
Au Sanctuaire
SEIYA
Je tournais en rond depuis des heures devant la maison du bélier. Saori...Athéna n'était toujours pas revenue, et mes nerfs avaient depuis longtemps dépassé leur limite.
-"Arrêtes, Seiya, tu me donnes le tournis..." Se plaigna Kiki, adossé contre une colonne du temple et à moitié endormi, muni d'une couverture chiffonnée pour se couvrir de la fraîcheur nocturne. Il avait bien grandi, en 3 ans. À présent, il faisait presque la taille que j'avais lors de la guerre sainte. Bien sûr, j'avais aussi pris des centimètres depuis tout ce temps. Pas autant que Shun, bien sûr. Mais j'avais pour fierté personnelle d'avoir dépassé Ikki il y avait quelques mois de cela. Il avait fait mine de rien, mais je savais qu'au fond de lui il devait bouillonner.
J'ignorai sa demande pour me tourner vers Shun, qui gardait le regard religieusement braqué sur l'écran de son téléphone.
-"Shiryu et Hyoga ! Est ce qu'ils ont envoyé des nouvelles ?" Ma voix dérailla un peu vers la fin. C'est vrai que je n'avais pas bu ni mangé de la journée. Rien ne voulait rentrer.
-"Non, tu aurais entendu ma sonnerie, sinon." Se contenta-t-il de répondre. On voyait bien aux cernes sous ses yeux et à sa mine déconfite qu'il n'avait pas beaucoup dormi ses derniers jours.
Il y a un peu moins de deux semaines, la Déesse Athéna à laquelle nous, chevaliers du sanctuaire, étions dévoués, avait disparu en ne laissant qu'une courte lettre nous demandant de ne pas la rechercher. C'était impossible. Malgré le peu d'effectifs qu'il nous restait, la quasi totalité des chevaliers restants du sanctuaire avait été mobilisée pour la retrouver. Il ne restait au sanctuaire que nous trois.
Kiki de toute manière n'était pas un chevalier, et Shun, dont l'âme avait été formée à partir de celle de notre ancien ennemi le Dieu Hadès, était une cible beaucoup trop facile et était interdit de quitter le sanctuaire non accompagné. Quant à moi, j'avais été jugé trop indiscret et impatient dans mon état pour aider les autres. Après toutes ces années ! J'étais furax, bien entendu, mais surtout inquiet pour elle. J'avais peur qu'un Olympien l'ai menacée. Depuis qu'elle avait assumé son statut de Déesse, Saori avait une sale tendance au sacrifice corporel. Ne pas pouvoir lui venir en aide remuait désagréablement mes organes.
-"Mais ou est ce qu'elle est passée, nom d'un chien ?!" J'élevai instinctivement la voix en tapant du pied la colonne qui se trouvait sur mon chemin. Mon agacement augmentait en même temps que ma fatigue.
-"Si tu pouvais éviter de détruire ma baraque, hein." Nota sèchement l'ancien apprenti du bélier. Il n'était, comme je l'avais mentionné, pas chevalier, mais suite au décès de Mû, il ne restait plus que lui au sanctuaire qui possédait des connaissances en matière de réparation d'armures. En attendant qu'un nouveau chevalier du bélier soit formé, il résidait dans le temple, ou se trouvait tout l'attirail nécessaire à son office.
Au lieu de lui répondre, je m'éloignais en grommelant. Je n'avais ni envie de me battre, ni de m'excuser, mauvais caractère oblige.
Mes pas me menèrent devant l'entrée de la maison du taureau, qui était vide depuis 3 ans à présent. Toutes les maisons du zodiaque étaient privées de leur chevaliers, à présent. Mes compagnons et moi même, nous avions prouvés par le passé que nous étions dignes de porter des armures d'ors. Mais par fierté, et surtout par respect envers nos aînés, nous avions unanimement décidés de ne pas revêtir leur armures. De mon côté, c'était pour le mieux. Je me sentais bien plus à l'aise en tant que pégase. C'était avec cette armure que j'avais affronté les plus grands dangers, après tout. Je me sentais proche d'elle, et n'était pas prêt à la délaisser.
Machinalement, je sortais de ma poche la lettre laissée par Saori. Je connaissais son contenu par coeur, mais je ne pouvais pas m'empêcher de la relire encore et encore, dans l'infime espoir d'y trouver un indice caché.
