Ceux qui s’aiment ne se quittent jamais
Quatre jours passèrent, Becca était devenue l’ombre de Raven, où que la jeune mécanicienne travaille, laboratoires, salle des archives, centre de commandement… Becca était toujours à ses côtés pour lui indiquer la marche à suivre et lui faire découvrir les technologies qui pourraient l’aider à accomplir sa mission. Monty et Jasper les épaulaient du mieux qu’ils pouvaient. Pour les autres, qui étaient relégués aux tâches subalternes voir parfois contraints à l’inactivité, le temps paraissait de plus en plus long.
Vivre en vase clos était une habitude pour les Skaikru puisqu’ils étaient nés sur l’Arche, mais pour le natif d’Azgeda cela devenait insupportable. Hector déjà d’un naturel taciturne et peu chaleureux commençait à devenir irritable, voir agressif. Bellamy avait décidé de le garder à l’œil, car il craignait que le guerrier ne tente de regagner la surface pour disparaitre, hors ils avaient besoin de lui pour faire le chemin du retour.
Clarke quant à elle, s’était isolée du groupe. Bien sûr elle se tenait au courant des avancées des travaux de Raven et était toujours disponible en cas de nécessité, mais elle ressentait le besoin de se tenir à l’écart. De toute manière elle n’était pas en mesure de prendre les choses en main et laissait bien volontiers cette tâche à la matière grise de Raven.
La quatrième nuit, Clarke ne parvenait pas à trouver le sommeil, elle décida de se balader dans le complexe pour tromper l’ennui. Tout était calme, ses amis devaient probablement déjà dormir depuis un moment, elle marcha machinalement son esprit en veille, se dirigeant au hasard là ou ses jambes la conduisait.
Elle se retrouva devant l’ancien bureau de Becca, elle poussa la porte et entreprit de visiter les lieux. Un bureau en bois poussiéreux surplombé d’une lampe industrielle trônait au milieu de la pièce, un petit canapé en cuir brun était installé contre le mur à côté d’une étagère remplie de livre jaunis tout aussi poussiéreux que le bureau.
Clarke alluma la lampe et s’assit sur le canapé perdue dans ses pensées. Lorsque soudain elle sursauta, l’hologramme de Becca se tenait devant-elle.
« Bonsoir Clarke !» Dit-elle.
« Oh…euh Bonsoir Becca. » Répondit la jeune femme, encore sous le coup de la frayeur que cette apparition lui avait faite.
« Cette manie qu’elle a d’apparaître d’un coup ! » Pensa Clarke qui ne laissa rien paraitre.
« Qu’est-ce que tu fais ici ? » Demanda Becca en regardant son ancien bureau avec un air nostalgique.
« Oh…rien je n’arrivais pas à dormir, alors je me balade. » Répondit Clarke en se redressant sur le dossier du canapé.
« Tu ne travailles pas avec Raven ? »
« Si je n’étais pas un hologramme je dirais que cette fille m’épuise, elle ne s’arrête jamais ! » Dit-elle en souriant avant de poursuivre :
« Mais ce soir je lui ai dit que je ne l’aiderai plus temps qu’elle ne prendrait pas un peu de repos. J’ai peur qu’elle ne présume de ses forces et que son physique ne la lâche. »
« C’est une dure à cuire… » Répondit Clarke.
« Je sais que tu as une question pour moi Clarke…mais tu n’as toujours pas osé me la formuler… » Dit Becca. Si elle avait été réelle, Clarke était persuadée que l’ancienne commandant se serait assise à côté d’elle et lui aurait posé une main sur l’épaule comme pour l’encourager à se confier. Mais, pas besoin d’être réelle, la douceur de son regard eût le même effet.
Une fois de plus, Clarke avait peur de poser la question, elle était tellement angoissée d’entendre une réponse qui mettrait un terme à son secret espoir. Elle resta silencieuse une minute les yeux dans le vague avant de prendre son courage à deux mains et de s’adresser à nouveau à Becca.
« Est-ce que tu es la seule à pouvoir apparaitre par l’intermédiaire de la flamme ? »Demanda-t-elle en retenant son souffle.
Becca eût un regard plein de compassion, elle savait très bien ce que voulait savoir Clarke.
