
Chapter 14
« I just want you for my own
More than you could ever know
Make my wish come true
All I want for Christmas is you »
( All I want for Christmas - Mariah Carey )
Samedi 21 Décembre 1980, Résidence des Potter, Ecosse.
Sirius atterrit en douceur sur une route grêlée de nids de poule. Il lui fallut encore rouler cinq minutes avant d'entrer dans le village où Madelyn McGonagall avait déniché une maison anonyme pour James, Lily et Harry. Caché au cœur des Highlands Ecossais, Caithness était un village pittoresque, exclusivement habité de moldus, et complètement perdu au milieu de nulle part.
Il gara sa moto à l'abri des regards derrière un tas de bois, puis marcha un petit kilomètre d'un pas vif. Deux hivers loin de Poudlard lui avaient fait oublier à quel point le froid écossais était saisissant et il ne fut pas mécontent de voir apparaître une petite maison de pierre beige. Il passa le portail gris et une étrange sensation fit dresser ses cheveux sur sa nuque quand il traversa les puissants charmes que Lily avait certainement dû lancer elle-même.
James apparut presque aussitôt dans l'encadrement de la porte d'entrée. Sirius ne fut pas surpris de le trouver vêtu d'un pull orné de têtes de cerfs.
- Salut, Cornedrue ! Lâcha-il, tout en attirant son frère de cœur dans ses bras. Content de te retrouver vivant.
- Tu avais des doutes ? répliqua James alors que Sirius entrait.
Il se débarrassa de sa veste de cuir et de ses gants, avant de rejoindre le salon, James sur les talons.
- Et bien vous auriez pu tous mourir de froid, ce qui n'aurait pas été une fin digne de vous.
Il déposa un baiser sur la joue de Lily qui, emmitouflée dans une épaisse couverture rouge qu'il lui avait offert, lisait un grimoire au moins aussi vieux qu'ennuyant. Harry était installé sur un tapis au sol et jouait avec une poignée de jouets. Sirius passa une main à travers les quelques mèches brunes qui décoraient le crâne de son filleul, s'assurant qu'il ait l'air aussi décoiffé que son père et arrachant un grognement à Lily.
- Black ! gronda-t-elle.
- Toi aussi tu m'as manqué, Bichette.
Le jeune femme lui lança un regard faussement noir et recoiffa son fils avec application.
- Tu sais que tu perds ton temps, pas vrai ? J'ai vu des portraits de dizaine de Potter, ils ont tous cette tignasse hirsute.
Lily eut un sourire dangereux avant de lui faire un clin d'oeil, et Sirius étudia la possibilité qu'elle change la donne.
- Alors, quoi de neuf ? interrogea James.
- Pas grand chose mon vieux, pas grand chose.
Son frère de cœur se rencogna contre le fauteuil en grognant.
- Articule quand tu parles, Potter ! Et ne me sort pas ton regard intimidant, j'y suis immunisé ! Je n'y peux rien s'il ne s'est rien passé d'important en une semaine !
- Alors pourquoi tu es venu ?
- Parce que je ne peux pas t'encadrer, ça me paraît évident.
James ouvrit la bouche puis se ravisa, préférant fixer la cheminée qui lui faisait face avec hargne. Le silence dans la pièce, à peine troublé par les babillages de Harry, devint pesant, et Sirius eut un petit sourire désolé pour Lily. Il savait que son frère ne supportait plus d'être tenu à l'écart de l'Ordre. De plus en plus de réunions se faisaient sans lui, et depuis début Novembre, Dumbledore les avait exilés physiquement loin de Londres, en demandant à McGonagall de leur trouver une maison dans l'une des régions d'Ecosse les plus perdues. La distribution des tracts au début du mois lui avait offert une distraction bienvenue, mais l'isolement devenait intolérable.
Cela le tuait de voir son meilleur ami taciturne et il savait que James pouvait devenir insupportable quand il en voulait à la terre entière.
Et ce n'était pas lui qui était coincé au milieu de nulle part avec lui toute la journée.
- Comment va Judy ? demanda Lily pour changer de conversation.
Sirius eut un sourire des plus crispés, qui fit lever un sourcil à Lily et se redresser James.
- Vous vous êtes disputés ? tenta Lily.
- Je crois que j'aurais préféré.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? s'inquiéta James.
- Je suis invité à passer le réveillon de Noël chez elle…
- Tu veux dire avec son oncle et son père ?
- Ouais…
Lily et James échangèrent un regard et se retinrent de rire in-extremis.
- Eh ben mon vieux, tu risques de trouver la soirée très longue, dit finalement James en lui assénant une claque dans le dos.
- Je te remercie de ton soutien, Potter, ça me touche beaucoup.
- De rien.
Sirius sentit que l'enthousiasme de James était forcé mais décida d'y voir un bon signe quand même.
- Cela étant, j'ai réussi à négocier le jour de Noël et je veux vous voir chez moi à midi tapante.
Lily et James échangèrent un de leurs regards qu'il ne saurait jamais décrypter.
- Je ne sais pas si c'est une bonne idée, Sirius, commença Lily. Voldemort doit certainement savoir que James et toi êtes très proches… Il s'y attendra.
