Et si...

Harry Potter - J. K. Rowling
F/M
Gen
G
Et si...
Summary
La nuit du 31 octobre 1981, Lord Voldemort épargne la vie de Lily Potter, mais échoue à tuer le jeune Harry. Devenue veuve, Lily est contrainte de se cacher avec son fils chez le responsable de la mort de son époux, Severus Rogue. Pour se racheter, le mangemort repenti fait la promesse à Lily de protéger le jeune Harry Potter, en dépit des rancunes passées.******Tous les personnages et l'univers décrit appartiennent à J. K. Rowling. Tous Droits Réservés.
Note
WARNING: This fanfiction is available in English on my profile under the name of If...A new chapter every TuesdayATTENTION: Cette fanfiction est disponible en anglais sur mon profil sous le nom de If...Un nouveau chapitre tous les mardis.
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La chauve-souris et le chien

C’était la dernière fois que Lily faisait sa rentrée à Poudlard, sa septième année. Elle se trouvait sur la voie 9 ¾ avec ses parents. Pétunia avait cessé de les accompagner depuis des années. Elle vivait à Londres à présent. Elle partageait un appartement avec deux jeunes femmes. L’une était infirmière, tandis que l’autre travaillait dans la même entreprise que Pétunia. Lily avait appris que sa sœur fréquentait un homme qu’elle avait rencontré sur son lieu de travail, un certain Vernon. L’étudiante n’en savait pas plus. Lily l’avait à peine vue pendant ses vacances à Carbone-les-Mines. Pétunia avait seulement daigné venir passer un week-end à la fin du mois de juillet, et était repartie aussi vite qu’elle était venue.

Lily serra ses parents dans ses bras et embarqua dans l’une des voitures du train. Depuis sa cinquième année, la jeune sorcière ne retrouvait pas directement ses amies dans leur compartiment. Les préfets et préfètes devaient d’abord se rencontrer durant une réunion qui était supervisée par les deux préfets en chef. Et cette année, il se trouvait que Lily avait justement été nommée préfète en chef. C’était un véritable honneur, mais aussi une grosse responsabilité.

Lily traîna sa malle dans l’étroit couloir de la voiture. Elle n’était pas très lourde, car la Gryffondor l’avait ensorcelée un genre de sortilège d’Extension. C’était astucieux ! Et puis, elle le vit, Severus Rogue. Il venait de monter à bord du train et portait une vieille malle décrépie qui avait sans doute appartenu à sa mère. Lily ne l’avait pas aperçu sur le quai, ni même Mrs. Rogue. Elle et Rogue ne se parlaient plus depuis la fin de leur cinquième année.  

Le Serpentard lui lança un regard indescriptible et Lily l’ignora. Parfois, la jeune fille se demandait comment elle avait pu être amie avec lui. Il était déjà méchant quand elle le considérait comme son meilleur ami. Hélas, il était devenu de plus en plus mauvais au cours de leur sixième année. Elle avait cru – à tort – que cette rupture le ferait réfléchir et lui ferait renoncer à ses vilains penchants. Malheureusement, elle avait eu l’effet contraire… Tant pis, elle n’avait plus de temps à perdre avec le fils Rogue. Elle voulait simplement qu’il reste loin d’elle. Le reste lui importait peu.

Lily entra dans le compartiment réservé aux préfets et découvrit avec stupeur que James Potter s’y trouvait. C’était forcément une méprise, une nouvelle farce de cet arrogant jeune homme.

- Que fais-tu ici ? demanda Lily, surprise. Tu as dû te tromper de compartiment, c’est celui des…

- Des préfets, répondit en souriant le poursuiveur de Quidditch. Il se trouve que j’ai été nommé préfet en chef.

Cela devait être une plaisanterie. James Potter préfet en chef ? Impossible ! Il avait certes de très bons résultats, mais il était loin d’être exemplaire.

Il exhiba alors un insigne et Lily sut qu’il ne se moquait pas d’elle. La jeune sorcière aurait préféré que cela fût une blague. Elle ne l’avait jamais supporté. La perspective de devoir assurer la discipline de l’école aux côtés du plus grand fouteur de troubles de Poudlard lui donnait envie de jeter par la fenêtre du wagon son propre insigne et de démissionner.

