèrent, un souffle magique la heurta de plein fouet et seuls de nombreux entraînements lui permirent de ne pas basculer. Elle ne put retenir un sourire en coin quand elle vit Greyback se redresser difficilement après avoir fait un tonneau sur lui-même.

Un premier sortilège manqua toutefois de la désarmer, aussi reporta-t-elle toute son attention sur le combat qui l'attendait. Oswald et Edgar Bones se portaient à leur rencontre, mais à deux contre huit, ils n'avaient pas la moindre chance. Le père reçut deux stupéfix en pleine poitrine, et elle désarma le fils en le touchant d'un sort qui fit apparaître quatre larges coupures sur son bras droit. Excité par l'odeur du sang, Greyback se précipita sur lui et elle refusa de se retourner quand elle entendit le cri de douleur d'Edgar Bones.

Denise, Audrey - la femme d'Edgar - Helen, Sylvia et Antigone - les trois filles d'Edgar - s'étaient séparées et de toute évidence cachées dans les nombreuses pièces que comptaient le petit manoir.

Les louveteaux de Greyback ne mirent pas un quart d'heure pour les retrouver toutes les cinq. Bellatrix attrapa Antigone par le menton et eut un sourire cruel quand l'adolescente tenta de la faire plier par la seule force de son regard, puisque Macnair l'avait déjà réduite au silence d'un simple sortilège.

- Heureuse de me revoir, très chère ?

Antigone rua pour se dégager de sa prise et elle ne put résister à la tentation de la saisir par la gorge. Elle serra jusqu'à ce que le visage de l'adolescente devienne rouge, les veines de son cou saillantes et qu'elle halète à la recherche d'un peu d'air, bien décidée à éteindre le défi qui - malgré tout - brillait dans le regard sombre de sa proie.

- Celle-ci est pour moi.

Greyback lui arracha son jouet avant qu'Antigone ne perde connaissance. Une quinte de toux secoua son corps frêle, rendu encore plus insignifiant par la présence du loup-garou à ses côtés. Greyback plaqua le dos de la jeune fille contre son large torse, un bras semblable à un étau passé en travers de sa poitrine, et dégagea d'une main griffue - celle d'un animal plus qu'un être humain - les mèches blondes qui recouvraient le cou de la Cracmolle.

A la façon dont il renifla, Bellatrix eut l'impression que quelqu'un venait de lui servir un met particulièrement délicat. Antigone se débattit à nouveau, usant de ses jambes pour déséquilibrer son geôlier.

Greyback ne bougea pas d'un pouce, tout juste resserra-t-il sa prise pour la maintenir immobile, avant de lécher la peau offerte à son regard.

- Hummm… Quel dommage que le Lord te souhaite morte mon ange. Tu aurais fait une femelle de choix dans ma meute. Peut-être même ma favorite.

Bellatrix se détourna du spectacle repoussant et rejoignit son beau-frère dans le salon. Denise était attachée sur une chaise, inconsciente après avoir reçu un Stupéfix, son mari n'avait toujours pas repris conscience, Edgar était sous la bonne garde de trois Louveteaux et elle se surprit à les fixer alors qu'ils léchaient leurs doigts maculés du sang frais de l'homme. Audrey, Helen et Sylvia étaient installées sur le canapé. Les deux jeunes femmes étaient en larmes, tandis que leur mère faisait de son mieux pour sauver les apparences et garder la tête haute. Bellatrix récupéra les six baguettes de la maisonnée et les brisa une à une, avant de les jeter dans le feu de la cheminée.

Il ne restait plus qu'un quart d'heure avant que le soleil ne bascule derrière l'horizon, aussi fit-elle signe à ses hommes de se diriger vers la sortie.

Les sept derniers Louveteaux les remplacèrent à leur poste de garde. Ils étaient encore tous des enfants - le plus âgé ne devait pas avoir plus de quinze ans - mais la sauvagerie qui brillait dans leur regard remplissait la pièce d'une atmosphère malsaine qui la laissait mal à l'aise.

- Je vous laisse en bonne compagnie, Madame, Mesdemoiselles. Avec les compliments du Seigneur des Ténèbres.

Le cri suraigu d'Antigone - emplie d'horreur et de souffrance - la figea au moment où elle se détournait pour quitter la pièce.

Les grognements qu'elle devina malgré la porte fermée firent monter une vague nausée, qu'elle réprima en affichant un sourire malsain sur ses lèvres, destiné à Audrey Bones.

- Ce cher Greyback semble apprécier les charmes de votre cadette… Je suppose qu'il n'y a qu'une bête comme lui pour apprécier une Cracmolle.

Elle sortit, la satisfaction d'avoir brisé la femme d'Edgar Bones ancrée en elle, mais ignora avec obstination le spectacle de débauche qu'offrait Greyback à la vue de tous.

Quand la Lune se leva sur Nottingham, des cris témoignant d'une terreur absolue secouèrent le petit Manoir.