- Il s'attendra surtout à ce que vous soyez chez vous pour le jour de Noël ! Et puis, qui vous dit qu'il ne fait pas la fête lui aussi ?
- Crois-moi ou pas, Patmol, mais je l'imagine très mal avec un déguisement du Père-Noël à distribuer des cadeaux aux enfants de ses Mangemorts.
- C'est vrai qu'il a plus le profil du Père Fouettard… Mais pour en revenir à notre conversation du départ, mon invitation est non déclinable.
- Patmol…
- Non ! Il n'y a pas de Patmol qui tienne ! Jusqu'à preuve du contraire, Noël est une fête de famille alors j'exige que ma famille soit réunie et ce n'est pas un abominable mage noir qui va changer ça. Fin de la discussion.
Avant que James ou Lily ne répondent, il sortit son paquet de cartes explosives de sa poche et commença à les distribuer.
Son meilleur ami attrapa ses cartes une à une et Sirius devina qu'il allait dire une bêtise avant même qu'il n'ait ouvert la bouche.
- Quand tu dis que toute ta famille sera réunie, est-ce que je dois m'attendre à croiser Bellatrix ? Parce que je te préviens, il est hors de question que je sois assis à côté d'elle.
Sirius leva les yeux au ciel.
- Concentre-toi sur le jeu, Potter, ou je vais encore te mettre une raclée.
- Faux, intervint Lily, je vais vous mettre la volée de votre vie.
Lily gagna effectivement la première partie haut la main, ce qui l'obligea à faire équipe avec James pour la battre au tour suivant. Il mit tout en œuvre pour changer les idées du couple Potter, décrivant comment Judy et lui avaient piégé le Manoir Black avant de terminer leur journée au Marché de Noël du Londres moldu. Ils oublièrent la guerre autour d'un bol de chocolat chaud et des crêpes. Quand la nuit commença à tomber, James et lui s'en allèrent rejoindre Remus et Peter dans la Cabane Hurlante.
…
Samedi 21 Décembre 1981, Caynton Caves, Angleterre.
Bellatrix observa le visage de sa jeune sœur à la dérobée, cherchant à deviner la nature de ses pensées mais Narcissa avait toujours su dissimuler ses sentiments quand elle le désirait.
Elle n'avait pas la moindre idée de ce que pouvait ressentir Narcissa, mais une chose était sûre : elle n'était pas heureuse à l'idée de l'aider à accomplir son rêve.
La tête haute, le visage fermé, les bras croisés sur sa poitrine, rarement elle avait été aussi loin d'elle alors qu'à peine deux mètre les séparaient.
Bellatrix repensa à ce qu'avait prévu de faire le Maître et son cœur s'accéléra, distillant une excitation qui n'avait d'égale que la culpabilité qu'elle éprouvait envers Narcissa.
Certes, le Maître allait tenir sa promesse et Bellatrix ne doutait pas une seule seconde que son rituel réussirait. Seulement, il y avait un prix à payer et elle était intimement convaincue que Narcissa ne lui pardonnerait jamais.
Aujourd'hui, sa jeune sœur allait lui offrir sa fertilité…
Si tout se passait bien, Bellatrix serait mère dans neuf mois. Mais Narcissa ne pourrait plus jamais avoir d'enfant.
- Approchez, Ladies.
La voix du Lord résonna étrangement dans la grotte où il les avait emmenées. Il désigna le cercle magique qu'il avait préparé à leur attention : de nombreuses bougies dispensaient la seule source de lumière, tandis que des pétales de fleurs avaient été éparpillés sur le sol. En s'approchant, Bellatrix devina le parfum des roses.
Elle s'agenouilla face à l'autel et Narcissa l'imita non sans marquer un ultime geste d'hésitation.
Seul l'autel de pierre les séparaient : Bellatrix reconnu un cœur humain disposé entre plusieurs ossements et quelques herbes magiques qu'elle ne distinguait pas assez pour les nommer.
Comme le Maître le lui avait expliqué, Bellatrix se saisit du petit poignard posé près d'elle et s'entailla la main gauche, avant de tendre l'arme à Narcissa, puis elles entrelacèrent leur doigts.
Bellatrix sentait le liquide chaud couler lentement le long de son avant bras. Les gouttes qui tombaient sur la pierre résonnaient sinistrement dans le silence oppressant de la grotte.
Le regard que Narcissa braquait sur elle était plus brûlant que les sept feux de l'Enfer…
- Que le sang serve de lien,
- Que la magie ouvre le chemin.
- Ce qui a été doit être défait.
- Ce qui est va être réparé.
- Que ces deux femmes échangent leur fertilité,
- Pour qu'un enfant puisse enfin se développer.
Bellatrix eut l'impression que le vide glacial qui rongeait son ventre se délitait, comme balayé par un souffle imaginaire. A mesure que la vie entrait en elle, elle eut l'impression que chaque partie de son corps se détendait pour accueillir ce miracle comme il se devait : ses poumons s'élargirent, son visage s'éclaira, son esprit s'apaisa, les battements de son cœur s'espacèrent…
Pour la première fois depuis qu'elle était en âge de se souvenir, Bellatrix eut envie de pleurer de joie. La première larme était prête à quitter ses yeux quand le cri de Narcissa fit voler en éclat le silence oppressant de la grotte en même temps que la sérénité qui s'épanouissait en elle.
