L'Initiation du Héros

Once Upon a Time (TV)
F/F
Multi
G
L'Initiation du Héros
Summary
{Ce titre est temporaire, c'est juste que je n'ai vraiment pas d'idée}C'est une simple réécriture de la série Once Upon A Time en y rajoutant un petit élément en plus. Ce nouveau personnage ne va pas provoquer de grands changements sur la trame de base de la série mais plutôt y apporter une histoire complémentaire.
Note
Avant de commencer quelques explications :- Chaque chapitre sera l'équivalent d'une saison, sauf indication contraire. Ils risquent d'être assez longs mais ce découpage sera plus lisible pour moi.- Les passages en italique sont des souvenirs- Toute l'histoire ce fera du point de vue de ce nouveau personnage, sauf indication contraireEt bien sûr, je ne possède pas les droits sur la série ni les personnages créer par Kitsis et Horowitz et je ne gagne rien à faire cette histoire, si ce n'est un peu de plaisir mais ça ne compte pas.Sur ce, bonne lecture ! (j'espère)
All Chapters Forward

Saison 2

Point de vue Neutre



Regina le sentait, elle savait que la malédiction avait été détruite. Henry venait de se réveiller en pleine forme alors, avant que les choses ne deviennent chaotiques, elle avait décidé de s'enfuir. En prenant le couloir, juste avant la sortie, elle l'avait vue allongée dans une des chambres. Pâle et immobile, sa fille, Morgane. Enfin, la jeune fille qu'elle avait forcée à être sienne pendant vingt-huit ans. Quand la culpabilité et l'inquiétude l'avaient envahie, elle s'était ruée dans la chambre en question.

À présent, elle se retrouve agenouillée à côté du lit, tenant la main de la jeune rebelle qui lui avait causé tant de soucis il y a trente ans. Elle n'avait jamais voulu lui faire du mal. Au début peut-être, la douce revanche sur une ennemie, la force à aimer la Méchante Reine. À présent, Regina n'avait pas honte de dire qu'elle s'était attachée à la jeune fille. Elle n'avait techniquement pas touché à sa personnalité, juste effacer sa mémoire. Regina avait, naïvement certes, pensé qu'elles pourraient peut-être entretenir cette relation malgré la fin de la malédiction.

Sauf que Morgane se retrouve à présent sous l'emprise du même sort dont Henry venait de faire les frais… et aucun moyen de la réveiller. Parce que le seul remède serait un baiser d'amour véritable et Regina ne sait rien de la jeune fille qu'elle avait techniquement kidnappée.



« Je suis désolée Morgane. » Regina parvient à dire au milieu de ses larmes. « Ça ne devait pas se passer comme ça. »

« Regina ! » Une voix se fait entendre quelque part dans le couloir. Quelques secondes plus tard, Emma apparaît dans l'encadrement de la porte. « Qu'est-ce qui lui est arrivé ? » La blonde demande immédiatement en voyant Morgane sur le lit d'hôpital.

« Sortez. » Regina exige en séchant rapidement ses larmes, espérant que la sauveuse n'ait rien vu.

« Regina… »

« Sortez ! »

« S'il lui est arrivé la même chose qu'à Henry il vous suffit de… »

« Ça ne marchera pas. » Regina la coupe. « Pas avec moi. Henry avait raison, je suis mauvaise. »

« Pas avec elle, jamais. C'est votre fille Regina, si quelqu'un peut la sauver c'est vous. »

« Ce n'est plus ma fille. » Regina se contente de dire en se levant. « Plus depuis que vous avez rompu le sort. »

« C'est faux. » Emma la retient par le bras, empêchant l'ancienne reine de quitter la pièce. « Vous l'aimez. »

« Mais elle se souvient maintenant que je suis la Méchante Reine et elle ne peut qu'éprouver de la haine pour moi. » Regina lui explique, semblant éprouver autant de remords que pour Henry. « Au moins son état s'est stabilisé quand le Sort Noir a été rompu, elle est donc hors de danger. Mais je ne pourrais pas la réveiller, elle ne me le permettra pas. »

« Écoutez, il y a quelques heures à peine je ne croyais pas aux histoires d'Henry mais elles étaient vraies. S'il y a une chose que j'ai appris en venant à Storybrooke : croire c'est pouvoir. » Emma retire sa main du bras de la brune et s'apprête à quitter la chambre quand elle s'arrête une dernière fois. « Je dirai qu'il vous reste environ cinq minutes avant que les villageois ne se souviennent de qui les a amené ici. Quoi que vous fassiez ensuite, ne restez pas dans le coin. »



Alors que Regina se retrouve seule à nouveau, son regard se tourne une dernière fois vers celle qui a été sa fille pendant 28 ans. Celle qu'elle a choisie pour remplacer un souvenir.



« Je ne peux pas te sauver. » Regina finit par dire. « Je ne connais même pas ton vrai prénom. » Elle continue dans un rire désabusé en rejoignant le côté du lit. « Mais s'il y a une partie de toi, même infime, qui a pu m'aimer un jour, il faut que tu te concentres dessus. C'est probablement tout ce qui peut te sauver à présent. »



Alors que Regina murmure cette dernière partie, elle s'approche encore un peu plus de Morgane et vient l'embrasser tendrement sur le front. Regina ne reste pas pour voir les effets de son baiser et se rue vers la sortie, se précipitant vers Mifflin Street.



PDV Morgane



Je me réveille brusquement et tout revient. Pas seulement les derniers instants avant que je croque dans ce morceau de pomme. Non, également tous les souvenirs d'avant la malédiction. Je me souviens surtout de… Regina. Précipitamment, je me lève et quitte la chambre. Je dois la retrouver.



« Morgane ! » J'entends Henry m'appeler alors je m'arrête. Il vient m'envelopper dans une étreinte dès qu'il est à portée de bras. « Est-ce que c'est ton vrai nom en fait ? T'étais qui avant ? »

« Personne, je ne suis pas dans le livre. » Je m'empresse de le couper dans son élan. J'aurais le temps de mettre Henry au courant plus tard. « Henry, je dois retrouver maman. »

« Pour tu l'appelles encore comme ça ? Ce n'est pas ta mère. La Méchante Reine n'a pas de fille. »

« Et moi je n'ai jamais eu de mère. On se verra plus tard, promis. »



Je mets fin à l'étreinte, confiant Henry à la mère qu'il a choisi, et j'ignore les appels de Mlle Swan pour me ruer jusqu'à la maison. C'est le seul refuge auquel je peux penser. Pourtant, lorsque j'atteins Mifflin Street, l'endroit est loin d'être aussi apaisant que d'habitude.

Une foule massive, pratiquement tout Storybrooke, se retrouve agglutinée devant notre maison. Et j'aperçois Regina sur le perron, faisant fièrement face à la foule. Sauf qu'au moment d'invoquer sa magie, rien ne se passe et je sais déjà que ça va tourner au vinaigre. Alors je cours, plus vite que jamais, jusqu'à atteindre l'endroit où Whale a plaqué ma mère contre une colonne.



« Lâche-la. » J'ordonne de ma voix la plus assurée, celle que je n'ai plus utilisée depuis la Forêt Enchantée.

« Ou quoi ? »



Le ton condescendant de Whale suffit à me faire agir et j'invoque ma magie, avec succès pour ma part. Alors que le docteur vole à plusieurs mètres, le reste de la foule met immédiatement une distance de sécurité entre nous.



« Je m'occupe d'elle. » J'annonce aux badauds avant d'empoigner ma mère et de l'entraîner à l'intérieur. La barrière magique que je lance autour de la maison me permet de me détendre. Nous sommes hors de danger. « Alors, explique-toi. » J'exige en lui faisant face.

« Tu es revenue te venger ? » Elle me demande, ignorant ma question.

« C'est ton truc la vengeance, pas le mien. Maintenant réponds. Pourquoi vouloir une fille et pourquoi moi ? »

« Je pensais… me repaître de ta haine dans le cas où la malédiction serait brisé. Vingt-huit ans a aimé la Méchante Reine comme une mère pour se réveiller et… »

« Se rendre compte qu'on est aussi orpheline qu'avant ? » Je l'interromps, lisant la surprise sur son visage. « Je n'ai jamais eu de mère, jamais. Sauf pendant cette malédiction. » Je continue en me détournant d'elle. « Je serais probablement la seule à le dire mais… j'ai aimé cette période de ma vie plus que le reste. J'avais enfin l'impression… d'être aimé. » J'ai du mal à contenir mes émotions. « Alors dis-moi, est-ce que ça en valait la peine ? Mes larmes sont-elles une récompense suffisante ? »

« Plus maintenant. » Sa réponse me force à lui refaire face. « Je ne veux pas te faire de mal, je n'en ai même plus après ces idiots dehors. Je veux juste… retrouver Henry. »

« Alors tu n'as plus besoin de moi. »

« Tu ne serais de toute façon pas rester, admets-le. »

« Et pourtant me voilà. » Je lui rappelle. « Et c'est toi qui m'a réveillé. Tu sais comment fonctionne un Charme du Sommeil, toi mieux que personne. Alors dis-moi, à défaut de retrouver un fils, une fille ne serait-elle pas suffisante ? »



Je reste silencieuse plusieurs secondes, essayant de déchiffrer le peu d'émotions qu'elle laisse transparaître sur son visage. Je décide finalement d'insister.



« Je sais ce que tu as fait par le passé. J'étais là, je l'ai vu et je l'ai vécu. Je sais aussi ce que tu as fait ici, à Storybrooke. Encore une fois, je l'ai vu et vécu. Mais plus que tout, pendant 28 ans tu as été ma mère et je ne veux pas perdre ça. Alors très bien, peut-être que tu préfères Henry, peu importe. Est-ce que tu pourrais… au moins encore un temps… prétendre être ma mère ? » Je lui demande finalement, le désespoir dans ma voix une évidence pour nous deux.



Encore une fois, elle ne dit rien pendant un temps mais je sais que mes paroles l'ont impactées. Alors je lui laisse le temps de prendre sa décision. Au bout d'un moment, elle finit par plonger son regard dans le mien.



« Tu veux vraiment rester alors ? » Elle tient à s'assurer. Je vois bien qu'elle était persuadée de ne jamais me revoir. « Après tout, j'ai tué ton ami, devant tes yeux. »

« Et je t'avais dit que tu le regretterais plus que moi. »

« C'est vrai. Je suis désolée. »

« Je ne veux pas d'excuses. Je veux une mère. » Je lui explique alors sans en démordre.

« J'espérais exactement ça, que tu veuilles rester. »

« Et je suis là. Maman… »

« Reste. » Elle m'interrompt d'une voix faible. « S'il te plaît. » Pour seule réponse, je vais me précipiter dans ses bras, savourant la chaleur de son étreinte. « Morgane… »

« Je reste, promis. »

« Alors il serait peut-être temps que tu me dises ton vrai prénom. » Elle me fait remarquer avec sourire dans la voix.

« Disons simplement que je préfère Morgane alors restons sur celui-là. » Je tente un compromis. « Après tout, c'est le prénom que ma mère m'a donné. »

« Tu semblais tellement m'en vouloir il y a quelques jours, je n'arrive pas à croire que tu sois là. »

« Je suis toujours en colère, mais j'ai encore l'espoir que tu puisses changer. Parce que j'ai vu du bon en toi et je veux que les autres le voient aussi. »

« Je peux changer et je te promets de tout faire pour. »

« Je n'en demande pas plus pour le moment. » Je lui dis, confortée dans ma décision. « Maintenant si ça ne te dérange pas, je n'ai rien mangé depuis hier à part un morceau de pomme empoisonnée alors… » Je m'éloigne en direction de la cuisine mais je m'arrête dès qu'elle m'interpelle.

« C'est pour ça que tu étais à l'hôpital ? » Je me contente d'un hochement de tête pour toute réponse. « Tu es en train de me dire que… ça aussi c'était de ma faute. »

« Nan, c'est moi. J'aurais dû me douter que c'était une mauvaise idée de chiper une épluchure de pomme dans la maison de la Méchante Reine. » L'expression sur son visage me fait comprendre que ma blague était de très mauvais goût. « Trop tôt ? »

« Un peu oui. »

« Désolée. J'éviterai ce genre de plaisanterie pour le moment. »

« Et j'éviterai les pommes pendant un temps. » Elle dit à son tour, un sourire sur son visage.

« Parfait. J'ai le droit à un vrai repas maintenant ? »



Des coups puissants se font entendre à la porte, nous interrompant dans notre élan. On échange un regard et je lui fais comprendre que je vais me charger d'aller renvoyer les importuns. Derrière le battant se trouve Emma et… ses deux parents du coup, je suppose. Avec Henry ?



« Un problème ? »

« Morgane, pourquoi es-tu encore là ? » Mlle Blanchard - Blanche-Neige - semble étonnée de me trouver là.

« Je vis ici, au cas où vous l'auriez oublié. »

« Tu pourrais être en danger ! Regina… »

« C'est ma mère. » Je la coupe d'une voix dure. « Elle ne me ferait pas de mal. »

« Elle a donc réussi à te réveiller. » Emma comprend immédiatement.

« C'est exact. Une raison à votre visite ? »

« Nous sommes ici pour l'arrêter. Légalement. » Blanche m'explique alors.

« Je vous interdis de l'approcher. »

« Morgane, laisse-nous passer. » Emma exige, l'air très sérieux.

« Vous ne lui ferez aucun mal, j'y veillerai. »

« Morgane ! » La voix de ma mère résonne derrière moi. « Ils n'en valent pas la peine. »

« Mais, maman… »

« S'ils veulent m'enfermer, très bien. Je ne résisterai pas. »

« Mais… »

« Je t'avais promis de changer, non ? » Ma mère me rappelle. « Ça commence ici et maintenant. »



***



« Me voilà prisonnière alors. » Ma mère déclare dès que Charmant a refermé la porte de la cellule derrière elle.

« Pourquoi on n'est pas retourné dans notre monde ? » Le Prince lui demande, ignorant son sarcasme.

« Parce qu'il a disparu. Nous sommes coincés là. »

« Avec l'eau courante et l'électricité. Quelle tragédie ! » C'est à mon tour de faire appel au sarcasme.

« Si on allait voir Gold. » Blanche propose alors.



Sans un mot de plus, Emma, Blanche et Charmant quittent le poste de police en compagnie de Henry. Je ne bouge pas en ce qui me concerne. Je n'abandonnerai pas ma mère.



« Je pourrais te faire sortir en un claquement de doigts. » Je lui fais remarquer.

« Et ensuite ? On vivrait comme des parias jusqu'à ce qu'ils nous arrêtent à nouveau ? »

« Je pourrais… »

« Rien du tout. » Ma mère me coupe immédiatement. « C'est la bonne chose à faire et tu le sais. »



C'est à ce moment que M. Gold fait son apparition à côté de moi et, avant que je ne puisse réagir, je perds connaissance.



***



Quand je reprend connaissance, Gold a disparu et je suis toujours seule avec ma mère. Elle est dans sa cellule et a le regard fixé sur sa main. Elle n'a pas remarqué que j'étais réveillée.



« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Je demande, attirant son attention sur moi.

« Tu as entendu parlé des Spectres ? »

« Les dévoreurs d'âmes ? » Elle acquiesce. « Il y en a un dans ce monde ? »

« Oui, et Gold l'a lâché sur moi. »

« D'accord, et comment on l'arrête alors ? »

« On ne peut pas. »



Elle semble complètement abattue et je réalise alors qu'elle abandonne mais ce n'est pas mon genre. Je ne m'arrête que quand je ne peux plus avancer.



« Il y a forcément une solution, il y en a toujours une. »

« J'en doute. » Le dépit est évident dans sa voix. « Je veux que tu t'en ailles. »

« Quoi ? »

« Tu risquerais d'être blessée. »

« Je n'en ai rien à faire, je n'ai pas peur de ce Spectre. »

« Mais moi j'ai peur pour toi ! » Elle admet d'une voix forte. « La nuit va tomber et c'est là qu'il va attaquer. Je t'en supplie Morgane, va-t-en. »

« Jamais, je ne t'abandonne pas. » Je réplique en quittant tout de même la pièce. Il va me falloir du calme pour réfléchir.



Si les Spectres attaquent la nuit, c'est sans doute parce qu'ils craignent la lumière du jour. Peut-être que c'est tout ce qu'il faut pour s'en débarrasser : de la lumière. Et je suis plutôt douée pour manipuler le feu alors…

Un grand bruit sourd m'interrompt dans mes pensées. Cela venait de la pièce d'à côté. Maman ! Je réalise à peine que les Charmants et Emma m'ont rejointes, je ne vois que les lumières qui se sont éteintes et je n'entends que la voix de ma mère qui m'appelle.

Charmant intervient mais se fait vite mettre hors d'état de nuire. J'attaque au même moment que Blanche. Une petite boule de feu pour ralentir le Spectre alors que Blanche allume un briquet et alimente la flamme à l'aide d'un désodorisant.



« Astucieux. » Je lui lance une fois que le Spectre s'est enfui par la fenêtre.

« Merci. »



Je vois Emma qui s'élance vers ma mère pour l'aider à se relever. A mon tour, je m'approche d'elle pour m'assurer qu'elle va bien mais, comme elle a toujours son âme, je dirais que oui.



« C'était quoi ce truc ? » Emma demande alors.

« Un Spectre. » Ma mère lui répond le souffle court. « Un dévoreur d'âme. »

« Est-ce que…? » Blanche commence avant que ma mère ne l'interrompt.

« Vous l'avez tué ? Non, il a le don de se régénérer. »

« Génial. Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? » Je demande alors.

« Rien, il va revenir. » Ma mère avoue d'une voix lasse. « Il reviendra jusqu'à ce qu'il ait eu sa proie : moi. » Elle finit d'une voix faible.

« Et comment on le tue ? » Emma pose la même question qui me hante depuis quelques minutes.

« Il n'y a aucun moyen. Cette chose est déjà morte, on ne peut pas la tuer. »

« Alors on a un problème. »

« Qui ça "on" ? » J'interviens d'une voix forte. « Votre problème est déjà réglé, quelqu'un d'autre s'est chargé de la Méchante Reine. »

« Elle a raison. » David m'appuie dans mon propos. « On n'a pas de problème mais Regina oui. »

« Quoi ? »

« David… »

« Tu ne veux rien faire ? » Emma et Blanche semblent choquées des paroles du Prince mais moi, ça ne m'étonne pas.

« Il la tue, il s'en va et on ne craint plus rien. »

« C'est un bel exemple que vous donnez à votre fille. » Ma mère lui fait remarquer.

« Non ! Vous n'avez aucun droit de nous juger ! »

« Je peux vous poser une question ? » Ma mère continue en ignorant le doigt accusateur que Charmant pointe sur elle. « Vous avez une idée de qui a fait apparaître ce monstre ? C'est Gold. »

« J'ai fait une promesse à Henry. » Emma prend la parole, me faisant reprendre espoir. « Elle ne doit pas mourir. »

« Merci petit frère. » Je soupire à voix basse, passant inaperçue aux oreilles des autres.

« Si on ne peut pas le tuer, qu'est-ce que vous suggérez ? » Blanche nous ramène vers notre sujet de conversation.

« Il suffit de l'envoyer quelque part où il ne fera plus de mal. » Je propose alors. « Il n'y a pas que les haricots magiques qui permettent de voyager à travers les mondes. Tu ne connais pas un autre moyen ? » Je demande à l'attention de ma mère.

« Il en existe peut-être un. »



***



« Qu'est-ce que tu peux bien cacher de magique dans ton bureau ? » Je demande à ma mère une fois qu'on a rejoint la mairie.

« Ceci. » Elle déclare simplement en sortant de sous son bureau une boite circulaire. Elle l'ouvre et en sort un chapeau. « Henry vous a vraiment demandé de veiller sur moi ? » Elle demande à l'attention d'Emma.

« Oui. » La blonde répond sans hésitation, faisant sourire ma mère pour la première fois de la soirée.

« Navrée de vous interrompre mais… ce chapeau c'est… ? »

« Je rêve. » Emma murmure. « C'est vous qui l'aviez ? »

« De quoi vous parlez ? »

« Du chapeau de Jefferson. »

« Qui est Jefferson ? » Ma mère demande, feignant l'ignorance. Mais je la connais trop bien, je vois bien qu'elle en sait plus qu'elle ne veut bien dire.

« Jefferson ? C'est qui celui-là, le Chapelier Fou ? »

« Exactement. » Emma me répond d'un ton qui laisse suggérer qu'elle a déjà croisé l'énergumène… et que la visite n'a pas été plaisante.

« On en fera des torches quand il réapparaîtra. » David annonce fièrement quand il entre dans la pièce en compagnie de Blanche, tous deux brandissant des balais en paille. « C'est vieux jeu mais je le suis aussi. »

« Je me contenterai de ma magie si vous n'y voyez pas d'objection. » Je lâche immédiatement.

« Alors, c'est quoi la suite ? » Blanche nous ramène encore une fois dans le vif du sujet.



Ma mère nous emmène alors hors de son bureau jusqu'à la grande salle de débat. L'espace est assez grand pour qu'on ait le temps de voir le Spectre venir.



« Il va ouvrir une porte dans notre monde. » Ma mère explique alors en tenant le chapeau entre ses mains. « Tout ce qu'on doit faire c'est envoyer le Spectre de l'autre côté. »

« Oh ouais, c'est facile. » Le sarcasme de David n'amuse personne.

« Je ne comprend pas tout, je croyais que notre monde était détruit. » Blanche note avec justesse.

« C'est vrai. Si on l'envoie dans un pays rayé de la carte, on le condamne à l'oublie éternel. »

« Voilà ce que j'aime entendre. Une créature maléfique de moins à Storybrooke. » Je reprends un peu espoir en entendant cela.



C'est alors que les lumières vacillent, annonçant l'arrivée du Spectre. Les portes tremblent et l'air se charge d'énergie magique.



« Regina. » Emma incite ma mère à agir au plus vite.

« Je fais de mon mieux. »

« Allez l'aider. » J'intime à la sauveuse en me plaçant devant ma mère. « On s'occupe de le repousser. »



Les portes s'ouvrent en claquant mais toujours pas de trace du Spectre. Je n'ai pas peur pour lui, j'ai simplement peur pour ma mère. Je n'ai aucune envie de la perdre maintenant. Quand le Spectre s'approche enfin, noir comme la nuit aux yeux rouge brillants, Emma intime encore une fois à ma mère de se dépêcher. Pendant ce temps, Blanche recouvre les barrières en bois d'alcool et j'y envoie une boule de feu dès qu'elle s'en est éloignée. David tient le Spectre à distance et on maintient nos positions.



« Aller, vite ! » David exige.

« Emma, aidez-la ! » J'ordonne encore une fois à la Sauveuse, espérant qu'elle prenne conscience de sa capacité magique innée.

« Ça ne marche pas ! » L'agacement est évident dans la voix de ma mère.

« Pourquoi ? »

« La magie est différente ici. » J'explique à la blonde tout en lançant une salve de boule de feu en direction du Spectre.

« Là ce serait le moment idéal. » David nous fait remarquer.



J'étais sur le point d'aller aider ma mère quand je vois Emma s'approcher d'elle et poser sa main sur le bras de ma mère. Je ne pensais pas que ça fonctionnerait de cette façon mais le portail s'ouvre juste au moment où le Spectre se lance vers ma mère.



« Il vient vers vous ! » David les avertit juste à temps pour qu'Emma pousse ma mère hors de portée du Spectre.

« Dégagez ! » Elle dit juste avant de tomber dans le portail avec l'entité maléfique.

« Non ! » Charmant et Blanche s'exclament presque en même temps.

« Je ne veux pas la perdre ! » L'instinct maternel de Blanche parle pour elle et saute dans le portail à son tour.

« Moi non plus ! » David tente de les suivre mais il atterrit sur le carrelage de la salle de débat.



Le portail s'est refermé. Plus de Spectre, plus d'Emma et plus de Blanche. On échange un regard avec ma mère, ça n'aurait pas dû se passer comme ça. Ce portail ne menait nulle part, elles sont donc perdues.



« Où sont-elles ? » David demande après avoir observé le chapeau pendant quelques secondes.

« Je n'en ai aucune idée. »

« Elles sont mortes ? »

« La malédiction a détruit tous les royaumes. »

« Elles sont mortes oui ou non ? » David redemande d'une voix beaucoup plus forte, le désespoir évident dans ses intonations.

« Je n'en sais rien du tout ! »

« J'aurais dû moi-même vous tuer. » Il s'approche de ma mère mais elle le repousse d'une seule main.

« Qu'est-ce qui vous en empêche ? Allez-y ! »



Elle le repousse jusqu'au mur d'en face et, avec sa magie qu'elle parvient enfin à utiliser, elle fait apparaître des branches qui maintiennent le Prince à quelques centimètres du sol.



« Vous croyez quoi, être un prince, un vrai héros ? » L'une des branches commence à étouffer David.

« Maman… » Je tente de la raisonner mais elle ne m'entend pas.

« Je vous en prie. Vous n'êtes que le fils d'un simple berger. J'aurais dû vous tuer quand j'en avais encore l'occasion. Et justement… j'en ai l'occasion. »

« Maman non ! » Je m'écrie en même temps qu'une autre voix.



C'est à ce moment qu'Henry apparaît dans la pièce accompagné de Ruby. C'est donc elle qui le surveillait ? Pourquoi venir maintenant, comment pouvait-elle savoir que tout danger était écarté ?

Au moins, la présence d'Henry aura eu pour effet de calmer instantanément ma mère. Même si elle n'interrompt pas son sort, elle se tourne vers lui.



« Henry, qu'est-ce que tu fais là ? »

« Et toi, qu'est-ce que tu fais ? »

« C'est fini, tu ne crains plus rien. » Elle tente de le rassurer mais il est moins naïf qu'il n'y paraît.



Comme elle ne semble pas se rendre compte que son sort fait encore effet, je m'occupe moi-même de libérer David de l'emprise des branches et Ruby va s'enquérir de son état.



« Et où est Emma ? Où est ma… ? »

« Elles sont parties. Elles ont franchi une porte et elles sont… »

« Perdue. » Je finis quand je vois que ma mère hésite.

« Chéri, je suis navrée. »

« Non, t'es pas navré. » Henry réplique d'une petite voix. « Tu mens. La vérité c'est que tu es la Méchante Reine. Je ne veux plus jamais te voir. »

« Non, tu ne dois pas dire ça. Je t'aime. »

« Alors vas-y, prouve-le. Fais qu'Emma et Mary-Margaret reviennent. Et en attendant, laisse-moi tranquille. Et ne cherche pas à faire du mal aux autres. »

« Mais où vas-tu aller ? »

« Avec moi. » David intervient, ayant retrouvé son souffle.



Henry quitte alors la pièce avec David. Quand Ruby passe près de moi, son regard croise à peine le mien. Je réalise qu'elle a compris quel camp j'avais choisi. Je m'approche de ma mère et je pose ma main sur son bras.



« Demain, j'irai lui parler. Il est blessé, il ne pensait pas ce qu'il disait. »

« Il croit vraiment que je ne l'aime pas ? » Elle me demande d'une petite voix.

« Il est encore trop jeune pour voir ce que moi je vois. On va les ramener et ensuite… il reviendra. »

« Je suis contente que tu sois là. »

« Moi aussi. »



***



Je l'ai entendu pleurer la nuit dernière et cela venait de la chambre d'Henry. Je n'ai pas osé entrer pour la réconforter. Parfois, les larmes font autant de bien que les étreintes. Aujourd'hui, elle fait comme si tout allait bien alors je ne dis rien non plus et je me contente de réfléchir à un plan pour ramener Emma et Blanche.

Dans la matinée, des coups puissants sont frappés à la porte et ma mère va ouvrir sans hésitation. David entre sans sommation et brandit le chapeau magique.



« Je veux savoir ce que c'est que ça. »

« Je suis surprise de ne pas avoir des gardes armés devant chez moi en permanence. » Ma mère réplique sans tenir compte de l'ordre du prince.

« Pas besoin. On sait tous les deux que si vous mettez le nez dehors les gens se battront pour avoir votre tête. »

« Qui prendrait le risque de s'attaquer à moi ? »

« Essayez si vous voulez. » David lui propose avec un air confiant. « Mais je crois que le coup du papier peint l'autre soir n'était qu'un coup de bol. Si vous aviez retrouvé vos pouvoirs cette ville serait déjà à feu et à sang. Vous ne pouvez plus faire appel à la magie aussi facilement, je me trompe ? Sachez que si vous êtes encore vivante en ce moment, c'est parce qu'Henry le souhaite. »

« Non, c'est parce que je suis là. » J'interviens alors, les faisant tous les deux sursauter. « C'est ma magie qui protège cette endroit, ma magie encore qui vous a libéré hier soir. » Je poursuis en m'approchant de David. Je m'arrête à quelques centimètres de lui. « Et sachez que, si vous êtes encore vivant en ce moment, c'est parce qu'Henry le souhaite. Il me suffirait de… » Je pose ma main sur son cœur et fait mine de le lui arracher. « Et pouf, plus de Charmant. »

« Morgane… » La voix de ma mère sonne comme une mise en garde.

« Oh ça va ! On ne peut plus s'amuser ici ? » Je me tourne vers ma mère et vois qu'elle est sérieuse. « Très bien alors, revenons-en à ce chapeau. »

« C'est ce qui a emporté votre femme et votre fille. » Ma mère se contente de cela comme explication et se dirige vers la salle à manger.

« Où l'avez-vous trouvé ? »

« Il y a bien longtemps que j'ai oublié et vous voulez que je vous dise ? Peut-être qu'au lieu de vous soucier de ce chapeau calciné, vous devriez vous occuper un peu plus de mon fils. »

« Oh c'est vrai que vous avez bien su veiller sur lui. » David réplique avec sarcasme.

« Je n'ai aucune leçon de puériculture à recevoir d'un homme qui a mis son nourrisson dans une armoire pour l'envoyer dans le Maine. »

« Bon écoutez, je tiens à ma famille. Maintenant que la magie est revenue, il doit y avoir un moyen de les suivre ! »

« De les suivre où ? Dans un vortex qui aspire tout sur son passage ? »  Ma mère essaie de lui faire comprendre la stupidité de ses propos. « Dites-vous bien que dès que la magie fonctionnera, je mettrai en effet cette ville à feu et à sang. »

« Vous êtes vexée et humiliée. C'est tout ce que vous méritez. Vous avez tout perdu et c'est bien fait pour vous. »

« Vous ne devriez pas me provoquer de cette manière. Pour l'instant je n'ai plus de pouvoirs magiques et je n'ai plus mon fils mais quand j'aurais retrouvé l'un, je retrouverai l'autre. Et je vous déconseille d'être dans les parages à ce moment-là. »

« Si vous avez besoin de la magie pour garder votre fils. » David commence comme un avertissement. « Vous ne l'aurez jamais réellement. » Alors qu'il s'apprête à quitter les lieux, je l'interpelle une dernière fois.

« Je ne me répéterai pas alors écoutez bien. » C'est à mon tour de le mettre en garde. « La barrière magique vous a laissé passé cette fois mais c'était la dernière. La prochaine fois, vous resterez sur le trottoir. »

« Bien compris. »

« Cherchez le Chapelier Fou, le livre d'Henry vous aidera sans doute à savoir à quoi il ressemble. »



Comme il quitte définitivement la maison sans un regard de plus pour nous, je retourne auprès de ma mère.



« Je n'aime pas la façon dont il te parle. » J'admet alors.

« S'il n'y avait que ça. » Elle se tourne vers moi et je lis la détermination dans son regard. « Tu n'as pas besoin de me défendre, tu sais ? »

« Mais je le ferais quand même. Ils doivent savoir que s'ils s'en prennent à toi, c'est moi qu'ils mettront en colère. »

« Quand j'aurais retrouvé mes pouvoirs… »

« Tu n'en as pas besoin. David avait au moins raison sur ce point. Ce n'est pas la magie qui t'aidera à récupérer Henry. » Je tente de lui faire comprendre.

« Je me sens vide sans elle. »

« Je sais, mais tu as passé vingt-huit ans sans magie, pourquoi ce serait différent maintenant ? »

« Parce que j'en ai besoin ! »

« Très bien. » Je concède dans un soupir. « Le docteur Hopper est dans l'allée, je crois qu'il veut te voir. »

« Tu peux vraiment savoir quand quelqu'un entre dans la propriété ? »

« Oui, mais seuls ceux qui ne te veulent aucun mal le peuvent. Tu devrais aller le voir, au moins pour qu'il ne t'importune plus. »



Comme elle sort finalement, je lui laisse le temps d'avoir une conversation privée avec lui. Je ne fais que les observer afin de m'assurer qu'elle ne fera rien au docteur. Quand je vois que ma mère monte dans sa voiture et laisse le docteur dans l'allée, je me téléporte jusque sur le siège passager.

 

« Où est-ce que tu vas ? »

« Morgane ! Ça ne va pas de me faire une frayeur pareille ? » Elle s'exclame, la main sur le cœur.

« Tu es en sécurité tant que tu es sur ta propriété. Mais si tu t'éloignes, je ne peux plus rien pour toi. Alors, où est-ce que tu vas ? »

« Chez Gold, il y a quelque chose qui m'appartient. »

« Comment Rumplestiltskin s'est retrouvé avec un objet à toi ? » Je demande, curieuse de la relation que ma mère entretenait avec le Ténébreux.

« C'est une longue histoire. »

« Bien, ne dis rien si ça te chante. Mais je t'accompagne. »

« Très bien, si tu veux. Mais tu restes dans la voiture. »

« Crois-moi, je n'ai pas envie de me retrouver en face du Ténébreux, une fois m'a suffit. » J'accepte alors qu'elle démarre. « Dis-moi, tu n'aurais pas emmené quelques livres de sorts avec toi en passant ? »

« Pour quoi faire ? »

« J'étais sérieuse tu sais ? Si on ramène Emma, Henry reviendra vers toi. »

« J'en doute. »

« Fais-moi confiance, tu veux ? » J'essaie encore de la convaincre.



***



« Tu savais qu'en franchissant la limite de Storybrooke, on oubliait sa vie dans la Forêt ? » Je demande à ma mère en la rejoignant.



Je la retrouve sous son pommier, derrière la mairie. Ses yeux sont brièvement passés au violet et son arbre, celui qui avait commencé à mourir juste avant la fin de la malédiction, a retrouvé toutes ses couleurs.



« Qu'est-ce que c'était ? » Je l'interroge.

« De la magie. »

« Donc tu as retrouvé tes pouvoirs. Je les sens, tu es toujours aussi puissante. »

« C'est maintenant que tu vas commencer à avoir peur ? » Elle semble attendre que je m'enfuis.

« Je te l'ai dit, je n'ai pas peur de toi. Ma… tutrice, celle qui m'a élevé, elle était très puissante. Beaucoup plus que toi, peut-être même plus que Gold. »

« Je la connais ? » Ma mère s'enquit immédiatement.

« J'espère bien que non. Alors, maintenant que tu as tes pouvoirs, c'est quoi le plan ? »

« Toi, tu rentres à la maison et moi, je vais chercher Henry. »

« Ça ne marchera pas. » Je tente de la prévenir.

« Nous verrons bien. »



***



Quand j'entends la porte d'entrée s'ouvrir, je me précipite et j'arrive juste à temps pour voir Henry courir vers sa chambre.



« Qu'est-ce que tu as fait ? » Je demande à ma mère mais elle ne me répond pas et se contente de suivre Henry.

« Henry ! »



Je me lance à leur poursuite à mon tour et j'arrive dans sa chambre juste à temps pour voir Henry tenter de passer par la fenêtre et ma mère le retenir avec le même genre de branches qui maintenaient David la veille.



« Arrête de te débattre comme ça. » Ma mère exige « Tu vas finir couvert d'échardes. »

« Maman, qu'est-ce que tu fais ? Libère-le ! »



Elle le ramène alors à l'intérieur et les branches disparaissent immédiatement. Henry prend alors place sur son lit, semblant résolu à rester ici.