Lily devait néanmoins reconnaître que James Potter s’était assagi au cours de leur sixième année. Il était un peu moins arrogant, et avait cessé de la harceler pour qu’elle accepte de sortir avec lui. Il ne jetait quasiment plus de maléfices à tous ceux qui avaient le malheur de lui déplaire, excepté Severus. Mais le Serpentard était un cas particulier, qui avait un sérieux problème avec James Potter. Ils se haïssaient mutuellement depuis leur tout premier voyage à bord du Poudlard Express.

Lily ne voulait plus être associée à Severus Rogue, mais elle ne lui souhaitait pas d’être attaqué perpétuellement par James et sa clique. Rogue était loin d’être irréprochable, car il lui arrivait aussi de porter les premiers coups. Lily ne s’en mêlait plus à présent, depuis cette épreuve des BUSE. Le Serpentard lui avait bien fait comprendre qu’il n’avait pas besoin de l’aide d’une sale petite Sang-de-Bourbe pour se défendre. Cela avait été la goutte de trop.

Les préfets et préfètes des quatre maisons ne tardèrent pas à les rejoindre, et la réunion commença. Contre toute attente, James Potter ne se comporta pas avec désinvolture. Il semblait prendre très au sérieux ses nouvelles responsabilités. Il se montra même cordial avec les deux préfets de Serpentard. Gretchen Bulstrode était une élève de sixième année assez hautaine qui était préfète depuis l’an dernier. Bartemius Croupton, un élève de cinquième année, venait tout juste de recevoir son insigne. C’était un garçon de seize ans qui en paraissait treize. Grand et mince, on aurait dit d’une asperge. Il avait aussi une tignasse de cheveux blonds, et son teint pâle était entièrement parsemé de taches de rousseur. Lily l’avait quelquefois aperçu à la bibliothèque. C’était un garçon assez discret et travailleur qui ne se mêlait pas aux adeptes de la magie noire.

Lily fut étonnée d’entendre que James Potter maîtrisait ses nouvelles fonctions. Remus Lupin l’avait sans doute informé sur son nouveau rôle. Le jeune homme – qui n’avait pas été démis de ses fonctions au profit de Potter – était présent dans le compartiment et écoutait attentivement son ami parler.

- Ce soir, après le banquet, vous accompagnerez les nouveaux élèves jusque dans vos salles communes, annonça James.

- Soyez clairs dans vos explications, ajouta Lily. N’oubliez pas qu’ils sont encore des novices et qu’ils ne connaissent pas le château. Certains n’ont sans doute jamais entendu parler de Poudlard, du moins jusqu’à très récemment.

Gretchen Bulstrode ricana et adressa un regard méprisant à la rousse. Lily n’aimait pas beaucoup cette fille.

- Cela ne risque pas d’arriver à Serpentard, se moqua la préfète. Pas vrai, Barty ?

Le jeune garçon l’ignora et baissa les yeux vers ses chaussures. Il semblait mal à l’aise à côté de Gretchen Bulstrode, qui était tout aussi grande que lui, mais qui avait la carrure d’une armoire à glace. On aurait presque dit qu’elle l’intimidait.

- Là n’est pas le problème, lui rétorqua James, agacé. En tant que préfets, vous vous devez de montrer l’exemple et d’être impartiaux avec tous les élèves, qu’importent leur maison, leurs origines.

Lily crut rêver en entendant ces mots sortir de la bouche de James Potter. Elle se souvint d’un vieux dicton moldu, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. Quel hypocrite !

- Et n’abusez pas de vos fonctions, ajouta Lily en dardant un regard vers Potter. Soyez justes.

Gretchen Bulstrode se renfrogna. L’an dernier, la Serpentard avait été très sèche avec beaucoup d’élèves qui n’avaient pas été répartis dans la même maison qu’elle. On disait même qu’elle retirait très facilement des points à ceux qui ne lui plaisaient pas, et qu’elle était très laxiste avec ses amis et ses camarades de Serpentard. À l’évidence, on n’avait pas jugé préférable de lui retirer son insigne.

- Bien, passons aux autres points, intervint de nouveau le poursuiveur de Gryffondor. Comme vous le savez, une salle de bain est mise à la disposition des préfets et des capitaines de Quidditch au cinquième étage. Vous pouvez y accéder grâce à un mot de passe qui est…

James récupéra dans la poche de sa robe une lettre. Lily avait reçu la même, celle dans laquelle elle avait appris qu’on l’avait choisie pour devenir préfète en chef.