Bellatrix baissa le regard et trouva sa jeune sœur recroquevillée sur le sol, sa main libre serrée sur son ventre, le visage déformée par la douleur.
Une part d'elle voulut faire un geste vers elle, lui apporter un soutien - même infime -, juste lui faire comprendre qu'elle n'était pas seule…
Inconsciemment, Bellatrix comprit pourtant que c'était là le prix à payer : si elle montrait le moindre signe de regret, la moindre faiblesse, le sortilège pouvait se briser.
La Magie Noire était exigeante.
Alors elle resta immobile, ses doigts retenant la main de Narcissa dans la sienne à s'en briser les os.
Elle pleura intérieurement de voir sa sœur souffrir sans pouvoir s'empêcher d'être incroyablement heureuse.
Son ventre avait cessé d'être étranger à son corps. Bientôt, elle porterait la vie.
…
Mercredi 24 Décembre 1980, Résidence de Sirius Black, Londres.
L'horloge de l'Oncle Alphard raisonna sinistrement à travers toute la maison et Sirius s'approcha de la cheminée avec une résignation digne du condamné à mort sur le point de prendre son dernier repas.
Il prit le cadeau qu'il avait acheté à l'intention de ses hôtes puis lança une copieuse poignée de poudre de Cheminée dans le feu qui ronflait dans la cheminée.
- La Colline, Rowlfer, Idaho, Etats-Unis.
Le voyage fut aussi désagréable que les autres fois et il mit une longue minute à retrouver ses repères quand il arriva à destination.
Quand ses yeux arrêtèrent de larmoyer, Sirius surprit le sourire satisfait de l'Oncle Burt et il retint un soupir désespéré.
Ce fut en adressant une prière silencieuse à la constellation du chien pour que quelqu'un l'aide à survivre à cette soirée qu'il s'approcha de l'Oncle de Judy :
- Bonjour, dit-il en tendant une main vers l'homme.
Burt le fixa comme s'il avait à faire à un insecte insignifiant et particulièrement laid, puis se détourna en direction de la cuisine tout en réajustant son tablier jaune.
D'accord, songea Sirius. Judy ne pourra pas me reprocher de ne pas faire d'efforts.
Cette pensée lui arracha un sourire : il déposa le paquet qu'il avait apporté sur la table du salon et prit la direction de la caravane de l'autre côté du jardin. La lumière qui filtrait à travers les fenêtres lui confirma que Judy se trouvait encore à l'intérieur et il se dépêcha d'aller la rejoindre (il ne l'avait vu qu'une seule fois cette semaine et il craignait vraiment que Burt ne décide de le cuisiner, au sens propre de l'expression).
- Judy ? appela-t-il en entrouvrant la porte de la caravane après avoir frappé trois coups.
- Je suis presque prête ! Fais comme chez toi !
Sirius se glissa à l'intérieur, retrouvant la décoration hétéroclite mais chaleureuse de la caravane. Il s'installa confortablement sur un fauteuil en vieux cuir et regarda autour de lui : les murs étaient peints d'un beige un peu passé, les meubles étaient une accumulation de tout style et des tas de photos moldues traînaient un peu partout. A vrai dire, personne ne pouvait deviner qu'une sorcière vivait là.
- Qu'est-ce que tu en dis ?
Sirius se tourna vers la droite.
Déglutit difficilement.
Judy se tenait appuyée sur la chambranle de la porte qui donnait sur sa chambre et le fixait d'un regard qu'il jugea particulièrement troublant, compte tenue de la façon dont elle était apprêtée : un haut rouge foncé au décolleté discret mais qui la mettait parfaitement en valeur, une jupe noire juste assez courte pour stimuler l'imagination et une paire de talons qui n'en finissait pas d'allonger sa silhouette. Sirius s'obligea à la regarder dans les yeux tout en songeant que ce soir, il allait véritablement avoir beaucoup de mal à se retenir de lui sauter dessus.
- Tu es magnifique, dit-il d'une voix un peu trop rauque pour que Judy ne le remarque pas.
Elle haussa un sourcil et sourit légèrement.
- C'est gentil. Toi aussi.
Sirius, qui avait opté pour une tenue tout en noir sous les bons conseils de Lily, réussit à trouver suffisamment de maîtrise pour lui adresser un clin d'oeil.
Elle s'approcha de lui et l'embrassa délicatement. Sirius se fit violence pour ne pas approfondir le baiser, et plus encore pour garder ses pensées aussi chastes que possible.
- On y va ?
Il soupira sans chercher à être discret, se leva, et passa un bras autour de la taille de Judy, tandis que son cerveau recommençait à inventer des scénarios de plus en plus catastrophiques pour la soirée qui s'annonçait.
…
Sirius s'installa à l'arrière de ce qu'il savait être une voiture et imita Judy quand elle fit passer un lien étrange autour d'elle avant de le fixer dans une attache. A l'avant du véhicule, Grant lança le moteur, desserra le frein à main…
… Démarra dans un crissement de pneus atroce tandis que le moteur rugissait de toutes ses forces.