« Combien de temps tu vas me garder prisonnier ? » Il demande dès que ma mère a refermé la fenêtre derrière lui. « Jusqu'à ce que je sois majeur ? »

« Je suis venue te sauver parce que je t'aime plus que tout. »

« Donc tu m'as fait prisonnier parce que tu m'aimes ? C'est pas juste. Et Morgane, elle est prisonnière aussi ? »

« J'ai choisi de rester auprès de ma mère, ne prend pas ton cas pour une généralité. » Je me défends sans hésitation.

« Morgane, c'est bon. » Ma mère me fait signe de me calmer. « Est-ce que tu sais d'où je viens ? Là-bas ce que je vivais était vraiment injuste. De tous les mondes que j'ai vu, celui-ci me paraît le plus juste. »

« Tu as brisé des centaines de vies. Tu t'es débarrassée de Mary-Margaret et d'Emma. »

« C'était un accident. »

« Emma a voulu sauver maman et elle est tombée dans le portail. Blanche l'a suivi, c'est tout. Maman n'y est pour rien. » J'interviens à nouveau.

« La manière dont tu m'as traité n'était pas un accident. Tu t'es arrangé pour que personne me croit. » Cette fois au moins, son accusation est juste. « T'as tout fait pour me convaincre que j'étais cinglé. »

« Mais tout ça va changer maintenant. Je ne te cacherais plus rien, tu connaîtras tous les secrets. Ici tu seras au contact de la magie en permanence. Je vais te montrer quelque chose. » Ma mère propose alors avant de faire apparaître un gâteau coloré au creux de sa main.  « Je t'apprendrais si tu veux. Je te montrerais d'autres tours encore mieux que celui-là. Tu pourras inviter tous tes amis à la maison à chaque fois que tu le voudras et tu pourras leur montrer ce qu'il y a dans ton livre. »

« Mais personne voudra jamais venir ici. Ils ont tous peur de toi. »

« Grâce à la magie tu pourras faire en sorte qu'ils n'aient plus peur. »

« Mauvaise idée. » Je marmonne pour moi-même.

« Tu pourras même faire en sorte qu'ils t'aiment. » Ma mère continue pourtant, inconsciente de ce qu'elle est en train de faire.

« Je n'ai pas envie de faire ça. J'ai pas du tout envie de devenir comme toi. »



C'est là qu'Henry quitte la pièce, laissant ma mère dans un désarroi complet. Je m'approche d'elle et prend la place qu'il a laissé vacante.



« Je ne crois pas que c'était la bonne solution. » Je lui dis. « Tu n'aurais pas dû l'enlever. »

« Et pourtant je l'ai fait et maintenant il est là. »

« Oui, mais il n'en a pas envie. Si tu le laisses partir, il reviendra. Peut-être pas demain, ni le jour d'après… mais il finira par revenir. »

« Tu le crois vraiment ? » Elle semble finalement prendre conscience de l'importance de ce que je dis.

« J'en suis certaine. Après tout, c'est toi qui l'a élevé et un jour, il s'en souviendra. »



Je décide de la laisser réfléchir et je vais à la poursuite de Henry. Je le retrouve dans la salle de jeu, installé devant la télé.



« Je peux m’asseoir ? » Je demande et il acquiesce en silence. « Elle t'aime vraiment tu sais ? »

« Peut-être. » Il se tourne enfin vers moi. « Tu sais, Ruby te cherche. Elle veut te parler. »

« Elle en avait l'occasion hier soir et elle ne l'a pas fait. »

« Parce qu'il y avait ta mère. »

« Notre mère, Henry. » Je le reprends immédiatement. « C'est elle qui t'a élevé, ne l'oublie pas. »



C'est là que j’entends la porte d'entrée s'ouvrir avec fracas. Comme ma mère a récupéré ses pouvoirs, j'ai levé la barrière de protection et j'ignore donc qui est entré. Je me téléporte dans le hall d'entrée pour le savoir au plus vite.



« Je veux voir Henry. » David exige sans préambule, l'épée à la main. Ma mère se lève pour lui faire face et je prépare une boule de feu, juste au cas où.

« Henry, tu veux bien descendre ? » Ma mère appelle d'une voix suffisamment forte et, comme je comprends qu'il n'y aura pas de confrontation aujourd'hui, je coupe ma magie. « Votre épée ne vous servira à rien. » Ma mère fait remarquer à David.

« Quoi que vous fassiez, je me battrai. » David annonce en approchant sa lame du cou de ma mère. Peut-être que j'aurais dû garder ma boule de feu.

« Je veux dire que vous n'en aurez pas besoin ici. »



Elle éloigne l'épée d'un geste de sa main juste au moment où Henry descend les escaliers. David semble surpris mais il comprend bien vite la situation quand ma mère va s'agenouiller devant Henry.



« Tu vas retourner vivre avec David. » Elle explique alors à Henry.

« C'est vrai ? »

« Oui. Je n'aurais pas dû te ramener ici. J'ai été… » Elle hésite. « Je ne suis pas très douée pour aimer. J'en ai été longtemps incapable. Mais je sais, ou du moins je crois me souvenir, que ce n'est pas en s'accrochant obstinément à une personne qu'on peut la pousser à nous aimer. Je regrette de t'avoir menti, de t'avoir fait croire que j'ignorais qui tu étais. » J'entends les larmes dans la voix de ma mère mais elle poursuit résolument. « Je veux que tu viennes ici parce que tu en as envie, pas parce que je t'y ai forcé par le biais de la magie. J'aimerais sincèrement me racheter tu sais ? Va chercher tes affaires. »

« Alors prouvez-le. » David intervient dès qu'Henry est monté à l'étage.

« Comment ? »

« Répondez à ma question. Est-ce qu'il existe ? »

« De quoi vous parlez ? »

« De notre monde, de la Forêt Enchantée ! Est-ce que tout ça existe encore ? »

« Oui. » Ma mère admet après s'être rapprochée de David. « Mais je ne sais pas comment y retourner. »

« Pour l'instant. » J'ajoute afin de le rassurer. Je n'arrêterai pas de chercher.

« Je sens que je viens de vous lancer dans une quête héroïque. Mais n'oubliez pas de veiller sur mon petit garçon. »

« Aucun risque. »



Alors qu'on regarde Henry s'en aller avec David, je m'approche de ma mère et vient l'enlacer afin de la réconforter.



« Il reviendra, tu sais. »

« Je te fais confiance. »

« Merci. » Entendre ça me fait très plaisir. « Maintenant que cette histoire est réglée et que tu es en sécurité, j'ai quelques personnes à aller voir. »

« Tu reviendras, pas vrai ? »

« C'est chez moi ici, je ne vais nulle part. » J'insiste bien sur le "chez moi". « Il faut juste que je mette certaines choses au clair. »

« D'accord. Je préparerai le dîner pour ton retour . »

« Bonne idée. »



***



Quand j'arrive aux écuries, l'endroit est aussi calme que d'habitude et je me sens vraiment apaisée pour la première fois depuis la fin de cette malédiction. Grâce au retour de mes pouvoirs, je sens une présence derrière moi avant de l'entendre. Je me tourne dans cette direction et me retrouve en face de Tony - Accolon - qui ne semble pas vraiment surpris de me voir.


« Elaine. » Il me salue avec mon ancien nom.

« Je préfère Morgane. » Je lui fais immédiatement savoir. « Je crois qu'il faut qu'on parle. »

« Peut-être bien. »

« Ce qu'il s'est passé pendant la malédiction… » Je commence mais il m'interrompt très vite.

« Je suis désolé, d'accord ? J'ignorais que… Est-ce qu'on pourrait oublier tout ça, s'il te plaît ? C'est déjà assez dur de se dire que… » Il secoue la tête comme pour organiser ses pensées. « Tu étais fiancée à mon meilleur ami. »

« Il y a une chose que j'aimerais savoir d'abord. Tu ignores peut-être comment fonctionne cette malédiction mais, au moment où tu m'as approché, elle commençait à s'affaiblir. Si tu m'as invité à sortir, c'était autant le fait de Tony que d'Accolon. »

« Qu'est-ce que tu veux dire par là ? »

« Est-ce que tu as eu des sentiments pour moi ? » Je demande finalement. « Dans la Forêt ? » Il ne dit rien et se contente de détourner le regard mais son silence vaut bien mille mots. « Pourquoi tu n'as jamais rien dit ? »

« Ton cœur avait choisi Urien, je n'avais aucune raison de le faire. »

« Je suis désolée. »

« Rien n'a changé pas vrai ? » Il dit dans un rire désabusé.

« La seule chose que je sais, c'est que je suis loin d'avoir la tête à la romance en ce moment. Je dois aider ma mère à sauver la Sauveuse. » La confusion dans son regard me fait sourire légèrement. « Je vais avoir besoin de temps et je crois que toi aussi. Tu as été comme un frère pour moi et je ne crois pas pouvoir changer cela un jour. »

« Voilà qui est très déplaisant à entendre. »

« Désolée. »

« Ce n'est rien. » Il soupire et passe une main dans ses cheveux avant de s'exclamer. « Tu le crois ça ? Regarde mes cheveux, cette coiffure est ridicule ! » Je ne peux m'empêcher de rire à cela.

« Moi j'aime bien, ils étaient beaucoup trop longs avant. »

« Admettons. On se reverra, pas vrai ? »

« Quand tu te sentiras prêt oui. » J'acquiesce avant de lui tendre un petit miroir de poche. « C'est comme un téléphone mais en version Mist Haven. » Je lui explique quand il se saisit de l'objet. « Quand tu voudras parler tu n'auras qu'à prononcer mon nom et… je t'entendrais. »

« Astucieux. Pourquoi n'avoir jamais fait ça avec les Rebelles ? »

« Les miroirs étaient beaucoup trop coûteux à ce moment. »

« C'est vrai, j'oubliais. » Il secoue la tête et laisse échapper un autre rire. « Je me suis beaucoup trop habitué à l'électricité et au confort d'ici. Je ne crois pas que je pourrais retourner à notre vie d'avant. »

« Je suis d'accord avec toi. J'aime bien ce qu'on a ici. » J'acquiesce, heureuse de voir que je ne suis pas la seule à apprécier Storybrooke. « Dis-moi, tu as retrouvé d'autres personnes de notre groupe ? »

« Mon oncle est ici mais ça tu le savais, c'est lui qui s'occupe des écuries. »

« Oui, j'avais remarqué. »

« Mais j'ouvrirai l'œil pour toi, La Fay. Je suis inquiet moi aussi. »

« Je te remercie » Je murmure avant de m'éloigner. « J'attendrai ton appel Accolon. »



Sa réponse se perd dans le tourbillon de mon sort de téléportation. En un clin d'œil, je me retrouve devant le Granny's Diner et j'aperçois, à travers la grande baie vitrée, ma serveuse préférée. Ruby est certes habillée de façon bien moins provocante que pendant la malédiction mais le rouge est toujours la couleur prédominante. Je prends une grande inspiration avant de pousser la porte d'entrée. La clochette au-dessus de ma tête annonce mon arrivée et le regard de Ruby est déjà sur moi.



« Morgane… »

« Salut. » Je tente avec un demi sourire.

« Granny, je prends ma pause ! » La brune enlève son tablier et fait le tour du comptoir.



Arrivée devant moi, elle m'attrape par le bras et m'entraîne à nouveau à l'extérieur. Elle ne s'arrête que quand on se retrouve dans une allée adjacente au Diner et me fait face.



« Henry m'a dit que tu voulais me parler. » Je commence alors histoire de briser le silence.

« Tu as choisi le camp de la Reine. »

« Certes, parce que je vois encore du bon en ma mère et je sais qu'elle peut changer. »

« Tu dis ça, mais tu n'as pas connu la Méchante Reine. » Ruby essaye de me convaincre de changer d'avis. « Tu ne l'as pas combattu comme je l'ai fait. » Quand elle dit ça, je ne peux m'empêcher de laisser échapper un éclat de rire.

« Tu avais entendu parler de La Fay, la Rebelle ? »

« La protectrice des forêts du Sud ? Oui bien sûr, pourquoi ? » J'attends qu'elle comprenne sans rien dire. « Attends, c'était toi ? » J'acquiesce, toujours silencieuse. « Mais tu n'es qu'une enfant ! »

« Elle avait attaqué mon village, le seul endroit que j'ai jamais considéré comme une maison, le seul endroit où je me suis sentie acceptée. Alors oui, je me suis battue et personne ne m'a jamais vu comme une enfant. » Je me défend immédiatement, fatiguée d'être vue comme une gamine. « Je l'ai combattue, je l'ai vu écrasé le cœur de l'homme que j'aimais et j'ai su lui pardonner. Si tu m'as fait venir uniquement pour me faire renoncer à ma mère, cette visite était bien inutile. Je ne l'abandonnerais pas. »

« Tu es sûre de toi ? »

« Oui. » Je dis d'une voix assurée. « Et je ne changerais pas d'avis. »

« Très bien. » Elle semble hésiter à ajouter autre chose alors j'attends patiemment qu'elle se décide. « Est-ce que… ce qui s'est passé pendant la malédiction, est-ce que c'était uniquement l'influence du sort ? »



Je comprends qu'elle parle des sentiments que j'avais développés pour elle. Je n'y ai pas vraiment repensé depuis la fin de la malédiction mais il est vrai que, peut-être, le sort y était pour quelque chose. Et puis, quand je me plonge dans ses yeux verts, la réponse me paraît évidente.



« Non, ça venait de moi. »

« Et donc… c'est toujours là. » Elle affirme plus qu'elle ne me pose la question.

« Oui, mais ça me passera. Je sais reconnaître une cause perdue quand j'en vois une. »

« Je suis désolée. » Quand elle s'excuse je ne peux m'empêcher de laisser échapper un petit rire, réalisant que j'ai dit exactement la même chose à Accolon il y a quelques minutes. C'est en effet très désagréable à entendre.

« Notre amitié m'est très précieuse. » Je finis pourtant par dire. « J'aimerais qu'on puisse en revenir à ça. »

« Je crois que… ça me plairait aussi. »



***



« Tu es sûre que ça va ? » Ma mère me demande pour la énième fois.

« Oui maman, c'était un mal nécessaire et tu le sais. »

« Ça ne veut pas dire que ce n'est pas douloureux. »

« Ça ne me dérange pas tant que ça. Je préfère me concentrer sur notre mission. »

« Mission ? » Elle semble avoir oublié la promesse silencieuse que j'ai faite à Henry et David.

« On doit ramener Emma et Blanche. Je sais que l'idée ne te plaît que moyennement mais ça fera plaisir à Henry. On devrait s'y mettre. »

« Je n'ai jamais réussi à ouvrir un portail sans Gold. C'est toujours lui qui s'en charge. »

« J'ai quitté mon royaume de naissance sans aucun portail. » J'admet dans un murmure, réalisant que je ne me suis jamais confiée à elle sur mon passé. « C'était inconscient mais au moins, on sait que c'est possible. »

« Peut-être bien. Je vais aller chercher quelques livres dans mon caveau, on trouvera une réponse dans l'un d'eux avec un peu de chance. »

« Ton caveau ? »

« Je l'ai caché sous la tombe de mon père, au cimetière. » Ma mère m'explique hâtivement.

« Astucieux. Personne ne penserait à aller voir là-bas. »

« A part Graham. »

« C'est vrai qu'il pensait que son cœur se trouvait à l'intérieur. » Je me souviens de ce détail qui paraît si lointain. « Henry avait raison alors, c'est toi qui l'a tué ? »

« Oui. » Et elle n'a vraiment pas l'air fière de ce fait d'arme. « Tu le connaissais ? Je veux dire avant, dans la Forêt. »

« Je l'ai rencontré une fois, il m'a appris à tirer à l'arc, rien de plus. » Sans rien ajouter, je me dirige vers le vestibule et j'enfile une veste légère. « Alors, on y va ? »

« Comment ça "on" ? Tu n'oublies pas quelque chose ? »

« Non, quoi ? »

« L'école. » Ma mère me rappelle une réalité que j'avais complètement zappée.

« Sérieusement ? Maman, je n'ai pas besoin d'aller à l'école, c'est stupide ! »

« Il n'est jamais stupide de s'éduquer jeune fille. »

« Et je m'apprête à te suivre pour me plonger avec toi dans des ouvrages poussiéreux. C'est exactement la même chose. Sauf que là, au moins, je serais utile. » Je lui fais remarquer. « S'il te plaît maman, emmène-moi avec toi… » J'insiste en usant de ma meilleure bouille et ça semble fonctionner.

« Très bien. » Ma mère accepte avec un soupir. « Mais tu feras bien attention là-bas, il y a plusieurs objets magiques dangereux dont j'ai probablement oublié l'existence. »

« Promis, je ne toucherai à rien d'autre qu'aux livres. »



***



J'ai la tête dans des livres énormes et poussiéreux sentant légèrement l'humidité. Les écritures sont petites et certaines sont partiellement effacées. Je sens un mal de tête pointer le bout de son nez quand je lis enfin quelque chose d'intéressant.



« Ce livre parle d'un arbre magique, tu sais où il se trouve ? »

« J'ai cru comprendre que les fées s'en étaient servi pour fabriquer une armoire. » Ma mère me répond sans lever les yeux de son téléphone.

« La même armoire qui a amené Emma ici ? »

« Probablement. » Sa réponse n'est pas très assurée mais elle semble également obnubilée par autre chose donc je suppose qu'il s'agit juste d'un manque d'attention. « J'ai quelque chose à faire, je serais rapide. Tu peux rester ici si tu le souhaites ou rentrer. Cet endroit te sera toujours accessible à présent. »

« Qu'est-ce qu'il se passe ? » Je lui demande, intriguée par ce revirement de situation.

« David vient de m'envoyer un message m'invitant gentiment à vider mon bureau à la mairie. Je n'ai pas trop le choix je suppose. »

« Après vingt-huit ans à être maire tu devrais de toute façon en avoir assez non ? Penses à tout le temps libre que tu y gagnes. »

« Tu as probablement raison. » Elle acquiesce en remettant sa veste. Ensuite, elle s'approche de moi et vient m'embrasser sur le front. « Je te retrouverai plus tard. »

« D'accord. »



Puis elle s'en va dans un nuage de fumée. Je reste là à réfléchir. Le bois de cet arbre est naturellement magique et s'il a vraiment servi à emmener Emma ici… Peut-être que sa magie n'est pas tout à fait dissipée.



« Elles pourraient revenir par là. »



***



J'y travaille encore au bout d'une heure et ma mère n'est toujours pas revenue mais je ne m'en inquiète pas. Je crois que je tiens une piste, si seulement j'avais un moyen de communiquer avec Emma et Blanche… Soudainement, j'entends du bruit venant d'au-dessus, comme si quelqu'un déplaçait une grosse pierre. Je me souviens que maman avait dit que son caveau se trouvait sous la tombe de son père mais elle a de la magie. Ce n'est donc pas elle qui emprunte ce chemin pour entrer.

Inquiète, je me prépare au combat, une boule de feu crépitant déjà dans ma main. Les bruits de pas se rapprochent inlassablement jusqu'à ce qu'ils s'arrêtent dans la pièce d'à côté. Un faux mur me sépare de l’intrus mais j'entends le bruit d'une boîte qu'on déplace puis un cri de frayeur. Je me précipite dans l'autre pièce et je vois Henry avec, en face de lui, deux têtes de serpent reliées par la queue : une vipère d'Agrabah.



« Henry, ne bouge pas ! » Je m'exclame avant de lancer ma boule de feu vers le serpent. Sans réfléchir, je referme la boîte sans me soucier de l'état de santé de la vipère. « Tout va bien ? Qu'est-ce que tu fais ici ? »

« Je n'ai rien. » Henry m'affirme, encore un peu tremblant.

« Tu comptais faire quoi exactement ? »

« Je veux qu'elles reviennent ! Ça devait pas se passer comme ça. J'aurais dû partir avec elles là-bas. Je devrais être sur un cheval et me battre à l'épée. »

« Tu veux être un chevalier ? » Il acquiesce vigoureusement. « Très bien alors, il te faudra de l'entraînement. Personne ne devient chevalier en un claquement de doigt, ça m'a pris plus de trois ans personnellement. »

« Tu es un chevalier ? » Il me demande, l'excitation évidente dans sa voix.

« Je n'appartiens à aucune cour officielle mais oui, j'ai été faite chevalier par Urien de Gorre. Son père était Cynfarch Oer, roi de Rheged. Je ne crois pas qu'ils étaient dans ton livre non plus. Et, je ne sais pas si ça fait de moi un chevalier légalement mais… » Je hausse les épaules, montrant bien que je me fiche des titres que je peux avoir. « Être chevalier c'est plus que de recevoir l'adoubement d'un noble. Je peux t'apprendre et peut-être David aussi. Mais en attendant, tu dois me promettre de ne plus rien faire de dangereux ou stupide, d'accord ? »

« C'est promis. » Il accepte, à contre-coeur je le vois bien.

« Et ne t'inquiète pas pour Blanche et Emma, pourquoi je suis ici à ton avis ? »

« Tu cherches un moyen de les ramener ? »

« Exactement. Et je n'arrêterai pas avant d'avoir trouver, je t'en fais la promesse. »



Comme il semble dans de bien meilleures dispositions que tout à l'heure, je le raccompagne à l'extérieur quand une autre question me traverse l'esprit.



« Comment tu savais que maman ne serait pas ici ? »

« Je l'ai distraite. » Il avoue, semblant peu fier de son plan.

« La prochaine fois, demande-lui simplement son aide. »

« Elle ne m'aurait pas aidée. »

« Je crois que si au contraire. » Je tente de le persuader. « Elle était là avec moi à chercher des informations il y a seulement une heure. »

« C'est vrai ? »

« Oui, et je crois que je tiens une piste alors ne perds pas espoir tu veux ? »

« D'accord. » Au moment où il accepte, je vois David arriver un peu plus loin.

« Maintenant va rejoindre David, je te préviens dès que j'ai quelque chose de concret. »

« Merci Morgane. » Il vient m'enlacer, ses bras faisant le tour de ma taille. « T'es vraiment une grande sœur géniale. »

« J'essaie. Allez, vas-y petite tête et plus de bêtises de ce genre. »

« Promis ! »



***



Il est tard quand je rentre enfin à la maison, les bras chargés de livres. Je les envoie dans ma chambre avec ma magie et me dirige vers la cuisine d'où j'entends venir du bruit. Je me doutais bien qu'il s'agissait de ma mère mais, en la voyant, je comprends immédiatement qu'elle a pleuré.



« Tout va bien ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

« Rien. » Elle me dit comme si elle pensait que ça me suffirait.

« Je sais quand tu me mens, maman, ne gâche pas ta salive. » J'attends qu'elle se décide à me parler mais rien ne vient alors je laisse couler et oriente la conversation sur un autre sujet. « Très bien, ne dis rien si ça te chante. Henry était à ton caveau tout à l'heure, tu le savais ? »

« Je me doutais bien qu'il essayerait d'y rentrer quand il n'est pas venu. »

« La fameuse distraction. » Je comprends sans difficulté. « Je suis désolée qu'il se soit servi de tes sentiments de la sorte. Il est jeune, il ne se rend pas compte de ce qu'il fait. »

« J'en ai conscience. » Elle soupire légèrement et me fait face, plongeant son regard dans le mien. « Mais tu es là et, pour l'instant, c'est suffisant. »



***



« Et hier, il m'a appris à me battre à l'épée ! » Henry me raconte avec un immense sourire sur son visage.

« A ce rythme là, tu seras bientôt chevalier. »

« Tu crois ? »

« Il faudra que tu apprennes à monter à cheval d'abord. Et puis, une fois que tu sauras faire les deux séparément, il faudra que tu sois capable de faire les deux en même temps. » Je lui explique.

« David m'emmène aux écuries demain. Tu viendras me voir ? »

« Si c'est ce que tu veux alors oui, je viendrais. »

« Cool ! Maman dit que tu montes très bien, tu pourras m'apprendre des trucs ! »

« J'essayerais. » J'accepte avec un sourire et puis je vois l'expression sur le visage d'Henry changer.

« Comment va maman ? »

« Tu lui manques. »

« Tu crois qu'elle arrêterait d'utiliser la magie si je lui demandais ? »

« Ça vaut le coup d'essayer non ? »



***



« Où étais-tu ? » Je demande à ma mère quand je la vois rentrée.



La matinée est déjà bien avancée et je ne l'ai pas vue depuis ce matin, en rentrant de ma promenade avec Henry.



« J'ai été voir le Dr. Hopper. » Elle admet en hésitant à peine.

« Vraiment ? Tu as parlé à Henry alors ? »

« Oui, mais je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée. »

« Qu'est-ce que tu as à y perdre de toute façon ? Rien. Mais tu pourrais récupérer Henry. » Je lui fais réaliser.

« J'espère que tu as raison. »

« J'ai toujours raison. » Mon sarcasme aura au moins réussi à lui arracher un sourire. « Si on allait manger un morceau chez Granny ? J'ai une faim de loup après ma promenade avec Henry. »

« C'est donc toi qui t'arrange toujours pour qu'il vienne me parler. »

« Je fais ce que je peux. » J'admet avec un haussement d'épaule.

« Merci. »

« Enfin, c'est normal maman. Tu veux que je sois heureuse non ? Eh bien, ça marche dans l'autre sens aussi. »



***



Quand j'arrive aux écuries le lendemain matin, je croise rapidement le chemin d'Accolon. Il m'indique dans quelle stalle se trouve Henry et je m'y rend immédiatement. Je ne peux empêcher un éclat de rire de m'échapper quand je vois mon petit frère en train de nettoyer le box du cheval… avec le cheval toujours à l'intérieur.



« C'est plus simple quand il n'est pas là pour prendre la moitié de l'espace tu sais ? »

« Morgane, salut ! »

« Alors petit frère, on découvre les joies de la chevalerie ? »

« Tu devais vraiment faire tout ça avant de monter ? » Il demande, l'air pas trop convaincu de ce qu'il est en train de faire.

« Je vais te dire un petit secret. La plupart des bons chevaliers sont d'abord écuyers avant de monter à cheval. Moi j'ai pris un raccourci. »

« Lequel ? »

« Tu vois l'étalon noir là-bas ? » Je lui montre la stalle dans laquelle se trouve Cobalt et attends que Henry acquiesce. « C'est moi qui l'ai mis au monde, avec Cliff. »

« Cliff ? »

« Le chevalier Menassen, dans l'autre monde. C'est pour ça que j'ai pu le monter sans soucis, il doit me prendre pour sa mère. »

« Ou son père. » Henry plaisante dans un éclat de rire.

« Continue comme ça et je t'envoie méditer dans un trou de souris. »

« Hey ! Ce n'est pas gentil ! »

« Je suis la fille de la Méchante Reine. » Je lui rappelle avec un sourire un tantinet diabolique. « J'ai bien droit à une dérogation non ? »

« Sauf que je suis trop mignon pour que tu me fasses le moindre mal. »

« Admettons. »

« Alors, est-ce qu'au moins je peux le brosser maintenant ? Son box est propre. » Henry demande et l'expression sur son visage est trop adorable pour que je dise non.

« D'accord mais d'abord, un petit point de vocabulaire. On panse un cheval, on ne le brosse pas. Ce n'est pas un chien. »

« Bien compris. »

« Tiens. » Je lui tends la brosse et l'aide à placer une boîte en bois sur laquelle il pourra se tenir. « Ce sera plus simple comme ça, qu'est-ce que tu en dis ? »

« Parfait, merci ! »



Je le regarde faire pendant quelques minutes. Ses gestes sont précis et impeccables alors je le laisse faire, il semble maîtriser la situation. Au bout d'un moment, Henry commence à parler à sa monture, un autre bon point.



« Alors, grand-père dit que tu me feras savoir quand tu seras prêt à être monté. Alors c'est quand tu veux. Bientôt d'accord ? »

« Toi quand tu as une idée en tête, tu ne l'as pas ailleurs hein ? » Je réalise dans un éclat de rire.



Je m'interromps quand je sens le cheval s'agiter, il s'ébroue, se cabre et tape du sabot contre le sol en béton. On est seuls ici Henry et moi alors je m'inquiète immédiatement.



« Qu'est-ce qu'il lui prend ? » Mon petit frère demande.

« Les chevaux ont un instinct très développé. Première leçon : écoute toujours ton cheval. S'il sent le danger, c'est que celui-ci n'est pas loin. »



Les autres chevaux s'agitent aussi alors je n'hésite pas et fait sortir Henry du box, ce serait trop dangereux pour lui de rester à l'intérieur avec un cheval en panique. C'est là que je le vois. Un homme grand et pâle qui ressemble plus à un zombie qu'à un être humain normal.



« Henry, ne reste pas là. »

« Qu'est-ce qu'il se passe ? »

« Je ne sais pas, mais ça ne me dit rien qui vaille. » J'admet en me plaçant entre l'inconnu et mon frère. Pour ne pas plus alerter Henry, j'invoque une épée au lieu de ma boule de feu habituelle. « Qui êtes-vous ? » Je demande à l'inconnu, notant ses vêtements. Ils semblent provenir de l'ancien monde, de la Forêt, plutôt que d'ici.

« Arrêtez, vous faites peur aux chevaux ! » Henry intervient alors.

« Ce n'est pas le moment de tenter de le raisonner Henry ! Cet homme n'est clairement pas dans son état normal. Je t'en supplie, sors d'ici tout de suite. »

« Mais et toi ? »

« J'ai fait face à la Méchante Reine et je suis toujours là. » Je lui rappelle. « Je m'en sortirais, maintenant va-t-en ! »



Pour une fois, il m'obéit sans poser plus de questions et part en courant. Une fois rassurée sur sa sécurité, je décide de passer à l'offensive. Je m'approche de l'homme et je m'apprête à lui asséner un coup d'estoc quand il me frappe au visage avant de me saisir à la gorge. Je tente un coup de pied mais il est très fort et résistant. Alors que je perdais tout espoir de le faire lâcher prise, son regard change.



« Regina ? »

« Quoi ? D'où est-ce que vous connaissez ma mère ? » Je demande, envisageant déjà la possibilité d'une vendetta contre la Reine.

« Non, Morgane… »

« Comment connaissez-vous mon nom ? »



Je suis de plus en plus désemparée. Comment cet homme peut-il me connaître ? Je ne l'ai jamais vu ni ici ni dans la Forêt. Je vois ses mains couvertes de sang, mais ce n'est pas le mien. J'allais à nouveau l'assaillir de question quand j'entends ma mère arriver et l'inconnu se tourne vers elle dès qu'elle prononce son nom.



« Daniel, ne lui fais pas de mal ! »



Il se tourne vers elle, l'air toujours aussi troublé mais au moins il s'est calmé. C'est alors que je comprends que c'est bien ma mère qu'il connaît. Ça n'explique toujours pas comment il connaît mon nom.



« Alors c'est vrai, tu es là. » Ma mère a l'air à la fois surprise et… heureuse ?



Pendant un temps, je croyais vraiment qu'elle avait réussi à le calmer mais il choisit ce moment pour charger vers ma mère. Je réagis juste à temps et parviens à le bousculer hors de sa portée. Je le maintiens contre un mur avec ma magie mais, comme il se débat vigoureusement, je ne pense pas pouvoir le tenir très longtemps.



« Tu as une idée pour nous en débarrasser ? Je ne peux pas le retenir éternellement ! »

« Je n'utiliserais pas la magie sur lui Morgane ! » Ma mère semble indignée par cette idée.

« Quoi ? Pourquoi ? Qui est-il ? »

« Tu ne comprendrais pas ! »

« Très bien. » La main tendue vers lui, avec ma magie j'applique une pression sur le cou de ce… Daniel. Sa réaction est immédiate.

« Mais enfin, qu'est-ce que tu fais ? »

« C'est un monstre maman, si tu ne veux pas le tuer je le ferai ! »

« Morgane je t'en prie ! » Ma mère me supplie en se saisissant de mon bras. « Je vais lui parler, laisse-moi faire. »

« Il est imprévisible, c'est trop risqué. » Je tente de la raisonner.

« Laisse-moi au moins essayer. »

« C'est ridicule je te laisserais pas te mettre en danger. »

« Je ne te laisserais pas lui faire du mal ! Je sais qu'il va m'écouter ! » A la colère dans sa voix, se mêle le désespoir. Je ne l'ai jamais vu comme ça et, machinalement, je le libère du sortilège qui lui coupait la respiration, même si je le maintiens toujours immobilisé. « Je t'en supplie. » Elle poursuit d'une voix plus faible. « Laisse-moi parler à mon fiancé. »



Je ne m'attendais pas à une telle nouvelle et j'en perds tous mes moyens. Sans que je n'y puisse vraiment quoi que ce soit, ma magie s'interrompt et Daniel tombe à terre. Je vois ma mère s'approcher de lui avec prudence sans un geste brusque. Quand il la regarde, ses yeux sont presque normaux mais je remarque bien vite la noirceur qui le gagne à nouveau. Avant que je ne puisse réagir, il saisit ma mère à la gorge et la plaque contre le mur. J'allais intervenir, mais elle m'en empêche d'un geste de la main alors je ne bouge pas. Je lui fais confiance.



« Daniel, je t'en prie, c'est moi. » Elle tente de le raisonner d'une voix faible. « Lâche-moi, c'est moi. Daniel… Je t'aime. » Je vois l'homme se débattre avec lui-même mais il finit par la lâcher et s'éloigner légèrement.

« Regina… » Il la reconnaît et il n'en faut pas plus à ma mère pour se jeter dans ses bras.

« Daniel ! » J'entends les sanglots de ma mère et je reste là, incapable de bouger ou de parler. « Je n'arrive pas à croire que c'est vraiment toi. » Mais il n'a pas l'air vraiment apaisé et continue de se débattre avec lui-même. « Daniel… » La joie de ma mère laisse à nouveau place à l'inquiétude.

« Je t'en prie, fais en sorte que je n'ai plus mal. »

« Comment ? »

« Laisse-moi m'en aller. »

« Non. » Elle secoue la tête clairement peu encline à mettre ce plan à exécution. « Non je ne veux pas te perdre encore une fois. Tu sais que je ne suis rien sans toi, Daniel. Daniel ! Reviens avec moi ! » Elle prend le visage de l'homme entre ses mains, tentant encore de le ramener.

« Je ne peux pas ! Je ne peux pas… »

« Mais je t'aime. »

« Alors apprends à aimer à nouveau. » Il lui demande et, quand ses mains approchent du visage de ma mère, elles ne sont pas menaçantes cette fois.



Et il s'en va à nouveau, laissant encore place au monstre qui a tenté de nous attaquer. Mais, avant qu'il ne puisse charger à nouveau, ma mère le fige avec sa magie. Les larmes coulent sur ses joues et je sais qu'elle va le faire. Même si ça la déchire de l'intérieur, d'un geste de la main elle le fait disparaître.



« Au revoir Daniel. » Elle murmure au milieu de ses sanglots.



Je n'hésite pas plus longtemps et je vais me jeter dans ses bras. Je n'imagine même pas la douleur qu'elle doit ressentir en ce moment. Je ne sais pas comment je peux l'aider alors je me contente d'être là, de lui montrer que quelqu'un ici, dans le monde des vivants, l'aime.



***



Il est tard quand elle rentre à la maison. Je l'ai laissée seule aussi longtemps qu'elle en a eu besoin, même si j'ai l'esprit envahi de questions.



« Il s'appelait Daniel. » Ma mère commence comme si elle savait que j'allais l'interroger.

« Ça je l'avais bien compris. Et tu l'aimais ? »

« On devait s'enfuir, partir et vivre heureux, fonder une famille… » Des larmes silencieuses coulent toujours sur ses joues. « Et puis ma mère l'a tué juste devant moi et j'ai tout perdu. »

« Ta propre mère t'a enlevé l'homme que tu aimais ? »

« Pour que j'épouse le roi, le père de Blanche-Neige. »

« J'aimerais bien pouvoir mettre la main sur elle. » Je marmonne plus pour moi-même que pour elle.