- Phénix rougeoyant, lut le jeune homme. Je crois que nous vous avons tout dit.

- Il y a autre chose, rectifia Lily. Nous devons patrouiller dans le train pendant le voyage, afin de surveiller les élèves, ou pour les guider. Certains n’ont…

- Oui, certains n’ont jamais entendu parler de Poudlard, l’interrompit Gretchen Bulstrode, qui l’imitait. On sait !

James lui rétorqua sèchement qu’elle devait le respect à Lily, qui était au-dessus d’elle dans la hiérarchie des préfets. La Née-Moldue n’avait pas besoin qu’il vole à son secours. Elle savait très bien se défendre, et ne craignait nullement les filles comme Gretchen Bulstrode. Elle savait ce que cette fille pensait des Nés-Moldus. Bien sûr, Lily ne l’avait jamais entendue prononcer l’insulte infamante. Gretchen Bulstrode n’était pas assez sotte pour le faire en public. La Gryffondor éprouvait un petit plaisir coupable à devoir diriger une adolescente, comme Gretchen Bulstrode, qui était convaincue que les Nés-Moldus étaient inférieurs socialement aux personnes comme elle, fières de leur sang pur.  

La réunion prit fin, mais Lily ne fut pas pour autant débarrassée de James Potter. Il voulait lui parler, avoir avec elle une discussion au sujet de leurs nouvelles responsabilités.

- Je pense que nous devons nous montrer vigilants, dit-il l’air grave. On dit que Tu-Sais-Qui recrute même à Poudlard.

- Ce n’est pas nouveau, répondit Lily. Certains aspirent à le rejoindre. C’est un fait.

- Oui… Ce que je veux dire, c’est que certains l’ont peut-être déjà rejoint.

Cette perspective était horrifiante. De jeunes mangemorts à l’école de sorcellerie de Poudlard, des fanatiques. Elle pensa à Severus. Elle craignait d’apprendre un jour qu’il était vraiment devenu l’un des leurs. Il était suffisamment stupide pour le faire, et à la fois très intelligent pour y renoncer.  

- Et que veux-tu qu’on fasse ? Je ne vais pas demander à chaque Serpentard de relever leur manche.

- Non, moi non plus, dit-il en détournant le regard.

Ça ne l’avait pourtant pas gêné de déshabiller Severus au bord du lac.

- Je pense qu’il faut simplement garder à l’œil ceux qui pourraient éventuellement l’avoir rejoint, ou qui le feront. Ce serait terrible s’ils entraînaient d’autres élèves. Tu vois ce que je veux dire ?

Lily hocha la tête. Les plus jeunes étaient vulnérables et pouvaient facilement être influencés. Mais elle n’ignorait pas que ce genre de choses se faisait en secret, à l’abri des regards indiscrets. Ses fonctions ne lui permettaient pas non plus d’infiltrer la salle commune de Serpentard, bastion des mangemorts en devenir. Si elle et Severus avaient été encore des amis, le Serpentard aurait fait un très bon espion. Il avait cependant choisi une voie bien différente de la sienne.

- Que proposes-tu ? demanda Lily.

- On pourrait par exemple patrouiller dans les couloirs sur notre temps libre. Je crois savoir que les toilettes des filles du second étage ne sont pas très populaires.

- Oui, acquiesça Lily. Elles sont hantées par Mimi, qui inonde souvent les lieux. Personne ne s’y rend. Tu penses qu’elles pourraient être un endroit pour des réunions clandestines ? 

- Peut-être…

Ils marchèrent tous les deux dans le couloir pendant plusieurs minutes. Lily se surprit à penser que James Potter, quand il n’était pas entouré de sa foule d’admirateurs, était un garçon assez sympathique, et même mature. Il semblait vraiment préoccupé par la montée en puissance de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Pourtant, il n’avait rien à craindre, lui. Il était issu d’une famille de sorciers de sang-pur très riche. Tout ce qu’adoraient le mage noir et ses sbires, qui privilégiaient la pureté du sang.

Pour Lily, les choses étaient bien plus compliquées. Elle était une Née-Moldue, et beaucoup considéraient cela comme une infâmie. La Gazette avait rapporté au cours de ces derniers mois des disparitions inquiétantes, et même des assassinats. Les cibles étaient généralement des opposants, mais aussi des sorciers et sorcières comme Lily. Parfois, le journal évoquait dans de courts paragraphes les Moldus, qui étaient considérés comme du bétail par l’abominable mage et ses fidèles.