Sirius s'agrippa à la poignée de la portière et se tassa au fond de son siège. Un discret coup d'oeil à Judy lui apprit que la situation était toutefois normale.
- On est un peu en retard, non ? demanda Judy d'une voix calme.
- Ouais, grogna son père. J'vais prendre not' raccourci.
Et sans que Sirius n'ait eu le temps d'avoir plus de détails, Grant tourna le volant à fond : la voiture chassa allègrement et s'engagea sur un chemin en terre battue ravagé par les intempéries.
Alors qu'il était ballotté dans la voiture et qu'il lui semblait que Grant pouvait perdre le contrôle de son véhicule à tout instant, le père de Judy accéléra encore.
Le trajet dura encore cinq minutes.
Cinq minutes qui semblèrent plus longues qu'au moins deux éternités.
Sirius descendit de la voiture en titubant, les jambes aussi molles que du coton, et le cœur au bord des lèvres : comment quelqu'un pouvait-il conduire aussi mal et arriver à bon port ?
- Tout va bien Sirius ?
Craignant que le père et l'oncle de Judy se moquent à nouveau de lui (il n'était sûr de rien mais il avait bien l'impression qu'ils venaient encore de le tester), il se redressa, drapé dans sa fierté, et passa un bras autour des épaules de Judy.
- Évidemment.
Judy eut le tact de ne pas rire en entendant sa voix un peu moins assurée que d'ordinaire et Sirius fit diversion en regardant autour de lui : il se trouvait dans le centre d'une petite ville dont les deux rues principales étaient séparées par une large route. Ils passèrent devant de nombreux commerces sans ralentir et Sirius faillit demander ce qu'ils faisaient là.
Finalement, ils empruntèrent une petite ruelle dont l'entrée était illuminée par une enseigne publicitaire ventant les qualités d'une bière au nom imprononçable.
Une construction de bois blanc aux larges portes se dressait un peu plus loin et ce ne fut qu'en découvrant le clocher et l'immense croix au-dessus de l'édifice que Sirius comprit enfin de quoi il était question.
- Judy, ton blanc-bec de petit-ami anglais est bien Protestant, n'est-ce pas ? demanda Burt alors qu'il s'apprêtait à entrer dans l'église.
Elle se tourna vers lui, un sourcil haussé en signe d'interrogation.
Sirius eut un sourire crispé, voulut demander le sens du terme Protestant avant de se raviser aussi vite : il pouvait se tromper mais Burt et Grant semblaient le mettre au défi de répondre autre chose que oui.
- Bien sûr que je suis protestant. J'adore protester.
Les deux hommes ne le crurent pas, il en était absolument convaincu, mais la cloche au-dessus de leur tête se mit à sonner et ils entrèrent dans l'église, non sans faire une sorte de geste qu'il tenta de reproduire sans se tromper.
Il laissa Judy le guider entre les deux rangées de bancs et détailla l'immense pièce où il se trouvait. Les murs étaient exempts de décoration à l'exemption de nombreuses bougies placées aux pieds de statues. Les quelques fenêtres n'offraient aucune vue intéressante et Sirius s'assit à côté de Judy sans véritablement savoir à quoi il allait assister. Jugeant qu'il valait mieux pour lui que l'oncle et le père de Judy ne s'aperçoivent pas que c'était uniquement la deuxième fois qu'il mettait les pieds dans une église, il porta son regard dans la même direction que toutes les autres personnes. Un homme vêtu en violet était installée au fond de la pièce derrière une large table de pierre et semblait attendre que tout le monde soit installé avant de commencer…
Merlin seul savait quoi. Et encore…
Sirius ne se sentait pas du tout à son aise au milieu de tous ces gens, d'autant qu'il craignait un peu qu'on lui demande de participer, mais il réussit à garder la tête froide en se rappelant ce que Lily lui avait expliqué quand il lui avait posé des questions sur la relation qu'entretenait les Moldus avec ce gars appelé Dieu .
- Mes bien chers frères, mes bien chères sœurs… Nous sommes réunis aujourd'hui pour célébrer la naissance de Jésus-Christ notre Sauveur et…
Sirius cessa d'écouter : Lily lui avait présenté cette histoire de religion avec un air sceptique - elle n'avait baptisé Harry que pour faire plaisir à ses parents - et il n'avait pas spécialement été transcendé - il était même plus ou moins convaincu que Jésus-Christ, le fils de Dieu était un sorcier. Les moldus ne marchent pas sur l'eau -. Il en était à réfléchir à un nouveau slogan pour l'Ordre du Phénix quand toutes les personnes autour de lui se levèrent, avant de commencer à chanter.
Sirius les imita avec un cruel temps de retard et aurait payé cher pour connaître les paroles de la chanson. Judy lui glissa un sourire goguenard et Sirius ne put retenir une grimace. Il se savait dans une très mauvaise passe et en désespoir de cause, il marmonna l'air de la musique pour ne pas se faire repérer par Grant et Burt. Heureusement, la chanson ne dura pas longtemps et Sirius s'évertua à se faire le plus petit possible quand il put de nouveau s'asseoir.
La cérémonie dura encore une heure et Sirius tenta finalement de suivre. Ce n'était pas aussi terrible que ce que lui avait raconté Lily. La petite reconstitution de la naissance de Jésus-Christ par des enfants de la ville avait un côté attendrissant et il avait même réussi à chanter le refrain de quelques-unes des chansons.