« Non, tu n'en as pas du tout envie. »

« Je comprends mieux maintenant. »

« Comprendre quoi ? »

« Quand tu m'as enlevé mon fiancé, c'était pour infliger à quelqu'un d'autre la même douleur que tu avais ressenti. » J'explique alors.

« Ça n'excuse rien. »

« Peut-être, mais aujourd'hui ça me permet de comprendre ta peine. » Je m'approche d'elle et l'emmène s'asseoir sur un des canapé avant de prendre place à ses côtés. « Comment est-il revenu ? Si Daniel était mort, comment… ? »

« Tu connais le Dr. Whale non ? » Elle me demande et je sens un frisson m'échapper.

« Je ne l'aime pas beaucoup. »

« Tu connais également le monstre de Frankenstein, pas vrai ? »

« J'ai même vu le film l'année dernière. » Je réalise mon erreur trop tard.

« Quoi ? Mais je t'avais interdit de…! »

« Je sais. » Je l'interromps rapidement, l'heure n'est pas au sermon. « Attends, tu veux dire que Whale est en fait le Dr. Frankenstein et qu'il… qu'il a fait de Daniel son monstre ? »

« C'est exactement ça oui. »

« Maintenant c'est lui que j'ai envie d'aller encastrer dans un mur. »

« Il a perdu un de ses bras aujourd'hui, je dirais que la punition est suffisante. »

« Peut-être bien. » J'admet à contre-coeur. « Où est-ce que tu es partie tout à l'heure ? »

« Je suis allée voir le Dr. Hopper. »

« Et ça t'a aidé ? »

« Je crois. » Même si elle n'a pas l'air très sûre d'elle, elle a au moins cessé de pleurer. « Je te remercie d'avoir protéger Henry et de… de m'avoir fait confiance. »

« C'est normal tu sais. Je n'imagine même pas ce que ça me ferait si Urien revenait mais que… que ce n'était pas vraiment lui. » J'en frissonne rien qu'à cette idée. « Ce que tu as fait aujourd'hui demande un courage immense. Jamais je n'aurais pu faire preuve d'une telle bravoure. »

« Je veux juste… j'aimerais juste pouvoir oublier tout ça, arrêter de souffrir. »

« Rien ne peut effacer une telle douleur à part le temps. Tu devrais le savoir, c'est toi qui m'a appris ça. »

« Je déteste quand tu utilises mes propres leçons contre moi. » Elle admet, m'arrachant un sourire.

« Au moins ça prouve que je t'écoute. »



***



« Depuis combien de temps n'as-tu pas dormi ? » Ma mère me demande quand je descends la rejoindre dans la cuisine.



Plusieurs jours sont passés depuis l'incident avec Daniel et apparemment, ma mère a repris du poil de la bête. Assez pour noter ce genre de détail on dirait. Mais je tente quand même de m'en sortir sans avoir à révéler la vérité. Je ne veux pas qu'elle s'inquiète pour ça, honnêtement ce n'est rien de grave.



« Qu'est-ce qui te fait dire que je ne dors pas ? »

« Ta tête. Parle-moi. »

« Je n'ose plus fermer l'œil. » J'avoue alors. « Chaque fois que je m'endors je me retrouve dans ce… cet horrible endroit. »

« Quel endroit ? »

« Une pièce remplie de flammes qui me brûlent dès que je tente d'en sortir. » Je lui explique à contre-coeur. « Des voix m'assaillent. C'est comme si je retournais au village, sauf que cette fois tout le monde me reproche de ne pas être arrivée à temps pour les sauver. Il n'y a ni porte ni fenêtre je ne peux pas sortir et je ne sais même pas comment j'y suis entrée. »

« Alors toi aussi ? » Elle semble en comprendre plus que moi.

« Comment ça moi aussi ? »

« Henry fait le même genre de rêve. J'étais simplement passée te dire que je devais me rendre à l'appartement des Charmants, David veut que je le garde à l'œil le temps qu'il s'occupe d'une affaire au bureau du shérif. Et tu vas venir avec moi. On trouvera peut-être une solution tous ensemble. »

« Ok, ça me va. »



***



Aucun rêve n'est sensé blesser dans le monde réel, sur ce point au moins je suis d'accord avec elle. Alors, quand elle appelle M. Gold, je ne dis rien même si être en présence du Ténébreux ne me rassure pas du tout.



« Oh, en effet. Tu as eu raison de m'appeler. » Gold dit à ma mère dès qu'il a examiné la brûlure sur le bras d'Henry.

« Donc vous… vous allez pouvoir m'aider ? » Mon petit frère demande plein d'espoir. « Ce n'est qu'un rêve. »

« Non, ce que vous me décrivez tous les deux n'est certainement pas un rêve. »

« Qu'est-ce que c'est alors ? » Ma mère insiste pour savoir.

« Un effet secondaire. Je m'étonne que tu utilises un sort que tu connais aussi mal. »

« Mes victimes étaient sensées ne jamais se réveiller, je ne m'occupais donc pas de ce qui arrive quand on en revient. » Ma mère réplique avec froideur. « Jusqu'à aujourd'hui. » Elle ajoute en se tournant vers Henry et moi.

« Quand ce sort frappe une personne, son âme est envoyée dans le monde des limbes et elle reste là jusqu'à son réveil. Voyez-vous, ce monde se situe entre la vie et la mort et il est trèsréel. » Gold explique sortant un talisman et une potion de sa sacoche. « Dernière chose : quand le sortilège est levé, il arrive que parfois, en dormant, celui qui avait été ensorcelé y retourne. » Henry s'approche de Gold qui s'applique maintenant à remplir l'amulette avec la potion. « Ce qui est votre cas. »

« Cet autre monde donne des tourments à mes enfants à chaque fois qu'ils trouvent le sommeil. Alors donne-leur ce qu'il faut pour les empêcher d'y retourner. »

« Je te jure que ça va maman. » J'interviens à mon tour. « Les flammes ne me font rien, je parviens à les maîtriser et les voix… »

« Des regrets. » Gold m'explique. « Malheureusement, je ne peux pas vous empêcher d'y retourner. Toutefois, je peux donner à Henry quelque chose qui lui permettra de contrôler ses actes dans ce monde comme Morgane le fait. Et quand on contrôle quelque chose, elle cesse très vite de nous effrayer. » Gold termine en montrant le talisman à Henry.

« Un pendentif ? »

« Mets-le toujours avant de dormir. Une fois que tu contrôleras tes voyages, ta peur disparaîtra et là, tu pourras aller et venir comme tu veux. » Il tend le médaillon vers Henry mais ma mère l'empêche de le prendre.

« Je sais que tout a un prix avec toi. » Elle dit à l'attention de Gold. « Qu'est-ce que tu veux en échange ? »

« Avec le déplacement ? C'est trop cher pour toi. Mais là, il s'agit d'Henry, je te l'offre avec plaisir. » Il donne finalement le pendentif à Henry avant de partir.

« Tu es sûre que ça ira ? » Ma mère me demande encore une fois.

« Je t'assure que oui. Je sais maintenant qu'il me suffit d'exiger que les voix se taisent, comme j'ai forcé les flammes à s'écarter de moi. »

« T'es vraiment trop forte. Comment t'as su que tu pouvais maîtriser les flammes ? » Henry me demande.

« J'ai de la magie je te rappelle, c'est plus simple pour moi. »

« Ça se tient. »

« Où est-ce que tu vas ? » Ma mère m'interpelle au moment où je m'apprête à sortir.

« J'ai juste besoin de faire un tour. »

« J'éviterai à ta place. »

« Pourquoi ? » Je suis perplexe, elle ne m'a jamais interdit de sortir. Encore moins depuis que j'ai à nouveau ma magie.

« C'était la pleine lune la nuit dernière, il est possible que le loup rôde toujours. »

« Tu penses sérieusement m'avoir avec l'histoire du grand méchant loup ? »

« Tu parles de Ruby ? » Henry semble comprendre de quoi ma mère essaye de me parler.

« Qu'est-ce que Ruby a à voir là-dedans ? »

« C'est loin d'être une simple serveuse. » Ma mère m'explique alors. « Une fois par mois, elle se change en loup pendant quelques jours. »

« C'est un loup-garou ? » Je suis surprise par cette révélation.

« Je t'ai jamais raconté l'histoire du Petit Chaperon Rouge ? »

« Non Henry, celle-là tu ne me l'as jamais raconté. Je commence à croire que je devrais peut-être lire ton livre. » Je décide de laisser tomber l'idée de la promenade et je préfère aller rejoindre Ruby. « Je reviens plus tard, ne t'inquiète pas pour moi. » Je me téléporte jusqu'au bureau du shérif, là où ma magie a repéré la trace de Ruby. « Qu'est-ce que tu fais en cellule ? »

« C'est pour la sécurité des habitants de Storybrooke. »

« Qu'est-ce que… ? David ! » Je me tourne vers le shérif par intérim. « Comment tu peux cautionner ça ? »

« J'ai besoin de temps pour trouver qui a vraiment assassiné Billy. »

« Vous l'avez déjà trouvé. » Une voix se fait entendre depuis le couloir avant que je vois apparaître Albert Spencer. « C'est cette chose, cette louve. » Il dit en jetant un regard vers Ruby.

« Vous allez parler d'elle autrement. » Je réplique, les dents serrées.

« Allez-vous en ! » David exige à son tour. « Le contentieux que vous avez c'est avec moi alors laissez-la. Rien ne prouve que Ruby ait quelque chose à voir avec ce meurtre. »

« Il me semble bien que vous laissez vos émotions nuire à votre jugement. » Sa réplique fait mouche et Ruby se lève précipitamment et agrippe les barreaux qui la retiennent prisonnière.

« Je vous préviens, laissez-le ! »

« Vous protégez votre amie en mettant les autres en danger. » Spencer continue en ignorant les menaces de Ruby. « Je savais que le berger ferait un faux pas. »

« Qu'est-ce que vous voulez ? »

« La justice. »

« Alors laissez le faire son travail. » J'interviens à mon tour.

« Cette fille, livrez-la-moi et laissez les gens décider de son sort. »

« Non ! »

« Jamais. » David me rassure immédiatement. « Je sais de quelle justice vous voulez parler. »

« Cette ville est plus grande que vous ne le pensez. Si je dis au gens que vous les mettez en danger pour protéger votre amie, vous aurez une mutinerie sur les bras. »

« Essayez donc pour voir. » Je viens me placer entre David et Spencer, clairement agacée par cette conversation stérile. « Pour l'avoir elle, il faudra vous débarrassez de moi. Et vous connaissez ma mère non ? » Pour la première fois, il ne semble plus aussi sûr de lui.

« Vous ne me faites pas peur. » Il me dit finalement avant de partir.

« J'aurais aimé que ma mère l'oubli dans un vortex temporel. C'était qui cet idiot dans la Forêt ? »

« Mon père. » David me surprend par sa réponse.

« Il n'a pas l'air de te porter dans son cœur. »

« Ça non. »

« Il va revenir, vous savez ? » Je leur fais remarquer. « Il sait qu'elle est là et s'il réunit assez d'idiots qui pensent comme lui, ils prendront cet endroit d'assaut. »

« Tu as un plan ? » David semble me faire confiance alors je me tourne vers Ruby pour guetter sa réaction.

« On la cache ailleurs, à un endroit auquel ils ne penseront pas. »



***



« Ils arrivent ! » Je m'exclame en apparaissant dans la bibliothèque. « Wow Granny ! Baissez cette arbalète vous voulez bien ? »

« J'ai cru comprendre que tu étais du côté de la Reine. »

« Non Granny. » Ruby s'empresse de me défendre. « Elle n'est d'aucun côté, il n'est pas question de côté pour l'instant. »

« Il s'agit de protéger Ruby. » Je l’appuie immédiatement. « Et je donnerais ma vie pour ça, d'accord ? »

« Bien. »

« Il n'y a qu'un moyen de calmer la foule et c'est de prouver que Ruby n'a rien à voir avec la mort de Billy. » David nous ramène au sujet important.

« J'ai vu le corps. » Je l'informe de mes découvertes. « J'ai vu assez de cadavres attaqués par des loups pour savoir que ce qui est arrivé à Billy est un meurtre et le seul monstre capable de ça, c'est l'Homme. » David semble soudainement comprendre quelque chose.

« Je vais avoir besoin de vous. » Il dit en pointant Granny du doigt. « Et vous deux, assurez-vous que la foule ne parvienne pas jusqu'ici. »



Il s'en va avec Granny et je m'assure que les portes sont bien verrouillées derrière eux. Je ne mentais pas, je ne laisserais personne être blessé sans raison.



« Bien alors, qu'est-ce qu'on est censées faire dans ce genre de soirée entre filles ? » Je tente un trait d'humour pour détendre l'atmosphère. « On joue au loup ? »

« Bien essayé. » Ruby laisse échapper un petit sourire qui me paraît bien las. « Vous devez vous en aller, la lune se lèvera bientôt. »

« Certainement pas ! J'ai promis de te protéger et c'est ce que je ferais ! »

« Tu penses que les chaînes vont tenir ? » Belle lui demande.

« Si tout va bien. »

« Bon, je reste. »

« Et moi aussi. » J'ajoute sans hésitation. « Ma magie nous assure la sécurité. »

« Je sais que David a confiance en moi mais j'ai déjà tué quelqu'un et je recommencerai. C'est comme ça et les gens ont raison d'avoir peur de moi. »

« Non ! » Je m'écris en même temps que Belle.

« Moi je n'ai pas peur. »

« Vous devriez pourtant. »

« Peu importe ce que tu as pu faire dans le passé. » Belle insiste. « David croit en ce qui est bon en toi. Il y a qu'une chose à en déduire. »

« Quoi donc ? »

« Que ça existe en toi. Pourquoi tu ne le vois pas alors que nous on le voit ? » Je continue, comprenant où Belle voulait en venir.

« Vous en êtes vraiment sûres ? »

« Crois-moi Ruby, je suis experte dans le domaine de la réhabilitation. »

« Elle a survécu au Ténébreux. » Je fais remarquer à Ruby.

« Ouais, c'est possible. Oui peut-être… peut-être que vous avez raison. » C'est là qu'elle passe une menotte autour de mon poignet, me surprenant totalement. « Mais ces gens ont raison, je suis un monstre et c'est pour ça que je veux être sûre que je ne tuerai plus jamais quelqu'un. »

« Attends Ruby, qu'est-ce que tu vas faire ? »

« Tu ne m'arrêteras pas. Les gens veulent un loup et je vais leur en donner un. Je dois payer pour tout ce que j'ai fait. »

« Mais ils vont te tuer ! » Je panique déjà rien qu'à cette idée et mon esprit se vide. Je ne vois que l'image de son corps sans vie.

« C'est ce que j'ai mérité, non ? »

« Non, Ruby je t'en supplie ne fais pas ça ! » Je m'exclame, mais elle est déjà partie. « Tu n'as pas les clés ? » Je demande à Belle alors que je tire vainement sur mes chaînes.

« Tu n'as pas de la magie ? »

« Magie ? Oh, mais c'est vrai ! » Les menottes s'ouvrent dès que je les y oblige. « Reste là, ça risque d'être dangereux. »

« Promets-moi de la ramener saine et sauve. » Belle me demande.

« Je ne les laisserais pas lui faire du mal, je te le garantis. »



***



J'ai finalement retrouvé Ruby, acculée dans une ruelle sombre, cachée dans le renfoncement d'un mur. Je tente de m'approcher mais le loup me grogne dessus alors je m'arrête, les mains en l'air pour qu'elle voit que je ne suis pas armée.



« Ruby, je sais que tu m'entends. » Je tente d'obtenir son attention toute entière.

« Voilà où elle se cache. » La voix de Spencer résonne au bout de la rue au milieu des cris de la foule.

« Ne vous approchez pas. »

« Je n'ai pas peur de toi fillette. »

« De moi peut-être pas. Mais vous vouliez un monstre non ? » Je dis en laissant toute ma magie se libérer, je sens mes yeux passer au noir alors que ma vision change. Je n'ai plus été dans cet état depuis des années. Au moins, ça les fait reculer. « C'est ça, restez à distance si vous ne voulez pas être maudits par Morrighan. » Ma voix a changé, elle est devenue caverneuse, comme si mille autres voix s'exprimaient par ma bouche.

« Morgane ! » David se fraie un chemin à travers la foule, tenant un chaperon rouge dans les mains.

« Reste en dehors de ça David, je vais lui parler. » J'exige en tendant la main vers lui. Il semble comprendre et me donne le manteau.

« Écoutez-moi ! » David poursuit en s'adressant à la foule. « Ruby n'a pas tué Billy. C'est lui ! Il a volé sa cape et égorgé Billy pour faire croire à une attaque de loup. Tout ça pour vous faire croire que je ne m'occupe pas de la ville comme il faut. » La foule charge de nouveau mais David les repousse avant que je ne puisse le faire. « Arrêtez ! Une personne est déjà morte à cause de cet homme, il y a eu assez de victime comme ça ! Je vous jure qu'elle ne vous fera aucun mal. Elle a seulement peur. »



Comme je sens que la foule est maîtrisée, je détourne mon attention d'eux et je m'approche un peu plus de Ruby.



« Qu'est-ce que tu penses de ce monstre là ? » Je lui demande en laissant mon pouvoir s'en aller. Je sens mes yeux reprendre leur couleur marron naturelle. « S'il te plaît, écoute-moi. C'était Spencer, tu entends ? Il voulait te piéger pour te faire croire que tu es un monstre mais tu n'en es pas un. » Elle commence à grogner plus fort au mot monstre. « Tu n'es pas un monstre Ruby Lucas, mais un loup, un loup magnifique par dessus le marché, mais tu es une femme aussi, une femme… tout aussi magnifique. » Je m'approche de plus en plus, lentement pour ne pas l'alarmer. « Je sais qui tu es vraiment, je suis sûre que tu peux contrôler le loup. Ruby, tu sais ce que je ressens pour toi et ça n'a pas changé avec ce qui s'est passé ce soir. Tu m'entends ? »



Je suis assez proche à présent pour poser ma main sur sa fourrure si je le voulais mais je me contente de jeter le manteau sur elle. Sous mes yeux, le loup redevient un femme. Elle se relève et son regard se pose sur moi.



« Tu m'as sauvé. »

« Non, Ruby ça tu l'as fait toute seule. On n'a fait que te rappeler ce que tu savais déjà. »



Le sourire qu'elle me lance fait rater plusieurs battements à mon cœur et me conforte dans ma décision de ce soir. J'allais lui proposer de s'en aller quand on entend à nouveau de l'agitation venant de la foule.



« Oh non, Granny. » Ruby murmure en se précipitant vers l'entrée de la rue.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? » Je demande à David en arrivant près de lui.

« C'est Spencer, il s'est enfui. »

« Alors partez à sa recherche, je ramène Granny chez elle. » Je propose sans hésiter.

« Merci. » Ruby murmure en posant sa main sur mon épaule avant de partir.



***



Quand je quitte le B&B et que je prends la direction de chez moi, je croise Ruby sous sa forme de loup alors je m'arrête pour lui parler.



« Balade nocturne ? » Le loup acquiesce. « Attends, ce sera plus simple comme ça. » D'un geste de la main, je lance un sort de communication. « Un peu de compagnie, ça te tente ? »

« Tu penses être assez rapide ? » J'entends la voix de Ruby qui résonne dans ma tête.

« Si tu m'accompagnes jusqu'aux écuries, je te présenterai le destrier le plus rapide de tous les royaumes. »

« Attends, tu me comprends ? »

« J'entends tes pensées, c'est différent. » Je lui explique. « Alors, ça te tente ? »

« La première arrivée aux écuries ! »

« J'ai de la magie tu sais ? » Mais elle ne m'entend déjà plus ou alors elle décide de m'ignorer délibérément.



Tant pis, je sais que je peux la rattraper sans problème.



***



Je suis rentrée à l'aube, il est à peine sept heures quand je remonte l'allée qui mène chez moi. Je m'arrête quand j'aperçois David sur le perron avec ma mère qui lui fait face.



« Je n'ai rien à voir avec la disparition d'Albert Spencer. » J'entends ma mère se défendre de là où je suis.

« Ce n'est pas vous que je suis venu voir. »

« C'est moi. » J'attire leur attention sur moi.

« Qu'est-ce que tu lui as fait ? »

« Il croupit dans les geôles sous l'hôpital. Personne n'en connaît l'existence, il y restera jusqu'à ce que j'en décide autrement. »

« Bien, c'est tout ce que je voulais savoir. » David s'apprête à partir mais je l'arrête quand il est à ma hauteur.

« J'ai appris pour le chapeau, Ruby m'a tout raconté. »

« Et donc ? »

« Il y a peut-être un autre moyen de les faire revenir. Tout ce qu'il me faut, c'est un moyen de communiquer avec elles parce que la solution se trouve dans l'autre monde. »

« C'est quoi ton plan ? » David me demande, intrigué.

« L'armoire magique. »

« Celle qui a envoyé Emma ici ? »

« Exactement. Une telle magie ne s'efface jamais vraiment. Tout ce qu'il faut, c'est qu'elles mettent la main dessus. » Je lui explique le plus simplement possible. « Pour ce qui est de la communication… »

« Le monde des limbes. » Ma mère intervient alors.

« Le monde des quoi ? »

« C'est là que vont les âmes quand quelqu'un est sous l'influence du Charme du Sommeil. » Je précise.

« Henry a pu parlé à une femme qui prétend se trouver en compagnie de votre femme et votre fille. »

« On tient notre solution alors. » Je réalise doucement qu'on est sur le point de réussir. « Mais ce n'est pas Henry qui ira, c'est trop dangereux. Je vais le faire. On aura besoin de Gold alors rendez-vous là-bas tout à l'heure. »

« D'accord. Et Morgane ? Merci. »



***



Quelques heures plus tard, on se retrouve dans l'arrière-boutique de M. Gold en compagnie d'Henry, David et ma mère. Henry m'a confirmé qu'il avait parlé à une jeune femme qui affirmait être en compagnie de Blanche-Neige.



« Nous ne pouvons être sûrs qu'elle y soit encore lorsque vous vous endormirez. » Gold dit avec justesse. « Tenez. » Il poursuit en me tendant un petit sac que je m'apprête à ouvrir. « Ne l'ouvrez pas. La poudre qui se trouve à l'intérieur peut être très toxique si elle est inhalée sous cette forme. »

« Oh, désolée. »

« Gardez simplement le sac en main pendant que vous dormirez, il vous accompagnera dans le monde des limbes. Si vous avez besoin de vous réveiller, alors seulement serez-vous autorisée à l'ouvrir. »

« C'est de la poudre de corne de licorne ? » Je comprends alors.

« Précisément. Je vois que tu ne l'as pas choisi par hasard. » Il dit à ma mère.

« Maintenant, si vous le permettez, j'ai passé la nuit à courir les bois avec un loup et j'ai besoin de sommeil. »

« Tu as quoi ? » Ma mère réagit immédiatement après mon aveu.

« Où est le problème ? Je n'aurais aucun souci pour m'endormir au moins. »



Je me contente d'aller m'allonger sur le sofa que M. Gold a fait apparaître pour l'occasion et je m'assure que je tiens toujours le petit sac rempli de poudre.



« Ok, je suis prête. On se revoit bientôt. Enfin… j'espère… » Je dis mystérieusement en lançant un clin d'œil à l'attention d'Henry.



J'essaye d'ignorer les quatre paires d'yeux fixées sur moi et je me concentre. Pour une fois, le sommeil me vient assez vite et je me retrouve projeté dans le monde des limbes.



***



Je retrouve la grande pièce rouge envahie par les flammes. Je ne panique pas et force les flammes à s'écarter. C'est là que j'entends la voix.



« Henry ? Henry, tu es là ? »

« Je ne suis pas Henry. »J'attire l'attention de la jeune femme sur moi. « Mais vous n'avez pas à vous inquiéter. Je m'appelle Morgane, je suis la sœur d'Henry. Je suis venue à sa place, cet endroit est trop dangereux pour lui à mon goût. »

« Je vous comprends, cette pièce n'est déjà pas faite pour un adulte, encore moins un enfant. »

« Qui êtes-vous ? »Je demande alors à la jeune femme.

« Je m'appelle Aurore, je voyage en compagnie de Blanche-Neige et d'Emma. »

« C'est parfait. Dites-leur de partir à la recherche de l'armoire, Blanche saura de quoi je parle. »

« Elles y ont déjà été. »Aurore m'explique alors. « Mais c'est Cora qui a récupéré la magie qui en vient. Il faut que Rumplestiltskin trouve un moyen d'arrêter cette sorcière. »

« Vous dites sorcière, cette Cora… elle a donc de la magie ? »

« Oui et elle est très puissante. Il nous faut un moyen de l'arrêter pour récupérer les cendres de l'armoire. »

« Et je suppose que vous n'avez pas d'encre de seiche sous la main ? »Je devine sans mal, c'est une forme de magie assez rare et difficile à trouver.

« De la quoi ? »

« C'est bien ce qu'il me semblait. Alors nous ferons comme vous avez dit. J'en parlerai avec Rumple et nous trouverons une solution. Revenez ici dans deux heures précisément, d'accord ? »

« Très bien, je ferai comme vous avez dit. »

« Parfait, maintenant… »J'ouvre le sac que Gold m'a donné et je le tend vers Aurore. « Respirez un grand coup et vous vous réveillerez. »



Quand elle le fait, je la vois disparaître presque immédiatement. J'inhale à mon tour la poudre de licorne et je me réveille.



***



« Alors ? » Ma mère s'enquiert dès que j'ouvre les yeux. « Tout s'est bien passé ? »

« Oui, j'ai parlé à la femme, Aurore. Blanche et Emma avaient déjà mis la main sur l'armoire mais une femme, Cora, leur à pris la magie qu'il y restait. »

« Tu as dit Cora ? »

« Oui, tu la connais ? »

« Très bien même. » Gold choisit ce moment pour intervenir. « C'est sa mère et mon ancienne élève. »

« Eh bien, apparemment, elle est en route. Je suppose que personne n'a envie de la voir débarquer à Storybrooke ? »

« Je croyais qu'elle était morte ? » Gold se tourne vers ma mère, l'air inquisiteur.

« Je le croyais aussi mais elle a bien retenu tes leçons on dirait. Qu'est-ce qu'on fait ? »

« Elle est si puissante que ça ? » Henry demande.

« Oh oui. »

« Mais pas autant que moi. » Gold cherche à le rassurer.

« C'est discutable. »

« Non, c'est indéniable. »

« Elle ne me fait pas peur. » J'interviens à mon tour. « Qu'elle vienne, je lui ferai regretter ce qu'elle t'a fait. » J'ajoute à l'attention de ma mère.

« Avec un peu de chance, tu n'auras jamais à la croisée. »

« Heureusement que j'ai toujours une longueur d'avance. Quand dois-tu rejoindre cette femme dans les limbes ? »

« Dans deux heures. » Je précise immédiatement.

« Bien, voilà qui est amplement suffisant. J'ai déjà une solution. »

« Bonne nouvelle. Alors, c'est quoi le plan ? »



***



Deux heures plus tard, je suis prête à retourner dans le monde des limbes quand ma mère s'approche de moi et me tend un objet que je n'ai plus vu depuis très longtemps.



« De quoi j'aurais l'air à dormir encore avec un doudou à presque seize ans ? » Je lui fais remarquer avec un sourire, histoire qu'elle voit que j'apprécie le geste et qu'il ne s'agit là que d'un trait d'humour.

« Gold est sorti avec Belle et David a emmené Henry faire un tour, personne ne le saura à part moi. » Ma mère réplique immédiatement. « Je doute que la poudre fonctionne une deuxième fois et si tu te retrouves coincée là-bas plus longtemps… je voulais simplement m'assurer que tu aies quelque chose de réconfortant près de toi. »

« Je te remercie. » Je la rassure en empoignant le petit cheval en peluche. « Je n'ai jamais rien eu de tel quand j'étais enfant, tu sais ? Même si ces souvenirs ont été générés par la malédiction, je les chéris autant que ceux qui sont réels. »

« Vraiment ? »

« Ils sont bien meilleurs que ceux que j'ai de ma véritable enfance. » J'explique en caressant machinalement la peluche. « Je dois y aller, Aurore m'attend sûrement. On se revoit très vite. »

« Je ne vais nulle part, je serai encore là à ton réveil. »

« D'accord. »



Je ferme les yeux et, après quelques secondes, le sommeil m'emporte à nouveau.



***



« Morgane, tu es là ! Alors, tu as trouvé un moyen ? »

« Je sais où trouver de l'encre de seiche, celle dont je t'ai parlé. »Je lui explique en repoussant les flammes. « Elle se trouve dans le cachot de Rumplestiltskin. »



Je me rends compte à présent que quelque chose cloche. Les flammes continuent d'attaquer Aurore malgré tous mes efforts pour l'en débarrasser.



« Aurore, tu m'entends ? »Je cherche à m'assurer. « Est-ce que tu as compris ? »

« Non je… Qui m'appelle ? »

« Il n'y a que nous ici Aurore, il faut que tu te concentres. »

« Tu as entendu ça ? »La jeune femme semble de plus en plus paniquée.

« Non, qu'est-ce qu'il se passe ? »



Soudain, dans un tourbillon de fumée, le corps d'Aurore s'envole et je perd toute trace d'elle. C'est à ce moment que je l'entend, une voix caverneuse qui semble m'appeler. Avant que je ne puisse réagir, je me réveille.



***



« Morgane, réveille-toi ! » La voix de ma mère et sa main sur mon épaule achèvent de me tirer de mon sommeil et j'ouvre les yeux.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? »

« J'allais te poser la même question. Qu'est-ce que c'est ? » Ma mère regarde en direction de mes mains.

« Oh, ce n'est qu'un reflex. » Je lui assure en éteignant la flamme qui s'y était allumée. « Il s'est passé quelque chose. Aurore a disparu avant que je ne puisse lui expliquer le plan. Je dois y retourner. »

« Non, c'est trop dangereux. »

« C'est la seule solution maman. Je ne risque rien là-bas si ce n'est quelques brûlures qui se soignent très vite. Je peux aider et je le ferai. »

« Et il fallait qu'elle soit entêtée bien sûr. » Ma mère marmonne assez intelligiblement pour que je comprenne.

« J'y retourne, peu importe les risques. »

« Quand on s'aventure dans le monde des limbes au lieu de s'en éloigner, on court forcément des risques. » Gold apparaît soudainement, semblant avoir entendu toute notre conversation. « Quelqu'un a réveillé Aurore avant que son âme soit prête à revenir. La violence de l'acte l'a arraché et a très probablement blessé Morgane. »

« Tu m'as dit que tu n'avais rien ! » Ma mère s'exclame en se tournant vers moi.

« Ce n'est pas gr… »

« Montre-moi ! »



Comme je sais que je n'ai aucune chance de m'en sortir en mentant plus longtemps, je relève la manche de mon chemisier et le montre à ma mère. Elle me saisit par le poignet, prenant garde d'éviter la blessure.



« Tu peux la soigner ? » Elle demande à Gold mais je m'en charge avant qu'il ne puisse répondre.

« Je sais me débrouiller toute seule maman. Dois-je te rappeler la nature de ton sort d'attaque de prédilection ? J'ai assez eu affaire au feu pour savoir en guérir les effets. Fais-moi confiance tu veux ? »

« Ça aurait pu être plus grave. » Pour une fois, Gold semble être du même avis que ma mère. « Il vous faudra sans doute un peu de temps avant de pouvoir repartir. »

« C'est hors de question, on ne la renverra pas ! »

« Qui alors ?" Je demande à ma mère. « Henry ? C'est la seule solution et tu le sais. »

« Je refuse de te voir souffrir plus longtemps. »

« Si on ne fait rien, ce n'est pas moi qui souffrirai mais Henry. C'est ce que tu veux ? » Mon argument semble faire mouche.

« Je sais qui est Cora. » Gold intervient. « Si on ne les aide pas, Blanche et Emma seront bientôt mortes et là… un véritable monstre sera en route pour Storybrooke. »

« On ne peut plus compter sur Aurore. » Ma mère nous fait remarquer. « Pourquoi on renverrait Morgane dans cet enfer alors qu'il n'y a personne pour recevoir notre message ? »

« Il y aura quelqu'un. » J'affirme sans hésiter, ayant déjà réfléchi à la question.

« Qui ? »

« Aurais-tu oublié qui est la première personne que tu as soumis au Charme du Sommeil ? Blanche bien sûr. »

« Ça, c'est une hypothèse un peu osée. » Ma mère tente encore de m'en dissuader.

« Non, elle sera là j'en suis sûre. Tous ceux qui ont été soumis à ce sort se retrouvent là-bas un jour ou l'autre, non ? » Je demande confirmation auprès de Gold qui acquiesce. « Alors elle trouvera un moyen d'y aller. »

« Je refuse. »

« Maman, je t'en supplie fais-moi confiance. Je peux le faire. Donne-moi trois heures, je n'en demande pas plus. S'il te plaît. »

« Très bien. » Elle accepte dans un soupir, clairement pas convaincue. « D'accord mais c'est la dernière fois. »

« Promis. »

 

***



Heureusement je suis très fatiguée, il m'est donc facile de retourner dans le monde des limbes. J'attends patiemment et prépare le terrain pour l'arrivée d'Aurore ou de Blanche. Je dégage l'endroit de toutes flammes et celles-ci se retrouvent acculées contre les murs. Je m'assois, adossée contre l'une des colonnes et attend, encore et encore. Soudain j'entends sa voix.



« Morgane ? Morgane, tu es encore là ! »Elle s'approche précipitamment de moi.

« Je n'allais pas vous laisser tomber sans essayer une dernière fois. Je savais que tu viendrais. Qu'est-ce qu'il s'est passé avec Aurore ? »

« On a été attaquées par des… des zombies, et Aurore a été enlevée. »

« Elle va bien ? »Je m'inquiète immédiatement.

« On va la retrouver mais pour ça, on doit connaître le plan de Rumplestiltskin. »

« Dans son ancienne cellule. »Je commence mon explication. « Celle dans laquelle vous l'avez enfermé. Il dit qu'il y a laissé de l'encre de seiche, le même type qui vous a permis de l'arrêter lui. Vous trouvez cette encre et vous pourrez arrêter Cora. »

« Ça a l'air assez facile pour une fois. »

« Parfait, mettez-vous en route alors. Debout maintenant et revenez vite, votre mari est assez… insupportable sans vous. »J'avoue, la faisant éclater de rire.

« Rappelle-moi de te remercier une fois qu'on sera rentrées. »

« Un burger chez Granny et on sera quitte. »



Elle disparaît dans un dernier éclat de rire, me laissant seule dans cet endroit. A court d'idée, je sors de la poche arrière de mon pantalon la peluche que ma mère m'a donné. Je la regarde, espérant un miracle.



« Une idée pour sortir d'ici ? »Je lui demande comme si elle pouvait me répondre.



Je ne sais pas trop comment, mais je me réveille. Le soulagement m'envahit.



***



« Elle a eu le message. » Je confirme dès que j'ai ouvert les yeux.

« Bien, il ne reste plus qu'à attendre alors. »

« On devrait rentrer. » Ma mère propose. « Histoire que tu te reposes vraiment à partir de maintenant. »

« J'aimerais encore m'entretenir avec toi Regina. »

« Je peux rentrer seule, ne t'inquiète pas. »

« Tu es sûre que ça va ? » Ma mère insiste, clairement inquiète.

« Je n'ai rien, je t'assure. Si ça peut te rassurer, je demanderais à David de me raccompagner. Henry doit avoir un tas de questions à me poser. »

« D'accord si tu es sûre de toi. »

« On se revoit quand tu seras rentrée. » Je confirme en me levant.



Même si la tête me tourne un peu quand je quitte la pièce, je fais tout pour ne rien montrer devant ma mère. Mais je reste quand même quelques minutes à m'appuyer contre le comptoir de la boutique histoire de retrouver mes esprits. Quand ma vue est moins brouillée, je m'apprête à m'en aller quand je perçois un bout de la conversation entre ma mère et M. Gold. Et ça ne me plaît pas du tout.