- Je suis content de travailler avec toi, dit-il avant de se glisser dans le compartiment qu’il partageait avec ses trois amis. On se revoit au banquet !

Lily lui adressa un petit sourire et arpenta le train pour retrouver ses amies, qu’elle n’avait pas vues depuis deux mois. James Potter gagnait peut-être à être connu, songea-t-elle.

*

Lily et Severus étaient postés devant la cheminée et attendaient Sirius. Severus portait sa redingote austère et une cape noire qui le faisait ressembler à une chauve-souris. Ces vêtements lui conféraient une autorité naturelle. À travers les mots de Severus, Lily avait deviné que son hôte n’était pas un enseignant patient et doux. Il était certainement le genre à effrayer les élèves, à les malmener un peu. Lily se demanda si Dumbledore avait pris la bonne décision en lui confiant les plus jeunes. Il aurait peut-être été plus judicieux de lui attribuer les niveaux supérieurs. Les élèves plus âgés étaient généralement plus disciplinés et avaient davantage de connaissances et de pratique.

Lily regarda autour d’elle. Le salon de Severus était bien plus chaleureux et confortable. Elle comptait néanmoins poursuivre les améliorations. La veille, Lily avait poursuivi son nouveau projet. Severus l’avait aidée à quelques reprises, quand il n’était pas occupé ailleurs, notamment avec Harry. Il s’était chargé de le distraire de temps en temps, en lui lisant encore le Mensuel des potions. C’était une lecture étrange pour un enfant de quinze mois. Le fils de Lily semblait y prendre du plaisir, d’autant plus que Severus était un bon lecteur. Sa voix grave apaisait le bambin qui restait suspendu à chaque mot prononcé par le nouvel enseignant.

- Que fiche-t-il ? marmonna Severus. Je vais être en retard.

- Il n’est même pas sept heures trente, répondit Lily.

- Il en fait exprès, j’en suis certain !

Sirius Black n’avait pas annoncé l’heure de son arrivée. Lily savait simplement qu’il apparaîtrait juste avant le départ de Severus pour Poudlard. L’ancienne Gryffondor appréhendait un peu le moment où Severus et Sirius se retrouveraient face à face. Les deux hommes se haïssaient et se méprisaient ouvertement. Quelques heures après la mort de James, les deux ennemis avaient failli en venir aux baguettes. Seule l’intervention de Lily avait pu éviter un duel dans le salon. Elle ne leur demandait pas de devenir amis, car elle-même savait que certains miracles – comme celui-ci – n’arrivaient jamais. Seulement, elle espérait qu’ils pourraient avoir un jour des rapports cordiaux. Ils se battaient à présent dans la même équipe, et non dans deux camps adverses.

Enfin la cheminée flamba, et Sirius Black franchit l’âtre.

- Je n’ai jamais aimé ce moyen de transport, dit-il en époussetant les manches de sa robe.

Severus le regardait comme un vulgaire insecte qu’il fallait écraser. Lily eut comme une impression de déjà-vu. Pétunia avait eu le même regard envers Severus.

- Rogue, salua froidement Sirius.

- Black.

Les deux hommes se toisaient comme deux lions ennemis enfermés dans une cage. Des flammes flamboyaient dans leurs yeux. Sirius fut le premier à rompre le contact visuel, car Lily était là.

- Lily, dit-il en la prenant dans ses bras. Si tu savais à quel point je suis heureux de te retrouver, et à quel point je suis désolé…

Le souvenir des obsèques de James revint à la mémoire de Lily. Dumbledore ne lui avait rien dit, et seuls Sirius et Remus avaient été autorisés à y assister.

- Ce n’est rien, répondit-elle en esquissant un faible sourire.

Severus, droit comme un I, n’avait pas bougé d’un pouce et observait toujours Sirius avec haine. Lily avait cru qu’il partirait rapidement, car la présence du Maraudeur l’insupportait.

- Ne craignais-tu pas d’être en retard, Sev ? hésita Lily.

Sirius, désinvolte, affichait un sourire triomphal.