- Voilà ce qu'il en coûte de se dresser face au Seigneur des Ténèbres, murmura Bellatrix avant de transplaner faire son rapport.

Mercredi 21 Janvier 1981, Résidence de Sirius Black, Londres.

- Tiens le coup, vieux, on est presque arrivés.

- James, il y a vraiment beaucoup de sang…

- Pas du tout ! N'écoute pas Queudver, Patmol. C'est juste une petite blessure…

Sirius fit un effort surhumain pour garder les yeux ouverts. Sa jambe était en feu. Sa jambe le brûlait. Et il avait une furieuse envie de fermer les yeux.

- Black ! Tu restes avec nous !

Il grogna vaguement et releva la tête.

faischierJames.

- Vas-y, insulte-moi si ça t'aide à rester réveillé !

Imbécile.

- Continue, c'est très bien.

A travers les formes floues qui dansaient devant ses yeux, il lui sembla reconnaître sa maison. Il battit des paupières et se retrouva devant une porte sombre.

- James ! Dépêche-toi ! Il va pas bien là ! Il va pas bien du tout !

- Je fais ce que je peux… Il en reste plus qu'un… Ayé ! Sirius, fais pas le con ! On va te soigner ! Ça va aller…

L'appel de l'inconscience se faisait de plus en plus tentant mais Sirius se sentit le cœur de résister encore un peu, juste pour faire mentir les statistiques. Alors, il serra les dents et trouva même assez d'énergie pour avancer clopin clopan dans son entrée.

- Qu'est-ce qu'il se passe…

Peter, James et Sirius relevèrent la tête d'un même ensemble et ils découvrirent Judy au milieu des escaliers.

- Merde, marmonna Sirius.

- Je savais qu'on aurait dû aller chez toi, Peter, dit James.

- Sirius ! s'écria finalement la jeune femme, passé un temps de surprise. Dieu tout puissant ! Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ?

Elle descendit les escaliers dans un bruit de tonnerre et James et Peter le menèrent dans son salon avant de le déposer avec le plus de douceur possible sur son canapé.

Dès qu'il retrouva la station allongée, Sirius se sentit tout de suite un peu mieux.

- Qu'est-ce qui s'est passé ?!

- Un accident. Rien de grave. On s'en occupe. Tu n'as qu'à…

James tenta de retenir Judy dans le couloir mais elle lui asséna un violent coup d'épaule qui le fit reculer de plusieurs pas.

En deux enjambées, elle était près de lui.

- Salut chérie…

Elle le fusilla du regard comme rarement elle l'avait fusillé du regard et Sirius admira les efforts qu'elle fit pour ne pas grimacer devant l'état de sa jambe.

- C'est pas joli joli, pas vrai ?

- Ferme-la, sinistre crétin, gronda-t-elle avant de commencer à détacher la boucle de sa ceinture.

Il voulut l'en empêcher mais ses bras étaient bien plus lourds que d'habitude.

- J'adorerais, Judy… Vraiment… Mais je crois que c'est pas vraiment le moment.

Judy l'ignora royalement. Une fois qu'elle eut récupéré sa ceinture, elle la fit passer sous sa cuisse gauche.

- Aïe ! cria-t-il quand elle serra sauvagement.

- Je t'ai demandé de te taire. Il faut appeler un médicomage.

- Non !

- Black, si tu ne la boucles pas, je t'assomme, c'est clair ?

- Il a raison, Judy… On ne peut pas appeler un médicomage, intervint James.

- Vous préférez qu'il se vide de son sang ?!

- Ça saigne plus, là… remarqua Peter.

- Évidemment ! Je lui ai fait un garrot mais si on ne fait pas rapidement quelque chose, on devra lui couper la jambe !

- J'aimerais autant qu'on en vienne pas à cette extrémité.

- Alors j'appelle un médicomage !

- On ne peut pas… répéta James, le visage décomposé par l'inquiétude.

- Vous avez une meilleure idée ?!

James et Peter se liguèrent pour affronter Judy du regard.

- On ne peut vraiment pas s'en remettre aux médicomages, Judy, plaida James. Je t'assure qu'on a une très bonne raison.

Judy ferma les yeux une folle seconde avant de se relever vivement.

- James, prend le relais. J'ai une idée.

Dès que James fut en place, Judy quitta la pièce en courant.

- James, il faut que tu retournes voir Remus, murmura Sirius. Il ne peut pas passer le reste de la pleine lune seul.

- Crois-moi ou pas, il risque de s'en vouloir si jamais tu y passes. Alors on te tire de là, et j'y retourne après.

- Judy gère la situation. Va le rejoindre. S'il-te-plaît.

- Sirius…

- Imagine que c'est ma dernière volonté et obéis, Potter !

James détourna la tête et hésita pendant un long moment.

- Peter, remplace-moi.

Queudver s'exécuta aussitôt.

- Ne profite pas de mon absence pour mourir, Patmol, dit-il avant de quitter la pièce à son tour.

