les démons de minuit

Jessica Jones (TV)
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les démons de minuit
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Summary
Il avait finalement eu ce qu'il voulait. Ce qu'il avait commencé à désirer plus que tout alors même que cela lui était refusé.L'empire sur l'esprit de Jessica. Sur son âme. -Tu as besoin de moi. Ne le nie pas. Tu te sentirais vide, sans ça.
Note
Un petit OS qui m'est venu comme ça, en une heure, en écoutant du jazz noir. A lire en écoutant la BO de Jessica Jones !

Il avait finalement eu ce qu'il voulait. Ce qu'il avait commencé à désirer plus que tout alors même que cela lui était refusé. 
L'empire sur l'esprit de Jessica. Sur son âme. 

Pourtant mort de sa main, il continuait à la hanter, à la narguer, à l'attirer du côté sombre. Parce que son esprit, maintenant qu'il s'y était implanté de son vivant, avait besoin de lui. 

 

-Tu as besoin de moi. Ne le nie pas. Tu te sentirais vide, sans ça. 

 

Adossé à l'encadrement de la porte de son appartement, alors qu'un homme dormait dans son lit, l'homme en costume la fixait. Les mots voletèrent, troubles, dans l'air de fin de soirée. 
Jessica lui envoya un regard noir qui le fit rire. Grave et discret. Plein d'élégance et de raffinement, comme il en avait le secret. Il aurait pu être son type, s'il n'était pas un pur connard psychopathe. 

 

-Tu te trompes encore, Jessica. Apparemment, je suis sociopathe. 

 

A moitié plongé dans l'ombre, elle voyait quand même son sourire. 


Parfois, elle ne savait plus dire s'il était une hallucination produite par son esprit comme projection de son passé ou s'il était réel. Dans les deux cas, ça la faisait monstrueusement chier. Dire qu'elle avait senti son regard sur elle moins d'une heure plus tôt, alors qu'elle avait ramené un inconnu chez elle... 
Un début de nausée se faufila dans son corps à cette pensée qu'elle stoppa aussitôt. Kilgrave avait intérêt à la fermer. 

 

-Sociopathe de mes deux. Il n'y a même pas de mot assez fort pour exprimer à quel point tu es un enfoiré, répliqua Jessica à voix basse en farfouillant dans la cuisine.

 

Elle dégota une bouteille de bourbon, en but environ la moitié. 

 

-Oh, s'il te plaît. Je pense que tu as la part belle, et que tu omets de l'admettre. Des problèmes de conscience, ma chère Jessica...?

 

Ses poings se serrèrent. 

 

-Va te faire voir. 
-Alors ça, pour être ironique, c'est ironique. Très tentant, merci, mais je ne peux pas. Il n'y a que toi qui m'intéresse. 


 
Il la suivait partout, comme un de ces démons tentateurs. Mais même le diable n'arrivait pas à la cheville de Kilgrave lorsqu'il était d'humeur joueuse -traduisez d'humeur à la tourmenter. Kilgrave, ou bien... son esprit ?

 

-Nous nous égarons, tu ne trouves pas ? 
-Ferme-la.
-Admets que tu as besoin de moi. 

 

Jessica eut un mouvement de recul. Elle renifla d'un air méprisant, toisant de haut l'homme en costume pourpre. 

 

-Jamais, Kevin

 

Elle cracha le nom comme la pire des insultes, d'un ton mordant. La grimace sur le visage rasé de près de Kilgrave fit mouche, et Jessica se sentit satisfaite. Mais ensuite, le sourire de ce dernier fit faner cette joie mesquine. C'était un sourire qui indiquait qu'il avait quelque chose en tête. Et quand Kilgrave avait un plan, c'était non seulement dans le seul but de la tourmenter, mais ça voulait dire qu'il avait trouvé un levier sur elle. Quoi qu'il en soit, c'était très mauvais signe. 

Elle savait qu'elle aurait dû dormir, épuisée, avec l'homme qui chauffait la place à côté d'elle dans le lit. Mais dormir signifiait prendre un risque incommensurable. Et puis elle n'avait pas sommeil. 
La brûlure de l'alcool apaisa la tourmente. Mais ça ne fit pas disparaître le salopard qui se trouvait devant elle, en pleine nuit, à quatre heures du matin. 

Assis devant la table, mains croisées sur son torse, il la toisa d'un regard très sérieux. 

 

-Peut-être que prendre une bonne douche te ferait du bien... 

 

La femme brune tiqua. 

 

-Pervers. 

-Je ne suis que ton esprit, Jessica...

 

Son sourire revint. Quel... Il ne la lâcherait pas cinq minutes. Quittant la table, y déposant la veste de son costume au passage, il fit quelques pas vers elle. Il savait que la proximité physique l'avait toujours mise mal à l'aise. Surtout quand c'était lui. 

Elle le fixait d'un regard orageux. Ah, les trésors de la colère...