« Comme tu le sais, les esprits des défunts commandants vivent encore dans la flamme, je ne suis que l’un d’entre eux, et Raven par l’intermédiaire du système informatique de la base est venu me rechercher. Cela est faisable pour tous les autres… »
« Même s’ils sont morts dans la cité des lumières ? »
Becca se mit à sourire :
« Lexa n’est pas morte dans la cité des lumières, Clarke… aujourd’hui elle se trouve ailleurs…»
« Je ne comprends pas… » Dit Clarke dont le regard s’était illuminé à nouveau.
« Chaque esprit vit dans la flamme…dans son propre monde…celui qu’il s’est créé… Lexa est dans le sien… »
Voyant que Clarke ne comprenait toujours pas, Becca décida de simplifier l’information.
« Lorsque tu étais dans la cité, ton esprit a pu interagir avec ce monde-là. Par exemple, tu as fait apparaitre la montre de ton père, fais tomber la pluie, transformer le jour en nuit… Et bien Lexa à son propre monde, sa conscience est abritée dans son propre espace tel que son esprit l’a conçu.»
« A quoi est ce qu’il ressemble ? » Demanda Clarke pressée de tout savoir.
« Je ne peux pas te dire exactement, je n’y ai pas eu accès, mais ce que je sais c’est que c’est un endroit très beau et très calme. Contrairement a un autre ancien Heda, avide de guerre dans sa vie, qui aujourd’hui vit dans un monde où il passe son temps à guerroyer et remporter des batailles et ce pour l’éternité. Un autre revit inlassablement son enfance…Dans ce monde on n’a pas la notion du temps. Tout est possible. Mais ce que je sais Clarke parce que nous sommes tous liés c’est que le monde que s’est construit Lexa est très différent, c’est un endroit magnifique, tout à fait à son image ou du moins à l’image de ce qu’elle espérait pour son futur et celui de son peuple. »
Clarke émue, les yeux rougis par les larmes :
« Est-elle heureuse ? »
Becca ferma les yeux un instant comme si elle tentait de ressentir quelque chose.
« Je te mentirai si je te disais qu’elle est heureuse, elle s’est imposée une solitude qui lui pèse loin des autres esprits de Heda avec qui elle n’interagit jamais, mais dans son monde elle ne souffre plus. »
Clarke en essuyant du revers de sa main une larme qui coulait le long de sa joue dit d’une voix empli de certitude :
« Je veux la voir ! »
« Pourquoi veux-tu vous infliger une nouvelle blessure à toutes les deux ? La ramener ici, lui ferais reprendre conscience de sa condition, te revoir et te quitter à nouveau pourrait l’anéantir et alors le monde salutaire dans lequel elle s’est réfugiée pourrait se transformer en cauchemars. Ne vaut-il pas mieux là laisser en paix ? Entends-moi bien je comprends ta souffrance mais je sais que la ramener à un état conscient en interagissant avec elle risquerait de vous détruire toutes les deux. »
« Est-ce que la flamme peut activer deux esprits en même temps ? » Demanda Clarke qui préférait ignorer les avertissements de Becca.
« Non, un seul esprit à la fois… » Répondit Becca désolée de voir que Clarke n’entendait rien à ce qu’elle venait de lui dire et restait dans son idée fixe, revoir Lexa.
« Montres-moi comment la faire revenir. »
« Clarke…je... »
« Becca ! Montres-moi comment ramener Lexa ! »
Becca l’air attristé savait qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’accéder à la requête de Clarke.
« Rejoignez-moi devant l’unité centrale, commandant. » Dit Becca en disparaissant.
Clarke ne perdit pas une minute, elle courut dans les couloirs jusqu’à cet immense ordinateur où Becca l’attendait déjà.
La jeune femme blonde prit place dans le fauteuil devant le clavier. L’hologramme lui indiqua la marche à suivre pour isoler l’esprit de Lexa et la faire apparaitre à sa place.
« Voilà, maintenant tu sais…Si telle est ta décision, tu peux sortir Lexa de son monde tout de suite pour la ramener ici avec toi. » Dit-elle calmement, mais son visage désapprobateur indiquait clairement à Clarke qu’elle ne la soutenait pas dans cette démarche.
Clarke hésita un instant puis, en voyant l’heure matinale, elle pensa que ce n’était pas le meilleur moment. Raven allait se lever d’une minute à l’autre et Becca devait être présente pour l’épauler. La jeune femme sentit le sens du devoir et des responsabilités reprendre le dessus sur son cœur, ce n’étais pas le bon moment. Mais là nuit prochaine, lorsque tout le monde dormirait à nouveau et que Becca serait alors inutile, elle ramènerait Lexa auprès d’elle.