Avant qu'ils ne partent, Judy, Grant et Burt allèrent allumer une bougie au pied d'une des statues et il comprit à demi-mot que c'était leur façon de rendre hommage à la mère de sa petite-amie. Ce fut seulement au moment où ils passaient la porte de l'église que Sirius réalisa quelque chose : il allait devoir remonter dans la voiture.
…
Jeudi 25 Décembre 1980, Résidence de Sirius Black, Londres.
Sirius sortit la belle poularde du placard à froid et la posa sur la table de la cuisine, à côté de tous les ingrédients qu'il avait soigneusement acheté. Il se frotta les yeux pour éloigner le sommeil qui continuait d'embrouiller son cerveau, puis commença à couper soigneusement les marrons en morceaux. Concentré sur sa tâche, il découvrit que Judy l'avait rejoint qu'au moment où elle l'enlaça. Elle glissa son visage dans le creux de son épaule et déposa un baiser à la base de son cou.
- Tu as du courrier, dit-elle finalement en lui tendant une enveloppe rouge.
Sirius resta interdit en reconnaissant l'écriture de James.
- Tu ne l'ouvres pas ? Plus tu attends, pire ce sera.
- Je sais… J'essaye juste de me souvenir ce que j'ai bien pu faire pour mériter une beuglante. James respecte en général l'échelle de sa mère et il faut vraiment avoir dépassé les bornes pour en mériter une.
Judy attrapa un marron qu'elle croqua d'un air pensif, comme si elle passait en revue ses derniers méfaits.
- Lily et lui ont peut-être trop arrosé leur repas hier ? J'ai fait bien pire qu'envoyer une beuglante.
- James aussi, soupira-t-il avant de décacheter l'enveloppe.
- SIRIUS ORION BLACK, SI TU AS EPOUSE JUDY SANS MÊME M'EN AVOIR PARLE ET SANS M'AVOIR INVITE, TU ES UN HOMME MORT !
L'élocution parfaitement claire lui apprit que James avait tous ses esprits quand il lui avait envoyé la beuglante.
Le contenu le laissa complètement perdu.
Il leva les yeux vers Judy : elle n'avait pas l'air surprise - ou du reste très peu - et il lui sembla qu'elle était même fière d'elle.
- Il a raison d'être en colère. J'aurais moi aussi aimé être présent lors de mon mariage.
Judy lui lança son sourire tordu et il craignit le pire.
- J'ai laissé un mot à l'intention de ta génitrice Square Grimmaurd.
- Tu as quoi ?!
- Relax… Je n'ai pas laissé un faire-part de mariage ! Juste de quoi semer le doute. Je pensais en entendre parler un peu plus tôt pour être tout à fait honnête.
Sirius prit une profonde inspiration tout en se frottant le front d'une manière compulsive, reproduisant inconsciemment le tique de Fleamont Potter. Depuis le début, il avait tout fait en sorte pour que sa famille - et par-dessus tout Bellatrix et Walburga - ne sachent rien de sa relation avec une Née-Moldue. Il avait assez à faire avec la promesse de mort de sa cousine pour ne pas entraîner quelqu'un d'autre dans sa chute, à commencer par Judy.
- Quel genre de note exactement ? demanda-t-il en faisant de son mieux pour contrôler le timbre de sa voix.
Elle dut lire la peur sur son visage car son masque de manipulatrice tomba et elle effleura sa joue mal rasée du bout de ses doigts fins.
- Sirius, j'ai juste signé Judy Black. Je ne suis pas stupide. Je n'allais pas laissé mon adresse à une bande de psychopathes.
Il ignora l'étrange chaleur qui s'alluma dans son coeur en entendant l'improbable association du prénom de la jeune femme suivi de son nom à lui, et préféra juguler la peur qui glaçait ses entrailles.
Bellatrix devait être hors d'elle qu'il ait osé profaner l'illustre demeure des Black et il la connaissait assez pour savoir qu'elle mettrait tout en œuvre pour se venger. Il savait le prix à payer quand on se dressait contre les Black, et il s'était juré d'être le seul à s'acquitter de la dette.
Si sa réaction l'effraya, Judy n'en montra rien. Elle le ramena à la réalité d'un simple baiser à la commissure de ses lèvres et plongea son regard brillant de défi et de malice dans le sien.
- Je parie que la tête de Walburga valait le détour.
Sirius savait qu'elle avait dû être encore plus choquée qu'en apprenant sa répartition à Gryffondor, ce qui n'était pas peu dire.
- Il y a de bonnes chances.
- J'ai aussi laissé mon soutien-gorge, se vanta-t-elle en passant ses bras autour de son cou, son sourire tordu de retour sur ses lèvres.
Il l'embrassa avec ardeur, cherchant à faire sien le défi qu'elle se plaisait à balancer au visage de tout ceux qui se dressaient sur son chemin. La chaleur étouffante que dégageait son corps pressé contre le sien chassa définitivement la peur de ses pensées. Outre le fait qu'il ne laisserait jamais Bellatrix s'approcher de Judy, et encore moins lui faire du mal, il y avait fort à parier que sa cousine se retrouverait confrontée à une adversaire de taille s'il échouait.