« Et si Mary-Margaret et Emma arrivaient à la vaincre et revenaient ? » Je reconnais la voix de ma mère.

« Eh bien pour toi comme on dit ce serait gagnant-gagnant. »

« Tu peux être plus clair ? »

« Si on élimine Cora, tu es protégée à jamais de sa colère. » Gold commence son explication. « Si, par malheur, on arrête Blanche-Neige et Emma alors… tu seras la seule et unique maman qu'il restera à Henry. Tu es d'accord avec moi ? » Gold fait une pause dans son discours mais ma mère reste silencieuse. Pitié, faites qu'elle n'accepte aucun de ses plans diaboliques. « Ici les effets de la magie sont imprévisibles. Si un malheur arrivait alors que toi tu essayais d'éviter le pire, ni Henry ni Morgane ne te le reprocheront, tu ne crois pas ? »

« Non, je ne peux pas leur mentir. » Ma mère refuse et je soupire de soulagement. « Je leur ai promis d'être une mère et une femme meilleure. »

« Sauf que tu ne pourras plus être une meilleure quoi que ce soit si Cora franchit cette porte. Car si c'est elle qui vient, elle sera une menace pour tous les gens qui vivent ici, y compris tes enfants. Alors si tu veux être une bonne mère, si tu veux vraiment les protéger, si tu veux être meilleure, prouve-le. »



Je quitte silencieusement la boutique, refusant d'en entendre plus. Je retrouve David et Henry devant l'entrée et mon petit frère vient me prendre dans ses bras dès qu'il me voit.



« Alors tu as réussi ? Elles ont eu le message ? »

« Oui, ne t'inquiète pas. Elles seront bientôt rentrées. » C'est à ce moment que ma mère nous rejoint.

« Vous voilà. Tu n'es pas rentrée ? »

« Non, je… on discutait. » Je tente de paraître innocente.

« Bien, je veux que tu restes avec Henry. M. Gold et moi devons encore préparer la venue de Mary-Margaret et Emma. »

« Tu vas vraiment les aider ? » Henry demande, plein d'espoir.

« Oui, je te l'ai promis non ? »

« Alors tu as vraiment changé. »

« Et qui avait raison ? » J'ajoute en donnant un petit coup de coude à Henry.

« C'est vrai, j'aurais dû te faire confiance. »

« Tes doutes étaient légitimes. On y va ? »

« On peut passer chez Granny ? Une glace pour célébrer ça, ça te tente ? » Henry me propose.

« Ça me va, je ne suis plus vraiment fatiguée à présent et… »

« Je crois qu'elle a envie de voir une certaine serveuse. » Ma mère ajoute d'un air taquin.

« Peut-être bien. En route alors. Tu viens avec nous David ? »

« Pourquoi pas. Qui refuserait une glace ? »

« Personne de censé. »



On se dirige alors vers le Diner mais je marche légèrement en retrait de David et Henry. Je veux faire confiance à ma mère mais… c'est en Gold que je ne crois pas du tout. Il aime beaucoup trop le pouvoir pour ça.



« Où sont-ils ? Regina et Gold ? » J'entends la voix de Ruby qui interpelle Henry et David.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Tous les diamants magiques ont disparu de la mine ! »

« Ils les ont volé ? » Henry semble ne pas y croire.

« C'est impossible. »

« Pourtant ils sont venus en notre absence et ont tous pris. » Leroy insiste. « Et personne n'a jamais volé les nains. »

« Sauf la Reine »

« Et Rumplestiltskin. »

« Ça veut dire qu'ils n'aident pas Emma et Mary-Margaret et… ça veut dire que ma mère m'a menti. » Henry comprend en se tournant vers moi.

« Je suis désolée Henry. » Ruby dit d'une voix douce en se mettant à la hauteur de mon petit frère.

« Arrêtez ! » J'interviens d'une voix plus forte et tout le monde se tourne vers moi, y compris les nains. « Quand je disais que c'était impossible, je voulais dire que notre mère était là à l'instant. Comment aurait-elle pu voler quoi que ce soit en moins de deux minutes ? »

« Elle a dû trouver un moyen. » Ruby se tourne vers moi. « Je sais que tu veux croire en elle mais… »

« Vous n'avez aucune preuve, que des suspicions. Vous allez vers les cibles les plus évidentes sans chercher plus loin. » Je raisonne en préparant un plan dans ma tête. « On va les trouver, je suis certaine de pouvoir la faire changer d'avis. Et vous. » Je pointe mon doigt vers les nains mais mon regard est ancré dans celui de Ruby. « La prochaine fois que vous proférerez des accusations sans fondements à l'encontre de ma mère, je ne serais pas aussi clémente. »

« Tu sais où ils sont ? » David me demande.

« Je peux sentir leurs énergies magiques, ils ne sont pas loin. Le Puits aux Vœux, c'est là qu'ils se trouvent. Ça fait sens, Gold a ramené la magie par ce biais. C'est plus qu'un puits, c'est un portail. »



***



J'ai senti que les choses tournaient mal à partir du moment où de gros nuages sombres et menaçants ont fait leur apparition. L'éclair vert qui en est sorti me le confirme. Je laisse les autres en plan pour me téléporter jusqu'au puits. J'aurais dû commencer par ça au lieu de m'encombrer avec des témoins.



« Qu'est-ce que vous faites ? » Je demande immédiatement alors que Gold et ma mère me tournent toujours le dos.

« Je fais ça pour vous protéger. » Ma mère tente de me rassurer.

« Est-ce que tu te rends compte de ce que tu fais ? Tu trahis la confiance d'Henry ! Il sait ce que vous faites, il est en route en ce moment même. »

« Comment ça ? »

« Les nains ont trouvé les mines vident et ils ont été très prompts à vous accuser. Ne leur donne pas raison, je t'en supplie. Il n'est pas trop tard pour faire le bon choix. »

« Je suis désolée, mais je ne peux pas. » Ma mère insiste, des larmes se formant dans ses yeux. « Il est trop tard maintenant. »

« Maman ? » Henry arrive en courant accompagné de Ruby et David. « Alors, t'es pas là pour aider Mary-Margaret et Emma hein ? »

« C'est pour toi, c'est pour te protéger que je suis là. »

« Quoi ? Tu racontes n'importe quoi. »

« Vous allez les tuer n'est-ce pas ? » Ruby demande.

« Désolé. »



Sans plus de cérémonie, Gold envoie David et Ruby valser à plusieurs mètres et ils tombent tous deux, inconscients. Je sens ma magie se réveiller et je ne fais rien pour la contrôler.



« Ça vous n'auriez pas dû le faire. » Je dis simplement avant de libérer Morrighan sur le Ténébreux. Même la magie de Gold ne peut rien contre la puissance que je dégage alors et il se retrouve plaqué contre un arbre, incapable de bouger.

« Maman, mais pourquoi ? Qu'est-ce que tu fais ? » Henry insiste pour savoir.

« On ne peut pas laisser Cora franchir cette porte. Tu n'as aucune idée de ce qu'elle pourrait nous faire ! »

« Emma et Mary-Margaret vont être plus fortes qu'elle. Ce sont elles qu'on va voir arriver. Le bien l'emporte toujours sur le mal ! »

« Tu devrais le savoir non ? » J'interviens pour soutenir Henry. « Tu n'as jamais pu gagner parce que tu étais du mauvais côté de la barrière. N'y retourne pas ! »

« Ce que je sais c'est que ma mère veut détruire tout ce que j'ai. Tout ce que j'aime ! Ce qui veut dire vous deux et ça, je ne le supporterai pas. »

« Regarde ce que j'ai fait au Ténébreux ! » J’abats ma dernière carte. « J'ai plus de puissance en moi que tu ne sembles le penser alors, si tu n'as pas confiance en elles, ai confiance en moi. S'il te plaît maman. J'ai toujours cru en toi, ne me fais pas regretter mon choix maintenant ! »



Le puits s'agite, des éclairs verts en jaillissent, prouvant que quelqu'un essaye de passer. Henry réagit au quart de tour et se précipite vers le portail mais ma mère le retient au dernier moment.



« Arrête ! Arrête, tu dois pas faire ça ! Tu vas les tuer ! Je t'en prie ! Non ! Elles vont réussir à traverser, arrête tout ça ! Tu vas les tuer, maman ! » Il parvient à s'échapper et arrive devant le puits avant que ma mère ne l'en écarte.

« Henry ! Qu'est-ce que tu fais ? »

« Emma et Mary-Margaret vont réussir à revenir. Je le sais. Tu disais que tu voulais changer, devenir meilleure. C'est le moment. » Je vois bien que la tirade d'Henry fait mouche, je crois qu'il peut y arriver. « Si tu veux que j'ai confiance en toi, alors il faut que tu aies confiance en moi. »



Je vois le moment où ma mère change d'avis sur le sujet et prend une décision radicale. Elle s'approche du puits à son tour et place ses mains au-dessus. Elle absorbe la magie alors qu'une telle quantité d'un coup pourrait la tuer !



« Maman non ! » Je m'écrie en me précipitant vers elle et je la rattrape juste à temps.

« Non ! » Henry s'exclame quand il se rend compte que rien ne se passe.

« Je suis désolée. »



Le portail n'est plus bloqué et pourtant personne ne vient. Peut-être que le sort a fait son effet finalement. Peut-être que personne ne pourra plus jamais franchir la porte qui mène à ce puits.



« Je suis désolée. » Ma mère laisse ses larmes couler et je sens sa tête se poser sur mon épaule.



Mes yeux sont toujours rivés sur le puits. J'attends et j'espère, comme Henry. Je ne peux pas croire qu'on ait fait tout ça pour rien. On ne peut pas avoir perdu deux vies en une seule journée, pas après tant d'efforts. Et puis soudain, une main apparaît et Emma se hisse hors du puits, suivie de près par Mary-Margaret. Henry se précipite vers la blonde et va la prendre dans ses bras. Maintenant que je suis rassurée, je me tourne vers ma mère.



« Je vais m'assurer que Ruby va bien, je reviens tout de suite. » Je dis à son attention. « Tu as fait le bon choix, n'en doute pas. » J'ajoute en me relevant. « Il va bien Blanche. » Je lance d'une voix forte quand je vois que la brune en question à le regard rivé sur son mari. « Allez le voir, il va se réveiller. » Je vais m'agenouiller à côté de Ruby et je pose ma main sur son épaule. « Hey, Ruby, réveille-toi. » Un petit coup de magie et la voilà qui ouvre les yeux.

« Qu'est-ce qui s'est passé ? » Ruby demande en même temps que Blanche.

« Elle vous a sauvé. » C'est Henry qui répond en se tournant vers ma mère. « Elle vous a sauvé toutes les deux. »

« Merci. »

« Y a pas de quoi. » Ma mère répond à la blonde.

« Ah hum… votre mère, elle a… un sacré… caractère, vous savez ? »

« Oh ça oui, je sais. Bienvenue. »

« Merci. » Emma répond en serrant Henry plus fort contre elle.



Alors qu'Emma s'éloigne pour aller voir son père et Ruby, Henry s'approche de ma mère.



« J'avais raison tu vois. Tu as vraiment changé. » Il dit avant de la prendre dans ses bras. « Merci beaucoup. »



Leur étreinte me réchauffe le cœur et je ne peux m'empêcher de sourire devant cette scène. Finalement, Henry s'éloigne en compagnie d'Emma, Blanche, David et Ruby. Je remarque seulement maintenant que je n'ai toujours pas libéré Gold alors je relâche mon emprise sur la magie.



« Eh bien, j'ai cru que vous m'aviez oublié. »

« C'est le cas. » Je dis entre mes dents. « Que cela vous serve de leçon : il y a toujours plus fort que vous quelque part. »

« Je serais prêt la prochaine fois. »

« Nous verrons bien. » Je le regarde s'en aller dans un nuage de fumée rouge avant de me tourner vers ma mère. « Ça va, tu tiens le coup ? »

« Je vais bien. » Elle acquiesce avant de se relever. « Tu ne les accompagnes pas ? » Elle me demande en montrant d'un signe de tête la direction vers laquelle Henry est parti avec les autres. « J'ai cru les avoir entendu parler d'une célébration chez Granny. »

« Qui voudrait d'un burger quand je pourrais avoir tes célèbres lasagnes ? » Ma réponse aura au moins pour effet de la faire sourire. « Je serais toujours de ton côté, ne l'oublie pas. »

« Je m'en souviendrais à présent. Merci. »

« Aller en route, je crois qu'une bonne nuit de sommeil nous fera du bien à toutes les deux. »

« Il n'est que quinze heures. » Ma mère me fait remarquer.

« Une sieste alors. » Je réplique avec un haussement d'épaule qui lui arrache un petit rire.



***

 

« Alors, on doit aller au village le plus proche, c’est ça ? » Je demande encore une fois à Urien alors qu’on avance résolument à travers la forêt. « Je ne comprends toujours pas pourquoi, il nous suffirait de chasser. »

« On commence à manquer de ressources, de matière première. » C’est Menassen qui parle, à quelques pas devant moi. « En plus, il nous faut des remèdes pour les chevaux. »

« Et il est loin ce village ? »

« On y est presque, petit impatiente. »

 

En effet, après le prochain virage et derrière une épaisse fourrée, je vois enfin le village. Enfin, les quelques maisons qui sont rassemblées autour d’un puits. Ce n’est peut-être pas très grand mais tout le monde semble rassemblé sur la place centrale où est dressé le marché. Je suis Urien et Menassen, ils semblent tous deux connaître l’endroit par cœur et je ne suis là que pour me familiariser avec les alentours.

Puis, alors qu’on s’était arrêté devant le stand d’une herboriste, un bruit sourd se fait entendre. On aurait dit le grondement d’un orage à quelques lieux d’ici, mais le groupe de cavalier qui déboule dans le village me fait réalisé qu’il ne s’agissait que du martèlement des sabots des chevaux.

Ils sont tous noirs, de même que les soldats qui les montent. Quatre cavaliers ouvrent la marche et derrière eux un grand carrosse noir. Ils est si richement orné que je n’ai aucun doute quant à l’identité de la personne dedans, forcément quelqu’un de noble sang. Les villageois semblent savoir exactement de qui il s’agit parce qu’il se sont tous écarté de la place centrale.

 

« Qui est-ce ? » Je demande en chuchotant à l’oreille d’Urien.

« La reine. »

« Tu dis ça comme si j’étais sensée savoir qui elle est. »

« De quel royaume tu viens exactement ? Tout le monde connaît la Méchante Reine ici. »

« Ouais mais je ne suis pas d’ici justement. » Je lui fais remarquer. « Qu’est-ce qu’elle veut ? »

« J’ai entendu dire que Blanche-Neige était passée par ici récemment. Elle est sûrement à sa poursuite. »

« Blanche-Neige ? »

« Tu ne connais vraiment rien à l’histoire du Royaume Blanc, pas vrai ? » Urien me demande avec un petit sourire.

« J’ignorais même dans quel royaume je me trouvais. J’étais sensée allée jusqu’à Mist Haven. »

« Je croyais que tu n’avais aucune destination précise en tête. »

« J’ignorais si je pouvais te faire confiance. »

 

C’est là que je vois une femme descendre du carrosse. Elle n’est pas très grande mais elle a une présence qui compense son manque de stature. Elle est vêtue d’une tenue noire et rouge mêlant le cuir et le tissu avec un savoir-faire clairement réservé aux gens avec des moyens illimités. Le village s’est tu, plus personne n’ose même respirer trop fort. Oui, ils ont peur mais je me demande bien pourquoi. Peut-être que la Reine est intimidante, certes, mais méchante ? En façade probablement, mais je ressens une certaine lassitude dans l’attitude de la souveraine.

 

 

« Tu n’as pas peur ? » Urien murmure à mon oreille.

« Je devrais ? »

 

***



Finalement, j'ai à peine fermé l'œil. Ces multiples allers et retours m'ont épuisé, oui, mais pas physiquement, plutôt moralement. Alors je suis restée allongée quelques heures jusqu'à ce que des coups frappés à la porte me tire de mes pensées. Comme je suis curieuse, je ne résiste pas et, quand je me décide à descendre, ma mère ferme à peine la porte derrière le visiteur.



« Qui était-ce ? » Je demande alors qu'elle se tourne vers moi.

« C'était Emma. »

« Oh, et hum… » J'hésite un temps, jetant un rapide coup d'œil vers la porte d'entrée. « Elle est repartie en un seul morceau, pas vrai ? » Le regard de ma mère m'indique clairement ce qu'elle pense de ma petite blague. « Il va vraiment falloir que tu apprennes l'auto-dérision. »

« J'ignorais que c'était nécessaire. »

« Pour vivre avec moi ? Oh oui ça l'est. » J'affirme avec beaucoup de sérieux. « Alors, qu'est-ce qu'elle voulait ? »

« Ils organisent une petite réception ce soir chez Granny's pour… fêter leur retour je suppose. »

« Et Emma t'a invité ? » Et même si ma mère ne me répond pas ouvertement, je comprend assez facilement que oui. « Ça me paraît logique, non ? Sans toi, elles seraient mortes, personne n'aurait pu arrêter Gold. »

« Ne sois pas ridicule, je suis certaine que tu l'aurais fait. »

« Ok alors, changement de tactique. »

« Tactique ? Serais-tu en train d'essayer de me convaincre d'y aller ? » Ma mère comprend enfin.

« Essayer ? Ah, très drôle. Non, je sais que je te convaincrai parce que c'est Henry qui veut te voir là-bas, pas vrai ? C'est pour ça qu'Emma est venue, parce que votre fils le lui a demandé. »

« Et même si c'était le cas, qu'est-ce que ça changerait ? C'est une fête de héros et je n'en fais pas partie. »

« Aujourd'hui si. » Je lui fais réaliser. « Si tu continues de t'isoler de la sorte, à ne sortir que pour voir Henry, ils ne changeront jamais d'avis sur toi. Tu seras toujours la même Méchante Reine à leurs yeux. C'est à toi de faire le premier pas et ça se passe ce soir. »

« Admets-le, c'est surtout toi qui a envie d'y aller. » Ma mère me taquine avec une demi-sourire.

« D'accord, je l'avoue, j'ai bien envie de voir la tête qu'ils feront quand ils verront débarquer La Fay, la Protectrice des Forêts du Sud. S'il te plaît, j'ai retrouvé mon vieux blouson de vengeresse masquée, il faut que j'étale ma réussite devant Blanche-Neige et ses sept nabots, j'ai l'impression qu'ils me sous-estiment. »

« Très bien, d'accord ! » Ma mère accepte dans un soupir. « Je ne te priverai pas de l'expression sur leur visage quand ils se rendront compte qu'une adolescente menait la Rébellion. »

« Génial ! Et nous n'iront pas les mains vides alors au travail ! »

« Pardon ? »

« Crois-moi. » J'entame mon explication en entrant dans la cuisine. « Tu pourrais conquérir le cœur de tout un royaume avec tes lasagnes et nous allons tester cette théorie dès ce soir. » J'allais commencer à rassembler les ingrédients nécessaires quand le sourire de ma mère m'arrête dans mon geste. « Quoi, qu'est-ce que j'ai dit ? »

« Rien, juste… Je suis contente que tu sois là. »

« Je suis contente d'être là aussi. »



***



On est en route pour Granny's, à pied parce que l'air frais me fait du bien. Je me doute qu'on sera plutôt nombreux ce soir, confinés dans un espace assez restreint, alors j'en profite pour m'aérer autant que possible tant que je le peux.



« Alors dis-moi. » Ma mère m'interrompt dans mes pensées. « Qu'est-ce que ça représente exactement ? » Elle me demande en désignant la broderie qui orne le dos de ma veste.

« Oh, c'est un corbeau, c’est un oiseau qui représente le changement et la détermination, mais aussi la mort et la magie. » J’ajoute avec un sourire. « Et dans sa bouche, il tient une amaryllis, la fleur de la victoire. »

« Très théâtrale. »

« Le peuple avait besoin d'un symbole et c'est moi qu'ils ont choisi. » J'explique avec un haussement d'épaule. « Je ne sais pas vraiment pourquoi mais j'ai quand même décidé de jouer le jeu… en y mettant la forme. Et tu peux parler toi, avec tes tenues noires et rouges. »

« Ça m'arrivait de porter du violet avec le noir. »

« Tout de suite moins intimant, c'est vrai. » Je lance avec sarcasme juste au moment où je pousse la porte du Granny's. « Je crois qu'on a refroidi l'ambiance. » Je marmonne ensuite en notant le silence qui règne depuis notre entrée.

« Désolée, on est un peu en retard. »

« Qu'est-ce qu'elle fait là ? » Leroy sort alors une dague de sa poche et la pointe sur ma mère avant que je ne la change en rose.

« On ne t'a jamais appris les bonnes manières ? C'est une fleur que tu es censé tendre vers une dame. »

« C'est moi qui l'ai invitée. » Emma prend alors la parole, récoltant la surprise générale, avant d'être prise à partie par ses parents.

« Bon ça aurait pu être pire. » J'essaye de relativiser. C'est à ce moment que j'aperçois mon petit frère. « Hey, Henry ! »

« Morgane ! Maman ! Vous êtes venues ! »

« On n'allait pas rater une telle fête quand même ! N'est-ce pas maman ? »



J'espère que là, elle comprendra qu'elle a eu raison de venir. Au moins, elle passera du temps avec Henry et je sais que ça compte plus que tout pour elle.



***

 

« Tu les as sauvé aujourd’hui Elaine ! Ils ont repris espoir, ils pensent qu’ils pourront s’en sortir et que Blanche-Neige retrouvera bientôt son trône. C’est grâce à toi. »

« Vous vous trompez. » Je me tourne vers le groupe de renégat qui peuple la forêt et je comprends que même eux ont retrouvé un certain éclat. « Je ne suis qu’une enfant, pas un espoir. »

« Tu n’es pas une enfant, Elaine. » Menassen s’approche doucement de moi. « Tu es la première personne que je rencontre qui ose tenir tête à la Méchante Reine. »

« Non, ce n’est pas moi ça. Je voulais juste… je ne suis pas une rebelle. »

 

Je n’ajoute rien et me précipite vers ma tente. Une fois que je suis relativement seule, je me laisse aller à la panique. Ils veulent vraiment que je prenne la tête d’une rébellion, moi ? Je ne suis personne, rien qu’une orpheline vivant dans la forêt. Quelle légitimité aurais-je à vouloir diriger un groupe d’homme armés. Non, je ne peux pas le faire et je ne peux pas faire face à leur déception. C’est décidé. Ils n’auront qu’à dire aux gens du village que j’ai été dévorée par des loups ou quelque chose comme ça. Je m’en fiche, tout ce que je veux, c’est partir d’ici aussi vite et aussi loin que possible.

Alors j’attrape les quelques affaires qui sont miennes depuis plusieurs semaines maintenant et j’empaquette le tout dans un grand sac. J’enfile une longue cape et une écharpe que je place sur le bas de mon visage. J’aimerais ne pas être reconnue aussi longtemps que possible. Les autres sont toujours dehors, en train de discuter, alors je choisis de quitter ma tente par l’arrière. Je suis assez discrète et ils ne m’entendent pas alors je m’enfonce plus profondément dans la forêt.

Il y fait sombre mais parfois un rayon de lune traverse les feuillages et éclaire un peu ma route. J’avance résolument, je ne peux plus reculer à présent. Je ne peux pas être ce qu’ils attendent de moi. Oui, j’ai tenu tête aux soldats de la Reine aujourd’hui mais ça ne veut pas dire que je suis prête à combattre le reste de son armée.

La nuit est calme et seul le bruissement du vent dans les feuilles m’accompagne pendant plusieurs longues minutes. Puis j’entends le murmure de l’eau, je dois être proche de la rivière. En la traversant, j’arriverai peut-être à masquer mes traces et les autres ne me retrouveront pas. Ce sont-ils même déjà aperçu de mon absence ? J’en doute, ils doivent être trop occuper à célébrer cette petite victoire face à la Reine.

Un hurlement dans le lointain me tire de mes pensées. Ça ressemble à un loup, en plus puissant. Je n’ai pas peur des loups mais j’espérais faire un bout de chemin tranquillement, au moins jusqu’au prochain village qui se trouve à plusieurs lieues. Je n’aurais pas cette chance apparemment. Le hurlement est plus proche cette fois et j’entends le bruit caractéristique d’un loup en chasse.

Je regarde frénétiquement autour de moi, cherchant à deviner de quel côté la bête viendra. C’est là que mon regard tombe sur une créature qui, certes, ressemble à un loup, mais elle est également beaucoup plus grande qu’un loup ordinaire. Ses grands yeux jaunes sont fixés sur moi et les poils sur son dos sont hérissés, comme si le loup avait… peur. Son pelage aussi noir que la nuit l’aurait presque rendu invisible à mes yeux si la lune ne se reflétait pas sur ses énormes dents blanches et luisantes.

Puis j’entends d’autres cris venant de plus loin derrière le loup, des cris d’hommes. Je suppose alors que le loup n’est pas en train de chasser mais d’être chassé. Il n’essaie pas de me faire peur, c’est lui qui a peur.

Je me souviens alors de cet autre loup, il y a plusieurs moi dans la forêt, un loup qui accompagnait un chasseur. Ce n’est clairement pas la même bête mais je vois dans ses yeux le même genre d’intelligence qui devrait être propre à l’homme.

 

« Tu dois partir, ils sont tout proches. » Je dis à voix basse, même si je me doute qu’il ne comprendra rien. « Vas-t-en, ne reste pas là. »

 

Le loup finit par bondir, un saut de plusieurs mètres qui l’envoie de l’autre côté de la clairière où je me trouve. Au même moment, un groupe de soldat de la Reine apparaît juste à l’endroit où le loup se tenait quelques secondes avant.

 

« Tiens, ne serait-ce pas la gamine de ce matin ? » L’un d’eux dit en me voyant.

« Il paraît qu’elle a abattu plusieurs de nos hommes. »

« Et ceux qui restaient ont fuit comme les trouillards qu’ils sont. » Je réplique, les dents serrées. Gamine, moi ?

« Mais c’est qu’elle mordrait. »

« Hey, le loup est juste là ! »

« On l’abat tout de suite ou on le laisse s’occuper de la gamine d’abord ? »

 

Ils n’auront le temps de faire ni l’un ni l’autre apparemment. Comme je les vois s’avancer, vers moi ou le loup je n’en sais rien, je me saisis de ma dague et la lance vers l’un des soldats. Il tombe raide mort et le reste de son groupe se tourne vers moi.

 

« Tu vas le regretter. » L’un d’eux s’approche un peu plus près.

 

Oui, je vais le regretter. Je n’ai plus d’arme à ma disposition, ayant utilisé la seule qui me restait pour tuer le premier soldat. Je me retrouve seule et sans défense, c’est là qu’elle se réveille. Ma magie. Je ne l’ai plus utilisé depuis que je me suis échappée d’Avalon et les quelques sorts de protection que j’ai lancé depuis n’ont pas nécessité l’invocation de ce… cette chose à l’intérieur de moi. Mais je reconnais les signes, je sais qu’elle est juste là, je la sens gratter sous ma peau et me brûler les yeux.

J’entends des cris, des suppliques mais je ne vois plus rien, c’est comme si un voile noir me recouvrait les yeux. Je sens que je tombe, je sens l’herbe sous mon visage mais je ne vois plus rien, je n’entends plus rien…

 

***



« Attendez… Mulan ! Pour vrai ? »



Blanche vient tout juste de me raconter son épopée dans la Forêt et j'avoue que les premiers pas de la Sauveuse dans notre monde m'ont beaucoup fait rire. Mais la partie qui m'intéresse le plus est celle où elle a rencontré Mulan. De toutes les mauvaises adaptations de contes qui ont pu être faites, son film a été mon préféré. L'histoire d'une guerrière sauvant son pays et ramenant l'honneur sur sa famille, ça ne pouvait que me plaire.



« Euh… oui, pourquoi ? » Blanche semble surprise de mon intérêt soudain.

« Pourquoi ? Parce que c'est la meilleure tout simplement ! Comment elle était ? Tu l'as vu se battre ? Est-ce que tu t'es mesurée à elle ? »

« J'ignorais que tu étais une fan. »

« Et pourtant, je t'envie tellement en cet instant. »

« J'ai toujours son épée si tu veux. » Blanche dit alors, et j'en oublie comment parler pendant quelques secondes.

« Attends, quoi ? »

« Je n'en aurais plus l'utilité maintenant et de toute façon je préfère l'arc. Alors elle est à toi, à une condition. »

« Et laquelle ? » Je préfère être prudente avant d'accepter.

« J'ai reconnu le symbole sur ta veste et je sais à qui il appartient. Alors, si tu es vraiment La Fay, Protectrice des Forêts du Sud… »

« C'est le cas. Certains m'ont même renommé Grande Prêtresse mais j'ai trouvé ça beaucoup trop prétentieux. Morgane, ça suffira. »

« Très bien alors, Morgane. » Blanche poursuit en attirant l'attention de son mari qui nous rejoint très vite. « Charmant ici présent a un jour dit que les exploits de La Fay n'étaient pas très impressionnants, et qu'il pourrait sans doute la battre aisément. »

« Ah vraiment ? » Mon regard se tourne vers David qui ne semble plus être aussi sûr de lui.

« Prouve-lui qu'il a tort et l'épée est à toi. »

« Cette idée me plaît bien. Charmant ? »

« Quoi, tout de suite ? »

« Oui, pourquoi ? Auriez-vous peur M. le Prince ? » Je cherche à titiller son égo et ça semble fonctionner.

« C'est vrai, réglons cette affaire une bonne fois pour toute. Mais pas de magie ! »

« Promis, ce sera un combat de chevalier et rien de plus. »



***



Quelques minutes plus tard, nous nous trouvons à l'extérieur David et moi. Comme je ne veux aucune inégalité, je laisse David se battre avec son épée que j'invoque assez facilement grâce à ma magie.



« Je les ai enchantés pour qu'on ne soit pas blessés. » J'explique à David. « Elles ne coupent pas mais les bleus seront de rigueur. »

« Ce ne serait pas un vrai combat sinon. »

« Alors en garde. » Je dis avant de prendre position.



Je l'observe sans bouger, attendant qu'il fasse le premier geste. Je sais qu'il perdra patience avant moi, j'ai toujours été très calme pendant un combat. C'est un face à face, il est mon seul adversaire et j'ai le temps d'analyser la situation. Comme prévu, il charge le premier et il m'est assez facile de parer. Le coup n'était pas particulièrement puissant ni dangereux, sûrement un moyen de jauger ma force. Je riposte et, à l'aide de quelques coups rapides, je l'oblige à reculer de quelques pas.



« Pas mal. » David m'accorde avec un sourire.

« Allez-y, Petit Prince, montrez-moi ce que vous avez vraiment dans le ventre. »



La réplique est immédiate. Il tente un coup vers ma jambe mais j'esquive facilement et réplique en portant un coup dans sa nuque avec ma garde. Il perd l'équilibre quelques secondes et j'en profite pour enchaîner. Il arrive tant bien que mal à parer mes coups mais j'arrive finalement à lui arracher son épée des mains. Pour la forme, je pointe ma propre lame en direction de son cou, attendant qu'il abandonne.



« Je dois bien admettre que je me suis trompé. Tu es beaucoup plus rapide que je ne le pensais, et dangereusement précise. »

« Je n'ai pas franchement le gabarit pour miser sur la puissance. » Je lui fais remarquer en l'aidant à se relever. « Il faudra remettre ça quand je n'aurais pas la sobriété pour faire pencher la balance en ma faveur. »

« Ouais, j'ai peut-être bu un peu trop de bière. »

« Alors vous les hommes il faut toujours que vous vous trouviez des excuses. » J'ajoute avec sarcasme alors qu'on arrive devant Blanche.

« Je t'avais dit de ne pas la sous-estimer. » Cette dernière n'hésite pas à taquiner son mari.

« C'est bon, j'ai compris. Maintenant donne-lui son épée et rentrons, il fait beaucoup trop froid ce soir. »

« Tiens. » Blanche me tend alors l'arme et le fourreau qui la protège.

« Merci, j'en prendrais soin. » C'est en jetant un coup d'œil alentour que je me rends compte qu'il manque quelqu'un. « Vous avez vu ma mère ? »

« Elle est partie juste à l'instant. » C'est Emma qui répond alors qu'elle arrive à notre hauteur.

« Oh, très bien. Je vais la suivre dans ce cas. Merci encore, pour ce soir. »



***

 

L’odeur de la forêt m’envahit mais aussi celle d’un feu de bois crépitant non loin. Je n’ai pas encore ouvert les yeux, essayant d’abord de déterminer où je me trouve. Je me souviens avoir quitter précipitamment le campement hier soir et le… le loup, les soldats ! Comment puis-je encore être en vie ? M’auraient-ils capturé ? Je dois me trouver près du château de la Reine à l’heure qu’il est, à la merci de ses soldats. Je dois m’échapper tant qu’il en est encore temps.

J’ouvre brusquement les yeux et me relève précipitamment en vérifiant que mon masque improvisé tienne toujours. Je suis déjà bien campée sur mes jambes quand je sens une main se poser sur mon épaule. Je me retourne et me prépare à frapper quiconque tente de me retenir mais je me retrouve nez à nez avec une jeune femme. Ses cheveux sombre sont longs et mal entretenus et je reconnais les signes de fatigue sous ses yeux verts.

 

« Calme-toi, tu es en sécurité. »

« Les soldats de la Reine… »

« Ils sont morts. » La jeune femme m’annonce d’un ton grave. « Je t’ai trouvé au milieu de ce qu’il restait de leurs corps. »

« Oh non, c’est moi qui… »

« Je ne crois pas, aucun humain n’aurait pu faire ça. »

« Alors, le loup… » Je me souviens du loup, de l’intensité de son regard.

« Peu de gens survivent assez longtemps pour se vanter d’avoir gagner un combat contre ce loup, ou les soldats de la reine. »

« J’ai eu de la chance. »

« De la chance, oui. »

« Je m’appelle Elaine. » Je dis en tendant ma main vers elle, jugeant pouvoir lui faire confiance pour le moment. « Je vous remercie d’avoir veiller sur moi pendant la nuit. »

« Je m’appelle Blan… je veux dire, Mary. Je m’appelle Mary. »

« Très bien, Blanche-Neige. » Je ne peux m’empêcher de sourire face à sa surprise. Elle croyait quoi, que je ne reconnaîtrais pas le visage qui orne tous les avis de recherche ? « Notre campement n’est pas trop loin, vous devriez y être en sécurité pendant un temps. Me ferez-vous l’honneur de vous joindre à nous pour le déjeuner ? »

« Eh bien, je suppose que c’est envisageable. »

« En route alors, vous pourrez tout me raconter sur ce grand méchant loup. »

 

***



« C'est quoi cette histoire de garde à vue ? » Je m'exclame immédiatement en entrant dans le bureau du shérif.

« Tu interfères avec une affaire officielle Morgane. » David essaie de m'arrêter.

« Quelle affaire ? »

« On enquête sur un meurtre. » Cette fois, c'est Emma qui me répond. « Archie a été tué la nuit dernière. »

« Et vous pensez que ma mère a quelque chose à voir là-dedans ? »

« Ruby l'a vue entrer dans son cabinet hier soir. » La blonde m'explique et elle-même semble la vouloir innocente.

« J'étais avec elle toute la nuit, ça ne peut pas être elle. »

« J'en prendrais compte, je te le promets mais pour l'instant, c'est la seule piste que j'ai et je dois la creuser si je veux avancer dans mon enquête. »

« Ok, je comprends. » J'admet finalement mais sans en démordre. « Mais je veux assister à l'interrogatoire. »

« Je ne peux pas… »

« Emma, c'est bon. » David la coupe sans ménagement. « Elle devrait rester, si cette histoire implique de la magie alors elle pourra nous aider. Elle vous a ramené ici, on peut lui faire confiance. »

« Très bien. »



Sans rien ajouter, la blonde prend la direction de la salle d'interrogatoire avec David sur ses talons. A travers la vitre, je vois ma mère et je me concentre immédiatement. Il s'agit maintenant de faire attention à chaque détail pour ne rien rater d'important. Je note aussi que Blanche est là également.