La journée suivante sembla durer une éternité, Clarke n’avait qu’une seule idée en tête, retrouver Lexa. Monty et Jasper avaient beau lui raconter les incroyables découvertes qu’ils avaient faits dans le complexe, Clarke ne les écoutait pas. Elle se contentait d’hocher la tête ou de répondre simplement par oui ou par non. Elle essaya de dormir un peu dans l’après-midi, mais tant de questions se bousculaient dans sa tête qu’il lui fût impossible de fermer les yeux.
Le doute commençait à l’envahir, avait-elle le droit d’agir aussi égoïstement ? Becca avait-elle raison ? L’envie était trop forte, la vie depuis la disparition de Lexa lui était trop pénible. Il fallait qu’elle la revoie même sous une forme immatérielle, même si elle devait souffrir de nouveau au moment de la séparation. La jeune femme se disait que cela en valait la peine.
Le soir venu, tout le monde était réuni au réfectoire. Murphy passait le temps avec Bellamy à jouer aux cartes. Raven mangeait tout en griffonnant des calculs sur un calepin à côté d’elle. Monty et Jasper racontaient des blagues et Hector restait prostré au bout de la table enfermé dans son mutisme.
Clarke comptait les minutes, jusqu’à ce que Jasper ne se lève et déclare :
« Les amis je suis épuisé, je vous laisse je vais me pieuter. »
Il fût rapidement suivi par Murphy et Monty. Peu après Hector finit par se lever en grognant et partit rejoindre sa couchette. Il ne restait que Bellamy et Raven. La mécanicienne avait la tête qui flanchait dangereusement au-dessus de ses notes.
« Vas te reposer Raven ! Tes yeux se ferment tous seuls. » Lui fît remarquer le jeune Blake.
Pour une fois Raven obéit sans rechigner, ses journées à rallonges l’avaient totalement épuisée.
« Et toi Bellamy ? » Demanda Clarke.
« Moi, je vais faire un tour de garde. Avec Hector un peu bizarre je préfère m’assurer qu’il ne profite pas de notre sommeil pour se faire la malle. »
« Hector est toujours bizarre Bell, j’ai dormi tout l’après-midi, si tu veux je prends le premier tour de garde s’il y a quoique ce soit je te préviens…» Mentit Clarke.
« …Bon d’accord, mais ne perd pas sa cabine de vue. »
« Je vais m’installer dans la salle de commandement et mettre en route les caméras de surveillance. » Répondit Clarke.
Bellamy se leva et lui souhaita bonne nuit.
Pour s’assurer que tout le monde était bien endormi, Clarke attendit une demi-heure avant de se rendre comme la veille devant l’unité centrale.
Plus l’échéance approchait plus son cœur battait la chamade. Envahie par un mélange de sentiments contradictoires ; Clarke était à la fois heureuse et triste, une minute sûre d’elle et l’instant d’après habitée par le doute. La jeune femme s’apprêtait à franchir une ligne qui lui semblait interdite. Assise sur le fauteuil devant les écrans, elle avait reproduit la manipulation que Becca lui avait exposée la veille. Clarke gardait son index au-dessus de la dernière touche qui compléterait le processus.
« Tu es sûre de toi Clarke ? » Demanda Becca qui était apparue à côté d’elle le regard posé sur la main tremblante de la jeune femme au-dessus du clavier.
Clarke en tournant les yeux vers l’hologramme :
« Je dois le faire… » Dit-elle d’un ton assuré comme-ci tout à coup son esprit avait réalisé qu’il n’y avait aucun autre choix possible.
Becca dévisagea la jeune femme, et pût lire dans ses yeux que sa décision était irrévocable.
Wanheda appuya sur la touche et Becca se volatilisa. Clarke se leva de son fauteuil et regarda autour d’elle la gorge nouée. Dans un silence de cathédrale, les secondes lui semblèrent durer l’éternité.
Lorsque soudain à quelques mètres d’elle, une silhouette se dessina devant ses yeux qui imploraient sa présence. Leksa kom Trikru apparue devant elle… La guerrière portait sa tenue d’Heda, ses cheveux châtains tressés avec application retombaient dans son dos, son regard vert si intense, la finesse de ses traits, tout était là…Offert aux yeux bleus de la fille du ciel qui avait invoqué sa présence… Clarke se trouvait enfin devant cette beauté immaculée dont elle avait désespérément rêvé depuis ce jour funeste ou elle lui avait été arrachée. Clarke sentit l’émotion l’envahir… Lexa quant à elle avait l’air totalement perdue et clignait des yeux comme pour se convaincre qu’elle ne rêvait pas en apercevant Clarke à quelques pas d’elle.