Sirius se rencogna dans son canapé et ferma les yeux. Il était bien comme ça. Sa jambe lui faisait toujours mal mais c'était supportable. Il se sentait fatigué… Maintenant que le pire était derrière lui, il pouvait peut-être se reposer un peu…

Le coup qu'il reçut dans le ventre l'obligea à reconsidérer la question. Il tourna la tête pour fustiger l'importun mais se radoucit en découvrant Judy agenouillée près de lui.

- Tu restes avec moi, Black, souffla-t-elle en lui caressant le front.

- Je ne pourrais pas faire trois pas avec cette foutue jambe…

- Comment tu t'es fait ça ?

- Tu sais, je suis pas vraiment en état de te trouver un mensonge crédible…

- C'est encore une histoire où tu as donné ta parole ?

- Ouais…

Elle soupira et à sa plus grande surprise, ne se fâcha pas.

- Très bien…

Des sirènes retentirent au loin et Judy se releva brusquement.

- Où tu vas ?

- Ce sont les secours… Je reviens.

- Les secours ? répéta Sirius. Quels secours ?

Peter haussa les épaules près de lui mais garda son regard fixé vers l'entrée, comme s'il cherchait à découvrir ce qui se tramait dehors. Moins d'une minute plus tard, Sirius entendit des voix d'hommes et il écarquilla les yeux de surprise quand il vit débarquer trois armoires à glace habillées d'étranges costumes rouge foncé et jaune fluo.

- Effectivement, c'est une belle morsure, marmonna le plus âgé.

Deux des hommes ouvrirent une boîte noire et commencèrent à s'activer autour de sa jambe, tandis que le troisième posait ses doigts sur son poignet.

- Le pouls est un peu faible… Vous avez perdu beaucoup de sang, monsieur ?

- Ah, euh…

- Oui, pas mal quand même, répondit Peter pour lui.

- Vous connaissez votre groupe sanguin ?

Sirius cligna des yeux, surpris par la question des moldus, avant de répondre la seule chose qui faisait sens pour lui.

- Oui… Je suis un Sang-Pur. Les Black, vous savez…

Le pompier le dévisagea et Sirius se douta qu'il n'avait pas bien répondu à sa question.

- Il dit toujours des bêtises quand il panique, intervint Judy. Il ne connaît pas son groupe, c'est tout.

- Très bien.

L'homme haussa les épaules et lui mit une étrange montre autour du bras avant de presser une sorte de poire. Sirius sentit le bracelet le serrer de plus en plus et cela ne lui plaisait pas du tout.

L'homme releva l'heure et secoua la tête.

- A mon avis, vous avez perdu plus de sang que vous ne pensez. On va sûrement être obligé de vous faire une perfusion quand on sera à l'hôpital.

- A l'hôpital ?

- Je crois qu'on a pas trop le choix… C'est même probable que vous passiez sur le billard cette nuit.

- Le billard ?

- Oui, ils vont faire une exploration vu la plaie…

Il dévisagea son interlocuteur, le regard vide et le cerveau peinant à traduire le charabia qu'on venait de lui servir.

- Monsieur, vous ne vous sentez pas bien ?

Sirius, qui commençait à vraiment paniquer, chercha Judy du regard. Son sourire tordu le rassura légèrement : si elle se fichait de lui, c'est que ça ne devait pas être si grave que ça.

- Non, ça va… Ça va.

- Parfait. On va aller chercher le brancard et on va y aller, d'accord ?

Les trois hommes partirent et Judy se pencha vers lui dès qu'ils ne purent plus les entendre :

- J'ai appelé les secours moldus.

- Merci, je crois que j'avais compris. Qu'est-ce qu'ils vont me faire ?

- Ils vont t'emmener dans leur camion à l'hôpital où des médecins vont te recoudre. Entre nous, c'est vraiment moche alors ils vont sûrement t'endormir.

- Tant mieux. Tu vas venir avec moi ?

- C'est peut-être plus prudent.

Jeudi 22 Janvier 1981, 12 Square Grimmaurd, Islington, Londres.

Bellatrix s'extirpa de la cheminée avec toute la grâce dont elle était capable et n'attendit pas que Kreattur lui indique la direction à prendre.

Sa Tante avait eu pour habitude de les inviter, sa mère, sa sœur et elle jusqu'à ce qu'elle soit en âge d'aller à Poudlard. Aussi loin qu'elle s'en souvienne, le rituel n'avait jamais changé.

Walburga était installée dans le petit salon, une épaisse couverture sur ses jambes, ce qui était le seul détail qui trahissait son état de santé de plus en plus défaillant. Pour le reste, ses cheveux étaient retenus dans un chignon d'où ne s'échappait aucune mèche folle, un discret maquillage camouflait certainement son teint malade et la robe qu'elle portait était simple, mais taillée dans un précieux tissu.

- Bellatrix, ma chère petite… Viens t'asseoir à mes côtés. Ta sœur ne devrait plus tarder. Elle m'a promis d'amener Draco.