"Chers Chevaliers.
Ne venez pas à ma recherche. Je reviendrais en temps voulus.
C'est une mission que moi seule peut, non, doit accomplir.
À notre retour, ayez confiance.
Athéna. Et Saori."
"Notre retour..."
C'était cette partie qui m'intriguait le plus. Avec qui comptait elle retourné ? Aux début, nos soupçons s'étaient portés sur Poséidon, ou plutôt son hôte Julian, mais dans ce cas elle ne se serait pas envolée de cette manière. Nous étions alliés depuis trop longtemps pour ça. Mais qui, dans ce cas ? Je priais pour qu'elle ne soit pas allée demander grâce aux Olympiens.
Dans l'état actuel du sanctuaire, nous n'avions aucune chance si ils décidaient de lancer leurs armées sur nous. Davantage de chevaliers avaient survécu qu'après la dernière guerre sainte, ou seuls les chevaliers Shion du bélier et Dohko de la balance, aussi connu comme étant le vieux maître des cinq pics, n'étaient pas tombés au combat. Mais ils étaient des chevaliers d'ors accomplis et capable de gérer un sanctuaire en ruine. Aujourd'hui, ils n'y avait que nous, les chevaliers de bronze, ainsi que Marine et Shaina. Les autres étaient mort pendant les 16 dernières années, par la main de Saga, des Dieux...Ou de la nôtre. Nous étions parvenus à vaincre le seigneur Hadès par le passé, mais nous étions à 6 contre lui et c'est Saori, une déesse, qui avait porté le coup de grâce. Et puis...
Je portais instinctivement ma main contre ma poitrine
Avant que son corps ne soit détruit, Hadès m'avait porté un coup au coeur, qui aurait dû m'être fatal. Pendant plus d'un an, je me retrouvais coincé dans une sorte de purgatoire étrange. Mes souvenirs de cet endroit s'étaient peu a peu effacés, mais j'en gardais la marque indélébile sur mon torse. J'avais peu a peu repris du poil de la bête, mais mes capacités avaient étés définitivement affectées.
Tandis que je ruminais, j'entendis Kiki m'appeler au loin.
-"Seiya ! Vite !"
Mon sang ne fit qu'un tour, et je me précipitais en courant en bas des escaliers. Kiki m'y attendais, ses yeux bleus écarquillés. Il était pâle comme un revenant.
-"Saori ! Elle..." Il ne fallait pas en dire plus. Je passais devant lui en le regardant à peine, mais le bruit de ses pas derrières moi m'indiqua qu'il me suivait de près.
Devant l'entrée de la maison, je vis Shun dans une position défensive, des chaînes de cosmos enroulées autour de ses bras dépourvus d'armure. Je suivais son regard pour tomber sur un spectacle inattendu.
Savoir était bel et bien là, mais elle était inconsciente. Une silhouette encapuchonnée la tenait à bout de bras. Je me sentis défaillir. Tandis que la voix de mon ami résonnait dans mes oreilles.
-"Qui êtes vous ?? Que lui avez vous fait ?! Répondez, vite !" Énonça t'il d'une voix qui se voulait sévère.
Pour tout réponse, la silhouette se contenta de la déposer par terre. Pas violemment, mais sans égards particuliers.
Je me ressaisis en voyant la poitrine de Saori se soulever. Elle était vivante. Les derniers mots de sa lettre me revinrent au même moment en tête.
"Notre retour. Ayez confiance."
Est ce qu'elle parlait de lui ? Pour une fois dans ma vie, je tâchai de garder mon calme et me tournai vers la silhouette.
-"Qui êtes vous ?" Lui demandais-je avec le moins d'animosité possible. Je sentis le regard inquisiteur de Shun se poser sur moi. "Je crois qu'elle parlait de lui, dans sa lettre..." Lui chuchotai-je alors, en attendant la réponse de l'autre.
Il comprit de suite et se tourna lui aussi vers l'inconnu.
Au bout d'une moment qui me sembla durée une éternité, il se décida enfin à parler.
-"Je suis Asclépios, dieu de la médecine et fils d'Apollon. À compter de ce jours, je suis une divinité de ce sanctuaire, à l'instar d'Athéna." Il nous invita d'un geste de la main à venir la récupérer. "En ce qui concerne son état, elle se fera un plaisir de tout vous raconter à son réveil. Sachez juste que je ne lui ai rien fait qu'elle n'ai souhaité."