Pour la première fois, il choisit de partager le fardeau de sa famille.
Ils se séparèrent à bout de souffle et il eut encore plus de mal que les autres fois à se rappeler sa promesse. Par mesure de sécurité, il plaça la table entre eux deux, essayant d'ignorer le sourire amusé de Judy.
- Je te préviens : James va être infernal et il n'est pas du genre à abandonner facilement. Ce sera entièrement de ta faute.
Elle éclata de rire…
Avant de se figer quand il lui lança une copieuse poignée de farine au visage.
Sirius savoura son expression surprise, très fier de lui.
- Tu n'aurais pas dû faire ça, Black, souffla-t-elle.
- Pour…
D'un geste vif, Judy plongea sa main dans la farine et lui rendit la politesse.
- Parce que je suis une championne à la bataille de nourriture !
Sirius s'était amusé trop longtemps à défier James, Remus et Peter à tout et n'importe quoi pour ne pas reconnaître un défi quand il en croisait un. Il attrapa le paquet de farine, voulut le renverser sur sa petite-amie…
Judy était hors de portée. Elle contre-attaqua avec le café moulu qu'il n'avait pas rangé un peu plus tôt.
En moins d'une minute, la situation dégénéra en une véritable guérilla où tous les coups étaient permis. Sirius se retrouva aspergé d'huile avant de pouvoir toucher Judy avec de la sauce tomate. Il ne comprit trop tard qu'il s'agissait d'une ruse et elle lui arracha le paquet de farine des mains dans un éclat de rire.
- Tu es un homme mort, Black !
- Tu ne paies rien pour attendre, Adler !
Entre deux menaces, les attaques étaient bien réelles et Sirius saisit sa chance quand Judy se figea pour éternuer violemment après avoir respirer le poivre qui s'était renversé. Il la ceintura, saisit le paquet de farine. Judy le bloqua avant qu'il ne puisse le récupérer tout à fait. Il luttèrent de nombreuses secondes, chacun voulant garder pour lui le paquet. Sirius avait l'avantage, il n'avait plus qu'un petit effort à fournir pour…
Le sachet céda.
Sirius et Judy virent le monde autour d'eux devenir blanc et puis leur regard se croisèrent. Ils éclatèrent de rire, comme deux gamins l'auraient fait. Sirius réalisa que dans la bagarre, Judy s'était collée à lui.
Le jeu changea de forme et il se pencha pour l'embrasser.
- Ah vous êtes là ! Il va falloir qu'on ait une petite discussion !
Ils se séparèrent en sursautant. Sirius maudit James et son don pour toujours arriver au mauvais moment, avant de grimacer en découvrant le regard sombre de son meilleur ami et le doigt accusateur qu'il pointait sur eux.
Judy leva les yeux au ciel et se contenta de brandir sa main gauche devant le visage du jeune Potter.
- Bien essayé, Adler, mais ça ne veut rien dire. Vous connaissant, vous auriez très bien pu passer une nuit à Las Petas…
- Las Vegas, James, le reprit Lily, un rire dans la voix.
- Peu importe. Et vous marier sans prendre la peine d'acheter une bague ! Alors je veux toute l'histoire ! Tout de suite !
Judy soupira et se tourna vers lui avec une expression ennuyée.
Il se contenta de lui sourire - elle avait mérité de se débrouiller avec un James Potter obsessionnel - et comme si de rien était, il récupéra son couteau et continua à couper le peu de marrons encore sur la table.
- Très bien Potter… Quel est le petit film que tu t'es fait ?
James braqua un regard interdit sur elle.
- N'essaye pas de m'embrouiller avec ton jargon moldu, Adler !
Elle leva les yeux au ciel.
- Qu'est-ce que tu sais déjà, Potter ?
- Pas grand chose. Androméda m'a envoyé une lettre à l'appartement, parce que Narcissa lui a demandé si elle savait quelque chose à propos de la femme de Sirius. Bellatrix aurait trouvé un mot Square Grimmaurd.
Sirius n'eut pas besoin de le voir pour deviner le sourire tordu de Judy à la façon dont elle rejeta ses épaules en arrière.
- J'ai juste laissé un mot…
- Et ton soutien-gorge.
- Il n'est pas obligé de connaître tous les détails, Sirius, merci ! J'ai laissé un mot pour signer mon passage dans cette illustre demeure, rien de plus. Toutefois, si Walburga termine internée à Sainte-Magouste grâce à cela, Sirius m'a promis une demande en mariage. Satisfait ?
James resta silencieux une poignée de secondes.
- Donc vous n'êtes pas mariés ?
- Non, répondit-il à la place de Judy.
- Pas fiancés non plus ?
- Elle m'a promis de dire non si jamais je le lui demande.
- Très bien. Non, parce que je dois être le premier au courant en tant que futur témoin. J'aurais été très déçu si Bellatrix m'avait grillé la politesse, c'est tout.
Un nouveau silence s'installa dans la petite cuisine et Sirius échangea un regard amusé avec Lily, tandis que James continuait de fixer Judy avec une légère rancune.
- Je crois qu'on a bien fait d'emmener le dessert, remarqua finalement la jeune maman pour clore définitivement le sujet.