« Clarke ? » Demanda Lexa qui ne pouvait croire que tout ceci soit possible, confuse de se trouver là dans ce lieu qui lui était totalement inconnu devant celle qu’elle croyait avoir perdue pour toujours.
Clarke s’approcha lentement du commandant en esquissant un sourire comme pour la rassurer.
« Tout va bien Lexa… » Dit-elle sur le ton le plus réconfortant possible.
« Où sommes-nous ? Est-ce que c’est réel ? Comment cela est-il possible ? » Demanda Lexa complétement déboussolée.
Clarke s’approcha encore, si bien qu’il ne restait plus qu’un mètre entres elles, une larme coulait sur sa joue. Elle oubliait presque que Lexa n’était pas vivante et faite de chair et d’os comme elle.
« C’est réel… » Se contenta de répondre Clarke.
La jeune femme ne voulait pas mentir à Lexa mais elle souhaitait simplement profiter de cet instant inespéré et garder les autres questions pour plus tard.
Le visage de Lexa s’adoucit, elle oublia toutes ses craintes au simple regard de Clarke. Elle esquissa un sourire et à son tour ses yeux s’embrumèrent. Le commandant resta un moment à contempler le visage de Clarke qui lui avait tellement manqué. L’appel du cœur commença par cette simple vision, mais très vite elle voulut la sentir contre elle, l’enlacer de ses bras et la serrer très fort. Clarke le désirait tout autant et portée par l’émotion du moment elle oublia un instant que ce contact leur était interdit.
Lexa s’approcha pour enlacer la jeune femme. C’est alors que le moment de rêve se transforma en cauchemars. La défunte guerrière se rendit compte qu’elle n’avait pas de prise. En un instant dans un flash aveuglant le corps de la guerrière passa au travers de celui de Clarke pour se retrouver dans son dos. Toutes d’eux furent immédiatement ramenées à la dure réalité.
« Qu’est-ce que… ?» Dit Lexa en regardant ses mains devenues transparentes se rematérialiser peu à peu.
Clarke se retourna vers Lexa l’air sombre comme pour s’excuser de ne pas lui offrir une véritable résurrection.
« Tu es un hologramme…Une image virtuelle qui nous permet de communiquer par l’intermédiaire de la flamme…seul ton esprit est vivant… » Expliqua Clarke en essayant de dissimuler sa peine immense et ainsi avouer à son âme sœur que leur destins était toujours scellé.
Lexa resta silencieuse un instant comme pour digérer l’information. Lisant la détresse de Clarke dans ses yeux, elle lui répondit doucement :
« Ceux qui s’aiment ne se quittent jamais vraiment… »
Clarke ravala ses larmes et se força à sourire.
« Tu m’as manqué… » Lui dit-elle.
Lexa avec un air tendre :
« Tu m’as manqué aussi, Clarke. »
« Il fallait que je te revois… » Dit la jeune Skaikru des sanglots dans la voix.
Lexa sourit encore.
« Tu n’abandonnes jamais…Clarke kom Skaikru… »
« Toi…jamais…. » Dit Clarke en s’efforçant de sourire.
La jeune femme était totalement submergée par l’émotion. Revoir Lexa, entendre le son de sa voix, la savoir si proche mais toujours inaccessible…Tout ça la rendait heureuse et horriblement triste à la fois. Ces retrouvailles faisaient remonter tout le chagrin que Clarke avait accumulé depuis la disparition de son âme sœur. Cette réunion rendue possible par la technologie imposait à la jeune femme de rester en retrait derrière cette barrière invisible entre le monde des vivants et celui de Lexa.
La défunte Heda ressentait toute la détresse de Clarke et cette détresse devenait aussi la sienne car il lui était impossible de réconforter Clarke comme elle l’aurait souhaité.
Lexa tendit une main vers le visage de Clarke pour en effleurer les contours, même si Wanheda ne ressentait pas ce contacte cette seule vision la fît frissonner.
Soudain, une lumière rouge attira l’attention de Clarke, la loupiote indiquait l’ouverture de la porte qui donnait accès à la cage d’ascenseur. Clarke prise de panique se détourna de Lexa et alluma les écrans de surveillance.