- J’aimerais rappeler quelques règles élémentaires à Black avant de m’en aller, répondit froidement Severus. Tu n’es pas un invité ici. Je te tolère simplement parce que je n’ai pas le choix. Ne t’avise pas d’explorer les lieux, de toucher à quoi-que-ce-soit.

- Si tu crois que j’ai la moindre envie de visiter ta bicoque, lui rétorqua l’indésirable. Si je suis ici, c’est avant tout pour Lily et Harry. Je suis certain que ma présence ici rendra leur temps moins long, et plus agréable.

- Tu n’es pas ici pour les divertir ! grogna Severus. Tu es ici pour assurer leur sécurité !

Sirius ricana.

- Oui, en effet. Je te remercie de me le rappeler Rogue, j’avais complètement oublié. Maintenant que tu le dis, je pense pouvoir faire preuve de polyvalence, dit-il avec un rictus amusé aux lèvres.

Sirius avait beau avoir renié sa parentèle, il demeurait un jeune homme fier aux manières aristocratiques, qui ne souffrait pas de recevoir la moindre directive, encore moins de la part de Severus. Lily vit que ce dernier tenait fermement sa baguette, cachée par les pans de sa cape sombre. La situation pouvait dégénérer d’un moment à l’autre. La jeune femme sentait que l’atmosphère devenait de plus en plus orageuse.

- Cependant, je dois te rappeler moi aussi quelques faits qui ont certainement échappé à ton esprit pénétrant, poursuivit Sirius. James était mon meilleur ami, et avant tout l’homme que je considérais comme mon frère. Harry est mon filleul, je suis son parrain. Lui et Lily sont ma famille. As-tu bien compris ? Je n’ai aucun ordre à recevoir de ta part, et sache que dès que cette grotesque situation aura pris fin, je me chargerai moi-même de la sécurité et du bien-être de Harry et de Lily. Je les éloignerai de toi, de ton esprit tordu de mangemort. Tu n’es personne, Servillus !

- Ça suffit ! ordonna Lily avec fermeté.

Les deux hommes regardèrent Lily sans dire un mot.

- Severus, tu ferais mieux de partir, dit-elle avec froideur. Tu craignais d’être en retard, si je me rappelle bien.

Il hocha la tête et adressa un dernier regard orageux à Sirius avant de disparaître dans la cheminée.

- Nous voilà enfin débarrassés ! s’exclama joyeusement Sirius.

- Sirius, dit Lily en fronçant les sourcils. Tu ne peux pas dire ce genre de choses.   

- Quoi ? Il faut bien rappeler à Servilo qui sont ses supérieurs.

- Tu avais promis, lui rappela la jeune femme rousse. Tu avais promis d’être cordial, respectueux.

- J’avais promis d’essayer, répondit-il avec nonchalance. On ne raye pas dix années d’inimitié en seulement quelques instants. Et puis, c’est lui qui a commencé… À l’entendre, il faudrait que je reste prostré dans un coin sans vous quitter des yeux, toi et Harry. Tu crois que je suis autorisé à utiliser les sanitaires ?

Lily soupira, mais Sirius n’avait pas totalement tort. Severus ne souhaitait nullement que Sirius soit à son aise chez lui.

- Lily, excuse-moi. Je suis vraiment bête parfois… Je ferai mieux à son retour.

La rousse haussa un sourcil. Elle n’était pas certaine de comprendre. Mieux pouvait signifier pire dans la bouche de Sirius. Elle n’avait pas envie de voir les deux sorciers dévaster le salon qu’elle rénovait depuis deux jours.

- Parle-moi de l’extérieur, lança Lily, qui voulait changer de sujet.

- Comment ça ? Tu ne lis pas les journaux ? Ce fils de détraqueur ne te laisse pas lire la presse ?!

- Non, ce n’est pas Severus. C’est Dumbledore ! Il nous a interdit de recevoir la moindre chouette, et le moindre hibou… même ceux qui livrent la Gazette. Je ne sais rien de rien. Et Severus est dans le même cas que moi.

- Sacré Dumbledore, ironisa Sirius. Je comprends mieux pourquoi il nous a déconseillé de t’écrire, Remus et moi. Par précaution, il disait… Tu sais, je ne savais même pas qu’il t’avait caché les funérailles de James.

Il s’arrêta pendant quelques instants. Le sujet était douloureux pour lui.