Sirius regarda autour de lui et comprit immédiatement où elle voulait en venir : la cuisine était véritablement méconnaissable et il se demanda s'il n'allait pas devoir jeter ses vêtements à défaut de pouvoir se débarrasser de toutes ces tâches…
Et il s'en fichait royalement !
- Je vais me laver, lui dit Judy en se rapprochant de lui à nouveau.
Sirius sentit sa main glisser le long de son dos avant d'atterrir dans la poche arrière de son jean.
Il retint un sourire, rejeta catégoriquement l'idée de l'accompagner pour l'aider à retirer toute cette saleté, et préféra incorporer ses marrons à la farce.
- C'est une très bonne idée… Je vais continuer de faire à manger.
- Tu es l'homme idéal, Black.
- Tu viens seulement de le réaliser ?
Elle éclata de rire, retira sa main de la poche de son jean et s'éloigna en direction de l'étage.
Sirius sentait le regard de James qui, après avoir assisté à une telle scène, en avait perdu sa langue. Il s'amusa de son silence étonné quelques secondes.
- Les américaines sont nettement plus décomplexées que nos petites anglaises, mon cher James, je te l'ai toujours dit. Maintenant si tu veux te rendre utile, ça m'arrangerait que tu me passes le plat derrière toi.
…
- Mais c'est mon petit Harry ! Viens voir tonton Sirius !
Harry, qui venait de se réveiller, eut une moue boudeuse et se nicha contre sa mère. Sirius se figea dans son geste sous les rires de James et Judy.
- Ne fais pas cette tête, Sirius, se moqua gentiment Lily. Tu as vécu sept ans avec un Potter et ce n'est pas à toi que je vais apprendre qu'ils ne sont pas du matin.
Sirius se résigna à laisser son filleul émerger à son rythme et retourna s'asseoir à côté de Judy. Il passa un bras autour de ses épaules et elle vint poser sa tête sur son épaule. Il fit mine de ne pas remarquer le regard scrutateur de James,et préféra donner un coup de baguette en direction du magnifique sapin de Noël qu'il avait décoré avec tout ce qu'il avait trouvé à travers la maison (il avait eu un coup de cœur pour ce Vivet Doré empaillé qu'il avait placé au sommet de l'arbre). Les cadeaux qu'il avait soigneusement dissimulé par un sortilège apparurent et d'un second geste, il les fit voler jusqu'à leur destinataire.
- Sirius, je croyais t'avoir dit de ne pas pourrir mon fils ! fit mine de s'emporter Lily quand plusieurs paquets se posèrent à ses pieds.
- C'est son premier Noël, il fallait que je me montre à la hauteur.
Lily leva les yeux au ciel et se pencha pour attraper le premier présent.
Un joyeux tintement attira son attention et Sirius jeta un coup d'oeil à James pour voir sa réaction.
- Très spirituel, Black !
- Je me suis aperçu très récemment que ça manquait à ta panoplie.
- Il ne fallait pas te sentir obligé.
- Garde-les, j'insiste.
James secoua une dernière fois les clochettes (qui iraient parfaitement sur les bois de Cornedrue) et attrapa son second cadeau. Près de lui, Judy se redressa pour commencer à déballer les siens.
- Une nouvelle veste de moto ? Sirius, tu sais que j'en ai toute une armoire, pas vrai ?
- Tu n'as certainement pas ce modèle. C'est Max qui l'a mise au point : elle est bardée de sortilèges de protection au cas où tu aurais un accident. J'entends dans les airs ou sur la terre ferme…
Judy haussa un sourcil et étudia la veste sous toutes ses coutures, puis l'enfila.
- Tu as l'oeil, Black, elle me va parfaitement.
Sirius s'abstint d'expliquer qu'avec le nombre de filles qu'il avait déshabillées depuis qu'il était en âge de pouvoir le faire, il commençait à avoir quelques points de référence, et préféra apprécier le travail de Max. Il savait que le sorcier était un maître dans son domaine mais il ne l'avait jamais soupçonné d'être un artiste à ses heures perdues. Quand il avait évoqué ce qu'il cherchait, Max avait tout de suite rebondi : apparemment, il se souvenait parfaitement de Judy et avait bien l'intention de compléter son œuvre. La veste qu'il avait créé était d'un noir de jais et seules quelques flammes stylisées égayaient les manches.
Des flammes aussi rouges que la moto de Judy.
- Sirius, qu'est-ce que… Où as-tu trouvé ça ?!
Il tourna la tête vers Lily : elle venait de déballer le plus gros des cadeaux qu'il avait acheté à Harry.
Un magnifique Cerf à bascule aux bois ornés de fleurs de Lys.
- Le Père-Noël est un homme bien informé. Je n'y suis pour rien, Bichette.
La jeune femme leva les yeux au ciel mais Sirius pouvait voir que James et elle étaient touchés par son geste.
Le reste de l'après-midi se passa dans une ambiance légère qui leur fit presque oublier la guerre dehors, les morts qui avaient rythmé l'année passée et la menace grandissante qui planait au-dessus des Potter. Sirius s'évertua à faire rire son filleul le plus possible, usant de ses meilleures grimaces, tandis que James et Judy s'affrontaient dans une terrible partie d'échec version sorcier que Lily arbitra avec une objectivité discutable (quand elle n'aidait pas l'un, elle aidait l'autre).