« Je vois que la fonction de shérif est devenue une affaire familiale. » Ma mère lance dès qu'elle aperçoit Emma et David. Mais ils ne disent rien et se contentent de prendre place devant elle. « Qu'est-ce que je fais ici ? »

« Vous le savez très bien. Vous êtes ici à cause de Archie. »

« Et depuis quand c'est illégal de discuter avec quelqu'un ? »

« Ça ne l'est que si on assassine cette personne la nuit suivante. » David déclare sans prendre des pincettes, s'attendant à une réaction de la part de ma mère et il n'est pas déçu.

« Archie est mort ? » La surprise dans sa voix et sur son visage n'est pas feinte. J'avais donc raison, elle est innocente.

« Pitié, ne faites pas l'innocente, Ruby vous a vu vous rendre à son cabinet hier soir. »

« Elle ment, je n'ai pas bougé de chez moi hier soir. Demandez donc à ma fille. »

« Elle nous a déjà confirmé cet alibi. » Emma admet en prenant place sur la table cette fois.

« Alors qu'est-ce que je fais là ? »

« Peut-être qu'elle vous couvre. »

« Après tous les efforts que j'ai fait pour changer, pour qu'Henry m'accorde à nouveau sa confiance, pourquoi je gacherais tout maintenant ? » Ma mère demande en s'adressant exclusivement à Emma. « Et surtout, si j'avais vraiment voulu tuer Archie, vous n'auriez jamais rien su. Le simple fait que vous ayez pu m'arrêter prouve que je n'y suis pour rien. »

« On vous a déjà attrapée une fois. » David lui rappelle. « Franchement Emma, qui doit-on croire selon toi, Ruby ou elle ? On lui a donné plusieurs occasions de changer, mais elle en a toujours été incapable. » Il poursuit sa tirade et je prend sur moi pour ne pas entrer là-dedans et lui refaire le portrait. « Alors je ne vois pas pourquoi cette fois ce serait différent. »



C'est à ce moment qu'Emma demande à son père de sortir. Apparemment, ils vont avoir besoin de s'entretenir en privé. C'est en tout cas ce que je pensais avant de les voir s'arrêter à côté de Blanche et moi.



« Qu'est-ce qu'on fait d'elle maintenant ? » Blanche demande immédiatement.

« On la coffre. »

« On peut pas la coffrer, c'est pas elle qui l'a tué. » Emma se fait la voix de la raison pour une fois, à la grande surprise de ses parents.

« Tu as cru à son histoire ? »

« Je l'ai observé quand on lui a annoncé la mort d'Archie, elle n'était pas au courant. »

« Emma, je sais que tu as envie de croire que pour Henry elle peut changer… » Blanche commence mais sa fille l'interrompt.

« Je crois ce que je vois. Et regardez-la. » Ils se tournent tous en direction de la vitre, de ma mère. « L'ancienne Regina aurait réduit ce bâtiment en cendres. Je vois une femme qui veut changer et qui aimerait que tout le monde s'en aperçoivent. Je connais ce regard. » Emma poursuit sans en démordre. « Je connais Regina. Et moi je la crois. »

« Écoute, ne le prends pas mal mais on la connaît beaucoup mieux que toi. »

« C'est peut-être ça le problème. Dans votre royaume, elle a été la Méchante Reine. Ici, elle n'est que Regina. Et en tant que shérif de la ville, je suis tenue de respecter la présomption d'innocence. »

« Alors, dis-nous ce que tu proposes. » Blanche semble plus ouverte au dialogue que son mari.

« On la relâche. »

« Emma… »

« On la relâche. » Emma insiste en coupant son père. « Ensuite, on mène notre enquête. »



Et ils semblent finalement tous d'accord sur ce point.



***



J'entends l'altercation avant même d'arriver devant chez moi. Je savais bien que j'aurais dû me téléporter au lieu de marcher, ça m'apprendra à vouloir être 'normale'. Du coup, je me retrouve à devoir courir afin d'entendre la fin de cette conversation. Mais je m'arrête net, à quelques pas de l'allée. Je sens une autre énergie magique. Je crois reconnaître Reul Ghorm, mais qu'est-ce que la Fée Bleue viendrait faire ici. 'Une arrestation !' je pense immédiatement. Alors, seulement là je me téléporte et j'attends pour agir. Placée juste derrière la Fée, elle ne me verra pas venir.



« Je veux au moins lui parler. » Ma mère exige d'une voix forte. « Il a le droit de connaître ma version des faits ! C'est mon fils ! »

« Non c'est le mien ! Et je ne vous laisserai plus jamais l'approcher. A vous de jouer ! »



Quand Emma en donne l'ordre, la Fée se prépare à l'action mais d'un geste de la main, je la fige instantanément.



« C'est donc comme ça qu'on procède à une arrestation de nos jours ? »

« Vous pensiez vraiment que j'allais me faire avoir une seconde fois ? » La voix de ma mère a changé, moins tremblante et beaucoup plus assurée. « Vous, vous ne m'empêcherez pas de voir mon fils ! » Elle lance un sort en direction d'Emma qui vole sur plusieurs mètres. Ses parents courent immédiatement vers elle alors que ma mère continue. « Vous pouvez remballer votre poussière de fée. » Elle s'approche d'Emma, ne s'arrêtant qu'à quelques centimètres de la blonde. « C'est le moment d'utiliser vos nouveaux pouvoirs magiques si vous voulez rester en vie. »

« Maman, non ! »

« Je n'en ai pas besoin. » Emma réplique sans hésiter. « J'ai déjà gagné. Henry croira jamais vos histoires bidons sur la mort d'Archie. »

« Maman, s'il te plaît. » J'avais presque réussi à obtenir l'abdication de ma mère avant qu'Emma ne décide d'en rajouter une couche.

« Vous pouvez dire ce que vous voulez, on sait tous qui vous êtes et on sait tous que vous ne changerez jamais. »



Et cette fois, ma mère a l'air plus blessée qu'en colère. Je sais qu'elle a renoncé avant même qu'elle ne disparaisse dans un nuage de fumée mauve. Je relâche finalement la Fée qui se tourne vers moi, les yeux ronds.



« Morrighan… »

« Vous feriez mieux de ne jamais en parler à qui que ce soit. » Je la menace entre mes dents. « Les Fées m'ont abandonné il y a bien longtemps, cette histoire ne vous concerne plus. Et vous ! » Je m'exclame en me tournant vers le Clan Charmant. « Qu'est-ce que c'est que cette histoire ? »

« Tu devrais te calmer, je pourrais toujours te coffrer pour obstruction à la justice. »

« Vous appelez ça de la justice ? » Je suis loin d'être calme et ses menaces ne me font pas peur. « Depuis quand vous appliquez la justice de Mist Haven, shérif ? Quelles preuves avez-vous de sa culpabilité ? »

« Je l'ai vu dans un… attrape-rêve. »

« La magie des souvenirs. » J'acquiesce, consciente de la puissance d'une telle preuve. « Je peux voir la séquence ? »

« Je n'ai pas… Pongo n'est pas ici alors… » Emma bafouille, semblant ne pas du tout connaître les possibilités qu'offre la magie.

« Je n'ai pas besoin du chien, juste de vous. » J'explique en faisant apparaître un attrape-rêve. « Concentrez-vous sur la scène et je la verrai. »



Comme elle s'applique à faire exactement ce que je lui ai demandé, l'attrape-rêve commence à briller. La lueur tremblote un peu avant que l'image ne se fixe et je la vois enfin. Du point de vue du chien, j'ai un assez bon aperçu du cabinet du Dr. Hopper. J'entends les coups frappés à la porte, je vois ma mère entrer sous les aboiements du chien puis elle s'attaque au Dr. Hopper et la séquence prend fin.



« On suppose qu'elle a pris son dossier dans le tiroir puis qu'elle est repartie. »

« Vous supposez ? » Je demande en relevant un sourcil. « Et moi, je suppose que le vrai coupable a pris l'apparence de ma mère pour vous tromper. Qu'en dites-vous ? »

« Qu'est-ce qui te fait dire que ce n'est pas Regina ? » Blanche intervient alors.

« Votre témoin. » Je répond simplement. « Pongo n'a jamais aboyé après ma mère hors, c'est le cas dans ce souvenir. J'en conclue que l'idée d'un doppelgänger n'est pas si surprenante. » Je m'approche d'Emma et parle à voix assez basse pour être sûre de ne pas être entendue par ses parents. « Je sais que vous aussi vous voulez croire en elle. Alors ne laissez pas tomber, pas encore. Elle est innocente, nous le savons toutes les deux. » Je commence à m'éloigner avant de lancer un dernier argument. « Et tout le monde ici a conscience des dégâts que peuvent causer de telles accusations. Nous savons également que les preuves ne pointent pas toujours dans la bonne direction. » J'ajoute avec un regard entendu à l'attention de Blanche. « Je vous laisse l'annoncer à Henry. »



***



J'observe de loin la petite troupe rassemblée pour l'enterrement. Mais ce n'est pas vraiment eux qui m'intéressent. Plutôt la figure seule à plusieurs mètres de là, cachée derrière les arbres. Je la rejoins en silence.



« Je ne pensais pas que tu viendrais. » Je dis à ma mère pour m'annoncer.

« Je ne l'ai pas tué. »

« Ça je le sais. Je serais toujours de ton côté. »

« Tu serais bien la seule. »

« Mais ce sera suffisant. » J'insiste en la forçant à me faire face. « Je te promets que je retrouverai qui a fait ça et qu'ils paieront. Je prouverai que tu es innocente. »

« Ils te font confiance, ne gâche pas ça pour moi. »

« Je crois bien que j'ai déjà brisé cette confiance après ma petite démonstration d'hier. »

« Qu'est-ce qu'il s'est passé exactement ? Tes yeux étaient… » Ma mère demande puis hésite.

« Effrayants ? »

« Noirs, complètement noirs et ta peau… » Elle hésite à nouveau mais se reprend avant que je ne puisse intervenir. « Elle commençait à prendre la même couleur. Qu'est-ce que c'était ? Je n'ai jamais vu une telle forme de magie. »

« Ça a toujours été en moi, depuis ma naissance. C'est pour ça que je me suis retrouvée à Avalon, que j'ai grandi là-bas. »

« Je croyais que cette île était un mythe. » Ma mère semble surprise.

« Non, loin de là et je n'y ai pas eu la vie facile. Je n'ai jamais pu contrôler cette forme de magie en moi alors je la réprime et je n'use que de magie simple. Libérer Morrighan serait une grave erreur, elle est trop puissante même pour le Ténébreux. J'ai fait une erreur en l'utilisant. »

« Mais tu m'as sauvé, et pour ça je te remercie. » Son sourire me rassure et je comprends qu'elle accepte cette partie de moi aussi. « Je ne devrais pas rester à découvert aussi longtemps, je retourne au caveau. »

« C'est donc là que tu te caches ? »

« Viens me voir dès que tu le veux mais n'oublies pas… »

« Je me téléporte directement là-bas. » J'acquiesce avec un sourire. « Tu ne m'as pas trouvé en trois ans de traque, je sais être discrète. »



***

 

« C’est juste ici. » J’indique à Blanche-Neige alors qu’on atteint les abords de notre campement.

« Vous vous cachez de qui exactement ? »

« Personne en particulier. Ils ont tous perdu leurs foyers et ce sont réunis ici. Je suis arrivée il y a quelques mois seulement. »

« Il y a un village en contrebas, il a été attaqué hier. Comment les soldats n’ont pas trouvé cet endroit ? »

« Ils auraient déjà fallu qu’il puisse quitter le village. » Je lui fais remarquer. « Ceux qui ne sont pas morts en ont été chassé. »

« C’était toi ? »

« Je… ce que tu as vu dans la forêt, c’était involontaire. »

« Mais c’était bien toi hier, sur la place du marché. Je me souviens maintenant. » Blanche-Neige finit par comprendre. « Tu as repoussé ces soldats, je reconnais ta cape. »

« N’importe qui d’autre aurait pu s’interposer. »

« Mais personne n’oserait, je n’ai jamais vu personne affronter ouvertement les soldats de la reine. Au village, ils t’appellent "la fée". »

« Je ne suis pas une fée. » Je réplique en posant le pied sur notre campement.

« Elaine ! » La voix d’Urien interrompt notre conversation et je me tourne vers lui. « Tes affaires n’étaient plus là, tout le monde a cru que tu étais partie pour toujours. »

« Non, je… enfin, je veux dire… »

« Elle était simplement venue me chercher. » Blanche-Neige intervient alors. « On devait se retrouver beaucoup plus loin normalement mais j’ai été plus rapide que prévu. »

« Oh, et vous êtes… ? »

« Urien, je te présente Mary. Elle va rester avec nous quelques temps si ça ne vous dérange pas. »

« Pas du tout. Bienvenue au campement des renégats Mary. »

 

 

***



Quand j'ai reçu cet appel d'Emma me demandant de la rejoindre à l'hôpital, je me suis immédiatement inquiétée mais, en arrivant là-bas, j'ai réalisé qu'elle m'appelait pour tout à fait autre chose.



« Je peux savoir ce qu'il se passe ici ? »

« Tellement de choses en même temps, je ne sais plus où donner de la tête. Entre l'étranger qui franchit la limite de Storybrooke en renversant Crochet, Belle qui perd la mémoire et le Dr. Frankenstein qui s'enfuit au lieu d'opérer… »

« Vous avez dit Crochet ? » Je demande, pensant ne jamais réentendre ce nom.

« Exactement, tu le connais ? »

« Malheureusement. Et vous, comment vous le connaissez ? »

« Il bossait avec Cora. » Emma m'explique alors. « Si Cora est ici, elle essaiera d'entrer en contact avec ta mère. Tu sais où elle est ? » J'hésite à lui répondre et je crois qu'elle le voit. « Je ne te demande pas de me le dire, simplement de transmettre un message. On sait qu'elle n'a pas tué Archie, il est vivant. »

« Vivant ? »

« C'est Cora qui l'avait enlevé, c'est elle qui est derrière ce coup monté. »

« Ok alors, je lui dirai. » J'accepte avec soulagement. « Mais vous nous devrez quelques excuses Mlle Swan. »



Je ne lui laisse pas le temps de répondre et je me téléporte directement dans le caveau de ma mère. Sauf qu'en arrivant là-bas, je remarque immédiatement que quelque chose ne va pas. Je ressens une énergie magique inconnue en plus de celle de ma mère. Quand j'arrive dans sa pièce secrète, je la vois en face d'une femme vêtue d'une robe bleue élégante.



« Maman ? » J'appelle, attirant leurs attentions sur moi. « Qu'est-ce qu'il se passe ? »

« Et qui est cette jeune fille ? Vient-elle seulement de te prendre pour sa mère ? » L'inconnue demande son regard alternant entre ma mère et moi.

« C'est le cas. Morgane, s'il-te-plaît, reste en dehors de ça. »

« Non ! » Je refuse immédiatement, même si je vois bien que ma mère préférerait que je ne m'en mêle pas. « Cora je suppose ? J'ai beaucoup entendu parler de vous. »


L'inconnue ne répond pas et s'approche de moi avec un sourire froid. Son regard sombre et fixe semble scruter au plus profond de mon âme. Je sais qu'elle y cherche la peur alors je m'applique à ne pas lui donner satisfaction. Alors qu'elle est juste devant moi, elle emploie la magie pour me saisir à la gorge et coller mon dos au mur le plus proche. La pression n'est pas suffisante pour m'empêcher de respirer, encore une fois ce n'est qu'un jeu pour me faire peur, et je résiste. Ma magie la pousse à reculer de quelques pas et relâcher son emprise sur moi.



« Impressionnant. » Cora susurre, son expression passant du choc à l'avidité la plus pure. « Une telle puissance à un si jeune âge. Dis-moi Regina, où l'as-tu trouvé ? »

« C'est elle qui m'a trouvé. » Ma mère répond en se plaçant entre Cora et moi. « Et tu ne lui feras aucun mal. »

« Enfin Regina, ne sois pas stupide. Je suis peut-être puissante mais même moi je n'irai pas me frotter à une déesse. »

« Une quoi ? » Ma mère se tourne vers moi, attendant une explication.

« Elle n'est considérée ainsi que dans certains royaumes. Les autres la voient telle qu'elle est : une force maléfique et destructrice. »

« Une tel don et si peu de reconnaissance. » Le ton de Cora s'est considérablement refroidi. « Et dire qu'il aura fallu attendre des siècles pour un tel gâchis. »

« On n'a pas le temps pour ça. » Ma mère intervient d'une voix forte. « Tu vas nous suivre jusqu'au bureau du shérif sans faire d'histoire ou c'est elle qui t'y forcera. »

« Très bien dans ce cas, en route. »



***



Je n'ai pas écouté un traître mot de ce que Cora a raconté à ma mère dans la voiture, mais j'aurais peut-être dû parce que ça a été suffisant pour qu'elle change d'avis. En tout cas, le lendemain matin, elle a l'air dans des dispositions bien différentes de la veille.



« Qu'est-ce qu'il se passe ? »

« Henry est parti avec Emma, ils ont quittés la ville. » Ma mère m'explique et sa colère est plus qu'évidente. « Ils semblent tous persuadés que je n'ai aucune légitimité sur lui. »

« Pour l'instant. » Je cherche à la rassurer. « Ça paraît improbable, mais je te garantie que ça changera un jour. C'est votre fils. »

« Tu savais qu'elle a de la magie ? » Ma mère me demande après quelques secondes de silence.

« Qui ça ? »

« Emma. »

« Oh, hum… oui, je suis capable de sentir ce genre de choses. » J'admets finalement. « Je pensais que tu t'en doutais aussi, après tout c'est la Sauveuse. Comment crois-tu qu'elle a pu t'aider avec le chapeau ? Ta magie était encore instable à ce moment, c'était elle. »

« Je croyais… »

« Quoi ? » Je l'encourage quand je sens qu'elle hésite.

« C'est idiot, laisse tomber. »

« Pas besoin d'en dire plus, je crois que j'ai compris. »



***

 

La nuit commence à tomber quand je vais prendre mon tour de garde. Je reste concentrée sur ma tache même si elle est un peu inutile dans les faits. J’ai toujours mon sort de protection lancé tout autour du campement, au moindre intrus je devrais le sentir venir. J’entends également les bruits de pas s’approchant derrière moi. Je ne bouge pas et attends que la personne se fasse entendre.

 

« Ils ont tous confiance en toi, tu sais ? » Je reconnais facilement Blanche-Neige, même si je ne la connais que depuis quelques heures et que je ne me retourne pas pour le confirmer. « Ils attendaient un espoir et tu es arrivée. »

« Ce que j’ai en moi pourrait s’avérer plus dangereux que la Méchante Reine. »

« Mais tu es plus forte que ça, je le sais. »

« Et comment ? Tu as réussi à me comprendre en quelques heures ? »

« Disons que c’est un don que j’ai. »

« Je ne suis un espoir pour personne. » Je réplique entre mes dents mais la princesse n’en démord pas.

« Si, au contraire. J’étais là hier et tu m’as redonné espoir. »

« Et qu’est-ce que je suis sensée faire exactement ? Attaquer chaque bataillon de soldats noirs que je rencontre sur mon chemin ? »

« Commence donc pas compliquer les affaires de la reine pour l’instant. » Blanche me propose alors. « Protège les gens de cette forêt et ça suffira. »

« Moi, une rebelle ? »

« La rebelle La Fay, Protectrice des Forêts du Sud ! Ça sonne bien non ? »

« J’ai eu des noms bien pire. » Je lui accorde, toujours sans lui faire face.

« Penses-y, on ne te demande rien de plus. »

 

***



L'agitation sur la rue principale de Storybrooke a évidemment attiré mon attention. Je veux dire, c'est un géant ! Plutôt dur de le rater dans de telles circonstances. De loin, j'aperçois Mary-Margaret et David alors je me téléporte auprès d'eux pour m'enquérir de la situation.



« Je peux savoir ce qu'il se passe ? »

« Ah, Morgane. tu tombes à pic ! » David semble plutôt soulagé de me voir.

« Pourquoi il y a un géant qui se balade à Storybrooke ? »

« C'est Cora qui l'a amenée. Cela dit, il était beaucoup plus petit quand on l'a trouvé. »

« Ok, et qu'est-ce qu'il veut ? » J'insiste puisqu'il n'a pas l'air de comprendre que je veux toute l'histoire.

« Apparemment il n'aime pas trop les humains. Mon frère lui a causé du tort de ce que j'ai compris. »

« Tu avais un frère ? »

« Oui, le Prince James. »

« Il faut vraiment que je lise le bouquin d'Henry. » Je marmonne avant de jeter un œil en direction du géant. « Je passe à l'offensive. »

« Attends, Morgane ! »



Mais je ne l'écoute déjà plus et je vais me planter en plein milieu de la rue. Une fois que j'ai attiré son attention sur moi, il ignore totalement le reste des gens autour. C'est quand il me charge que je comprend, je ne suis pas prête pour un combat de cette envergure. Littéralement. Mais comme je suis petite et rapide, je parviens à l'éviter pendant un temps. Je me doute qu'il a mangé un des champignons qui sont légion au Pays des Merveilles, et je connais vaguement cette magie. Je sais qu'elle est temporaire et j'espérais pouvoir occuper le géant assez longtemps pour que la magie s'estompe.

Quand je me prends un coup et que je vole plusieurs mètres en arrière, je comprends que c'était une tactique assez bancale. J'ai très mal, l'atterrissage a été très brutal. Le géant est toujours concentré sur moi quand je commence à faire appel à la magie de Morrighan. Ma vision change, je sais que mes yeux sont passés au noir et ça semble calmer le géant. Il s'arrête à deux pas de moi et s'accroupit, approchant son énorme tête de moi.



« Je ne vous imaginais pas aussi petite, Déesse de la Guerre. »

« Déesse de la quoi maintenant ? Vous ne croyez pas que j'ai assez de titres ? »

« Vous êtes Morrighan. Enfin, sa nouvelle forme. » Il s'explique et, si ma tête ne tournait pas déjà autant, je crois que ça aurait commencé là.

« Oh non, encore un. »



C'est à ce moment que la magie du champignon s'efface complètement mais, quand le nuage de fumée enveloppe le géant, je sens la terre trembler sous moi. Je suis trop faible pour réagir et je serais sans doute tomber dans l'immense trou qui vient d'apparaître si David ne m'avait pas tiré de là au dernier instant.



« Le géant… » Je marmonne vaguement.

« Il est sans doute là-dedans. Je vais voir. » David propose sans hésiter.

« Tu arriverais à te téléporter ? » Blanche me demande une fois qu'il s'est éloigné.

« Je crois oui. »

« Alors tu devrais rentrer chez toi et te reposer. Tu t'es pris un sacré coup. »

« C'est une bonne idée, oui. »



Il me faut plusieurs tentatives avant d'y parvenir mais j'arrive finalement à me téléporter jusqu'à la maison. C'est très dur de tenir debout et j'ai toujours le souffle un peu court après le choc de l'atterrissage. Heureusement pour moi  -ou malheureusement, ça dépendra du point de vue-  ma mère est dans les parages quand j'apparais et elle se précipite vers moi dès qu'elle me voit.



« Morgane, qu'est-ce que tu as ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? »

« C'est de ma faute, je me suis mise sur la route d'un géant. »

« Tu as quoi ? » Je me rends compte que je suis loin de l'avoir rassurée.

« Il mettait une sacré pagaille au centre ville et j'ai essayé de le retenir le temps que… »

« Cet idiot était censé s'en prendre à Charmant ! » Quand elle dit ça, je comprends une chose qui m'avait échappé jusque là.

« C'est toi qui lui a donné le champignon. »

« Quel champignon ? »

« Ne fais pas l'innocente maman ! Je suis blessée et c'est de ta faute ! » J'avoue, j'essaye de la culpabiliser là mais je sens l'influence de Cora dans ses actions et ça m'énerve, sérieusement.

« Ce n'est pas ce que je voulais ! » Elle tente de se défendre.

« Non, mais c'est ce qui arrive quand tu es consciente de la malhonnêteté de tes actes mais que tu agis quand même ! Alors paies le prix de tes actes maintenant. »

« Morgane, je suis désolée. S'il te plaît, ne m'abandonne pas. »

« Je… » Je cherche une réponse mais ma vue se trouble et ça me perturbe. « Maman… » J'essaye de lui expliquer mon problème, j'essaye de demander son aide.

« Morgane ! » C'est la dernière chose que j'entends avant de m'évanouir.



***



« Où sont mes parents ? » Je demande un soir à ma marraine alors qu'elle met fin à mon entraînement quotidien.

« Tu n'as pas de parents. »Elle me répond sèchement et je sais déjà que j'ai fait une erreur en lui posant cette question. « Tes parents t'ont abandonnée dans la forêt, seule et sans défense et tout le monde le sait, les nourrissons qu'on oublie dans les forêts me reviennent. »Elle s'approche de moi et prend mon visage entre ses mains. « Oublie tes parents ma chère, tu es à moi. »

« Pourquoi ils m'ont abandonnée ? »

« Sans doute parce qu'ils ne t'aimaient pas, comme tous les autres. »

« Alors pourquoi vous dites que je suis unique si mon histoire est la même que les autres filles d’ici ? »J'insiste pour savoir, parce qu'on est définitivement trop curieux quand on a neuf ans. « Pourquoi vous n’entraînez que moi ? »

« Oh mon enfant, je n'attendais que toi. Grâce à toi, je sais que mon plan fonctionnera. Grâce à toi, je pourrais tous les sauver. »Je me sentirais presque importante après ces paroles mais ma marraine me ramène bientôt à la réalité. « Mais pour ça il faudrait déjà que tu saches lancer un sort simple. Demain, tu travailleras deux fois plus. »



***



J'observe mon reflet dans l'eau calme du lac. Ce que je vois me terrifie. Mes yeux sont entièrement noirs ainsi qu'une partie de la peau autour, je suis beaucoup plus pâle que d'habitude et ma vision est différente. Mais je le sais, c'est ça le pouvoir dont parlait ma marraine. C'est à ce moment que je sens une présence à mes côtés et, même si je ne l'ai vu qu'une fois, je le reconnais aisément.



« Dites-moi Merlin, le saviez-vous ? »

« J'avais connaissance de ton don, en effet. » Il admet d'une voix douce.

« Vous parlez de don mais vous avez vu ce que j'ai fait ? »Je réplique en montrant la douzaine de cadavres autour de moi. « Ils m'ont attaqué et tout ce que je sais c'est qu'ils sont morts maintenant. Je n'ai rien fait, c'était ce… ce… monstre ! »

« Tu n'es pas un monstre Morgane La Fay. »

« Je m'appelle Elaine ! »



Apparemment, la peur n'est pas le seul sentiment qui déclenche la fureur de cette magie. Si elle cause autant de ravages à chaque fois que je l'utilise, je n'en veux pas.



« Pourquoi m'avoir fait quitter Avalon si vous le saviez ? »

« Il fallait que tu partes pour ta propre sécurité. »

« Là-bas au moins je ne pouvais blesser personne ! »Je m'exclame sans me départir de ma colère. « Pourquoi vous vous servez tous de moi ? Je n'ai que onze ans, je ne vois pas en quoi je pourrais vous être utile. »

« Il fallait que tu partes pour accomplir ta destinée. »Merlin se décide finalement à m'expliquer de son ton énigmatique. « Avalon t'en empêchait. C'est à Mist Haven que ton destin te rattrapera. Je t'ai proposé de t'échapper et tu as fait le choix de m'écouter, pourquoi ? »

« Je n'aimais pas cet endroit. »

« Je sais. Là où je t'envoie, ta vie sera bien meilleure. »Il m'assure en s'approchant un peu plus maintenant que je suis enfin calmée.

« Vous promettez ? »

« Oui. »

« Et mes parents, ils m'ont vraiment abandonné comme elle a dit ? »

« Ça je ne peux pas te le révéler. C'est ta quête pas la mienne. »



***



Je me réveille brusquement après ce rêve. Souvenir, je me corrige mentalement. Ce souvenir donc, qui m'est revenu au pire moment. Je n'avais pas besoin de penser à elle ni à mon évasion. Surtout en ce moment quand tous ces problèmes avec ma mère… Ma mère ! Où est-elle ? Quand je tente de me relever, une main sur mon épaule m'en empêche.



« Oh Morgane, doucement. » Je me calme dès que je reconnais la voix.

« Ruby ? Qu'est-ce que tu fais là ? » Je lui demande en regardant autour de moi, c'est là que je réalise que je ne suis pas chez moi. « Non en fait, qu'est-ce que je fais là ? On est au B&B, non ? La dernière fois que j'étais consciente, j'étais chez ma mère. »

« C'est elle qui t'a amené ici. Elle a dit que vous vous disputiez quand tu t'es évanouie et elle pensait que tu ne voudrais plus la voir à ton réveil. »

« Eh bien elle avait tort. Il faut que je la retrouve avant que Cora… »

« Attends, Morgane. » Ruby me retient une nouvelle fois. « D'abord il faut que je te dise quelque chose. » Elle semble hésiter mais le fait que je reste assise sans bouger doit la convaincre de continuer d'une certaine façon. « Ta mère complote avec Cora. Elles ont prévu de se servir du Ténébreux pour tuer tous ceux qui s'opposeront à elles. »

« Quoi ? Mais… J'ai dormi combien de temps exactement ? »

« Plusieurs jours. J'étais terriblement inquiète. »

« Qu'est-ce que j'ai raté d'autre ? » Je m'enquis précipitamment en ignorant les battements effrénés de mon cœur. « Ruby, dis-moi ! »

« Le Ténébreux a été blessé quand il était à New-York. Par le Capitaine Crochet, je crois. »

« Cette enflure. » Je marmonne entre mes dents.

« Ils ont réussi à revenir à temps mais Gold est toujours affaibli et on pense que Cora veut en profiter pour récupérer ses pouvoirs. »

« Et ma mère l'aide. »

« C'est ça. » Ruby confirme d'une petite voix. « Je suis désolée. »

« Tu sais où ils sont ? Je dois absolument la voir, je sais que je peux la raisonner. »

« Tu ne devrais pas bouger, tu viens à peine de… »

« Je t'ai demandé où ils étaient, Ruby. » Je l'interromps d'une voix ferme. « Tu le sais alors dis-moi. »

« Ils se sont réfugiés dans la boutique de Gold. Elles frapperont sans doute là-bas. »



Je n'ajoute rien et me contente de disparaître dans un nuage de fumée bleue. Je réapparais juste devant la boutique du Ténébreux et je sens déjà la présence d'une barrière magique. Je vois également David faisant les cent pas juste devant la porte. Il semble assez tendu.



« Tout va bien Charmant ? » Je demande dès que je suis près de lui.

« Mary-Margaret a disparu et je crois savoir où elle est mais… j'espère me tromper. »

« Dis m'en plus. »

« Elle est allée trouver un moyen de tuer Cora et sauver le Ténébreux. Il existe une bougie qui prend une vie pour en sauver une autre et je crois qu'elle va s'en servir sur le cœur de Cora. »

« Vous avez son cœur ? » Je demande, surprise de leur exploit.

« Non, hum… Cora s'est arraché le cœur il y a bien longtemps. Il est dans le caveau de ta mère. »

« C'est donc là que se trouve Blanche ? » Je comprends facilement et il acquiesce en confirmation. « Je peux nous y emmener rapidement si tu veux. »

« S'il te plaît. »

« En route alors. »



Et je disparais immédiatement après en emmenant David avec moi. Je suppose qu'il parlera plus facilement à Blanche que moi. Peut-être que je peux empêcher un meurtre d'être commis. Avec un peu de chance, Blanche n'ira pas corrompre son âme et ma mère ne perdra pas la sienne. Non pas que je cautionne leur plan mais je doute que cette affaire aide à régler l'histoire qu'il y a entre Blanche-Neige et la Méchante Reine.

Quand j'arrive dans le caveau en compagnie de David, il n'y a personne.



« Où est-elle ? »

« En haut je crois. » Je réponds. « Je sens une présence à l'entrée. »



Il se précipite pour aller voir et je me lance à sa poursuite. On retrouve Mary-Margaret assise sur les petites marches qui mènent à la porte. Elle se tient la tête entre les mains et pleure, semblant complètement abattue.



« Tu avais raison. » Blanche murmure. « Je ne suis pas cette personne-là. »



Je comprend qu'elle l'a fait, qu'elle a maudit le cœur. Mais elle me dit ensuite avoir remis le cœur à ma mère et l'avoir convaincu de le remettre à sa place, elle-même.



« Tu as poussé Regina à tuer sa propre mère ? » Je demande à voix haute, juste pour me rendre compte de la situation.

« Je suis désolée. »



Je me téléporte encore une fois, espérant que ça soit la dernière aujourd'hui. Je n'ai pas encore récupéré l'intégralité de mes pouvoirs magiques. J'ai beau faire au plus vite, j'arrive trop tard. Quand j'entre en trombe dans la boutique de Gold, le cœur a déjà retrouvé sa place dans la poitrine de Cora et cette dernière agonise. Je m'approche quand même, prenant place à côté de ma mère.

 

« Mère ! Mère ? Qu'est-ce qui t'arrive ? »

« Je devais te dire... » Le murmure de Cora est à peine perceptible mais je comprends chaque mot et, même s'ils sont adressés à ma mère, j'écoute avec attention. « Elle était... en vie... quand je l'ai... laissé... dans la... forêt. »

« Quoi ? De quoi parle-t-elle ? » Je demande en me tournant vers ma mère qui n'a pas l'air de comprendre plus que moi. Sans attendre, Cora poursuit.

« Retrouve... la... Retrouve... ta fille… »


Une fille ? Regina a une fille ? Autre que moi ? Cette pensée me trouble plus que de raison. Certainement ma mère n'aura pas la tête à ça avant un moment. Sa propre mère vient de mourir dans ses bras, elle ne va pas se lancer dans une telle quête, pas vrai ?

 

« Qu'est-ce qui se passe ? » Ma mère demande à Gold qui se relève, apparemment en pleine forme.

« Vous ne devriez pas être mort ? » Je lui demande en me plantant devant lui.

« Non, mais toi tu devrais aller consoler ta mère. »

« Je sais que vous êtes derrière tout ça et vous ne vous en sortirez pas aussi facilement. »

« C'était toi ! » Ma mère intervient alors, semblant avoir entendu toute la conversation. « Tout est de ta faute, tu as volé sa vie ! Tu lui as jeté un de tes horribles sorts. »

« Je n'ai rien fait du tout. » Gold affirme et je réalise qu'il n'a pas tout à fait tort. En tout cas, il n'est pas le seul à blâmer et justement…

« Regina, ne faites pas ça ! » On entend Mary-Margaret avant de la voir arriver en courant.

« C'est vous qui l'avez tuée. » Ma mère comprend à son tour et j'entends déjà venir le retour de la Méchante Reine.



***

 

Je reste là, à regarder mon reflet dans l’eau courante de la rivière. Il est tard et la lune brille haut dans le ciel, je suis donc seule. Les paroles de la princesse Blanche-Neige tournent en boucle dans ma tête. Moi, une lueur d’espoir ? On parle d’une orpheline, une gamine qu’on a abandonné dans la forêt. Si je ne méritais même pas l’amour de ma propre famille, pourquoi aurais-je droit à la confiance de ces gens ?

J’en veux à Merlin en cet instant. Mon destin me rattrapera à Mist Haven, sérieusement ? Je n’ai pas l’impression d’avoir une destinée vraiment incroyable, à moins que finir avec sa tête sur une pique compte comme un destin qui vaillent la peine de tout quitter.