- Quand nous sommes arrivés au cimetière, nous avons été mis devant le fait accompli. J’ai failli partir… Mais Remus m’a raisonné… Alors, je suis resté pour James, pour toi, pour Harry… Il ne méritait pas de partir de cette façon…

Lily sentit sa gorge se serrer.

- Je suis contente que tu sois resté, que Remus et toi ayez assisté à son enterrement… Vraiment.

- Le lendemain, c’était Peter… Du moins, ce qui restait de lui. Je ne pourrai jamais me le pardonner… Quand je pense à sa pauvre mère…

Lily enlaça Sirius dans ses bras, et celui-ci sanglota. Elle ne l’avait jamais vu pleurer, jamais. La disparition de James, ajoutée à celle de Peter, avait été un véritable choc pour le jeune homme. Sirius et James se considéraient comme des frères. Sirius avait même fugué à l’âge de seize ans pour s’installer chez les Potter, qui l’avaient accueilli à bras ouverts, comme un second fils. Sirius avait été complètement renié par sa famille. Mais beaucoup de choses avaient changé en cinq ans. Son père était mort, et son frère – un mangemort selon Sirius – avait disparu deux ans auparavant. Il n’avait plus que sa mère, mais il ne l’avait pas revue depuis le jour de sa fugue.

- Elle n’avait plus que lui, poursuivit Sirius. C’est terrible de perdre la seule personne qu’on a au monde… Et tout ça par ma faute…

- Ne dis pas ça… Il connaissait les risques…

- Non, il ne les connaissait pas. Personne ne les connaissait… Bien sûr, nous savions que Voldemort userait de certains moyens, tels que les Impardonnables ou le Veritaserum, qui sont impuissants face à la volonté du gardien. Je n’avais pas prévu qu’il en connaissait d’autres. Cela aurait dû être moi.

- Dumbledore non plus ne le savait pas. Il disait que le Sortilège de Fidelitas était le moyen le plus sûr… Tu n’es pas le seul à blâmer. Je suis aussi à blâmer, tout comme James, Dumbledore… Nous aurions dû trouver un autre moyen… Cela ne sert à rien de se flageller, de se torturer l’esprit. Rien ne pourra jamais ramener James et Peter… Nous devons vivre avec cela, et ne pas oublier que le véritable responsable est Voldemort.

Sirius acquiesça et s’éloigna un peu de Lily.

- Veux-tu savoir ce qui se passe à l’extérieur ?

Lui et Lily s’assirent sur le canapé et Sirius lui raconta tout. Il y avait d’abord eu des festins organisés aux quatre coins du pays. L’information de la disparition de Lord Voldemort s’était répandue comme une trainée de poudre, et les sorciers et sorcières l’avaient célébrée pendant plusieurs jours.

- Ils ne font qu’en parler dans la Gazette… Pas une seule Une ne concerne pas Voldemort, ou la façon dont il s’est volatilisé. Chacun y va de sa petite théorie…

- Que disent-ils des mangemorts ?

- À chaque édition, les portraits de ceux qui sont recherchés sont affichés… Ma chère cousine Bellatrix, ces dégénérés de Lestrange… Ce matin, j’ai appris qu’ils avaient capturé Dolohov. Ils auraient mieux fait de l’achever…

Antonin Dolohov était un sadique, un monstre, qui avait torturé des opposants, mais aussi des Moldus. Il avait également participé à l’assassinat des frères Prewett, deux grands duellistes. Leur disparition avait été une lourde perte pour l’Ordre.

- Et ce quatrième mangemort, celui qui a participé à l’enlèvement et à la torture des Londubat… A-t-il été identifié ?

- Non… Nous savons juste qu’il s’agit d’un jeune homme… Tu parles d’un portait !

- Tu crois que… Je sais que tu n’aimes pas parler de ta famille…

Lily avait songé à Regulus Black, le frère cadet de Sirius.

- J’y ai pensé, répondit-il. Après tout, personne ne sait ce qu’il est devenu. Je m’en moque d’ailleurs. Mais si j’apprends que c’est lui qui a rendu à l’état de veracrasse Frank et Alice, ce n’est pas le baiser d’un détraqueur que Regulus recevra ! Crois-moi !

- À l’état de veracrasse, répéta Lily, horrifiée. Dis-moi la vérité… Dumbledore ne m’a pas tout dit.