Vers six heure, Harry fit comprendre à ses parents qu'il était las de cette journée en commençant à pleurer pour un rien.
- Je crois que ce jeune homme a besoin de retourner au calme… dit Lily en le prenant dans ses bras.
Harry bailla à s'en décrocher la mâchoire et Sirius se surprit à le fixer d'un air parfaitement attendri… Il ne disait pas ça uniquement parce qu'il s'agissait de son filleul, mais avec ses grands yeux verts, ses quelques mèches brunes et sa frimousse innocente, Harry était un petit garçon adorable.
- Merci pour l'invitation, Pat'… Et merci pour les cadeaux.
Sirius secoua la tête dans un « ne me remercie pas pour ça » que James décrypta avec son aisance naturelle, avant de répondre par un « j'insiste, tu n'étais pas obligé ». Du moins ce fut le sens que Sirius donna à son regard faussement noir.
Son meilleur ami ramassa toutes ses affaires puis il disparut dans la cheminée à la suite de sa femme et son fils.
Sirius souhaita secrètement qu'ils connaîtraient tous encore de nombreux Noël semblables à celui-ci avant de refermer ses bras autour de la taille de Judy. Ils se retrouvèrent très vite allongés sur le canapé et il ferma les yeux quelques secondes pour garder la tête froide. Il faisait de son mieux pour respecter la parole qu'il avait donné à Judy (à savoir plus de sexe jusqu'à… Enfin plus de sexe) mais le défi était plus ou moins compliqué à relever selon les circonstances.
Quand Judy et lui étaient allongés l'un contre l'autre et qu'ils venaient de s'embrasser aussi langoureusement que leur souffle leur avait permis, compliqué se transformait facilement en synonyme d' impossible.
Il sentit Judy se contorsionner et il rouvrit les yeux pour voir ce qu'il se passait : la jeune femme attrapa sa veste de moto des bouts des doigts puis glissa une main dans la poche gauche. Elle en tira un collier et le fit tourner devant ses yeux.
Sirius ne regarda pas le bijou. Il savait parfaitement à quoi il ressemblait. Il l'avait acheté une semaine plus tôt dans une boutique moldue : il s'agissait d'une longue chaîne en argent qui retenait un pendentif ovale, sur lequel de délicats améthystes redessinaient la constellation du Chien.
Sirius l'avait adoré dès le premier coup d'oeil mais il avait demandé l'avis de Lily avant de se décider.
Les quelques lumières de la pièces se reflétaient à l'infini sur l'objet, dessinant des formes étranges sur le visage de Judy.
Un visage que Sirius n'arrivait pas à décrypter : était-elle contente de ce cadeau, touchée, émue ? Ou bien déçue ?
Alors que le pendentif arrêtait enfin de tourner, il tendit la main et montra l'envers du bijou… Là où il avait fait graver le premier Je t'aime qu'il lui avait été donné d'admettre, puis de déclarer.
Judy était toujours silencieuse.
Il sentit son cœur commencer une course contre la montre tandis que ses entrailles lui donnaient l'impression de s'être complètement contractées… Ou bien liquéfiées. Il n'était sûr de rien.
Finalement, elle lâcha la chaîne et Sirius sentit le poids du pendentif s'alourdir dans sa main. Judy se redressa et planta son regard dans le sien.
Il eut beaucoup de mal à trouver le courage de ne pas se détourner.
- Mon cadeau… ne te plaît pas ? marmonna-t-il.
- Il est magnifique mais Sirius… Je n'ai pas besoin que tu graves ces trois mots dans de l'argent massif… J'ai besoin que tu me les dises. Que tu me les dises et que tu les penses vraiment.
Sirius inspira profondément et serra machinalement le collier dans sa main. Il pouvait sentir chaque forme contre sa peau mais plus que tout, il avait l'impression que la gravure à l'arrière du pendentif le brûlait.
Il pensait ces trois mots. Il ne voyait pas comment décrire autrement ce qu'il ressentait pour Judy. C'était différent de tout ce qu'il avait connu.
Différent et surtout nouveau…
Il se redressa, obligeant Judy à s'asseoir, et toujours sous son regard scrutateur, il passa le collier autour de son cou, devenant de plus en plus proche d'elle, si bien que son visage n'était plus qu'à quelques centimètres du sien.
- Je t'aime, souffla-t-il contre ses lèvres.
Les yeux de Judy s'illuminèrent et il imagina son sourire sans pouvoir s'empêcher de l'imiter. Il n'aurait jamais pensé que prononcer ces quelques mots le rendrait aussi profondément heureux.
Elle l'embrassa délicatement et Sirius comprit qu'aimer ne servait à rien si ce n'était pas partagé.
- Moi aussi, dit-elle.
Ce fut à son tour de l'embrasser et leur baiser ne tarda pas à devenir brûlant. Sentant qu'il perdait le contrôle de ses pensées, Sirius voulut s'écarter…
Quand Judy glissa ses mains sous sa chemise, il comprit toutefois que leur période d'abstinence venait de prendre fin.