J’entends un corbeau croasser quelque part au-dessus de ma tête et je relève les yeux, intriguée. Il fait nuit, cet animal devrait… je ne sais pas, dormir à tout hasard ? Mais l’oiseau est posé sur une branche basse d’un arbre proche, le regard tourné vers moi. En fait, c’est comme s’il me regardait, moi précisément et volontairement. Mais c’est probablement mon imagination, pas vrai ? Aucun oiseau n’a l’intelligence suffisante pour observer un Être Humain avec autant de… de concentration.

 

« Qu’est-ce que tu veux ? » Je demande, m’attendant à le voir s’envoler immédiatement mais il n’en est rien. « Rentre te coucher, retourne auprès de ta famille. »

« J’ai rencontré une fille qui parlait aux oiseaux, elle a très mal tourné. »

 

Je me tourne brusquement vers l’endroit d’où la voix provient. Je la reconnais immédiatement, même si je ne l’ai vu qu’une seule fois. Ça ne peut être qu’elle, la Méchante Reine.

 

« Vous ici ? Sans garde rapprochée ? »

« Je n’ai pas besoin d’eux pour me défendre, ma magie est plus puissante que cent hommes armés. » Elle me fait remarquer en s’approchant de moi. « Mais toi, tu viens de ce campement de renégats que je ne peux apparemment pas voir pour l’instant. Dis-moi, qui était cette femme qui a attaqué mes gardes hier ? »

« Je ne vais pas vous donner cette satisfaction, vous la tueriez. »

« Très juste. Mais si tu ne dis rien, c’est toi que je tue. » Son ton est presque mielleux, comme si cette perspective l’enchantait particulièrement.

« Je n’ai pas peur de vous. »

« Peut-être que tu devrais. »

« Et peut-être qu’il était temps que quelqu’un se dresse contre vous et vos hommes. »

« Petite insolente ! Tu t’adresses à une reine, parle avec un peu plus de respect ! »

« Le respect se gagne votre majesté. » Je réplique et c’est à ce moment qu’elle s’approche de moi d’un pas rapide.

 

Elle s’arrête à quelques centimètres de moi et je ne vois que ses yeux brillants dans l’obscurité. Elle est juste devant moi et sa main se porte à mon cœur. Sans que je ne comprenne ce qu’il se passe, je ressens une énorme douleur au niveau de ma poitrine. Soudain, je vois dans sa main un objet rouge et lumineux. Est-ce que c’est… ?

 

« Joli. Regardez-moi ça, un petit cœur aussi pur que celui d’un enfant. »

« Est-ce que c’est mon… ? »

« Oh oui jeune fille, c’est ton cœur, et si tu ne veux pas que je l’écrase… » Pour appuyer ses propos, elle applique une légère pression sur l’organe battant dans sa main et la douleur se repend dans tout mon corps. « Tu vas répondre à mes questions. »

« Elaine ! »

 

Beaucoup de choses se passent en même temps. Après le cri d’Urien, je me tourne dans sa direction pour le prévenir de ne pas plus s’approcher. Ils sont trois en fait. Accolon est armé de son arc et tire une flèche au même moment où Urien et Menassen s’approchent avec leurs épées à la main. La Reine s’est tourné vers eux et je sais déjà qu’ils sont en danger mais je n’ai pas le temps d’intervenir. Le corbeau de tout à l’heure nous fond dessus, forçant la Reine à reculer de quelques pas et a relâché mon cœur.

 

« Je vous garde à l’œil, toi et ta petite bande de renégats. » La Reine s’exclame avant de disparaître dans un nuage de fumée violette.

« Elaine, tu vas bien ? » Urien me demande en s’arrêtant à côté de moi.

« Mieux maintenant qu’elle est partie. »

 

Je me penche pour ramasser mon cœur, me demandant comment je vais faire pour le remettre à sa place. Je n’ai même pas bien vu comment elle a fait pour le sortir de ma poitrine, j’ignorais même que c’était possible.

 

« Elle fait ça tout le temps. » Urien me fait remarquer en prenant mon cœur entre ses mains. « Je l’ai déjà vu les remettre en place aussi. Il suffit de… »

« Juste, fais-le. » Je l’interromps précipitamment, impatiente de revoir l’organe à sa place. « Je sens qu’il me manque quelque chose. »

« D’accord, je… ne bouge surtout pas. »

 

Il n’hésite pas longtemps avant de pousser mon cœur, lequel retrouve gentiment sa place dans ma poitrine. J’ai enfin l’impression de pouvoir respirer.

 

« Alors, qu’est-ce qu’elle voulait ? »

« Elle me cherchait. »

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? » Menassen demande en nous rejoignant.

« Maintenant ? On se rebelle. »

 

***



Je ne voulais pas avoir cette conversation maintenant, pas tant que ma mère était encore en deuil. Mais elle semble aller beaucoup mieux à présent puisqu'elle s'est déjà mis en tête de se venger en tentant de tuer Blanche-Neige. Encore une fois. J'ai besoin de réponses et je ne veux plus les attendre.

« On peut parler ? » Je demande alors que ma mère finit de préparer le repas de ce soir.

« Bien sûr. Quelque chose te tracasse ? »

« On peut dire ça. » J'hésite une seconde, attirant son attention sur moi. « Tu as une fille. » Je dis dans un souffle.

« Je te vois tous les jours Morgane, je ne suis pas prête de l'oublier. » Regina me répond, toujours concentrée sur la préparation du repas.

« Maman… »

« Je sais qu'on a eu quelques différents ces derniers jours mais je suis certaine qu'on peut… »
« Regina ! »
Je l’interpelle d'une voix plus forte. « Je ne parlais pas de moi. »

« Morgane… »

« Dis-moi la vérité, j'ai besoin de savoir. »

« Savoir quoi ? » Regina demande d'une voix faible, détournant enfin son regard de sa préparation.

« Tu sais où elle est ? Est ce que tu veux la retrouver ? Tu vas partir à sa recherche ? Et si jamais… ? »

« Morgane, calme toi. » C'est uniquement quand ma mère s'approche de moi que je remarque les larmes qui coulent le long de mes joues.

« Est ce que… Ça veut dire que tu n'as plus besoin de moi ? » Ma voix tremble et me fait défaut. « Si tu l'as déjà elle, qu'est-ce que je deviens alors ? Tu n'auras plus besoin de moi et… »

« C'est faux. Je ne t'abandonnerai pas, jamais. »

« C'est pour ça que Daniel connaissait mon nom. » Je comprends enfin. « Quand j'ai dit que j'étais ta fille, il a semblé me reconnaître mais ce n'était pas moi qu'il voyait, c'était elle. Et tu m'as donné son nom… »

« Morgane… »

« Dis-moi la vérité ! » J'exige d'une voix plus forte. « C'est son nom que tu m'as donné, admets-le »

« Oui. » Ma mère confirme alors.

« Je n'étais qu'une remplaçante. » Cette réalisation bouleverse tout mon monde et j'en perd mon souffle.

« Morgane, non… »

« Arrête avec ce nom ! » J'exige d'une voix forte et je sens ma magie palpiter. « Je ne veux plus l'entendre. » Je dis avec finalité alors que je disparais au milieu de la fumée.



***



J’ignore depuis combien de temps je suis enfermée dans ce cachot. Je me doute que la Reine m’a ramené jusqu’à son château, sûrement pour une exécution publique. Elle a réussi à attraper Elaine La Fay, la rebelle la plus recherchée après Blanche-Neige. Évidemment qu’elle va s’assurer que tout le monde le sache. Aujourd’hui, la Reine a gagné.

Mes pensées s’assombrissent à mesure que les heures défilent. J’ai vu le soleil se coucher et maintenant l’aube pointe déjà. Je ne sais pas combien de temps elle a prévu de me garder ici, assez pour que je perde tout espoir certainement. Comme s’il m’en restait, de l’espoir. Je n’ai plus rien. Elle a déjà détruit mon village, le seul endroit s’étant jamais apparenté à une maison pour moi. Elle a également tué mon meilleur ami, l’homme que j’allais épouser, celui-là même qui m’avait offert un foyer alors que je n’avais rien.

Des pas se font finalement entendre depuis le bout du couloir, le bruit des talons hauts résonne contre les parois humides de la prison. Je sais qu’il s’agit de la Reine, sûrement venue me narguer encore un peu avant de m’achever définitivement. Comme prévu, elle s’arrête juste devant ma cellule. Dans son attirail de cuir noir, elle est impressionnante je dois bien l’admettre. Le fait que je ne puisse pas utiliser ma magie dans cet endroit me rend d’autant plus nerveuse. Elle peut faire de moi ce qu'elle veut. 



« Tu ignores sans doute pourquoi tu te trouves ici. »Elle commence alors, un sourire carnassier sur le visage.

« Vous allez m'exécuter. Publiquement je suppose, histoire d’avertir le petit peuple. »

« Tant de pensées négatives, à ton âge ? C’est néfaste. »

« Qu’est-ce que vous attendez de moi exactement ? »

« De la peur. »La Reine m’explique alors. « Je veux ta peur et ta haine. Que tu me craigne et que tu me détestes. »

« Ça n’arrivera pas. Je n’ai pas peur de vous, j’ai rencontré des sorcières autrement plus puissantes et effrayantes que vous. Quant à vous haïr… »Je laisse échapper un petit soupir, lassée de cet entretien stérile. « Je ne vous hais pas. Au contraire, je me demande combien de peines vous avez connues avant d’avoir décidé de faire souffrir les autres plus encore. »

« Écoute-moi, petite. »Le ton de la Reine, jusqu’à présent suave, se fait beaucoup plus froid. J’ai sûrement touché un point sensible. « J’aime être la cause de leurs peines et de leurs souffrances. Rien de plus rien de moins. »Je sais qu’elle ment en disant cela, mais je me garde bien de le lui faire remarquer. « En ce qui te concerne, ta mort sera bien inutile. Demain, à la même heure, j’aurais lancé ma malédiction et le petit peuple ne se souviendra de rien. Alors, au lieu de gâcher une vie pour une leçon inutile, j’ai décidé de te garder. »

« Me garder ? »

« Oui. Un peu comme un animal de compagnie. Dans ce nouveau monde où je nous envoie, je te forcerai à m’aimer. »

« Bonne chance avec ça. »Je marmonne, espérant qu’elle ne m’entende pas.

« Une éternité avec moi, voilà ta punition. »La Reine finit avec une voix ferme. « J’espère que tu apprécieras l’attention. »



Avec un dernier sourire dégoulinant de méchanceté, elle s’éloigne, me laissant à nouveau seule avec mes pensées. Une éternité avec la Reine, je dois être l’âme la plus malchanceuse de Mist Haven.



***



Je me suis isolée en plein milieu de la forêt et j'ai pleuré. J'ai pleuré si longtemps que j'en ai perdu la notion du temps mais j'ai vu les étoiles faire place au soleil. Mes larmes se sont taries et ma gorge s'est asséchée. Après autant de temps passée seule, je ne m'attendais pas à entendre des bruits de pas se rapprochant.



« Alors c'est là que tu te caches. » Je sais déjà qu'il s'agit de Ruby, je sais aussi qu'elle est déjà passée par là aujourd'hui.

« Ne fais pas l'innocente, je t'ai repéré tout à l'heure. » Je réponds d'une voix rendue rauque par mes sanglots.

« Bien alors tu sauras que quelqu'un ici s'inquiète pour toi. » Elle vient s'installer à côté de moi et tourne son regard vers la ville qui s'étend sous nos yeux. « Et je ne parlais pas que de moi tu sais ? C'est ta mère qui m'a demandé de garder un œil sur toi. »

« Ma mère, tu parles. Je ne suis qu'un pansement à ses yeux. »

« De quoi est-ce que tu parles ? »

« Elle a une fille ! » Je sens la colère et la déception remontées en moi alors je décide d'ouvrir les vannes et de laisser toute la vérité éclater. « Juste avant d'épouser le roi, Regina a accouché de l'enfant de son amant, Daniel. Ce bébé, Cora le lui a enlevé et jusqu'à la semaine dernière, Regina croyait cette fille morte. Maintenant elle sait. La blessure est guérie. Elle n'a plus qu'à partir à sa recherche et jeter le pansement. »

« Morgane, arrête. » Ruby essaie de me calmer.

« Et arrête avec ce nom ! C'est le sien, pas le mien ! » Je laisse exploser toute ma colère et un peu de magie aussi je crois. « Regina m'a capturé juste avant de lancer son Sort Noir. Elle est venue elle-même me le dire : je n'étais qu'un animal de compagnie pour la distraire pendant la malédiction. » J'explique alors, espérant qu'elle comprenne. « Et j'ai fait l'erreur de croire qu'elle a pu être sincère, je pensais avoir enfin une mère ! Je sais qu'elle a fait des choses plus que réprimandables par le passé, certaines de ces choses elle les a faites sur moi. Mais elle n'a pas été comme ça pendant la malédiction et pourtant elle aurait pu. Personne n'aurait jamais rien su, tout le monde me croyait déjà morte quand ils ont vu la Reine m'emmener. Et ici à Storybrooke, il n'y avait plus personne pour lui résister. » Je ne sais pas où je trouve la force de produire plus de larmes mais elles coulent inlassablement sur mes joues. « Je veux croire en elle parce que je sais qu'elle peut être une bonne personne. Elle l'a été avec moi pendant vingt-huit ans. Elle m'a aimé et elle a été ma mère. Je me rend compte maintenant que tout ça était un mensonge. »

« Moi je ne crois pas. » Cette fois, Ruby n'hésite pas à m'interrompre. « J'ai vu Regina à son pire et je l'ai affronté. Je me souviens aussi du début de cette malédiction, quand vous veniez toutes les deux prendre votre petit-déjeuner chez Granny. » Elle me rappelle des souvenirs heureux et je vois clair dans son jeu mais comme elle parvient à me calmer je ne dis rien. « Je ne m'en rendais pas encore compte à ce moment-là, mais les choses entre vous ont changé au fil des jours. Son regard a changé, elle a appris à t'aimer. Alors oui, peut-être qu'elle t'a donné le prénom qu'elle avait choisi pour l'enfant qu'elle a perdu, mais ça ne veut pas dire qu'elle ne t'aime pas. Ni même qu'elle partira à sa recherche. Tu lui as au moins demandé ce qu'elle comptait faire ? »

« Je ne lui ai pas laissé le temps de répondre. » J'admet honteusement. « Je me suis énervée dès que j'ai compris et je suis partie. »

« C'est toi sa fille, tu l'as été pendant vingt-huit ans. Et n'oublie pas qu'elle t'a choisi, elle a choisi de t'aimer et d'être ta mère. »

« Tu as probablement raison. »

« Je sais que ce n'est pas vraiment le bon moment… » Ruby commence d'une voix plus hésitante après plusieurs minutes de silence. « Mais je crois qu'Henry est sur le point de s'attirer des problèmes. »

« Quel genre de problème ? » Je demande, oubliant mes tourments l'espace d'un instant. « Et pourquoi ne pas prévenir Emma ? »

« Parce qu'il a parlé de détruire la magie et je doute qu'Emma puisse faire quoi que ce soit. »

« Pourquoi il essayerait de détruire la magie ? C'est insensé ! »

« Ta mère en a après Blanche et je doute que votre conversation d'hier soir l'ait mise dans de meilleures dispositions. » Ruby tente une explication.

« Tu crois que je l'ai involontairement poussé à mettre son plan à exécution ? »

« Peut-être bien. »

« Et Henry veut détruire la magie pour l'en empêcher. Sans magie, ma mère ne peut rien. » Je comprends sans problème le reste et, comme je sais que je vais devoir intervenir, je me lève déjà. « Je crois savoir où il se rend, je vais le rejoindre. Merci Ruby. »

« Y a pas de quoi. »



Je disparais avant de pouvoir lui répondre. Quand j'arrive près du Puits au Vœux, je ne vois Henry nulle part. Alors je me concentre, je saurais reconnaître l'essence de mon petit frère même à une certaine distance. Je le repère enfin mais, comme il n'est pas seul, je m'inquiète déjà et me téléporte à proximité. Je ne suis pas repérée pour l'instant et c'est tant mieux. Il s'avère qu'Henry est en compagnie de l'étranger qui a franchi la limite de Storybrooke il y a quelques semaines. Je doute qu'un acte aussi magique qu'apparaître subitement dans un nuage de fumée soit recommandé face à une personne extérieure.

Mais il s'agit quand même là de mon petit frère et je ne connais pas l'homme en face de lui, alors je me permets d'intervenir. Surtout quand je vois l'homme se pencher pour attraper le sac d'Henry.



« Tu t'appelles Henry, c'est ça ? » J'entends l'homme demander.

« Tout va bien ici ? »

« Je ne crois pas qu'il s'est fait mal. » L'homme me répond en se tournant vers moi.

« On s'est déjà vu ? » Je ne peux m'empêcher de lui demander. J'ai la curieuse impression de l'avoir rencontré quelque part.

« Je ne crois pas non, je ne suis pas du coin. » Il se contente de dire avant de diriger à nouveau son regard vers Henry. « Eh bien, bonne chance pour ton épreuve. »

« Quelle épreuve ? » Je demande à Henry une fois que l'étranger a disparu.

« Je lui ai dit que j'étais scout. C'était plus simple que de dire… »

« Que tu te rendais au Puits aux Vœux afin de détruire la magie à Storybrooke ? » Je lui fais savoir que j'ai compris tout son plan.

« Je vais le faire et tu ne m'arrêteras pas. »

« Henry non ! » Je m'exclame en le voyant partir en courant. « Je n'ai pas dormi de la nuit, je n'ai pas le temps pour tes petits jeux. »

« C'est la magie le problème et je vais le régler ! »

« C'est bien ma veine. » Je me retrouve à marmonner toute seule. « Et pile au moment où je suis vidée de mon énergie magique. »



Bon bah, reste plus qu'à lui courir après, même si la perspective ne m'enchante pas du tout. Je le jure Henry, quand je te mettrai la main dessus tu comprendras pourquoi il ne faut absolument pas m'énerver. Surtout aujourd'hui.

Je le rattrape enfin au niveau du Puits aux Vœux mais il a déjà déballer sa dynamite et craquer une allumette. Je dois l'arrêter avant qu'il ne soit trop tard mais je n'ai plus assez de magie pour intervenir à cette distance. Comme je suis à court d'idée, je décide de l'interpeller d'abord.



« Henry ! » Je m'exclame en même temps qu'une autre voix.



C'est uniquement à ce moment que je repère ma mère. Elle s'approche lentement d'Henry, son regard ne dérivant que brièvement vers moi. Je décide de la laisser faire et reste un peu à l'écart.



« Qu'est-ce que tu fais ? » Elle demande quand elle est sûre d'avoir toute son attention.

« Je vais détruire la magie. » Henry explique en brandissant la dynamite. « C'est elle qui gâche tout et tu pourras pas m'en empêcher. » Il allait clairement faire craquer une autre allumette quand ma mère l'arrête à nouveau. 

« Tout ce que tu vas réussir à faire c'est te tuer. »

« Tu dis ça parce que tu as besoin de la magie, que tu veux utiliser ton sort sur moi. »



Cette révélation me surprend. Elle voulait donc utiliser un sort sur Henry. En a-t-elle jamais utilisé sur moi ? Peut-être que j'étais vraiment manipulée depuis la fin de la malédiction et je me serais libérée à force d'utiliser Morrighan ? Non, c'est ridicule. Il faut que j'arrête de douter d'elle à chaque occasion.

Je suis tirer de mes pensées quand je vois Henry approcher une allumette de la dynamite. Heureusement, ma mère intervient bien vite et fait complètement disparaître l'explosif. Voilà qui règle définitivement la question.



« Je ne veux pas te perdre Henry, tu représentes tout pour moi. » Elle affirme en s'approchant à hauteur d'Henry.

« Alors n'utilises pas ton sortilège. Ne… Ne tue pas Mary-Margaret s'il te plaît. »

« Non, il faut qu'elle paie ! »

« Avec le sortilège, tu sais que je t'aimerais pas pour de vrai, tout sera faux ! »

« Mais au moins, on aura quelque chose. » Ma mère réplique d'une voix forte. « Je sais que c'est dur à comprendre pour toi aujourd'hui, mais tu verras. Toi et moi on peut être heureux. Tous les deux, on pourra avoir tout ce qu'on souhaite. »

« Non, pas comme ça. » Henry refuse en reculant.

« Regina, éloignez-vous de mon fils ! » La voix d'Emma se fait entendre.



C'est là que je réagis. La journée a été bien assez dure et je n'ai pas en plus envie de me prendre la tête avec le Clan Charmant. Je pensais être vidée d'énergie magique mais finalement, j'ai l'impression d'avoir une petite réserve. Ou bien ma fatigue rend plus facile l'intervention de Morrighan. En tout cas, je parviens à créer une barrière magique juste à temps pour arrêter Emma. Quelques mètres les séparent encore.



« Ce n'est pas le vôtre, c'est le mien. » Ma mère réplique en se mettant entre Henry et la blonde. « Et une fois que j'aurais jeté ce sort, vous ne le verrez plus jamais. »

« Vous n'y arriverez pas ! »

« Si vous voulez tuer Mary-Margaret, il faudra tous nous tuer. »

« Si ce n'est que ça. » Ma mère invoque une boule de feu et David empoigne son arme.



J'allais intervenir, puis je réalise qu'Henry et moi avons eu la même idée. Il est venu, comme moi, se placer entre les deux camps.



« Stop ! »

« Henry, reste pas là ! » Un homme que je ne connais pas prend la parole.

« Non ! Je resterai là tant que personne ne m'aidera à détruire la magie. »

« C'est impossible et tu ne peux pas la faire exploser comme ça ! » Ma mère tente encore de lui expliquer.

« Ce n'est pas la magie le problème, c'est elle. » Emma insiste en tendant sa main vers Henry comme pour l'inciter à la rejoindre.

« Non, il n'y a pas qu'elle. Tout le monde est en cause. »

« Je n'aurais pas dit mieux petit frère. »

« Regardez ce que la magie a fait à Mary-Margaret. » Henry poursuit sans en démordre. « Ou à Morgane. »

« Je vais très bien. » Je réplique entre mes dents.

« Bah c'est pas l'impression que tu donnes. » Il se tourne ensuite vers ma mère. « Regarde ce qu'elle t'a fait. Elle abîme tout quand elle est là. Même les gens biens font des choses terribles à cause d'elle. »

« Les bons comme les mauvais. » Emma insiste auprès d'Henry pour qu'il la suive mais il se tourne résolument vers Regina.

« Je t'en prie, elle va anéantir toute ma famille. Aide-moi à m'en débarrasser. »

« Sauf que c'est vraiment impossible. » J'interviens alors, ramenant l'attention d'Henry sur moi.



Pour la forme, j'interromps aussi ma magie et reprend mon apparence normale. Ce que je n'avais pas prévu, c'est la grande fatigue qui m'envahit alors.



« Ça va Morgane ? »

« Je sors d'une nuit blanche et j'ai encore dû courser un petit fugueur dans les bois. Comment tu crois que je vais ? » Je demande de façon rhétorique, le sarcasme évident dans ma voix.

« C'est parce que tu as utilisé de la magie. »

« Cette magie. » Je le coupe d'une voix ferme. « C'est elle qui m'a sauvé d'une attaque de géant, je serais morte sur le coup sinon. » Du coin de l'œil, je vois ma mère se tendre lorsque je dis ça. « C'est cette même magie qui m'a protégé alors que je n'étais encore qu'un bébé qu'on avait abandonné au bord de la route. Elle peut être dangereuse, ça je le sais. » Je vais prendre appuis contre le puits, sentant mes jambes faiblir. « Je l'ai vu détruire des vies et corrompre des âmes, mais je l'ai aussi vu sauver d'autres vies et purifier d'autres âmes. » Je me laisse quelques secondes pour reprendre mon souffle. « Tu ne peux pas détruire la magie, elle existera toujours quelque part. La source même de la magie ne mourra jamais. Tu peux la renvoyer dans son monde pendant un temps, mais elle reviendra, inlassablement. C'est une puissance qui fait partie de cette terre au même titre que la vie et la mort. Et il ne te viendrait pas à l'idée de faire exploser la mort à coup de dynamite, pas vrai ? »

« Ce qu'elle dit est vrai, Henry. » Ma mère prend la parole. « On ne peut pas détruire la magie, il n'y a rien à faire. Sauf peut-être ça. » Elle se contente de dire avant d'empoigner un petit papier.

 

Je suppose qu'il s'agit là de la formule du sort qu'elle comptait lancer sur Henry. Je la vois ensuite jeter le papier dans le feu qui reposait au creux de son autre main. Après quelques secondes, le papier n'est plus qu'un petit tas de cendres qui se mêle au vent et ma mère éteint sa boule de feu.



« Merci. » Henry dit, le souffle court et tout le monde semble se détendre.



Ils s'en vont tous avec Henry et en quelques secondes je me retrouve seule avec ma mère… Enfin, je ne sais même pas si je suis encore légitime pour l'appeler comme ça.



« Tu n'as pas l'air bien. » Regina se contente de dire mais je comprends le sous-entendu.

« Je crois qu'Henry avait raison d'une certaine façon. Je n'aurais pas dû utiliser cette magie, pas maintenant. »

« Morgane… Je veux dire, Elaine. »

« Non, s'il te plaît… Pas maintenant. » Je l'arrête immédiatement. Clairement, je n'ai pas la force pour ça maintenant. « Juste… ramène-moi à la maison. »



Je n'ai plus l'esprit très clair à partir de là et ma vue se brouille. Je sens les bras de ma mère autour de moi, qui m'empêchent de tomber, et puis le noir…



***



Je m'attendais à retrouver le monde des limbes. J'ai réussi à l'éviter ces dernières semaines mais, parfois, quand je dors trop profondément, j'y retourne. Dans un moment pareil, je pensais que ce serait le cas. Mais ce n'est clairement pas le monde des limbes. Je suis dans une cour, il fait nuit mais le sable sous mes pieds semble luire à la lumière de la lune. Il y a un arbre qui trône au milieu de la cour, il est grand et majestueux.



« Où est-ce que je suis ? »

« Cet endroit se situe à Camelot. »Une voix me fait sursauter, je pensais être seule. « Ta destinée t'amènera ici un jour. »

« Merlin. »Je comprends sans difficulté. Il est le seul à me parler de 'destinée'. « Vous ne vous montrez pas ? »

« Je suis déjà là. »

« Pardon ? »Je regarde autour de moi mais je suis définitivement seule. « Il n'y a rien ici, à part un vieil arbre. »

« Et c'est la forme qui est la mienne aujourd'hui. Je peux prendre de nombreux aspects, Morgane La Fay. »

« Vous m'appeliez déjà comme ça à l'époque. »Je me souviens brusquement. « Est-ce que vous le saviez à ce moment-là ? »

« Que c'est le prénom que ta mère te choisirait ? Oui, je le savais. C'est là que ton cœur devait aller. »

« Mon cœur ? Si vous connaissez tant de choses, vous avez certainement connaissance de sa fille. La vraie Morgane, celle dont j'ai hérité le nom ? »Je réplique, impatiente d'avoir des réponses.

« Je sais où elle se trouve en effet, et je sais également qu'elle ne t'enlèvera pas ta mère. »

« Vous en êtes sûr ? Parce que vous m'aviez promis une meilleure vie et j'espérais que Regina en fasse partie »

« Tu poses beaucoup trop de questions Morgane. »Pour une fois, quand il utilise ce nom, je le laisse faire.« Il y a certaines choses que je ne peux pas te révéler aujourd'hui. »

« Bien alors, si vous n'avez plus rien à dire je peux m'en aller ? »

« Quand tu te réveilleras. »

« Bien ma veine. »Je marmonne en m'asseyant contre le tronc d'arbre. « Voilà que je me retrouve coincée dans un rêve à parler à un arbre. »

« Un jour tu pourras me libérer. »

« Et en attendant, je ne peux vraiment rien savoir d'autre sur ma "destinée" ? »Je demande en mimant les guillemets.

« Eh bien… » Cette fois, quand il hésite, je sais qu'il cherche uniquement une réponse appropriée. « Est-ce que tu aimes la glace ? »

« La glace ? Comme une crème glacée ? »Je suis plutôt surprise de sa question.

« Non plutôt comme de la neige, mais en plus froid. Cette glace. »

« Oh. Je suis assez frileuse alors… pas vraiment ? »

« Il faudra t'y faire alors. »Merlin me dit simplement, comme si ça expliquait tout.

« C'est quoi cette question d'abord ? »

« Tu voulais connaître un autre bout de ta destinée. »

« Et elle implique de la glace ? »Je suis de plus en plus confuse. C'est quoi cette histoire ?

« Oh oui, beaucoup de glace même. »

« Je crois que je vais faire comme vous avez dit : je vais me réveiller. »Je déclare en me levant. « Et la prochaine fois qu'on se verra, assurez-vous d'avoir des réponses plus claires à me donner. »

« Nous nous reverrons très bientôt, Morgane Mills. »

« De tous les noms qu'on m'a donné, je crois que c'est celui-là que je préfère. »Je réalise soudain.

« Tu vois, finalement tu pars avec une réponse de plus qu'en venant. »



Je n'ai pas le temps de répondre, tout s'embrouille autour de moi et je comprends que je me réveille.



***



Je crois que plusieurs heures sont passées depuis que je suis littéralement tombée de fatigue. Je mets plusieurs minutes à m'éveiller, mon lit étant trop confortable. Mais, quand j'ouvre les yeux, je reconnais immédiatement ma chambre et je suis alors parfaitement réveillée. Peut-être bien que je pourrais arranger les choses avec ma mère alors.

C'est là que j'entends la sonnette retentir, je me lève tant bien que mal et jette un coup d'œil par la fenêtre. Que j'aimerais avoir accès à ma magie en cet instant ! Je serais déjà en bas et je serais fixée. Mais la perspective de descendre les escaliers, dans cet état, ça ne m'enchante pas du tout. Alors je me contente de la fenêtre et je ne vois pas grand chose.

A part, peut-être, un homme près du jardin des voisins. Je crois bien que c'est l'étranger, celui qui vient du monde extérieur. Je me concentre pour voir ce qu'il tient en main et, même si ma magie est faible, c'est suffisant pour aiguiser ma vue. Et je le vois, le téléphone qu'il tient en main et… c'est la façade de ma maison qu'il filme !

J'essaie, vraiment je fais tout pour pouvoir me téléporter à ses côtés. Surtout quand je le vois hésiter avant de démarrer sa voiture. La frustration l'emporte et je ne peux m'empêcher de frapper le mur, juste à côté de la fenêtre par laquelle je regardais.



« Je peux savoir ce qui te prend ? » J'entends la voix de ma mère quelque part derrière moi mais je refuse de lui faire face. « Je ne lui ai rien fait, tu sais ? »

« A qui ? »

« Mary-Margaret. »

« Alors c'était elle à la porte ? Qu'est-ce qu'elle voulait ? » Je demande, surprise.

« Que je la tue. J'ai refusé évidemment, la voir souffrir est beaucoup plus agréable. » Cette fois, je me tourne vers elle histoire de m'assurer qu'elle ne mente pas.

« Tu l'as laissé partir ? »

« Oui, je te l'ai dit. Je n'ai plus besoin de la détruire, elle s'en charge toute seule. » Je ne dis rien, jetant un autre coup d'œil par la fenêtre mais l'étranger a disparu. « Mais tu ignorais que c'était elle, c'est donc autre chose qui t'a frustré. Raconte-moi. »

« Il y avait cet homme, celui qui a franchi la ligne, il était juste là. Avec son téléphone et il filmait en direction de la maison. »

« Tu es sûre ? »

« Certaine. J'étais incapable de faire appel à ma magie pour l'arrêter ! »

« C'était donc ça. » Ma mère comprend et je l'entends s'approcher de moi. « Il te faudra sans doute plusieurs jours de repos pour la récupérer intégralement. »

« Tu comprends donc ma frustration. »

« Oui, mais ne t'inquiète pas, je me chargerais de ce Greg Mendell. »

« Ah, c'est donc comme ça qu'il se fait appeler ? » Je ne suis pas convaincue par cette information. « J'ai l'impression de l'avoir déjà rencontré. » J'admet en retournant me coucher. « Je ne saurais te dire pourquoi, mais il m'est vaguement familier. »

« J'ai eu la même impression en le voyant mais ne t'inquiète pas, je m'en occupe. »

« Maman, attends ! » Je l'arrête avant qu'elle ne puisse franchir la porte. « Je veux dire… Est-ce que j'ai toujours le droit de t'appeler comme ça ? »

« Bien sûr. »

« J'ai eu peur. » Je poursuis implacablement. « J'ai cru que… que tu partirais à sa recherche et qu'ensuite tu n'aurais plus besoin de moi. Toute ma vie on s'est servie de moi pour mon pouvoir. Je pensais… Je pensais qu'ici ce serait différent. En apprenant cette nouvelle, tout ce que je comprenais alors c'est que… que tu t'étais servie de moi aussi. » Je termine, le souffle court. Ma mère s'approche de moi et me fait face. Ses yeux sont embués de larmes mais elle ne les laisse pas couler.

« Je suis désolée, ce n'est pas ce que je voulais. » Elle commence à s'excuser mais se reprend très vite. « Je veux dire, si, c'était ce que je voulais au début mais plus maintenant. Je n'ai pas besoin de partir chercher ma fille parce qu'elle est juste là. Elaine, je… »

« Morgane. » Je l'interromps rapidement.

« Quoi ? »

« Mon nom, c'est Morgane Mills. C'est comme ça que ma mère a choisi de m'appeler. » Je lui explique. « Je ne veux plus entendre les noms qu'on pouvait me donner dans la Forêt, ils appartiennent à une autre personne. »

« Tu es sûre de toi ? »

« Certaine. D'ailleurs, tu disais ne pas connaître mon prénom d'avant. »

« Oh c'était le cas. » Ma mère me confirme. « Mais il s'avère que Blanche-Neige ne sait définitivement pas garder un secret. »

« J'aurais dû m'en douter. »

« Maintenant, tu dois encore te reposer et moi je vais m'occuper de ce Greg Mendell. »

« D'accord. » J'acquiesce et prend place sous les couvertures pour prouver ma bonne foi. « Et toi, ne fais rien que je ne ferais pas. »

« C'est promis. »



Quand elle vient m'embrasser sur le front avant de disparaître, je sais que j'ai fait le bon choix. Je me rends également compte que j'ai failli perdre tout ça, juste parce que j'étais incapable de contrôler mes sentiments et que j'ai laissé Morrighan prendre le dessus. Ça n'arrivera plus, je me promets avant de fermer les yeux.



***



« Alors, qu'est-ce que ça a donné ton tête à tête avec Mendell ? » Je demande à ma mère dès qu'elle rentre dans la cuisine.

« Morgane ! Tu étais sensée te reposer ! »

« Je ne fais que dormir depuis hier, je crois que ça ira. » Je lui fais remarquer. « Alors, raconte-moi. »

« Ta curiosité te perdra un jour. »

« Jusqu'ici ça m'a plutôt réussi. J'attends. »

« Tu te souviens d'Owen ? » Ma mère me ramène à des souvenirs lointains.

« Owen… Oh attends, c'est vrai ! Au début de la malédiction, un homme a débarqué en ville avec un petit garçon. C'est pour ça que son visage me disait quelque chose. Le petit Owen a pris trente ans et est devenu un homme. Qu'est-ce qu'il vient faire ici ? »

« Il cherche son père. »

« Pourquoi tu ne lui dis pas simplement ce que tu en as fait ? » Je demande.

« Qu'est-ce qui te fait dire que… ? » Ma mère commence mais s'interrompt d'elle-même quand elle croise mon regard. « Bon très bien, je me suis peut-être débarrassé de lui à l'époque. »

« Pourquoi ? »

« Il avait vu de la magie, il ne pouvait pas retourner dans son monde. »

« Tu pouvais pratiquer de la magie pendant la malédiction ? » J'ignorais ce détail.