Bellatrix obéit docilement sans montrer qu'elle était étonnée que sa sœur ait accepté de venir, encore plus accompagnée de son fils chéri. Pour la première fois, elles avaient passé les fêtes de Noël chacune de leur côté. Bellatrix avait été obligée de se rendre à la réception organisée par Ranatus Lestrange et les regards réprobateurs l'avaient suivie toute la soirée. La famille de Rodolphus était encore plus traditionaliste que les Black, et l'absence d'enfant dans son foyer avait peu à peu fait d'elle une paria.

Un cri suraigu la sortit de la plus désagréable des façons de ses pensées et elle se tourna vers la porte, apercevant son neveu - âgé de sept mois déjà - en larmes dans les bras de sa mère.

Narcissa ne se laissa pas émouvoir et débarrassa les cheveux blonds de son fils de la cendre qui s'y était accroché.

- Tes crises de colère ne rendront pas les voyages en cheminée plus agréables, jeune homme. Cela suffit.

Draco continua à s'égosiller, son visage de plus en plus rouge, et Narcissa la sauva d'une méchante migraine en lançant un Silencio au bambin. Elle le déposa au sol, près de Walburga, et sortit quelques jouets du sac qu'elle avait apporté, puis embrassa leur Tante.

- Excusez-moi pour ce raffut, ma chère Tante, mais je crains qu'il ait hérité du tempérament colérique de notre famille.

Walburga balaya ses excuses d'un geste élégant et passa une main dans les boucles blondes de son petit-neveu qui semblait avoir compris que plus personne ne faisait attention à lui.

- Aucun enfant n'aime les voyages en cheminée… Il aura tout le temps d'apprendre à refouler ses colères.

Bellatrix haussa un sourcil au commentaire : sa tante avait tenu un discours similaire quand Sirius ne cessait de se donner en spectacle à grand renfort de cris et de larmes. Malgré toutes les punitions que Walburga avait pu imaginer, il avait grandi en ce rebelle qui ne cessait d'empoisonner son existence.

Que ses ancêtres lui en soient témoin, elle ne laisserait pas son filleul aussi mal tourner.

Sa cadette déposa une bise sur sa joue avant de s'installer à sa gauche.

Narcissa orienta la discussion sur les récentes fêtes de fin d'année, son voyage de quelques jours à Paris qui avait coïncidé avec Noël, et les trésors qu'elle avait ramené de la capitale française.

- Je n'ai jamais aimé les français, conclut Walburga en terminant sa tasse de thé, mais je dois leur reconnaître qu'ils ont beaucoup de goût en matière de mode. Comment se porte Ranatus, Bellatrix ? J'ai cru entendre qu'il avait fait un séjour à Sainte-Magouste ?

Bellatrix eut un sourire légèrement crispé : son beau père avait reçu un courrier piégé d'un mauvais sort au début du mois, l'accusant d'être un Mangemort. Son cœur en avait pris un grand coup, même s'il s'entêtait à prétendre que tout allait pour le mieux.

- Il a insisté pour affronter Rolf et Stan au Quidditch… Il a reçu un Cognard dans le dos. Je lui avais bien dit que ce n'était plus de son âge.

Walburga approuva :

- Il a commencé ses études un an après moi… Ce sport n'est fait que pour les jeunes gens vigoureux.

Elle baissa les yeux vers Draco. La colère du bambin était oubliée. Il jouait calmement avec une peluche en forme de dragon et babillait de temps à autre un charabia qui n'avait de sens que pour lui.

- Quel dommage que Draco n'ait pas de compagnon de jeu… Vous formiez une si charmante petite bande, plus jeunes.

Sa réponse passa ses lèvres avant qu'elle n'ait eu le temps de réfléchir aux conséquences.

Et elle ne pensa même pas à la regretter en voyant le visage de sa tante donner l'impression qu'elle avait avalé une boisson particulièrement amère.

- Si vous vous sentez nostalgique, Walburga, vous pourrez toujours organiser un goûter pour Draco et votre futur petit-enfant.

- Bellatrix ! s'indigna Narcissa.

Walburga mit une poignée de secondes à reprendre contenance. Son regard exprima une forme de panique, repris par son souffle rapide. Bellatrix ignora le regard sombre de sa cadette sur elle. Walburga l'avait bien cherché. Si elle n'avait rien pu dire aux Lestrange sous peine de se donner en spectacle devant une cinquantaine d'invités, l'intimité du Manoir Black était une autre histoire.

- Y a-t-il quelque chose que j'ignore ? demanda-t-elle finalement avec froideur.

Bellatrix se redressa sur son siège et attrapa une pâtisserie qu'elle croqua avant de répondre.

- Il est venu à ma connaissance que Sirius aurait épousé une quelconque Sang-de-Bourde… Je suppose qu'un enfant est à escompter.

- Ce ne sont que des rumeurs, ma Tante… intervint Narcissa, sa main attrapant celle de Walburga. Vous vous doutez bien qu'il se serait arrangé pour faire la une de la presse à la manière des Potter si tel était vraiment le cas.