« Qu’est-ce qu’il se passe ? » Demanda Lexa.
Clarke ne répondit pas jusqu’à ce qu’elle aperçoive Hector dans la pièce par laquelle toute l’équipe était entrée dans le laboratoire quelques jours auparavant.
« Euh…je dois y aller... Je reviens dès que possible. » Dit Clarke en faisant signe à Lexa de l’attendre, tout en se précipitant à l’entrée de la salle de commandement.
« Clarke ! » Lança Lexa inquiète.
La jeune femme n’avait pas le temps de prévenir Bellamy, elle devait se charger d’arrêter Hector avant qu’il ne quitte la base. Elle se précipita en courant jusqu’à l’entrée.
Elle ouvrit la porte et tomba nez à nez avec le natif d’Azgeda qui s’apprêtait à appuyer sur le bouton pour appeler l’ascenseur.
« Hector ! Mais qu’est-ce que tu fais ? » Lui cria-t-elle.
« Je rentre chez moi ! » Répondit l’homme avec un air pas commode.
« Tu as des ordres, tu dois nous reconduire à Polis, lorsque nous aurons trouvé ce que nous cherchons ! » Lui rappela Clarke en s’approchant de lui.
« J’ai largement rempli mon contrat, je vous ai amené jusqu’ici, il n’a jamais été question que je reste à végéter au fond d’un lac ! »
Clarke se mit en travers de son chemin, devant l’ascenseur pour lui en interdire l’accès.
« Bouges-toi de là Skaikru ! » Grogna l’homme menaçant.
« Non ! » Répondit Clarke les yeux noirs.
« Petite fille, si tu ne bouges pas c’est moi qui vais te faire bouger ! » Lui dit-il en brandissant une dague sous le nez de Clarke.
« Si j’étais toi je ne ferais pas ça ! » Lança une voix derrière Hector, le natif surpris tourna la tête et resta figé un instant devant cette apparition.
Il eut tout juste le temps de laisser échapper « Heda ? » Avant que Clarke ne se saisisse de son arme qui pendait à sa ceinture et ne l’assomme d’un coup de crosse derrière la tête. Le géant s’écroula à ses pieds.
« Je vois que tu as toujours des ennuis. » Lança Lexa avec un sourire ironique sur les lèvres.
Clarke lui rendit son sourire avant de répondre en soupirant :
« Si tu savais… »
Clarke désarma Hector et après l’avoir menotté, elle entreprit de le trainer jusqu’à la cabine la plus proche et de l’y enfermer. Clarke traina le natif non sans difficulté, Lexa se contenta de l’encourager dans son effort à défaut de pouvoir l’aider pour le porter.
« Désolée, je ne pensais pas que nos retrouvailles se passeraient comme ça… » S’excusa Clarke en se retournant vers Lexa après avoir condamné la porte de ce qui était devenu la cellule de Hector.
« Tu sais bien que nos moments de bonheurs sont toujours de courte durée… » Répondit ironiquement Lexa tentant de dérider Clarke.
Elles se dirigèrent vers la salle de commandement, sur le chemin Clarke tenta de lui résumer la situation depuis leur dernière rencontre dans la cité des lumières. Lexa écouta attentivement, car au-delà de l’inquiétude qu’elle avait pour Clarke, le sort de son peuple ainsi que sa succession la préoccupait. Clarke essaya d’éviter de s’étendre sur les récents événements survenus à Polis, ce n’était pas le moment. Elle avait ramené Lexa pour elle, et elle voulait que Heda reste en sommeil. En la gardant dans l’ignorance Clarke pensait protéger Lexa et éviter qu’elle ne se conduise en commandant en tentant de la conseiller ou de la guider. Pour le moment, tout ce que la fille du ciel désirait c’était de sentir Lexa auprès d’elle. Même si cela était égoïste, elle voulait que toutes les pensées de son âme sœur soient pour elle et non pour son peuple.
« Moi qui pensais que la destruction de la cité te garantirai un avenir… » Dit Lexa sur un ton coupable, comme si elle se sentait responsable de ne pas avoir pu sauver Clarke de ce nouveau danger.
« Je vais trouver une solution. »
« Oui, je sais que tu trouveras, tu es un leader Clarke. » Confirma Lexa.
« Je n’ai plus envie d’être un leader… » Dit-elle en baissant les yeux.