« Je pouvais uniquement manipuler des cœurs mais il l'a vu. Et j'ai laissé le garçon s'échapper. Je ne pensais pas qu'il ruminerait sa vengeance aussi longtemps. »

« Tu peux parler. » Je réplique avec un sourire. « Dois-je te rappeler combien de temps tu as pourchassé Blanche-Neige. »

« Touché. »

« Bon, et c'est quoi le plan ? On lui efface la mémoire et on le renvoie d'où il vient ? »

« Altérer presque trente ans de mémoire pourrait être dangereux. » Ma mère explique en fronçant les sourcils. « Tout ce qu'on peut faire, c'est le garder à l'œil. »

« D'accord, alors j'y vais. »

« Je ne crois pas non. »

« Je voulais simplement aller faire une balade à cheval. » Je me défends immédiatement. « Voilà près de deux semaines que je n'ai pas monté mon étalon. »

« Très bien, si tu me promets que c'est vraiment ce que tu vas faire. »

« Je te le jure, rien de trop dangereux, pas vrai ? »

« Je suppose… »



***



Je me suis éloignée de la forêt, comme à mon habitude. Être à cheval, perdue dans les bois, ça me rappelle l'époque de Mist Haven. Pendant un temps au moins, je suis libre et mon coeur est léger.

Généralement, il n'y a personne dans cette partie de la forêt mais je suppose que les choses ont changé en deux semaines. Je suis assez loin pour passer inaperçue mais je vois quand même le Clan Charmant à plusieurs mètres de là. Ils ont arrêté le pick-up au milieu de la route et il n'y a rien autour qui aurait pu susciter un rassemblement ici.

Et puis je les vois disparaître. Un coup ils sont là et la seconde d'après personne. Ma magie n'est peut-être pas à pleine puissance mais je peux tout de même détecter la barrière de protection. Qu'est-ce qu'ils font là-dedans ? Je me concentre un peu plus et je parviens à distinguer ce qu'il se trouve de l'autre côté de la barrière. C'est un peu flou, comme si je regardais à travers une vitre dégoulinant de pluie. Mais je les distingue sans problème, les plans de Haricots Magiques.

Ils projettent de partir ! L'évidence s'offre à moi. Si Blanche et David montrent cet endroit à Emma, c'est sans doute parce qu'ils avaient prévu de retourner à Mist Haven.



« Oh non, maman. »



***



Quelques minutes plus tard, j'ai retrouvé la trace de ma mère. Elle se trouve sur les docks alors je pousse ma monture jusque là. Enfin, j'essaie mais il renâcle.



« Hey, Cobalt, c'est une façon de faire ça ? » Il s'ébroue mais refuse toujours d'avancer. « Comment ça je ne devrais pas y aller ? Non mais je rêve, mon cheval me donne des leçons ! » Je jette un œil en direction de ma mère et je vois qu'elle rejoint… Emma. « Oh, je comprends mieux. T'aurais pu me dire ça au lieu de faire ta tête de mule. » Mon cheval renifle. Je vous jure, parfois c'est comme s'il me répondait. « Si on y va au pas, elles auront le temps de discuter non ? »



Cette fois, Cobalt obéit et se met tranquillement en marche. Ok, j'avoue, emmener un cheval en pleine ville n'était peut-être pas mon idée la plus brillante. Mais je n'ai pas franchement réfléchi, d'accord ? Finalement, je n'ai même pas le temps d'arriver à leur hauteur. Ma mère se lève et commence à avancer dans ma direction. Je doute qu'elle m'ait vu pour l'instant alors j'attire son attention sur moi.



« Quand tu disais vouloir monter à cheval, j'imaginais en forêt ou sur la plage. »

« Moi aussi. » J'encaisse le sarcasme, conservant mon sérieux face à la situation. « Mais j'ai vu quelque chose et je crois que tu devrais voir ça aussi. »

« Qu'est-ce que c'est ? »

« On ferait mieux d'y aller ce soir, il n'y aura personne pour nous repérer. »

« Très bien, si tu es sûre de toi… »



***



« Alors, qu'est-ce que je suis sensée voir ? » Ma mère me demande quand je l'arrête devant le champ, vide pour l'instant.

« Ça. » D'un geste de la main, je fais disparaître la barrière magique. « Les nains travaillent dessus avec le géant. Pour le compte de Blanche-Neige et son prince. »

« Alors ils projettent de partir ? »

« Oui, mais je ne voulais pas t'alarmer pour rien. » Elle se tourne vers moi, l'air de dire que la situation est plus qu'alarmante. « On ne sait pas, peut-être que… qu'ils t'emmèneront avec ? »

« Tu le crois vraiment ? »

« Je crois surtout qu'il ne faut pas tirer des conclusions hâtives. Tu devrais leur parler. »

« Très bien, admettons. » Elle accepte avec un soupir. « Toi, tu restes ici. Assure-toi que personne ne te voit et surtout qu'ils ne viendront pas me doubler. »

« Ne fais rien de stupide, s'il te plaît. »

« C'est promis. »



***



Je n'ai même pas attendu une heure. En vrai, je n'ai même pas eu le temps de commencer à m'ennuyer. C'est assez facile de se distraire quand on a de la magie. J'étais tellement perdue dans mes pensées que je sursaute quand ma mère apparaît à côté de moi.



« Wow, tu m'as fait peur ! »

« Et c'est comme ça que tu montes la garde ? » Elle demande en relevant un sourcil.

« Très amusant. » Je réplique en me relevant pour lui faire face. « Alors, qu'est-ce qu'ils ont dit ? »

« Ils m'enfermeront dès qu'on aura remis les pied dans la Forêt. »

« Attends, quoi ? »

« Sinon je peux choisir de rester ici, avec mon fils dans un autre monde. » Elle termine son explication, imperturbable.

« Ils n'ont pas le droit de faire ça ! Pour qui ils se prennent ? » Je sens ma magie vibrer à l'intérieur de moi alors je me calme. « Il faut les en empêcher. »

« C'est pour ça qu'on va réquisitionner leurs billets de retour. »



Je tourne mon regard vers le champ de haricots, comprenant son plan sans qu'elle n'ait à le dire explicitement. Je sais bien qu'elle est en colère et qu'elle se sent trahie, mais je ne crois pas que ça arrangerait ses affaires si elle détruisait leur travail.



« Attends. » Je la retiens d'une main sur son bras. « Avant de tout faire cramer, on devrait réfléchir sérieusement. »

« A quoi ? »

« Cora et Crochet ont réussi à traverser les mondes, peut-être que d'autres viendront. Ou peut-être qu'on perdra d'autres personnes dans des vortex ou que sais-je. Ce que je veux dire, c'est que ce genre de magie peut toujours être utile. » J'indique la direction du champ d'un mouvement de tête. « Avant de les détruire, on devrait peut-être songer à s'en garder quelques uns, pour les cas d'urgence. »

« Tu as raison. On va prendre un pied et détruire le reste. »

« Ou alors, on les prend tous et on détruit intégralement l'endroit pour leur faire croire qu'ils ont tout perdu. »

« Un si bel esprit. » Ma mère murmure en prenant mon visage entre ses mains. « Je crois que je t'ai corrompu. »

« Mais non voyons. J'étais bien pire avant. »



***



Je suis restée seule pendant plusieurs heures assise dans le bureau de ma mère. D'ailleurs, j'ignorais qu'elle l'avait récupéré. Comme quoi beaucoup de choses changent quand on est dans le coma pendant presque une semaine. J'ai les yeux fixés sur le seul pied de haricots qu'on n'a pas détruit. Les autres sont calcinés, même si j'ai leur récolte dans la poche.

Je commence sérieusement à m'ennuyer, balancer des boules de feu dans un anneau magique n'est distrayant qu'un temps. Mais, par chance, c'est le moment que choisit ma mère pour revenir.



« Alors, qu'est-ce qu'il a dit ? » Je demande sans lui laisser le temps d'ouvrir la bouche.

« Il a refusé. »

« Je te l'avais dit, Henry n'abandonnera jamais Emma. Tu crois qu'il va tout leur raconter ? »

« Je me suis assurée que ça n'arrivera pas. Il n'a plus aucun souvenir de cette conversation avec moi. » Ma mère m'explique en se tournant vers le pied de haricot.

« Bien, changement de tactique alors. Laisse-moi réfléchir à un plan B. »

« Nous avons le temps, ils ne peuvent plus rien faire à présent. »



C'est à ce moment que des coups sont frappés à la porte et ma mère s'empresse de s'éloigner du haricot avant d'inviter la personne à entrer. Quand je vois apparaître Crochet, mon sang ne fait qu'un tour.



« Capitaine. On dirait que les derniers jours ont été éprouvants. »

« C'est le moins que l'on puisse dire. » Il répond d'un ton bougon qui trahit sa frustration. « Je suis venu te demander ta protection. » Il avoue finalement en s'approchant de ma mère.

« Contre Gold ? Je suis surprise que tu oses te montrer dans cette ville alors que ton ennemi est toujours vivant. »

« Nous avons un problème bien plus grave. Je parle de Greg Mendell, celui qui m'a percuté la nuit où j'ai tiré sur Belle. »

« Mon estime pour ce gars remonte en flèche. » J'interviens pour la première fois et le Capitaine semble à peine se rendre compte de ma présence.

« J'ignorais que tu avais de la compagnie Regina. »

« Ma fille. » Ma mère explique simplement et la menace est claire dans sa voix. « Pour en revenir à Mendell. »

« Il est de mèche avec une femme. » Crochet avoue alors. « Elle m'a enlevé à New-York et m'a livré à Mendell. Ils m'ont demandé de conclure une alliance avec toi et de te trahir ensuite. C'est à cette condition qu'ils m'ont libéré. »

« Qu'est-ce qui vous a empêché de suivre ce plan, la peur peut-être ? » Je demande au Capitaine, lui lançant par la même occasion un sourire faussement angélique.

« Je sais où sont mes intérêts. » Il se contente de dire avant de se reconcentrer sur ma mère. « Alors je propose que nous formions une alliance mais qu'on oublie dès maintenant cette fâcheuse histoire de trahison. »

« Et pourquoi je te ferais confiance ? » C'est heureusement la réponse que lui offre ma mère.

« Si j'ai conclu un pacte avec ta mère, ce n'est pas un hasard. Tous les trois nous pourrions peut-être renouveler notre alliance ? » Il semble ignorer que Cora n'est plus de ce monde alors je m'empresse de le mettre à jour.

« Cora est morte. »

« Quoi ? »

« Elle a été tuée. » Ma mère ajoute et la nouvelle semble honnêtement perturbé Crochet.

« Je l'ignorais, voilà une triste nouvelle. Toutes mes condoléances, nous le regretterons. Laisse-moi te dire une chose Regina, je la connaissais assez pour savoir que ce qu'elle voulait le plus au monde, c'était te voir gagner. » Nous y voilà, il tente de la prendre par les sentiments maintenant. « Je n'ai pas réussi à assouvir ma vengeance, j'aimerais lui rendre hommage en t'aidant à accomplir la tienne. »

« Je voudrais… J'ai quelque chose à te montrer. »

« Tu es sûre de toi là ? » Je demande à ma mère. « Parce que personnellement, je ne lui fais toujours pas confiance. »

« Se serait-on déjà croisé ma jolie ? »

« Exactement, et il vous faudra plus que des beaux discours pour m'avoir. »

« Morgane. » Ma mère attire mon attention sur elle. « Si tu n'as pas confiance en lui, aies confiance en moi. »

« Ça je peux faire, mais je vous ai à l'œil. » J'ajoute en direction du Capitaine.



Ma mère se tourne ensuite vers le pied de haricot et Crochet la suit du regard. Il semble savoir rapidement de quoi il s'agit.



« Un plan d'évasion ? » Il demande. « Oh elle aurait approuvé. C'est pour les haricots qu'elle avait apporté le géant ici, pour pouvoir repartir dans le monde d'où nous venons avec toi. »

« Et c'est ce que je compte faire avec mes enfants. Si tu acceptes de nous aider, c'est grâce à ça que nous échapperons à la destruction totale de Storybrooke. Si nous nous liguons tous les deux. »

« Quand tu parles de destruction totale, tu y inclues le Crocodile, n'est-ce pas ? » Crochet tient à s'assurer qu'il aura sa part du gâteau.

« Ça va sans dire. Rumplestiltskin mourra à condition que tu m'aides. »

« Je vais vous laisser peaufiner votre plan. » J'annonce alors en me levant. « Tu me diras ce que tu veux que je fasse, en attendant je vais prendre l'air. »

« Et comment être sûrs que tu ne nous dénonceras pas à Emma et aux autres ? »

« Ce n'est pas de moi dont il faut se méfier Capitaine, je ne trahirais jamais ma mère. A vous de me convaincre qu'il en va de même pour vous. » Je répond simplement avant de me téléporter.



En vérité, si, je veux parler à Emma. Mais pas de ce plan absurde, je suis presque certaine de pouvoir déjouer le plan de ma mère et ce n'est pas le pirate manchot qui m'en empêchera. Mais il faut que je discute avec la Sauveuse de deux ou trois détails qui me tracassent toujours, et elle a les réponses. Enfin j'espère.

J'arrive en bas de l'appartement qu'elle partage avec ses parents quand je la vois sortir en compagnie d'Henry. Alors j'attire leur attention sur moi et je les rejoins.



« Morgane, tu arrives juste à temps ! » Henry s'exclame en venant me prendre dans ses bras. « L'Opération Cobra reprend du service ! »

« Henry ! »

« Je venais simplement discuter avec Emma mais… si vous avez besoin de mon aide. »

« C'est une histoire compliquée… » Emma commence mais est très vite interrompue par son fils.

« La copine de mon père, Tamara, Auguste nous a dit de nous en méfier alors on va enquêter. »

« Peut-être pas si compliquée au final. » La blonde reconnaît avec un haussement d'épaule.

« Et ton père c'est… »

« Neal. C'est le fils de Rumplestiltskin ! »

« Je crois que maman m'en avait parlé de cette histoire. » Je me souviens brusquement. « Ça devient un bordel sans nom cette affaire. »

« A qui le dis-tu. » Emma acquiesce avant de se mettre en route. « Vous venez ? On risque de perdre sa trace sinon. »

« Attendez un peu ! » Je lui emboîte quand même le pas afin de lui exposer mon point de vue. « Auguste vous a dit de vous méfiez de Tamara, c'est ça ? » Emma et Henry acquiesce. « Crochet a découvert que Greg Mendell travaillait avec une femme, ils veulent tuer ma mère apparemment. »

« Greg Mendell ? Tu veux dire, le gars en voiture qui a franchi la ligne ? »

« Exactement. »

« Attends, Crochet est de retour ? » Emma semble plutôt inquiète à cette perspective.

« Oui mais il ne représente qu'une menace mineure, ce n'est qu'un pirate. »

« Tu as probablement raison. »

« En tout cas, si cette Tamara travaille vraiment avec Mendell, on risque d'avoir des problèmes. Ils sont venus en ayant déjà connaissance de la magie. »

« Raison de plus pour relancer l'Opération Cobra. » Henry nous fait remarquer.



***



Apparemment, ce qu'on est en train de faire s'appelle 'être en planque', mais pour moi, ce n'est qu'une perte de temps. Voilà déjà une demi-heure qu'on attend, à regarder la façade de Granny's comme si notre vie en dépendait.



« Pourquoi ne pas simplement entrer, la figer, et faire ce qu'on a à faire ? »

« On a pas besoin de magie. » Emma me fait remarquer.

« Certes, mais elle nous serait très utile en ce moment. »

« Il faut changer le nom de l'Opération. » Henry interrompt notre conversation.

« Quoi ? »

« Le but de l'opération Cobra était de rompre la malédiction. » Mon petit frère commence son explication. « Là le but c'est que l'existence de Storybrooke reste secrète. Il faut un autre nom de code. »

« Opération Tigre. » Emma suggère immédiatement.

« Pourquoi ? »

« Il faut une raison maintenant ? Tu ne donnes jamais de raison toi. »

« Je veux que ça fasse penser à cette ville. Les gens la voient pas alors qu'elle est sous leurs yeux. Elle se fond dans son environnement comme une mante religieuse. »

« Au final c'est toi qui choisit, petite tête. » Je me contente de hausser les épaules. « Le nom n'influera pas sur notre réussite alors… »

« D'ailleurs, tu ne voulais pas me parler de quelque chose ? » Emma me rappelle.

« C'est vrai. Je voulais vous parler de ma mère. »

« Qu'est-ce qu'il lui arrive ? »

« Rien, c'est juste que… » J'hésite un temps puis décide de me lancer. « Je crois que vous lui faisiez confiance, que, comme moi, vous avez vu le bon en elle. Mais elle a trahi cette confiance en s'alliant à sa mère. »

« Ça tu peux le dire. »

« Mais dites-vous bien qu'elle avait tout perdu. Vous veniez de reprendre Henry et elle pensait que j'allais lui tourner le dos. Je n'ai pas été là pour la soutenir, je le reconnais. » J'admets avec un soupir. « Mais il est dur de changer après autant de temps. Tout ce que j'aimerais, c'est que vous lui fassiez encore un peu confiance. »

« Pourquoi moi ? » Emma demande avec justesse.

« Parce que je pense que vous êtes la clé. La prophétie disait que la Sauveuse devrait détruire la Méchante Reine. Il n'est dit nulle part que Regina devrait mourir dans le processus. »



Je vois que mon discours la touche et que l'idée fait son chemin dans la tête de la blonde. Je choisis de m'arrêter là, pensant que ça suffira pour aujourd'hui. Je crois qu'Henry a remarqué qu'il vaudrait mieux détourner la conversation.



« Avant je pensais qu'il faudrait retourner dans l'autre monde pour vivre des aventures. »

« Tu ne tiendrais pas une semaine sans électricité. » Je réplique avec un sourire.

« J'aurais pu monter à cheval, me battre à l'épée et tirer à l'arc. » Henry n'en démord pas et semble toujours motivé à devenir un chevalier. « Mais ça aussi c'est cool. » Il finit par admettre en prenant une gorgée de son chocolat chaud.

« C'est vraiment ce que tu voudrais ? Je veux dire… S'il y avait un moyen de repartir dans la Forêt Enchantée. » Emma demande, et je comprends qu'ils n'ont encore rien dit à Henry à propos des haricots.

« Il y en a un ? »

« Non ! Où tu vas chercher ça ? »

« Il y en a un, un moyen de repartir ! C'est un haricot je parie, le géant l'a apporté avec lui. »

« Très malin le petit. » Je fais remarquer à la blonde qui n'a pas l'air convaincue par mon sarcasme.

« Ça va être trop cool maintenant ! On pourra vivre dans un château, toi, moi et Neal. »

« Oh là commence pas à t'emballer. »

« Morgane pourra nous rendre visite ! » Il ajoute sans se départir de son excitation.

« Je n'irai nulle part sans maman. »

« Cachez-vous ! » Henry s'exclame soudain.



Quand on s'exécute, j'aperçois un couple quitter le Granny's. Sûrement Neal et sa copine, la fameuse Tamara. Elle ne m'a pas l'air si effrayante mais le mal rôde partout.



« L'Opération Mante Religieuse est lancée ! »



***



Emma est entrée dans la chambre que Neal et Tamara partagent au B&B. Pendant ce temps, Henry et moi on fait le guet mais je me retrouve bientôt à reprendre la conversation de tout à l'heure.



« Tu irais vraiment vivre dans la forêt ? »

« Bah oui, ça a l'air super cool ! » Henry s'exclame avec un grand sourire. « Tu pourrais m'apprendre à être un rebelle ! »

« Ce n'est pas aussi génial que ce que ton livre semble raconter, crois-moi. La vie y était très difficile tu sais ? Pour manger, il fallait chasser. Pour avoir chaud la nuit, il fallait faire un feu. Pas d'électricité, ni d'eau courante et tu peux oublier les bains chauds. A moins que tu ne vives dans un château, évidemment. »

« Il n'y a pas ton histoire dans le livre, c'était vraiment si dur ? » Il commence à comprendre.

« Oui, et quand on a grandi sans rien, c'est suffisant. Mais tu as été élevé dans un environnement sain. Fais-moi confiance, la vie est bien plus agréable ici. Toute ta famille est là, avec toi. » Je lui fais remarquer en me mettant à sa hauteur. « Y compris la mère qui t'a élevé depuis tout bébé. »



C'est à ce moment qu'on entend des pas venir du couloir et Henry se précipite vers la porte pour y donner un coup de pied, comme Emma le lui a demandé. Puis on voit Neal apparaître et il semble assez surpris de nous trouver là.



« Bah, qu'est-ce que vous faites là ? » Il demande avant de comprendre tout seul. « Oh non franchement, c'est moi qui lui ai appris ce truc-là. Emma ! » Il s'exclame en poussant la porte.

« Maman a raison, il faut vraiment que j'apprenne à monter la garde. » Ma petite répartie fait à peine sourire Henry mais au moins, il sait que je ne suis pas inquiète face à la situation.

« Vous étiez pas là et la porte était ouverte alors on a… » Emma tente une explication mais je sais déjà que ça ne marchera pas.

« Je peux savoir ce qu'il se passe exactement ? »

« C'est Tamara. » Emma commence, semblant prête à révéler la vérité. « Je crois qu'elle te manipule. »

« Et pour quelles raisons ? »

« Je pense que c'est elle la personne contre qui August a tenté de nous mettre en garde et je voulais pas te le dire avant d'avoir une preuve. »

« Oh, ok je comprends. » Neal répond avec un petit rire sans humour. « Tu as fouillé notre chambre pour pas me faire de la peine. Non mais t'es devenue barge ? »

« Il nous a dit de nous méfier d'une femme. »

« Ce qui englobe la moitié de l'humanité. T'as embarqué Henry là-dedans ? » Il remarque en montrant leur fils d'un geste de la main.

« Elle m'a menti ! Et quand on me ment je le vois tout de suite. »

« Tu crois le sentir mais j'en suis pas aussi sûr que toi. »

« C'est vrai et tu le sais. » Emma rétorque. « Et puis elle a une liste des personnages de contes avec les noms qu'ils portent à Storybrooke, imagine qu'elle la donne à quelqu'un qui veut révéler au monde entier ce qu'est cette ville ! »

« C'est moi qui l'ai aidé à faire cette liste. » Neal avoue alors, l'air presque honteux. « Elle en a besoin pour essayer de comprendre ce qu'il se passe ici. C'est difficile à appréhender… elle fait l'effort pour moi. »

« Écoute, je sais ce que tu t'imagines mais c'est pas du tout ça. Est-ce que j'ai l'air d'une ex jalouse et totalement hystérique ? »

« En fait oui, un peu. » J'interviens et cette fois, j'arrache un petit rire à Henry et même Neal semble sourire. « Mais elle a raison, Tamara est suspecte. Crochet affirme qu'elle l'a enlevé à New-York et ramené ici pour les aider dans leur plan. »

« Et tu fais confiance à Crochet ? » Neal soulève un point important.

« Pas vraiment. »

« Écoute, on n'a qu'à vérifier. » Emma propose. « Il y a une latte du plancher qui bouge, on regarde en-dessous, s'il y a rien parfait, on en parle plus. »

« Ok, si tu veux on jette un œil. »



Emma s'approche alors de la latte en question, elle s'agenouille et tente alors de la soulever. Je suppose que faire une telle chose avec une paire de gants n'aide pas vraiment mais je me garde bien de le faire noter à la blonde.



« Tu me donnes un coup de main ? » Emma demande à Neal qui accepte tout de suite.

« Oh, oui bien sûr. »



A deux, ils y parviennent rapidement et Emma plonge une de ses mains dans le trou qui se cachait sous la latte. Elle en sort alors… rien du tout apparemment, si j'en juge par l'expression de la blonde. Neal semble à la fois soulagé et presque triste que cette réalité s'impose à Emma. Personnellement, je ne me décourage pas. Je ne fais pas confiance à Crochet, certes, mais comment aurait-il connaissance de cette femme sinon ? Il doit bien y avoir une part de vérité dans le discours qu'il a tenu à ma mère.



« Écoute… » Neal commence d'une voix compatissante. « Je sais que la présence de Tamara rend les choses un peu délicates… »

« C'est bon. » Emma le coupe, clairement ce n'est pas ce qu'elle veut entendre en ce moment. « Viens Henry, on s'en va. »



***



La nuit est déjà tombée quand je quitte Henry et Emma pour rejoindre ma mère. Je me laisse quelques secondes pour essayer de repérer son énergie magique. Je me dirige ensuite vers la bibliothèque, là où elle se trouve. J'étais à quelques pas de la porte quand je vois quatre personnes sortir. Je reconnais Crochet, Greg, Tamara et… même avec le capuchon sur la tête je suis sûre que c'est ma mère.

 

« Maman ! » Je m'exclame en m'approchant d'eux, invoquant une boule de feu dans ma main. « Libérez-la. »

« Non, je ne crois pas. » Greg me répond d'un ton condescendant.



Je le vois sortir un petit flacon de sa poche. Comme il est opaque, je ne vois pas la couleur du liquide à l'intérieur. De toute façon, je n'ai pas l'occasion de réagir avant qu'il ne me la jette dessus. Immédiatement, je sais. C'était de l'encre de seiche et je suis maintenant complètement figée.



« J'étais certain que tu avais de la magie toi aussi. » Greg poursuit avec un sourire satisfait. « Probablement pas aussi puissante que ta mère cela dit. » Je ne peux rien dire, mais mon regard transmet clairement le message : il va me le payer. « Bon, c'est pas tout mais on est pressés alors en route ! »



Je les vois partir mais ils poursuivent leur route derrière mon dos et j'ignore donc dans quelle direction exacte ils sont partis. J'ignore combien de temps cela va durer mais je sens déjà la colère monter en moi. Je sais que Morrighan fera son apparition à la seconde où l'encre aura perdu son effet. J'aurais presque pitié d'eux alors, parce qu'ils n'auraient pas dû l'énerver.

Finalement, j'ai réussi à réunir assez d'énergie pour lancer un sort, un seul. D'instinct, je vais me téléporter dans le bureau de ma mère. C'est le premier endroit auquel je pense et sûrement celui où vont aller Greg et Tamara. Crochet a dû tout leur dire à propos des haricots et je doute qu'ils laissent passer une telle occasion. Pas quand Crochet connaît tout le plan de ma mère, y compris celui de la destruction totale de Storybrooke.

Sauf que, quand j'arrive dans le bureau, je sais déjà que j'ai fait une erreur. Je reconnais les symptômes : les battements de mon cœur qui résonnent dans les oreilles, ma vision qui se trouble et l'immense fatigue qui m'envahit. Pas de doute, j'ai dû épuisé ma réserve de magie en l'utilisant pour briser l'enchantement de l'encre. Tout ce que je vois avant de m'évanouir, c'est le pied de haricots… il est vide.



***



« Vous pouvez rentrer, elle n'est pas là. » Une voix perce la brume qui m'envahit et je tente d'ouvrir les yeux.

« Hey, Morgane. » Je sens une main sur mon épaule qui me secoue. « Tu m'entends ? » Je reconnais la voix de David. « Réveille-toi Morgane. »



Finalement, je parviens à ouvrir les yeux et à me redresser tant bien que mal. Avec le soutien de David, j'arrive même à me tenir debout. Je mets tout de même quelques secondes à me rappeler les évènements de la veille.



« Qu'est-ce qu'il s'est passé ? » Emma me demande.

« C'était Greg Mendell et Tamara, ils travaillent avec Crochet. Tous les trois ils ont enlevé ma mère, bien que j'ignore encore pourquoi elle n'a pas riposté avec sa magie. » Je leur explique sans hésiter. « Je doute qu'ils lui veulent du bien. Mendell a un passif avec ma mère, il n'hésitera pas à la tuer dès qu'il aura obtenu d'elle ce qu'il veut. »

« C'est bien elle qui a pris les haricots. » David note alors et je comprends qu'ils ont découvert notre plus récent exploit. « Et ils ont disparu. »

« Sûrement Greg et Tamara. Ou Crochet. Un pirate comme lui, il doit connaître la valeur d'un tel objet. »

« On doit la retrouver. » Emma affirme mais Henry l'interrompt immédiatement.

« Quand vous la trouverez, vous lui ferez pas de mal ? »

« Non, on veut juste qu'elle réponde de ses actes. » Je vois la blonde s'approcher du système d'alarme près de la porte. « D'après le système de sécurité, la dernière fois que quelqu'un est entré c'était à six heures ce matin, en utilisant une clé de neutralisation. »

« Je vous l'ai dit, c'était Greg et Tamara. » J'insiste, j'aurais sans doute besoin de leur aide. « Je ne sais pas ce qu'ils complotent mais ça ne me plaît pas du tout. »

« Tu as réussi à la réunir à ta cause ? » Blanche demande en se tournant vers Emma.

« Je n'ai rien à voir avec ça. »

« Crochet m'en a parlé et je l'ai vu hier soir. Est-ce que je dois vraiment vous répéter ce qu'il s'est passé la dernière fois que j'ai vu ma mère ? »

« Non, ça ira. » David prend la parole. « Dis-nous juste où ils sont partis. »

« Si je le savais, je ne serais déjà plus là à vous parler. » Je réplique, les dents et les poings serrés. « Ma magie est perturbée depuis quelques jours, je ne peux pas l'utiliser comme d'habitude. Je vais avoir besoin de votre aide. » J'avoue presque à contre-coeur.

« D'accord, je vais aller voir dans la chambre de Tamara. » Emma propose sans hésiter. « Emmenez-la se reposer, je viendrais vous chercher quand j'en saurais plus. »



***



Blanche et David nous ont laissés seuls, Henry et moi, à leur appartement. Apparemment, ils vont voir Gold histoire de trouver un moyen plus rapide de mettre la main sur ma mère. Je ne peux qu'être d'accord avec eux. Même si Emma retrouve Greg et Tamara, ce dont je ne doute pas, rien ne prouve qu'ils avoueront ce qu'ils ont fait de ma mère.

On n'a pas vraiment eu à attendre longtemps, ils sont de retour après seulement une demi-heure. Je ne sais pas comment ils ont fait pour obtenir un accord aussi rapide du Ténébreux mais je ne vais pas m'en plaindre.



« Qu'est-ce qu'il vous a donné ? » Je demande dès qu'ils ont refermé la porte. Blanche me montre alors un petit flacon avec un liquide translucide dedans. « Ce sont des larmes, pas vrai ? » Je comprends sans difficulté. « Comment il a eu des larmes de ma mère ? »

« Il a refusé de nous le dire. »

« Et c'est Blanche qui s'infligera ce sort ? » Je devine encore, ayant connaissance de cette forme de magie. « Il faut un sentiment assez fort entre deux personnes pour que ça marche et les larmes de chacune d'elles. »

« Tu connais cette magie ? » David me demande.

« Oui, et j'y aurais pensé moi-même si j'avais eu des larmes de ma mère sous la main. Mais je ne suis pas comme le Ténébreux, à collectionner des objets bizarres et glauques. Qui garde des larmes sous la main pendant presque trente ans ? »

« Rumplestiltskin apparemment. Si tu connais ce sort, tu sais aussi ce qu'il fait ? » David semble inquiet pour sa femme et je le comprends.

« L'enjeu dépend de ce que l'autre personne voit. Si ma mère était en train de regarder la télé, alors Blanche aurait juste droit à une séance ciné gratuite. »

« Et si Regina souffre ? » Blanche me demande d'une petite voix.

« Tu verras ce qu'elle voit, tu ressentiras ce qu'elle ressent. »

« Tu n'es pas obligée, tu sais ? » David lui fait remarquer.

« On peut toujours attendre que ma magie revienne. »

« Ça pourrait prendre des heures. » Blanche réplique. « Non, ça doit être moi. Mon cœur s'assombrit à cause de ce que j'ai fait à Regina. Si j'arrive à voir où elle est, si on peut la sauver… peut-être que la lumière reviendra dans mon cœur. » Ce petit discours était entièrement tourné vers son mari mais je n'en perds pas une miette.



David semble accepter la décision de sa femme parce qu'il prend le flacon et prépare la pipette. Il va ensuite placer une unique goutte dans l'un des yeux de Blanche. Après quelques secondes de silence total, elle a une réaction et exactement celle que je redoutais. Elle semble souffrir terriblement. Elle convulse, hurle et supplie. David est inquiet, évidemment. Même moi je le suis et pas seulement pour ma mère, pour Blanche aussi.

Le silence revient quand elle finit par s'évanouir. Sûrement le trop plein d'émotions et de sensations. David reste à ses côtés, caressant son visage.



« Elle va bien. » Je le rassure immédiatement.

« Tu es sûre ? »

« J'ai encore assez de magie pour ressentir ce genre de choses. » Comme pour prouver mes dires, c'est ce moment que choisit Blanche pour se réveiller.

« Mary-Margaret, ça va ? »

« C'était horrible. » Elle répond d'une voix tremblante. « C'était la pire douleur que j'ai ressenti. Regina doit l'endurer, elle ne peut rien faire, elle est sans défense. » Quand elle dit ça, je me tends considérablement. Au moins, ma colère semble réveiller Morrighan.

« Tu as vu où elle est ? » Je ne peux m'empêcher de demander.

« Tu as… vu les gens qui la garde prisonnière ? »

« Non, je me rappelle… » Son souffle est court et elle se tient la tête, mais elle continue obstinément. « Je me rappelle que la douleur et les cris. »

« D'accord. » David l'incite à s'arrêter là. « D'accord, hum, concentre-toi. Le moindre détail peut nous conduire jusqu'à elle. »

« Oui, je sais. Mes mains, j'avais les mains qui étaient attachées et mes jambes aussi. Il faisait froid et ça sentait… » Elle s'arrête pour réfléchir avant de continuer. « Très bizarre, ça sentait la sardine. J'en sais rien, j'aimerais me souvenir de quelque chose. » Comme elle commence à pleurer, David la prend dans ses bras pour la réconforter.



Quand Blanche commence à se calmer, David appelle Emma et lui explique ce qu'on vient de découvrir. Leur entretien dure à peine une minute mais Emma semble avoir trouver une solution. David m'intime qu'elle lui a demandé de les rejoindre, Neal et elle, sur les quais. Alors je n'hésite pas et me téléporte là-bas. Enfin, j'essaye mais rien ne se passe.



« Sérieusement ! » Je suis extrêmement agacée. Juste quand j'avais besoin de magie !

« Ce sera la voiture alors, en route. »



***



Heureusement, on est arrivés assez vite sur les quais et il est assez facile à partir de là de comprendre le raisonnement d'Emma. L'entrepôt à poisson se trouve juste là, devant nous. On est entrés, David armé de son pistolet et moi-même je tiens ma magie prête. Pour la première fois, je sens la venue de Morrighan progressivement. Ce n'est pas soudain comme les autres fois où je l'ai senti prendre le dessus. Non, là j'ai presque l'impression de pouvoir la contrôler. Ou alors, c'est ma colère que je suis parvenue à apaiser.

On a à peine fait quelques pas dans l'entrepôt qu'on entend d’autres bruits de pas. On s'approche silencieusement et David braque son arme droit devant nous. Droit sur Emma et Neal en fait.



« Vous nous avez foutu la trouille ! » Emma lance avec un soupir de soulagement.

« Tiens. » David dit en tendant un talkie-walkie à sa fille. « Comme ça, ça n'arrivera plus. »

« Vous allez fouiller le sous-sol, nous on se charge du rez-de-chaussée. Regina est sûrement ici, quelque part. »

« Je la sens. » J'indique alors, ma magie ayant atteint sa pleine puissance. « Maman ! » je m'exclame en courant dans sa direction.

« Morgane, attends ! Ça pourrait être dangereux ! »

« Je ne risque rien. » Je réplique en me tournant vers Emma et le reste de la bande. « C'est eux qui devrait me craindre. »



Je sais qu'ils l'ont vu, les effets de la magie de Morrighan sur mon visage. Ma vision est différente, plus précise, comme à chaque fois que mes yeux ont changé de couleur. Je ne reste pas pour leur donner des explications et j'avance résolument en direction du sous-sol. C'est là qu'elle se trouve, je le sais, je le sens.