 

-Oh, allez, quoi... persifla-t-il d'une voix suave. Ne me dis pas que cette... épave ronflante sur ton lit - il désigna l'homme endormi - a réussi à te satisfaire..? 

 

La mâchoire de la femme se contracta. Elle préféra se détourner. Mais ses poings la brûlaient. Si elle finissait par lui coller une droite, ce ne serait pas le cœur qui manquerait. Mais elle préférait éviter d'abîmer son joli mobilier tout neuf. Il avait fallu tout racheter après son déménagement. Les frais d'Alias Investigations ne rapportaient pas encore assez. 

Le niveau ambré de la bouteille en verre avait encore descendu d'un cran. 
Seul un souffle répondit à l'homme qui avait semé la terreur dans New York par deux fois. 

 

-Je vais vraiment en arriver au suicide. Peut-être que tu arrêteras de hanter les gens, cette fois...

 

-Toujours si dramatique. Mais cela dit, je note que tu n'as pas répondu à ma question.

 

-Je ne parlerai pas de ça avec toi ! 

 

-Mais, Jessica... je crois qu'en fait... tu n'as pas besoin de me le dire. Je sais tout de toi, tes moindres petits secrets... et je connais ton corps. Tu ne peux pas me mentir. 

 

Il s'était de nouveau avancé, un sourcil relevé. Sa posture rappelait celle d'un fauve approchant sa proie, prêt à lui asséner le coup de griffe final. 
Jessica se figea. Alors qu'il posait une main sur son bras, elle fit volte-face, parant toute tentative avec trop de force, comme à son habitude. Le contenu de la bouteille tangua dans son récipient de verre, comme une tempête ambrée. 

 

-Et c'est TOI qui me dis de ne pas mentir, sale enflure ! sa voix commençait à atteindre les graves de la rage. 


-Je ne t'ai jamais menti. Tout ce que j'ai fait, c'était pour toi. 


Oubliant qu'elle débattait seule avec son esprit - Kilgrave semblait si réel, de toute façon, qu'elle doutait qu'il ne s'agisse que d'une hallucination de son esprit malade - elle fonça sur lui, le soulevant d'une empoignade par le cou contre le mur de la cuisine, la bouteille de bourbon dans l'autre main. 

 

Elle finit, d'une manœuvre, par la poser en relative sécurité sur un meuble non loin, reportant son attention sur l'homme en chemise qui souriait. 

 

-Tu aimes vraiment ça, hein ?
-Tais-toi.

 

Une gifle partit. La tête de Kilgrave valsa sur le côté. Mais ce maudit rictus ne s'effaçait pas de sa bouche. 

 

-J'ai toujours su que tu avais un fond sadique. 
-Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans : TAIS-TOI ?

 

Nouvelle gifle. 
L'étincelle dans le regard de Kevin le sociopathe la mit autant mal à l'aise qu'il la poussa à continuer à extérioriser sa rage. Son corps semblait si tangible entre ses mains, comme une poupée de chiffon qu'il lui suffirait de briser une nouvelle fois pour qu'il la laisse tranquille. 

 

-Si j'avais su que c'était ce qui te plaisait, je te l'aurais proposé plus tôt, ça aurait réglé bien des... aie. C'est vraiment bas, ça.

 

Elle venait de lui donner un coup de poing au sternum. 

Il avait un air un peu fou, et elle ne savait plus ce qu'elle faisait. Quatre heures du matin, de l'alcool dans le sang, une presque hallucination dans les pattes. Combien de merdes le destin lui enverrait-il encore ? 

 

-Tu as raison, finit-elle par reconnaître d'un ton froid. 


Cela eut le don de l'intéresser prodigieusement. Mais il n'était pas libre pour autant de la poigne de la femme aux pouvoirs surnaturels.


-...J'étais... frustrée.

 

Sa bouche se tordit, comme si elle avait des difficultés à prononcer ce mot. Puis, un sourire. Pas un de ceux qu'il aimait chez Jessica. Un plus carnassier, plus ressemblant au sien. Kilgrave trouva que ça ne le dérangeait pas, finalement.

Elle lui lança un nouveau coup de poing. Il hoqueta de douleur. 

 

-...Mais maintenant, je me sens tout à fait satisfaite. 

 

Elle lui balança de nouveaux coups qui le laissèrent haletant, le douleur et l'exultation parcourant son corps. 
Elle le lâcha comme si elle s'était brûlée ; Kilgrave se laissa tomber le long du mur de la cuisine, sonné. 

 

-Et je vais pouvoir prendre ma douche. 

 

Jessica contempla un instant les dégâts qu'elle avait commis, le sang jaillissant des plaies du visage, les cheveux en bataille et le costume froissé de Kilgrave. Une vue qui lui procura un plaisir intense. Puis elle s'en alla. 

Le bruit de l'eau se mettant à couler le sortit de son état de torpeur. De son rôle. Et son sourire s'agrandit. 

 

-Ah, Jessica. Tu ne perds rien pour attendre. Je sais être très persuasif... 

 

Il savait d'instinct où ses prochains pas allaient le diriger.