- A moins qu'il ait acquis un peu de bon sens. Il ne fait pas bon être Sang-de-Bourde ces derniers temps.

Narcissa fit claquer sa langue contre son palais avec agacement et Bellatrix croisa un regard parfaitement identique à celui de leur défunte mère.

Elle se contint au silence, mais leur petit thé tourna court. Il fallut moins d'un quart d'heure à Walburga pour prétexter une migraine et prendre congé.

- Tu exagères, Bellatrix ! Elle pleure encore la mort de Regulus ! Un peu de compassion de temps à autre n'a jamais tué personne.

- C'est elle qui a commencé.

- Tu es parfois plus puérile que Sirius, Bellatrix, et je te laisse imaginer à quel point cela est indigne de toi.

Jeudi 22 Janvier 1981, Royal London Hospital, Londres.

Sirius s'était réveillé une première fois, seul, entouré de machines étranges, un masque sur la bouche qu'il avait tenté de repousser avant qu'une main ne le remette fermement en place.

- Ne bougez pas. L'opération s'est bien passée mais vous devez vous reposer.

Comme ses paupières semblaient peser une tonne chacune et que chaque geste lui demandait plus d'effort de concentration qu'un matin de gueule de bois, il avait obéi sagement.

Le deuxième réveil avait été plus agréable. Judy se tenait à ses côtés, ses mains emprisonnant l'une des siennes. Quand il avait ouvert les yeux, elle s'était fendue de son sourire tordu avant de se pencher pour l'embrasser doucement.

Est-ce qu'ils t'ont dit qu'ils avaient été obligé de te couper la jambe ?

Il s'était redressé pour vérifier ses paroles, et la pièce avait commencé à tourner autour de lui de façon inquiétante, lui donnant une profonde envie de vomir.

Il réussit à apercevoir sa jambe entière et bandée jusqu'au genou avant de s'écrouler sur le lit, complètement à bout de force.

- Tu te crois drôle ? marmonna-t-il, la langue pâteuse et une désagréable impression dans la bouche.

- J'ai passé une nuit blanche à cause de tes conneries et tu n'as même pas l'excuse d'avoir sauvé le monde. Attends-toi à payer cher pour cette histoire.

- Je suis sûr qu'on trouvera un terrain d'entente, chérie. Je vais dormir encore un peu.

Le sommeil l'avait emporté presque aussitôt, et son troisième réveil avait été le bon. Fort de ses deux premières expériences, il s'était redressé avec douceur et Judy l'avait aidé à s'installer confortablement contre les oreillers. Tandis qu'elle attrapait un boîtier muni d'un bouton rouge au-dessus de lui, il s'était retrouvé à contempler avec curiosité l'étrange tube en plastique qui reliait sa main gauche à une poche contenant un liquide transparent.

Avant que tu ne paniques, c'est une perfusion. Une aiguille est insérée dans ta veine et permet au liquide de se diffuser dans ton organisme. C'est pour éviter que tu te déshydrates.

- J'ai une aiguille dans le bras ?

Oui, et pas loin de quarante points de suture à la jambe.

- Quarante ?!

Son ton réjoui sembla la surprendre et elle haussa un sourcil.

- Je viens d'établir un record que les autres ne vont jamais pouvoir battre ! James peut aller se rhabiller avec ses trois points et sa cicatrice d'un centimètre !

Elle ouvrit la bouche pour répliquer mais fut coupée par l'arrivée d'une femme d'une quarantaine d'années qui n'avait rien à voir avec Madame Pomfresh.

Petite, ronde et des cheveux crépus, elle lui dédia un sourire jovial avant de prendre une plaque accrochée au bout de son lit.

- Comment vous sentez-vous, Monsieur Black ?

- Ça peut aller.

- Pas de douleur ? De vertige ?

- Non… Je devrais ?

L'infirmière manipula plusieurs feuilles et nota un commentaire sur l'une d'entre elle avant de lui répondre.

- Vous aviez perdu beaucoup de sang. On a dû vous passer deux culots durant l'opération. Votre amie a été incapable de nous dire ce qui vous avait attaqué donc le médecin vous a également injecté un sérum contre la rage, ce qui peut donner des vertiges combiné à l'anesthésie.

Il se refusa à glisser un regard vers Judy au risque de passer pour un imbécile fini aux yeux de l'infirmière - il ne comprenait pas un traître mot au jargon moldu en règle général, mais celui médical était pire que tout le reste - et hocha poliment la tête en feignant d'être intéressé par ce qu'elle disait.

Du moment qu'on ne lui avait pas coupé la jambe et qu'il pourrait vite quitter cet endroit, il n'avait aucune raison de s'inquiéter.

- Je pourrais sortir quand ?

Elle replaça la plaquette au bout de son lit et se pencha vers le petit écran au-dessus de lui.