« Je sais…mais il le faut. Je veux que tu survives à tout ça, et tu es la meilleure chance pour nos peuples. »
Clarke releva les yeux vers Lexa, son cœur se remit à battre la chamade, elle avait l’impression d’étouffer.
En plongeant dans le regard du commandant Clarke lui murmura « J’aimerais… » Avant de se raviser.
« Moi aussi… » Répondit doucement Lexa qui avait très bien compris quel était le désir de Clarke a cet instant puisque le même désir l’animait.
« Un baiser…juste un baiser… » C’est tout ce que leurs cœurs réclamaient, c’est à ce moment-là que Clarke prit conscience du sens de l’avertissement de Becca. Revoir Lexa était le plus grand des bonheurs, mais ne pouvoir la toucher était aussi la plus grande des tortures.
« Est-ce qu’on va se revoir ? » Demanda Lexa.
« Aussi souvent que je pourrais. » Lui répondit Clarke.
« Mais lorsque tu auras trouvé les réponses que tu cherches tu repartiras et ça sera terminé pour de bon… » Dit Lexa amère le regard perdu dans le vague.
« Ne dis pas ça…je vais trouver un moyen pour te garder auprès de moi…tout est possible. » Répondit Clarke qui savait qu’elle se mentait à elle-même…
« Clarke tu es vivante, je suis morte, enfin pas tout à fait mais, tu ne peux pas vivre comme ça…Tu vas faire quoi revenir vivre ici jusqu’à la fin de ta vie pour qu’on puisse communiquer ? Une prison voilà ce que ça serait pour toi. »
Clarke sentit son cœur se briser, elle ne voulait pas entendre ce genre de chose, surtout dans la bouche de celle qu’elle aimait et qu’elle retrouvait à peine. L’injustice de la situation la mettait en colère.
« Je ne veux pas vivre sans toi ! » Lança-t-elle au bord des larmes.
« Je n’ai plus rien à t’offrir Clarke…Ma vie sur cette terre est terminée, mon cœur est à toi pour toujours…tu le sais…Mais, mon esprit est enfermé dans une boîte et je ne veux pas t’entrainer dans la même prison… » Lexa parlait avec raison, même si son cœur hurlait en silence, priant pour que Clarke reste à elle pour toujours. Mais cela aurait été égoïste et elle en avait conscience. Lexa l’aimait tellement qu’elle préférait la pousser à vivre sa vie pour la savoir un jour heureuse même si ça devait être sans elle.
« Je ne t’abandonnerai pas… » Dit fermement Clarke, en faisant signe qu’elle ne voulait pas entendre un mot de plus à ce sujet.
Lexa comprit qu’il ne fallait pas insister, Clarke n’était pas prête à entendre raison. Finalement cela l’arrangeait bien car chaque instant auprès d’elle était précieux, et valait une vie entière de commandant. Lexa ne regrettait rien de sa vie passée, elle avait été Heda, elle avait fait de son mieux pour protéger son peuple, pour accomplir son devoir même au prix de sa vie. Son seul regret avait été de laisser Clarke derrière elle. Aujourd’hui, elle avait l’immense chance de pouvoir faire ses adieux en douceur et de préparer celle qu’elle avait aimée au-delà de sa propre vie à avancer pour la quitter en la sachant saine et sauve. Pour la quitter en la sachant prête à retrouver le bonheur le jour venu.
Elles restèrent encore quelques instants côte à côte, sans se parler, la seule présence de l’autre était un tel réconfort que le temps semblait suspendu.
Clarke regarda l’horloge au-dessus des écrans, l’heure de la séparation était venue. Elle avait du mal à se résoudre à dire au revoir à son amour. Elle s’assit, devant le clavier, ses doigts tremblaient.
Sentant l’hésitation de la jeune femme Lexa lui dit d’un ton rassurant :
« Alors à un prochain rendez-vous…je répondrais à ton appel. »
Clarke leva les yeux vers Lexa, ses mains cessèrent de trembler.
« A notre prochain rendez-vous Heda. »
« A notre prochain rendez-vous Wanheda. »
Après un dernier sourire, Lexa disparue. Laissant Clarke seule devant les écrans. Revoir Lexa avait été un instant de pur bonheur. Maintenant il ne lui restait qu’un immense vide dans le cœur. Clarke sentit cette immense douleur l’habiter à nouveau. Cela confirma ses craintes, sans Lexa auprès d’elle la jeune femme était réduite à une vie de souffrance.