Sa dernière remarque me fit lever un sourcil, mais Saori passait devant tout. Nous nous précipitâmes vers elle. Elle ne semblait pas dans un coma, mais plutôt profondément endormie. Nous la portâmes ensuite jusqu'à une chambre de la maison du Bélier. L'inconnu, ou Asclépios, comme le prétendait, nous suivi sans dire un mot. Il portait toujours son capuchon rabattu sur son visage, aussi son expression restait indescriptible.
Une fois Saori installée dans le lit, nous dûmes attendre son réveil pendant quelques heures. Kiki et Shun étaient occupés à prévenir nos contacts du retour de la déesse et moi, je la surveillais, elle et la divinité qui l'avait amenée. Ma foi, il n'était pas contraire. Il s'était installé sur une chaise près de la fenêtre et regardait au dehors, visiblement peu inquiet de l'état de Saori. Son attitude me déplaisait mais il ne semblait pas hostile. J'angoissais a l'idée de découvrir ce qu'il s'était produit entre les deux pour que notre déesse se retrouve ainsi. Je relisait encore et encore sa note.
Qu'elle était donc cette chose qu'elle seule pouvait accomplir ? Nul doute que ça impliquait l'arrivé d'Asclépios au sanctuaire. Asclépios... Je n'avais jamais été bon éleve aux cours d'histoire mythologique de Marine, au point de carrément oublier l'existence d'Hadès jusqu'à ce que les chevaliers ressuscités "attaquent" le Sanctuaire.
Je sentis un frisson me parcourir l'échine en me remémorant cette époque sombre.
Toujours est-il qu'en dehors de ce qu'il nous avait révélé, j'ignorais tout de ce type. Sans doute Kiki et Shun en savaient ils plus, mais ils n'étaient pas là en ce moment. Il n'y avait qu'un lourd silence dans la pièce.
"Ce que elle seule pouvait accomplir...Mademoiselle Saori..."
Je regardais son visage endormi, pensif. Bien sûr, elle était toujours aussi jolie, peut être même encore plus qu'à l'époque où nous nous étions retrouvés. Ses grand yeux, qui d'habitude rayonnaient d'un bleus sombre et profond étaient clos. Ses longs cheveux violets, qui semblaient avoir pâlis depuis la dernière fois que je l'avais vue, entouraient son visage fin, son nez droit et sa petit bouche aux lèvres opulentes.
Malgré sa beauté éclatante, notre amourette enfantine de l'époque s'était depuis longtemps muée en un profond amour fraternel. Saori était devenue au fil des années comme notre sœur à nous, les chevaliers issus de la fondation Graad. Logique, au fond, puisqu'elle avait été adoptée par notre père, Mitsumasa Kido. Nous n'étions que les bâtards de Kido, et beaucoup d'entre nous ne souhaitaient pas être officiellement associés à cet homme. Mais Saori n'y était pour rien. Depuis qu'elle avait assumé le rôle d'Athéna et nous celui de chevaliers, elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour nous offrir une vie normale. Mais à quoi bon. On est trop têtus. Moi en particulier. Je m'étais il y a des années de cela juré de la protéger, quoi qu'il en coûta.
Le son de bruits de pas dans le couloir me sortirent de mes pensées. Je vis la porte de la chambre s'ouvrir et le visage de ma soeur apparaître. Son expression changea en voyant la déesse.
-"Saori...!" Elle se précipita vers elle, l'inquiétude déformant ses traits. Je n'avais jamais su déterminer si je lui ressemblais ou non. Certes nous avions les mêmes boucles brunes, et les même yeux chocolats, et il était facile de deviner que nous venions de la même famille. Mais...Seika était le portrait craché de notre mère. C'était certain. Je ne l'avais connue que pendant les cinq premières années de ma vie, mais jamais je n'oublierai la douceur de ses traits. Quand à moi, j'en étais sûr, je ressemblais comme deux gouttes d'eau à mon grand père. Nous vivions chez lui, à l'époque, jusqu'à ce qu'un foutu accident de voiture ne nous les prennent. Longtemps, je m'étais demandé quel genre de vie nous aurions menés si le destin en avait décidé autrement. Nous serions peut être restés à Okinawa. J'aurais peut être bossé dans la confiserie de notre grand père pour aider à payer les études de Seika...