- Ce sera au médecin de décider, mais je pense qu'il va vous garder ici plusieurs jours, le temps d'être sûr que la bête qui vous a attaqué n'avait pas la rage et que la plaie ne s'infecte pas. Je vais aller vous chercher un plateau repas. Par contre, vous n'avez pas le droit de vous lever avant quarante-huit heures. Si vous avez besoin d'aller aux toilettes, utilisez l'urinoir qui est ici.

Elle lui désigna une étrange bouteille en plastique et l'hôpital moldu perdit soudainement tout exotisme.

Il attendit qu'elle soit partie pour attraper l'urinoir et le détailla sous toutes ses coutures, avant de se tourner vers Judy. Il comprit qu'il était foutu en voyant qu'elle se retenait très difficilement de rire.

- Dis-moi que j'ai mal compris…

Le rire gagna la partie et elle mit une longue minute à se calmer.

- Tu ne sais pas le pire…

Sirius la dévisagea, incapable d'imaginer pire que de devoir uriner dans une bouteille en plastique durant deux jours, et sentit l'inquiétude serrer son estomac.

- Comme tu n'as pas le droit de te lever, et encore moins le droit de prendre une douche, c'est une infirmière qui te fera ta toilette demain matin.

Il envisagea très sérieusement la possibilité de transplaner sur le champ pour Sainte Mangouste où il savait qu'on ménagerait bien mieux son amour propre, puis paniqua en réalisant qu'il n'avait pas la moindre idée de l'endroit où pouvait être sa baguette magique.

Comme si elle avait suivi ses pensées, Judy la sortit de l'éternel sac à dos en cuir qui accompagnait toutes ses sorties.

- Je la garde en lieu sûr d'ici à ta sortie : James et toi avaient tellement insisté pour que le monde magique ne sache rien de vos aventures qu'il serait dommage que tu te fasses pincer pour utilisation de la magie devant des moldus.

Une lueur de défi brillait haut et fort dans son regard bleu nuit et il abandonna l'idée de négocier. Judy semblait bien décidée à lui faire payer le prix fort et ses méthodes étaient dignes du machiavélisme d'Euphémia Potter.

L'infirmière revint avec un plateau repas contenant une purée au goût insipide et tout juste tiède, une espèce de ragoût d'une viande qu'il ne sut reconnaître, un morceau de fromage élastique et un dessert au chocolat qu'il ne connaissait pas.

Il terminait sa dégustation quand deux coups furent portés sur le battant de la porte, suivi par l'apparition de la tête couronnée d'épis de son frère de cœur.

- Je le crois pas, tu as une chambre individuelle et on t'apporte tes repas au lit ?!

- C'est un traitement de faveur qu'ils doivent réserver aux Sangs-Purs, se moqua Lily en entrant à sa suite, un petit Harry encore emmitouflé dans un ensemble rouge et or qui ne laissait apparaître que ses grands yeux verts.

- Oh, ils ne t'ont pas coupé la jambe ? ironisa Peter à son tour. C'était l'occasion idéale.

Sirius allait lâcher une réponse acide à ce manque cruel de délicatesse de la part de ses amis, mais son regard se posa sur le visage sombre de Remus quand ce dernier apparut finalement.

Depuis que James et lui étaient devenus amis avec le timide première année qu'avait été Remus, il ne lui avait vu ce regard sauvage qu'à trois reprises.

La première avait été avant la première pleine lune qu'ils avaient passé sous leur forme Animagus, le rejoignant dans la Cabane Hurlante et se transformant sous ses yeux une seule minute avant lui pour lui ôter toute possibilité de leur expliquer à quel point tout ceci était inconscient. Au lendemain, Lunard avait passé la première pleine lune supportable de toute son existence et ses craintes semblaient oubliées.

La deuxième fois, c'était après l'accident avec Rogue. Sirius s'était aussitôt confondu en excuses, expliquant qu'il avait agi sur un coup de tête et qu'il n'avait jamais imaginé que cette histoire tournerait aussi mal. Remus n'avait rien dit et lui avait asséné un puissant coup de poing qu'il n'avait même pas essayé de bloquer. Leur réconciliation avait été longue et difficile, mais il s'était montré aussi obstiné qu'un Potter pour regagner la confiance de son ami.

Enfin, la troisième fois remontait à leur septième année, quand la mère de Remus, Hope Lupin, était décédée.

De ces trois expériences il avait retenu une chose : quand Remus était dans cet état-là, la personne qu'il devenait n'avait plus rien à voir avec l'agneau et tout avec le loup-garou.

Remus resta en retrait, adossé contre le mur près de la porte, sa mâchoire si contractée qu'il ne serait pas surpris qu'une dent cède sous la pression.

James déposa une boîte de chocolat sur la tablette où reposait son plateau vide, puis se saisit des documents accrochés au pied de son lit.

- Trente-sept points de suture ?! s'exclama Lily en lisant par dessus l'épaule de son mari.