- Les Londubat ne quitteront certainement jamais Ste Mangouste. Ils ne réagissent à aucun traitement. Les médicomages sont désemparés. Ces tarés, ces monstres ont fait d’eux des légumes, des fous. Ils ne parlent plus… Enfin, si… Ils hurlent comme des animaux… Ils se comportent comme des animaux… Ils sont partis… Ce ne sont plus que des corps animés par quelques instincts… Des bêtes séniles…

Les mots de Sirius choquèrent Lily, mais elle avait besoin de les entendre. La vérité n’était pas toujours plaisante à entendre, loin de là.

- Il y a autre chose. Je veux que tu saches que je n’approuve absolument pas que toi et Harry vous vous trouviez ici, chez Serv… hum… Rogue. Contrairement à Dumbledore, je ne pense pas qu’il s’agisse de la meilleure cachette. Surtout quand on connaît les relations de Serv… Rogue.

- Tout se passe bien, ici, assura Lily. Comme je te l’ai déjà dit, Severus nous traite extrêmement bien. Tu ne l’apprécies pas, c’est ton droit. Mais je n’ai absolument pas le droit de me plaindre de lui. Il prend de grands risques en nous accueillant chez lui. Tout ce que je peux dire, c’est que tu ne connais pas Severus comme moi je le connais. Je crois même que personne ne le connaît, comme moi je le connais. Ce n’est pas de la prétention, c’est la vérité.

- Alors, tu le considères comme ton ami… répondit Sirius en grimaçant.

- Oui, acquiesça Lily. Je lui fais entièrement confiance. Que voulais-tu me dire ? Que Harry et moi sommes les cibles des mangemorts ? Je le sais déjà. C’est pour ça que nous sommes ici, pour qu’ils ne nous trouvent pas.

- Non, ce n’est pas ça Lily… Ton nom et celui de ton fils sont connus de tous.

Lily cligna des yeux. Que voulait donc dire Sirius ?

- Je t’ai dit que Voldemort occupait largement la place dans la Gazette. Mais ils parlent aussi de toi, de Harry… Ils écrivent que vous êtes ceux qui ont survécu… Ils écrivent que Harry a survécu au Sortilège de la mort, qu’il est le seul à l’avoir fait. Ils l’ont surnommé le Survivant, celui qui a provoqué la chute de Voldemort.

- Mon dieu… soupira Lily.

Comment avait-elle pu ne pas y songer ?

- Chaque jour, ils publient des détails sur toi et Harry… Ils savent même pour sa cicatrice !

- En forme d’éclair, compléta Lily, désemparée. Quels détails ?

Sirius lui répondit que la presse brodait la plupart du temps. Il était notamment question des longs mois qu’avaient passé les Potter à se cacher à Godric’s Hollow. Leur cottage détruit avait même été photographié à plusieurs reprises.

- Ils font aussi des suppositions sur l’endroit où vous vous cachez.

- Quoi ?! s’écria Lily. Rassure-moi… Ils ne savent pas que nous sommes ici ?

- Non… Qui pourrait penser que vous avez trouvé refuge chez ce misérable ? Non, un jour vous êtes à Poudlard. Un autre, vous êtes à l’étranger, le lendemain vous vous trouvez au Ministère, ou bien dans une résidence étroitement surveillée par des Aurors en faction. Ils brodent, comme je te l’ai dit.

Lily ne savait pas ce qui était le pire pour elle et son fils : être potentiellement poursuivis par des mangemorts en fuite, ou par des journalistes de la Gazette du sorcier. Si le quotidien des sorciers apprenait où elle et son fils se cachaient, Lily ne donnait pas cher de leur peau. C’était finalement un mal pour un bien de ne pas avoir été tenue informée pendant des jours. Elle n’aurait pas supporté de lire toutes ces bêtises, mais elle ne souhaitait plus demeurer dans l’ignorance. Le savoir était le pouvoir, et permettait d’agir en conséquence.

Harry se réveilla quelques instants plus tard, et Lily le nourrit dans la cuisine sous le regard ému de son parrain.

- Il ressemble tellement à James. On dirait sa copie conforme, sauf les yeux…

- Les miens, répondit Lily qui donnait à Harry une cuillère de porridge. Je me le dis tous les jours quand je le regarde.

C’était à la fois une consolation et un supplice. Harry grandirait et ressemblerait trait pour trait à son père, à l’homme que Lily avait tant aimé, aimait toujours.

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