Je cours à travers les couloirs de béton, c'est instinctif, c'est comme si j'avais une carte détaillée de l'endroit. Je sais que je suis sur le bon chemin, aucun doute. Mais, quand j'entends les cris de ma mère, j'accélère encore.



« Vous ne ferez plus de mal à qui que ce soit. C'en est fini de vous. » J'entends Mendell dire juste avant que j'entre dans la pièce en trombe.

« Vous ne ferez plus de mal à qui que ce soit. » Je dis à mon tour, comme pour le narguer, juste avant de l'envoyer valser contre le mur mais je ne fais déjà plus attention à lui. « Maman ! » Je me dirige vers la table où elle est attachée.



Quand je la vois comme ça, affaiblie, couverte de fils qui la relient à un générateur électrique, l'inquiétude prend le dessus sur la colère. Je sens Morrighan se rétracter alors que j’entreprends de débarrasser ma mère de ces satanés câbles.



« Maman, tu m'entends ? » Je demande, mais elle ne semble pas m'entendre.

« Morgane ! » David et Blanche arrivent à ce moment. « Comment elle va ? » Blanche s'enquit immédiatement en s'approchant à son tour du lit.

« Elle est faible mais je peux la guérir. » En fait, je suis déjà en train de le faire au moment où je dis ça. « Mendell est juste là. » J'indique d'un geste de la tête à David alors que je sens ma mère remuer légèrement.

« Non, il s'est enfui. »

« Quoi ? » J'interromps ma magie, de toute façon ma mère commence à ouvrir les yeux. « Il faut qu'on le poursuive, il ne s'en sortira pas comme ça. »

« Morgane. » Comme j'entends ma mère m'appeler, je me tourne vers elle.

« Ne t'inquiète pas, ça ira. » Je la rassure en prenant sa main dans la mienne. « David viendra avec moi poursuivre Mendell et Mary-Margaret va t'aider à sortir d'ici. » Je lui explique, elle doit savoir que je ne serais pas seule. « Emmène-la à la maison. » J'ajoute à l'attention de Blanche. « On vous retrouvera là-bas quand cette histoire sera réglée. »

« D'accord. »

« Sois prudente. » Ma mère insiste.

« Toujours. »



Je serre une dernière fois sa main avant de quitter la pièce avec David. On a à peine franchi la porte que Morrighan fait son retour. Évidemment, cette fois David n'hésite pas à me questionner.



« Qu'est-ce que c'est que ce truc autour de tes yeux ? »

« C'est comme ça qu'elle se manifeste. » Je répond simplement, mais j'aurais dû me douter qu'il ne se contenterait pas de ça.

« Qui ? »

« Morrighan. » Je soupire quand je me rends compte que je vais devoir rentrer dans les détails. « C'est une entité magique que j'ai toujours eu en moi, depuis la naissance. Certains la considèrent comme une déesse, d'autre comme la créatrice des mondes et de la magie. »

« Et… elle est dangereuse ? » David demande prudemment.

« Tout dépend de qui l'utilise. »

« Et tu sais où il est allé ? »

« Oui, il est rapide. Je n'ai pas dû le taper assez fort. »

« Morgane ! » Je suis étonnée d'entendre Blanche m'appeler. « Il faut que tu viennes, on a un problème. » Blanche me saisit immédiatement par le bras dès qu'elle est à portée.

« Mais… »

« C'est ta mère. » Elle me coupe et je ne résiste plus.



Au diable ce Mendell ! Je ne peux pas lui courir après si ma mère est en danger. Mais je ne comprends pas comment ma magie a échoué. Quand j'arrive auprès de ma mère, je vois qu'en effet son état s'est de nouveau dégradé.



« Dès qu'elle a essayé de se lever elle s'est évanouie. » Blanche m'explique pendant que je cherche une solution.

« Ça dépasse mes compétences, je vais aller chercher la Fée Bleue. » D'un geste de la main, je fais disparaître ma mère. « Elle est à votre appartement, on se retrouve là-bas. » Je dis simplement avant de me téléporter à mon tour.



Arrivée au couvent, je ne mets pas longtemps à trouver le chemin de son bureau. Je n'aime pas particulièrement l'idée d'aller quérir l'aide des fées, mais ma seule autre option aurait été Gold alors… Plutôt Reul Ghorm que le Ténébreux.



« J'ai besoin de votre aide ! » Je m'exclame dès que j'aperçois la mère supérieure. Je cours jusqu'à arriver près d'elle et c'est là que je vois la surprise sur son visage. « Pardon, où sont mes manières. Bonjour, j'ai besoin de votre aide. Ma mère est probablement en train de mourir et ma magie n'a aucun effet sur elle. »

« Vous voulez que j'aide la Méchante Reine ? »

« S'il vous plaît, c'est ma mère… » Je n'hésite pas à la supplier et à tirer sur la corde sensible.

« Qu'est-ce qui vous fait dire que je peux l'aider si Morrighan n'y arrive pas ? »

« Ce n'est pas une question de puissance, mais de connaissance. Je ne sais pas ce qu'elle a et j'aimerais que vous m'aidiez à le découvrir. S'il vous plaît. » J'insiste et elle craque.



Dès que j'ai son accord, je nous téléporte dans l'appartement des Charmants. Comme prévu, ma mère est allongée sur le lit, semblant dormir mais je vois bien qu'elle est agitée.



« Quelque chose bloque la magie. » La Fée Bleue comprend sans difficulté alors qu'elle s'approche du lit.



Il ne lui faut pas longtemps non plus pour découvrir qu'un bracelet est la cause de ce blocage. Je n'aurais jamais pensé qu'il existait un autre moyen d'arrêter la magie, je ne connaissais que l'encre de seiche. Je m'assurerai que ce bracelet soit bien garder sous scellé.



« Maintenant qu'elle n'a plus le bracelet, ça devrait aller. » La Fée Bleue explique en appliquant sa magie sur ma mère. « Quand elle sera bien reposée, elle retrouvera ses pouvoirs. »

« Merci. » Je murmure en m'approchant du lit à mon tour.

« Vous êtes une bonne personne, je comprends pourquoi Morrighan vous a choisi. »



Je n'ai pas le temps de répliquer parce qu'au même moment, Emma revient. Seule. Et elle semble sous le choc. De quoi ? Ça reste un mystère pour le moment mais ses parents n'hésitent pas à s'approcher d'elle pour tenter de la réconforter.

 

« Qu'est-ce qui s'est passé ? » David demande, attendant peut-être encore l'entrée de Neal. « Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Où est Neal ? » Blanche demande à son tour.

« Elle l'a tué. Il est plus là. »



***



Je les ai laissé accuser ce deuil en famille et j'ai décidé de rester auprès de ma mère. A ma grande surprise, après quelque minutes Blanche me rejoint et me tend un linge humide. Je m'en saisis mais mon regard doit poser les questions à ma place.



« J'ai vu qu'elle avait de la fièvre, ça l'aidera pour l'instant. »

« Merci. » Je dis en prenant place à côté de ma mère.



Je commence à passer le linge sur le visage de ma mère. C'est vrai que sa température est plus haute que la normale mais j'espère que ça passera vite. Je m'en veux de ne pas avoir été plus rapide. J'aurais pu mettre fin à ça en attaquant directement ce crétin de Mendell. Au lieu de ça, je l'ai laissé kidnapper ma mère sous mes yeux. Et je l'ai à nouveau laissé s'échapper aujourd'hui. Il ne s'en sortira pas comme ça la prochaine fois.

Finalement, après quelques minutes, je sens ma mère remuer. Il ne faut pas attendre longtemps avant de la voir ouvrir les yeux. Elle se relève légèrement et son regard tombe sur moi.



« Maman… »

« Morgane. » Elle vient me prendre dans ses bras.

« Je suis désolée, j'aurais dû arriver plus tôt mais ma magie… »

« Tu m'as sauvé. » Ma mère m'interrompt en plongeant son regard dans le mien. « Et c'est tout ce qui compte. »

« J'ai eu de l'aide. » Je lui fais remarquer et son regard se tourne vers les Charmants.

« Vous. Vous m'avez sauvé ? »

« Vous croyiez quoi, qu'on allait vous laisser mourir ? » David demande, le sarcasme évident dans sa voix. « Malgré nos désaccords, nous sommes de la même famille. » Il ajoute d'une voix beaucoup plus douce.

« Où sont-ils ? » Ma mère demande après quelques secondes de silence. « Où sont Greg et Tamara ? »

« Ils se sont enfuis. » J'avoue, honteuse de mon échec. « Je n'ai pas eu le temps de l'arrêter, je suis désolée. »

« Alors ce sont eux qui l'ont. »

« Qu'est-ce qu'ils ont ? » Blanche demande, semblant comprendre la gravité de la situation.

« Un cristal. C'est quelque chose que j'ai créé en même temps que la malédiction. Une sécurité en quelque sorte. »

« Une sécurité ? »

« Qui provoque la destruction de Storybrooke. »

« Non... » Blanche et David semblent aussi abattus l'un que l'autre.

« J'ai créé la malédiction avec un système d'auto-destruction. »

« Et pourquoi au juste vous gardiez ce diamant sur vous ? »

« Tu n'as pas compris qu'elle voulait nous éliminer ? » David explique pour sa femme.

« J'allais utiliser les haricots magiques pour retourner avec Morgane et Henry dans la Forêt Enchantée. »

« Et en même temps vous alliez tous nous tuer. »

« Vous voulez vraiment parler des raisons que j'avais ? » Ma mère réplique. « Je savais que vous alliez m'abandonner. Ou bien on s'occupe d'un problème beaucoup plus urgent, c'est-à-dire le dispositif de destruction que je n'ai plus en ma possession. »

« Je peux partir à leur recherche. » Je propose. « Avec ma magie, je finirai forcément par les trouver, peu importe où ils se cachent. S'ils sont encore dans ce monde, je les trouverai. »

« Il n'en est pas question, tu ne te mettras pas en danger ! » Ma mère refuse immédiatement.

« Combien de fois il faudra que je vous le dise ? Je ne risque rien ! »

« Tu l'as dit toi-même : on tombe toujours sur plus forts que soi. »

« Certes mais eux, ils ne sont pas de taille face à moi. »

« Et si ta magie te fait à nouveau défaut ? » Ma mère trouve l'argument qui fait mouche.

« Eh bien, je… »

« Rien du tout. Tu n'iras pas seule, un point c'est tout. »

« Bien alors, on ira chercher tous ensemble. » Blanche conclut avec finalité. « Mais d'abord, tu dois encore te reposer Regina et nous avons des nouvelles à annoncer. On en profitera pour demander son avis à Gold. »

« Puisque je n'ai pas le choix… »



***



« Tu comptes faire les cent pas encore longtemps ? »



Les Charmants sont partis depuis plusieurs minutes en compagnie d'Emma. J'ai dû rester ici, ma mère refusant que je parte à la recherche de Greg et Tamara toute seule. Elle doit commencer à regretter cette décision maintenant.



« Je déteste me sentir inutile. »

« Tu n'es pas inutile, tu me tiens compagnie. » Mon regard doit lui indiquer que ce n'est pas vraiment ce que j'appelle être utile. « Tu ne peux rien faire pour le moment, ta magie est encore instable. » J'allais répliquer mais elle ne me laisse même pas le temps d'ouvrir la bouche. « Et n'essaies pas de me mentir, je le ressens. » Elle me fait alors signe de venir m'installer près d'elle et je n'hésite que quelques secondes avant de le faire. « Je l'ai bien vu tout à l'heure, tu as pu utiliser cette… cette magie… »

« Morrighan. C'est son nom, Morrighan. »

« Très bien alors, comment tu as pu l'utiliser avec si peu de réserve magique ? »

« Je… » J'hésite un temps mais son regard me convainc de tout lui révéler. « Je ne la contrôle pas vraiment et ces derniers jours c'est encore pire. Je n'ai pas vraiment pu me reposer depuis cette histoire avec… avec ta mère. » Je guette sa réaction mais, comme elle ne semble pas se replonger dans des souvenirs douloureux, je poursuis. « Ma propre magie ne se régénère plus comme avant mais j'en ai parfois besoin ! Et Morrighan en profite pour prendre le dessus. Parfois je ne le sens même pas quand je l'utilise, c'est instinctif et involontaire. »

« C'est peut-être à cause de cette magie que la tienne ne se régénère plus. » Ma mère me fait remarquer.

« Je ne sais pas, j'en doute. Tous ceux qui ont connaissance de cette entité semblent penser qu'elle n'est pas mauvaise alors que moi… »

« Qu'est-ce qui te fait penser le contraire ? »

« C'est ma marraine. » J'explique alors. « Enfin, c'est comme ça que cette sorcière voulait que je l'appelle. Elle n'était pas une bonne personne et si elle m'a choisi, moi parmi toutes les autres, c'est à cause de cette magie. Elle voulait la puissance de Morrighan pour accomplir… je ne sais quoi. Si elle le voulait, alors ça ne peut pas être une bonne chose. »

« Ça dépend peut-être de la nature de l'hôte, tu y as pensé ? » Ma mère cherche à me rassurer. « Morgane, regarde-moi. » Je n'hésite pas et plonge mon regard dans le sien. « S'il y a une chose dont je suis sûre, c'est que tu es quelqu'un de bien. Je ne t'aurais pas pourchassé aussi ardemment si tu ne me rappelais pas à tout ce que je n'étais plus. »

« Mais tu pourras le redevenir. » Je dis avec conviction, ce qui la fait sourire.

« Peut-être, mais pour l'instant c'est de toi dont il est question, pas de moi. Je ne veux pas que tu aies peur de cette magie parce que plus tu la crains, moins tu la contrôles. »

« Je peux essayer. »

« Et tu y arriveras. Quand ce sera le cas, je te laisserai peut-être partir à l'aventure comme tu l'entends. » Il semble lui en coûter de dire ça mais ça aura au moins eu le mérite de me remonter le moral.

« Alors j'en parlerais à Merlin, il saura sûrement m'aider. »

« Merlin ? »

« C'est une longue histoire. »



Je vois bien qu'elle allait chercher à en savoir plus mais une sensation étrange m'envahit soudain. Je crois que c'est la même chose pour elle parce que son regard s'est éclairé. Elle doit comprendre quelque chose qui m'échappe.



« Tu l'as senti aussi, pas vrai ? »

« Oui. »

« Qu'est-ce que c'était ? » Je demande, appréhendant sa réponse.



Elle allait sans doute me répondre mais le Clan Charmant est de retour avec Henry. Celui-ci, à ma grande surprise, se précipite dans les bras de notre mère. Peut-être qu'il commence à se rendre compte qu'il a de la chance de l'avoir et qu'il ne devrait pas la gâcher.

C'est là qu'une grande secousse les interrompt et je comprends enfin. Cette sensation tout à l'heure, j'ai dû ressentir l'activation du diamant. Et cette secousse à l'instant, ça a commencé. La destruction de Storybrooke est en marche.



« Regina, est-ce que c'est… ? » Emma commence mais ma mère la coupe.

« Oui, le diamant a été activé. »

« Alors on va tous mourir ? » Henry demande.

« Non, toi tu es né ici alors tu ne risques rien. »

« Mais… » Son regard passe sur chacun de nous avant de s'arrêter sur notre mère. « Je vais me retrouver tout seul. »

« Si tu savais comme je regrette Henry. »

« Non, ça n'arrivera pas ! » Je m'exclame en même temps qu'Emma

« Arrêtez ce truc. » Emma poursuis. « Trouvez une solution ! »

« Quelle solution ? On ne peut pas l'arrêter ! »

« Débrouillez-vous, c'est votre faute ! »

« Arrêtez de vous disputer ! » Henry intervient. « J'ai déjà perdu mon père, je veux pas perdre encore quelqu'un de ma famille. Il faut qu'on s'unisse pour sauver la ville. »

« La vérité sort de la bouche des enfants. » Je me tourne vers la porte juste à temps pour voir Crochet arriver. « Il a raison votre petit gars. » A ma grande joie, David vient lui foutre un coup de poing en pleine figure.

« Ça, c'est pour la dernière fois qu'on s'est croisés. » Il s'explique en sortant son arme. « Dis-nous ce que tu fais ici avant que je me serve d'autre chose que de mes poings pour te faire parler. » Il menace en s'approchant de Crochet.

« Tu crois vraiment que tes menaces me font peur ? On va probablement tous y rester de toute manière. »

« C'est un peu de votre faute. » Emma lui fait remarquer. « On sait que vous vous êtes allié à Tamara et Greg pour pouvoir tuer Gold. »

« La petite a parlé finalement ? » Son regard se tourne vers moi et je fais tout pour ne pas afficher mon dégoût. « C'était avant qu'ils m'expliquent que j'allais moi aussi être anéanti. »

« On n'a pas de temps à perdre avec lui, on a un gros problème. »

« C'est pour ça que je suis là. Voir la mort en face m'a fait comprendre que s'il y a quelque chose qui m'importe plus qu'assouvir ma vengeance, c'est bien de rester en vie. Alors évitons la destruction de la ville et reprenons nos querelles. »

« Il n'y aucun moyen d'enrayer le processus. » Ma mère explique d'une voix grave. « Le mieux que je puisse faire c'est le ralentir mais ça ne fera que retarder l'inévitable. »

« Ou nous donner le temps dont on a besoin. » David nous fait remarquer.

« Dont on a besoin pour quoi ? »

« Récupérer les haricots, s'en servir pour renvoyer tout le monde dans la Forêt avant que Storybrooke ne disparaisse ! »

« Comment ? On sait même pas où sont Greg et Tamara. » Emma lui rappelle.

« Moi je le sais et je vais vous y emmener. » Crochet propose avec un sourire.

« Pour voler les haricots et partir sans nous ? Pourquoi on vous ferait confiance ? »

« On va pas lui faire confiance. J'irai avec lui, s'il nous trahit je lui collerai une balle dans la tête. »

« Tu n'es pas du genre amical toi, hein ? »

« Autant que ce soit clair. »

« J'emmène Regina ralentir le processus. » Emma reprend. « Henry, Mary-Margaret, réunissez tout le monde, ils doivent être prêts quand on aura les haricots. »

« Et moi je vais avec Crochet. » Je ne laisse pas à Emma l'occasion de me dicter quoi faire. « Et ce n'est pas discutable. » J'ajoute à l'attention de ma mère. « Si on veut être sûrs de récupérer ces haricots, on doit être certains d'avoir le dessus sur eux. Avec moi, on l'aura. »

« Très bien, mais sois prudente. » Ma mère accepte face à l'évidence.

« Enfin maman ! Tu sais bien que la prudence n'entre pas dans mon vocabulaire ! » Ma blague ne la fait pas rire mais elle est distraite quand elle voit Henry partir.

« Henry, avant que tu t'en ailles. » Elle le retient puis lui fait face. « Je te demande pardon pour ce que j'ai fait. J'ai essayé d'être la personne que tu voulais que je devienne et je n'y suis pas arrivée. Mais je ferais tout pour que tu ne te retrouves pas seul au monde et je veux que tu saches que je t'aime. »

« Moi aussi je t'aime. »



Je n'ai pas besoin de voir l'expression de ma mère pour savoir qu'elle est au bord des larmes. Il y a longtemps qu'Henry ne lui a pas dit ces mots et ils ne pouvaient pas mieux tomber. Je ne suis pas idiote, j'ai compris ce qu'elle voulait vraiment dire avec cette tirade. Mais je ne dis rien et me contente de regarder mon petit frère enlacer ma mère, un sourire las sur mon visage. Je note également le regard que ma mère échange avec Emma avant que cette dernière ne quitte la pièce avec Henry. Quand ma mère s'apprête à les suivre, je la retiens.



« Ne crois pas que je suis stupide. »

« Je n'ai jamais dit que tu l'étais. » Elle se défend immédiatement.

« Non mais là, ce qu'il vient de se passer, c'était une scène d'adieu. Alors dis-moi la vérité, qu'est-ce que ça te coûtera ? »

« De quoi tu parles Morgane ? »

« Arrête de me mentir ! » Je réplique immédiatement. « Je sais que tu peux nous gagner assez de temps pour récupérer les haricots mais j'ai peur de te perdre du même coup. » Son regard suffit à me faire comprendre que j'ai raison, elle pense mourir en faisant cela. « Je ne te laisserais pas faire ! »

« C'est la seule solution et tu le sais. »

« Partez devant ! » J'exige en me tournant vers David et Crochet. Ils s'exécutent en silence et j'attends qu'ils soient sortis pour continuer. « Je ne te laisserais pas faire ça ! S'il le faut, je viendrais avec toi pour t'aider. »

« Il n'en est pas question, c'est trop risqué ! »

« Je refuse de te perdre ! » J'ai le souffle coupé face à sa résignation et je sens les larmes me monter aux yeux. « J'ai encore besoin de toi maman, Henry a besoin de toi, ne nous laisse pas ! »

« Tu avais raison sur une chose Morgane, ils ont besoin de toi. Dès que tu auras repéré Mendell, tu pourras prendre les haricots et tu me sauveras, comme toujours. »

« Et si je n'arrivais pas à temps, comme tout à l'heure ? » Je doute encore, le souvenir de mon échec est très frais dans ma mémoire.

« Je sais que tu y arriveras, parce que tu n'auras pas peur d'utiliser tout ton pouvoir cette fois. » Elle vient prendre mon visage entre ses mains et sèche les quelques larmes qui m'ont échappé. « Mais si jamais… »

« Non, s'il te plaît ne dis pas ça. » Je l'interromps en sachant pertinemment ce qu'elle allait dire.

« Je veux que tu saches que je t'aime et que je suis terriblement fière d'avoir pu être ta mère. »

« Je t'aime aussi. » Je n'hésite pas à répondre en me jetant dans ses bras.



***



On a décidé de se séparer. Enfin, j'ai imposé à David et Crochet de se séparer. Je préfère ne pas partir à l'aventure avec ce pirate manchot. De toute façon, ça ira plus vite si on couvre plus de terrain. Je marche aussi silencieusement que possible et tend l'oreille. C'est là que j'entends un coup de feu et je me précipite dans cette direction. Sûrement que David et Crochet les ont trouvés, j'espère juste que c'est David qui a tiré. Quand j'arrive à leur hauteur, je vois Greg s'éloigner.



« Qu'est-ce que vous faites ? Il faut les suivre, ils ont les haricots ! »

« Pas la peine, j'en ai un. » Crochet nous montre l'objet en question.

« Alors allez le ramener aux autres, moi je m'occupe de ce crétin. »

« On n'a plus beaucoup de temps ! » David tente de me rappeler.

« J'en aurais bien assez. » Je réplique et, pour une fois, je fais moi-même appelle à Morrighan. « Cette fois, il ne s'en sortira pas. »



Je ne leur laisse pas le temps de me répondre et je cours dans la direction vers laquelle Mendell est parti. Ça ne me prend que quelques minutes pour les rattraper mais, encore une fois, ils me prennent par surprise. Tamara pointe son arme sur moi et tire avant que je ne puisse réagir. Je tombe à genoux sous la douleur et elle en profite pour revenir vers moi. Elle me passe un bracelet autour du poignet et me regarde avec un sourire démoniaque.



« Cette fois, c'est fini pour toi petite princesse. »



Je comprends qu'il s'agit là d'un même genre de bracelet que celui qu'ils ont mis à ma mère et, en effet, quand j'essaye d'invoquer ma magie rien ne se passe. J'exprime ma frustration en frappant dans une caisse en bois qui se trouvait juste à côté. Et maintenant, qu'est-ce que je fais ? Une idée me vient et je me fige un temps. Est-ce que j'oserai ? Je n'ai pas le choix, je dois faire vite et trouver un objet coupant. Je regarde autour de moi. Heureusement, on est encore sur les docks et j'aperçois à quelques mètres de là un étal de poissonnier. Je m'en approche et cherche un peu partout jusqu'à trouver ce qu'il me faut.



« L'instant de vérité. » Je me dis à moi-même en regardant le hachoir que je viens de prendre en main. « Des fois, ma grande, tu es vraiment cinglée. »



Je pose ma main sur l'étal, relève ma manche et prends une grande inspiration. Sans trop réfléchir, je viens abattre le hachoir d'un coup sec sur mon poignet, juste en-dessous du bracelet. La douleur est immédiate et fulgurante, tellement que j'en tombe à genoux. Il me faut plusieurs secondes pour reprendre mes esprits et c'est une voix qui me tire de ma souffrance. "Ressaisis-toi !" Je l'entends m'appeler et, d'un coup, ma magie s'active et ma main revient prendre sa place. La douleur passe et j'inspecte mon poignet. Plus aucune trace du bracelet et surtout, personne ne saura jamais que j'ai dû me couper la main pour ça. Ce ne sera pas visible en tout cas.

Maintenant que j'ai l'esprit plus clair, une chose me paraît évidente : la destruction est toujours en marche et aucun portail n'a été activé. Qu'est-ce qu'ils font ? Je me concentre, invoquant toute la puissance de Morrighan et je repère alors facilement l'énergie de ma mère. Sans réfléchir, je m'y téléporte et j’atterris dans les mines.

Je vois d'abord ma mère, toujours aux prises avec le cristal. Emma, Blanche, David et Henry sont là. Pourquoi ? Ils devraient être chez Granny avec les autres, en train de partir vers Mist Haven !



« Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi vous n'avez pas ouvert le portail ? »

« Crochet est parti avec le seul haricot qu'on avait. » Emma m'explique, l'air abattue.

« Pardon ? Vous l'avez laissé s'échapper avec ? » Je me tourne vers David en disant ça, lui qui avait promis de le garder à l'œil. « Ça ne peut pas se passer comme ça ! »



C'est là que ça me revient et je n'arrive pas à croire que je n'y avais pas pensé avant. Sans plus d'explication, je me téléporte dans un nuage de fumée bleue et je me retrouve dans le caveau de ma mère. Là, je me précipite vers la boîte où je les ai caché. Quand je l'ouvre, ils sont encore tous là mais c'était évident. Personne ne peut briser un Charme du Sang, sauf une personne qui possède le même sang évidemment et dans mon cas, cette liste se résume à "personne".

Je prends une petite sacoche où j'en ai placé cinq. Un seul haricot suffirait mais je n'ai pas le temps de chercher plus longuement. Je referme la boîte et je me téléporte immédiatement. Dès que j'arrive, une vague de magie m'envoie voler plusieurs mètres en arrière. Le souffle coupé, je mets un peu de temps à reprendre mes esprits mais très vite je m'en aperçois : la destruction est arrêtée. Je ne sais pas comment ils ont fait, mais le cristal est inactif.

Je me relève d'un bond et regarde en direction de ma mère. Elle va bien, en tout cas elle en a l'air. Elle est déjà debout elle aussi et je n'hésite pas plus longtemps avant de courir me jeter dans ses bras.



« Tu nous as tous sauvé ! » Je m'exclame en resserrant mon étreinte.

« Je n'ai pas fait ça toute seule, Emma m'a aidée. »



Surprise par cette révélation, je m'écarte un peu de ma mère et tourne mon regard vers la Sauveuse. Emma se contente de hausser les épaules avec un petit sourire, l'air de dire que ce n'était pas grand chose. Mais ça représente tout pour moi alors je m'approche d'elle jusqu'à ce que quelques centimètres nous séparent.



« Merci. » Je murmure avant de la serrer elle aussi contre moi.

« Oh tu sais, ce n'est rien. »

« Ne dis pas ça. » Je réplique d'un ton léger en m'écartant d'elle pour retourner auprès de ma mère. « Vous nous avez tous sauvé. »

« C'est vrai. » Mary-Margaret me soutient. « C'est grâce à vous et à Henry. »

« Il faut reconnaître qu'une fois de plus il avait raison. »

« Oui, c'est vrai. » Emma approuve. « Heureusement que t'es là, hein ? »



C'est là que tout le groupe se tourne vers mon petit frère. Ou plutôt, le dernier endroit où il a été vu. Mon regard parcourt le reste de l'endroit mais rien.



« Henry ? » Emma appelle et, par précaution, va voir plus loin dans les galeries.



On la suit tous, chacun alternant pour appeler Henry mais il ne répond pas. On continue d'avancer jusqu'à ce qu'on tombe sur son sac à dos.



« Ils l'ont enlevé. » Emma comprend alors.



On se précipite à l'extérieur de la mine et là, tout le monde hésite. En regardant autour de moi, rien n'indique clairement dans quelle direction ils sont partis. Mais grâce à Morrighan, le chemin m'apparaît rapidement.



« Par là. » Je dis alors aux autres en commençant à marcher.

« Comment tu peux en être aussi sûre ? » Emma me demande immédiatement et, même si je comprends son inquiétude, je ne crois pas qu'on ait du temps à perdre avec ça.

« Écoute Emma, soit on reste ici à discuter de comment fonctionne la magie, soit tu me fais confiance et va aller récupérer Henry. »



Mon ton et mon regard devaient être assez sérieux parce qu'elle acquiesce et on se met en route sans plus d'interruption. La trace me mène jusqu'aux docks et on les aperçoit de loin. On arrive juste à temps pour voir Mendell jeter quelque chose dans l'eau.



« Le haricot magique. » Ma mère réalise pour tout le monde. « Il a ouvert une porte. »



Oui, et il compte emmener Henry avec lui ! On se précipite tous vers Greg et Tamara mais je sais déjà qu'on y arrivera pas. On les voit sauter directement dans le vortex et, le temps qu'on arrive à sa hauteur, le portail s'est refermé. Heureusement, David a retenu Emma juste à temps sinon la Sauveuse aurait eu droit à une petite baignade.



« Non ! Il faut les suivre ! » Emma s'exclame en se débattant. « Il y a forcément un moyen ! »

« On a plus de haricot magique et on ne sait même pas dans monde ils l'ont emmené ! »

« Trouvez une solution ! »

« Il n'y a aucun moyen de les suivre ! » Ma mère insiste et j'allais intervenir mais Emma prend la parole.

« Il doit y en avoir un, on ne peut pas les laisser partir avec Henry ! »

« Ils sont partis avec Henry ? » Gold arrive à son tour en compagnie de Belle et je décide de me taire pour l'instant. Je préférerais ne pas lui révéler que je possède des haricots. Les Charmants passent encore, mais pas le Ténébreux.

« Oui, fais quelque chose, utilise tes pouvoirs. »

« Gold, il faut nous aider ! »

« Je ne peux rien faire. Toute ma vie j'ai tenté de passer d'un monde à l'autre pour trouver mon fils. Il n'y a qu'en ouvrant une porte qu'on peut partir d'ici. »

« Alors c'est fini ? » Ma mère demande. « Il a disparu pour toujours ? Je refuse d'accepter cette idée. »

« Ça ne sera pas la peine. » Je décide d'intervenir, puisqu'il n'y a pas d'autres solutions. « D'abord, j'ai besoin de savoir si le Ténébreux a un moyen de savoir dans quel monde se trouve Henry. »

« A quoi bon, sans porte… »

« Ça je m'en occupe. » Je l'interromps sèchement. « Répondez simplement à ma question. »

« J'en aurais un oui. » Il admet finalement.

« Bien alors. » Avec un soupir, je sors la petite sacoche de ma poche et en extrait un haricot.

« Tu en avais encore un ? »

« Pourquoi tu n'as rien dit ? »

« Où est-ce que tu l'as eu ? » Les Charmants me demandent alternativement. Ma mère sait alors elle ne dit rien et moi j'invente un mensonge.

« Quand j'ai poursuivi Greg et Tamara, j'ai réussi à le leur prendre avant qu'ils ne m'immobilisent. »

« Il ne reste qu'à trouver un moyen de transport alors. » Gold nous fait remarquer.

« C'est quoi ça ? » Belle demande en attirant notre attention vers le large.



Et je le vois, il est difficile à rater. Là, au loin vers l'horizon, un voilier. Sans nul doute le Jolly Roger, fidèle bâtiment du Capitaine Crochet. Alors lui, quand je lui mettrais la main dessus…



***



Il prend son temps pour poser pied à terre en plus ! Je vous jure ce maudit pirate, je lui couperai bien l'autre main !



« Qu'est-ce que vous faites ici ? » Emma lui demande.

« Je viens vous aider. »

« Vous arrivez trop tard. »

« Vraiment ? » Crochet semble toujours très sûr de lui.

« Je croyais que vous faisiez passer vos intérêts avant tout le reste. »

« J'avais besoin de m'assurer que je pouvais toujours le faire. » Il dit en tendant une sacoche en cuir à Emma, celle qui contient le haricot original.

« Pour ça aussi vous arrivez trop tard. » Je rétorque en montrant mon propre haricot à Crochet. Pour une fois, il semble perdre de sa superbe.

« Quoi ? Où l'avez-vous trouvé ? »

« Au même endroit que vous, sur Greg Mendell. »

« Maintenant nous devons y aller. » Ma mère nous rappelle.

« Où ? On ne devait pas sauver la ville ? »

« On s'en est chargé. » David lui explique avec satisfaction.

« On cherche Henry, Tamara et Greg l'ont emmené dans un autre monde. »

« Si vous voulez vous lancer à leur poursuite, mon navire est à votre service. »

« C'est la moindre des choses après avoir risqué la vie de tout le monde. » Je lui fais remarquer et son regard vers moi est glaçant.

« Si vous êtes prêts, nous pouvons embarquer. » Crochet se contente de dire sans se détourner de moi.



Sans un mot de plus, je me lance la première et monte en direction du pont. Non pas que j'apprécie l'idée de voyager sur ce rafiot en compagnie du capitaine manchot, mais je veux aider à retrouver Henry. Même ma mère ne m'en empêchera pas. Alors ok, peut-être que j'ai totalement échoué sur tous les tableaux aujourd'hui, mais je sais que je peux me rattraper.

Il faut quelques minutes avant que tout le monde soit rassemblé sur le pont et on se regroupe immédiatement autour de Gold.



« Alors, tu as renoncé à me tuer ? » Gold demande à l'attention de Crochet.

« J'en ai bien l'impression. »

« Excellente nouvelle ! Je vais pouvoir te laisser la vie sauve. » Ça sonne comme une menace aux oreilles de tout le groupe mais je ne pense pas que Gold en ait quelque chose à faire.



Il se contente d'un geste nonchalant de la main qui fait apparaître un globe vierge. Quand le nuage s'est dissipé, Gold s'approche du globe et vient piquer son doigt à la pointe qui se trouve à son sommet. Il laisse ensuite tomber une goutte de sang sur le globe et la magie opère. Une fumée rouge se déplace sur la surface avant de former une carte.



« Quel est cet endroit ? » Ma mère demande après l'avoir scruté un peu. « Où ont-ils emmené Henry ? »

« Au Pays Imaginaire. » C'est Crochet qui répond alors que personne ne semblait avoir la réponse.



Ils semblent tous inquiets à cette perspective mais j'ignore quel genre d'histoires il se raconte sur ce pays. Je n'y ai jamais mis les pieds et je n'en ai jamais entendu parler. A part, évidemment, si l'on prend en compte les films qui en ont été faits dans ce monde. Mais quelque chose me dit que ce sera très différent.

Sans plus tarder, on prend la mer direction le large. D'après Crochet, il faut une sacré profondeur et assez de vitesse avant de jeter le haricot à la mer. Je vais lui faire confiance sur ce coup, la navigation ça le connaît.

 

« Qui sont vraiment Greg et Tamara ? » David demande d'une voix assez forte pour couvrir le bruit des vagues et du vent.

« Ce ne sont que des pions. » Gold lui répond sur le même ton. « Manipulés par des forces bien plus puissantes qu'ils ne pourraient le concevoir. Ils ne savent même pas pour qui ils travaillent réellement. »

« Et pour qui ils travaillent ? » Emma demande alors mais la réponse me paraît claire à moi.

« Quelqu'un que nous devrions tous redouter. »



Plus personne n'a le temps d'ajouter quoi que ce soit, on approche du vortex. Comme le bateau n'émet aucune résistance, il glisse facilement dans le portail. Et nous voilà partis pour le Pays Imaginaire.

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