- Et deux culots de sang, compléta-t-il sans vraiment savoir à quoi cela faisait référence.

James releva la tête, les sourcils levés, puis se tourna vers Lily qui avait perdu son sourire.

- C'est quoi ça, deux culots de sang ?

- Ça veut dire qu'il avait perdu beaucoup de sang et qu'ils ont été obligé de lui en injecter deux poches.

- Du sang moldu ?

- Selon toi, James ?!

James se tourna vers lui, reposa la plaquette de documents, puis un sourire en coin étira ses lèvres :

- Est-ce que ça veut dire qu'il est un Sang-Mêlé maintenant ?

Lily échangea un regard las avec Judy, qui se releva, faisant craquer plusieurs de ses os sinistrement.

- Si je dois supporter les âneries de Potter en plus de celles de Sirius, je vais avoir besoin d'un café… Tu m'accompagnes, Evans ?

- Volontiers.

Un silence pesant salua la sortie des deux jeunes femmes et de Harry, et Sirius chercha vainement une réplique inspirée pour diffuser la tension pendant de longues minutes. James prit la place de Judy et passa une main à travers ses mèches ridicules. En croisant le regard de son frère de cœur, il y lut de l'inquiétude - qui ne lui était pas destinée - et de la culpabilité - toujours à l'attention d'un autre que lui -. Il soupira.

- Ce n'est pas de ta faute, Lunard… Je savais à quoi…

- Ferme-la, Black !

La voix de Remus était bien plus grave que d'ordinaire, et la flamme sauvage dans ses yeux avait transformé ses pupilles ambres en deux orbes jaunes.

Il ne se laissa pas démonter pour autant, sachant pertinemment que Remus était un crétin quand la colère prenait le dessus.

- Sinon quoi, Lupin ?! La pleine lune est passée, je n'ai plus rien à craindre ! Ce qui c'est passé hier…

- Est la preuve que cette idée a toujours été mauvaise ! Tu aurais pu mourir, Black ! Est-ce que tu te rends compte de ça ?! J'aurais pu te tuer !

- Ne dis pas n'importe quoi ! Je ne crains rien sous ma forme Animagus !

- Tu ne crains pas rien, Black ! La seule chose dont ta forme Animagus te protège, c'est de devenir un loup-garou ! Tu aurais très bien pu retrouver forme humaine à cause de la douleur et même James n'aurait rien pu faire contre moi !

- Mais ce n'est pas arrivé ! intervint James. On te gère depuis cinq ans, Lupin ! Est-ce que tu peux au moins nous accorder le fait qu'on te connaît et qu'on a l'habitude de t'affronter même quand tu es plus difficile !

- Difficile ? C'est comme ça que tu excuses ce qui s'est passé la nuit dernière, Potter ?!

- Précisément ! Une guerre, ton agression, la mort des Evans ! Tu es toujours plus chiant quand tu passes un mois de merde !

Remus ouvrit la bouche pour répliquer, mais Sirius le coupa pour éviter qu'il ne s'enfonce davantage. Remus avait un talent inné pour se dresser des tableaux plus noirs que la réalité, et Sirius savait qu'il fallait démonter chacun de ses arguments avant même qu'il ne quitte sa bouche.

- Regarde les choses en face, Lupin, c'est la première fois que ça arrive ! Je vais avoir une sale cicatrice et je vais passer une semaine de merde enfermé ici, mais ça me permet d'effacer ma dette pour la cinquième année. Si c'était à refaire, tu sais très bien que je le referais sans hésiter. Tu n'as jamais demandé à être un loup-garou et si terminer à l'hôpital une fois tous les cinq ans te permet de supporter un peu mieux les pleines lunes, et bien ça en vaut la peine. Maintenant arrête de faire ta diva. On a établi depuis des années que c'est à moi que l'honneur revenait en toute circonstance.

Pour la première fois, ni sa déclaration d'amitié, ni sa touche d'humour ne passèrent l'obstination de Remus. Il se contenta d'un silence buté, puis tendit la main pour ouvrir la porte de la chambre, découvrant une Judy au teint verdâtre et aux joues baignées de larmes.

- Tu vois, ça c'est une réaction normale, Black. Je suis dangereux et vous feriez bien de vous en rendre compte ! Judy, rends-lui service et empêche cet idiot de sortir lors de la prochaine pleine lune. Je ne veux plus qu'aucun d'entre vous risque sa vie !

Il quitta la pièce et Judy eut un mouvement de recul qui manqua de la faire tomber à la renverse.

- Je vais voir où est Lily, marmonna James en entraînant Peter à sa suite.

Sirius eut à peine conscience du départ précipité de Cornedrue et Queudver, toute son attention focalisée sur Judy, son cerveau peinant à réaliser la merde dans laquelle il se trouvait.

Appuyée contre le mur, là où s'était tenu Remus, elle semblait avoir besoin de soutien pour rester debout. Il faillit répondre à sa réaction par de la colère - Merlin, Remus était un crétin fini mais il n'était certainement pas un monstre - mais son regard profondément terrifié l'en dissuada.