Seika qui, après avoir passé un linge humide sur le front de Saori, s'approcha de moi et me demanda discrètement ;
-"Seiya...Qui est cet homme ? Il me fait peur. Je n'ai pas confiance."
J'hésitais sur la formulation de ma réponse, quand l'homme en question répondit à ma place.
-"Asclépios. Je suis Asclépios. Ma foi, Athéna n'instruit-elle donc pas son propre personnel ? Pourtant je suis un fils d'Olympien qui figure parmi les mythes. Honnêtement, pour ce que je m'apprête à accomplir pour vous tous, je m'attendais à davantage de reconnaissance. J'imagine qu'Athéna a réellement gardé notre marché secret, au vu de vos réactions."
Décidément, je n'aimais pas ce type. Mais il venait de nos donner des indices précieux.
-" Quel marché ?!! Parlez nom d'un chien !" Je hurlais, pris d'assaut par mes sentiments. Mais je me repris rapidement, le mot de Saori toujours en tête. "S'il...s'il vous plaît ?" Je commençais à me souvenir pourquoi je n'étais jamais désigné pour les missions qui recquièraient du sang froid.
En dépit de sa capuche, je sentis tout le poids du regard que ma lança Asclépios.
-"...Même si je le voulais, votre déesse m'a fait jurer de lui laisser vos expliquer ce qui est en train de se passer. Il tourna sa tête vers l'horloge en bois qui ornait le mur de la pièce. "Elle devrait se réveiller sous peu. Un peu de patience, gamin."
Au moment ou il finissait de parler, Shun et Kiki entrèrent dans la pièce.
-"Voilà, tout le monde est en train d'être prévenu. Shiryu, Hyôga et Ikki ne devraient pas tarder à revenir au Sanctuaire, quelques jours tout au plus." Expliqua Shun à voix basse, comme si il ne voulait pas déranger l'ambiance solennelle qui avait envahi l'endroit.
-"Comment elle va ?" Demanda Kiki, plus direct.
-"Elle devrait bientôt se réveiller...Enfin, j'espères."
Comme si elle avait entendu mes craintes et avait souhaité me rassurer, Saori émis un gémissement à cet instant précis. Ses paupières se mouvèrent lentement et elle finit par ouvrir les yeux sous nos yeux ébahis.
-"Mademoiselle Saori !" Seika se précipita pour l'aider à se relever dans son lit. Elle semblait très engourdie.
-"Je...Suis-je au Sanctuaire...?" Elle demanda d'une voix faiblarde.
-"Oui !" Je m'empressais de répondre. Et nous sommes là, Shun et moi. Vous êtes en sécurité à présent." Je m'avançais peut être en affirmant cela, mais mon objectif à cet instant était de la rassurer et rien d'autre.
-"Seiya...Shun..." Elle regarda autour d'elle, jusqu'à ce que son regard croise Asclépios. Lorsqu'elle le vit, son expression changea.
-"..."
-"Saori ? Tout va bien ?"
-"...Oui. Où sont les autres ?"
-"Partis à votre recherche...Ils seront bientôt de retour..." Shun baissa les yeux, honteux d'avoir encore une fois désobéi aux ordres de la déesse. Je gardai les miens fixés sur Saori. Son visage réfletait davantage une pensée profonde qu'un éventuel mécontentement.
-"...Je vois. Dès que tout le monde sera de retour, une réunion d'importance capitale aura lieu dans la salle du Pope. Faites savoir que tous les chevaliers stationnés au Sanctuaire devront être présents. En attendant, demandez à des serviteurs de préparer une chambre pour le seigneur Asclépios dans la palais du Pope, et emmenez moi deux servantes. Il a me falloir une heure ou deux pour me remettre sur pieds. Pendant ce temps, assurez vous qu'aucun intrus ne tente de percer la barrière protectrice du Sanctuaire. Nous allons être à risque, ces prochains mois."
Une fois ses ordres donnés, Saori demanda à rester seule avec Asclépios. Nous sortîmes de la pièce, silencieusement, avant d'allez nous charger de ce qui venait d'être demandé.
Décidemment, je n'aimais pas ça, mais ma confiance en Saori primait sur tout. Quoiqu'elle décide, se serait pour le bien de la Terre.