Il se redressa et esquissa un geste vers elle, mais elle leva aussitôt une main pour le stopper, son regard brillant de peur.

- Je ne suis pas un loup-garou, Adler, grogna-t-il froidement. Et même si c'était le cas, la pleine lune est passée.

La méfiance sur son visage ne diminua pas d'un seul cran et elle ferma les yeux pendant plusieurs secondes pour reprendre ses esprits. Les larmes cessèrent de couler le long de ses joues et ses tremblements de peur s'espacèrent.

- Lupin est un loup-garou ? demanda-t-elle finalement d'une voix trop aiguë, ses mains serrées en deux poings dont les jointures devenaient de plus en plus blanches.

Remus est mon meilleur ami, répondit-il avec hargne, bien décidé à défendre Remus même s'il venait de lui jouer un coup bas. Ce qui lui arrive une fois par mois n'est pas de sa faute.

Elle rouvrit les yeux et il lui trouva le même regard froid qu'il avait croisé en Octobre. Il se résigna à reprendre depuis le début sous peine de la voir quitter la pièce sans certitude qu'elle revienne.

- Je suis un Animagus. James, Peter et moi sommes des Animagi. Les loup-garous ne peuvent pas contaminer les animaux. On passe les pleines lunes avec lui depuis notre cinquième année. On le distrait. On évite qu'il ne s'attaque lui-même. Ça rend les pleines lunes plus supportables pour lui. La nuit dernière a été un peu plus sportive que les autres, c'est tout. Je ne vais pas devenir un loup-garou si c'est ce qui t'inquiète autant, Adler.

Il décida de se radoucir en la voyant desserrer les poings : il commençait tout juste à toucher du doigt la culture sorcière américaine. Il n'avait pas la moindre idée de ce que Judy avait pu apprendre sur les loup-garous, et pour tout ce qu'il en savait, le MACUSA semblait encore plus conservateur que le Ministère.

- Tu comptais me le dire quand exactement ?

Il soupira.

Bien sûr qu'il avait prévu d'en parler à Judy à un moment ou à un autre, mais dévoiler le serment des Maraudeurs à quelqu'un d'autre qu'un Maraudeur sous-entendait que sa relation avec Judy dépassait la simple amourette, ce dont il avait encore besoin de se convaincre malgré l'assurance de James et Remus sur ce point.

- Ce n'était pas à moi de te le dire, éluda-t-il, décidant que Remus n'allait pas s'en sortir sans égratignure non plus.

Un nouveau silence s'installa dans la pièce, aussi désagréable que celui qui avait précédé la discussion catastrophique avec Remus. Il planta son regard dans le sien et se résigna à attendre le fin mot de l'histoire.

Il la connaissait assez pour deviner qu'elle ne lui disait pas tout et si elle exigeait de connaître ses secrets, il ne voyait aucune raison pour qu'elle ne lui rende pas la pareille.

Le choc laissé sur son visage par la révélation du grand secret des Maraudeurs finit par se dissiper. Elle croisa les bras sur sa poitrine comme pour se protéger et ferma les yeux une poignée de secondes pour rassembler son courage.

- Ma mère a été tuée par un loup-garou, avoua-t-elle finalement d'une voix tremblante.

Ce fut à son tour d'être abasourdi par sa déclaration.

Judy n'évoquait jamais sa mère, et il avait très vite compris que le sujet était trop sensible, même pour Burt et Grant. Lily avait émis l'hypothèse que les circonstances de sa mort avaient peut-être été compliquées quand il lui en avait parlé… Mais jamais il aurait pu imaginer ça .

Judy eut un sourire sans joie qui ne lui était pas destiné vu la façon dont son regard s'était perdu au loin.

- Je sais qu'un loup-garou ne contrôle pas ses actes durant la pleine lune… Mais ça n'enlève pas la… C'est… Le loup-garou qui a fait ça était le frère jumeau de ma mère… Il… Il a été mordu quelques années avant ma naissance. Aux Etats-Unis, ils étaient abattus à l'époque. Ma mère et Burt l'ont caché. Il était extrêmement gentil. Généreux. Il souriait toujours. Mais il l'a tuée. Il a détruit ma famille.

Sirius déglutit difficilement. Il y avait des monstres parmi les lycanthropes - Fenrhir Greyback en était le meilleur exemple - et si la mère de Judy avait été assassinée par l'un d'entre eux, il aurait pu lui expliquer à quel point Remus était différent - parce que Remus était tout sauf un monstre - mais face à ses confidences, il ne trouva rien à redire.

Les légers coups à la porte brisèrent le silence pensant entre Judy et lui.

- Remus est parti, souffla James.

Il détourna les yeux et s'affaissa davantage contre ses oreillers, alors qu'un mauvais pressentiment lui donnait envie de vomir.

C'était la première fois que Cornedrue échouait à raisonner Lunard.

Forward
Sign in to leave a review.