
HARRY ET LES DURSLEY
Sa vie chez les Dursley était bien calme depuis son arrivée. Il s'était endormi lorsque Hagrid l'avait emmené dans la moto de Sirius, et aucun souvenir de ce qu'il s'était passé après ça. Probablement comme la première fois. Dumbledore avait dû le laisser au pas de la porte de Pétunia qui l'avait ramassé, et visiblement mis dans le placard immédiatement. En réalité, Harry n'avait pas croisé qui que ce soit depuis son arrivée, il ne savait pas combien de temps s'était écoulé et seule Pétunia passait le voir. Deux fois par jour précisément, elle venait et lui donnait à manger, rien de plus rien de moins. Comme elle a déjà un enfant, elle sait quoi lui donner à manger, et ainsi lui donne suffisamment pour qu'il soit repu et tienne durant un demi-jour au moins. Elle était égale à ses souvenirs avec ses traits tirés et son air pincé, toujours dans ses robes de femme au foyer revêche même en étant seulement dans le milieu de sa vingtaine. Il n'avait pas même vu un cheveux de Dudley ou de Vernon depuis le début et en venait à se demander si ces derniers étaient seulement au courant de son existence. Dudley restait avant tout dans sa chambre à l'étage et Vernon passait de son pas déjà lourd devant la porte de son placard sans jamais s'y arrêter. Placard, en effet, il était finalement de retour dans ce micro espace. Il ne s'y était plus trouvé enfermé depuis tellement d'années, qu'il l'avait accueilli comme une vieille connaissance. Au moins il était dans un environnement familier. Savoir qu'il avait pu y vivre durant 10 années sans problème prouvait que c'était faisable, et si il était évident que ce n'est pas un endroit viable pour un enfant, un adulte comme lui pouvait endurer ce minimum de conditions précaires.
Il n'était pas trop mal installé dans un panier en osier rempli de couverture pour couchette et une mince lumière qui filtrait au travers de la porte pour éclairer son seul et unique jouet : le vif d'or de son père.
Fasciné de le découvrir, il avait demandé à ce dernier de lui donner ce que son père s'était empressé de faire en le montant sur un collier. Ainsi il ne le perdrait pas. Ce vif d'or était la seule chose qui lui restait de son père dorénavant, mais il était différent. Le vif d'or avait été enchanté par son père pour voleter en permanence autour d'Harry et l'occuper, l'entraîner à l'attraper qui sait ? Il était un compagnon de jeu idéal pour Harry et même s'il n'avait évidemment aucune conscience propre, était un peu son protecteur, son talisman. Il aurait souhaité l'avoir dans sa première vie. Enfin, qu'est-ce que ça aurait changé ? Il n'aurait jamais volé dans cette vie là non plus, c'était un enchantement que son père avait mis et qui avait disparu en même temps que lui. Le vif d'or resterait donc éternellement inerte dans sa main.
Harry préféra laisser de côté les maigres souvenirs de cette année qui passaient au travers des filets de ses barrières. Après avoir passé les premiers temps à se morfondre, il décida qu'il était temps qu'il réorganise ses pensées et se projette sur le futur. Pour l'heure il était toujours coincé dans le placard, mais au moins, la nuit, il pouvait continuer de pratiquer son parlé et surtout il organisait ses propres séances d'éducation physique. Le placard lui semblait bien petit dans ses souvenirs, mais c'était ceux d'un enfant de onze ans, pour son âge et sachant qu'il faisait moins d'un mètre il avait largement la place de se déplacer. Il pouvait sauter légèrement, marcher, forger son endurance et apprendre à bien mieux maîtriser ses mains. Certes aucun enfant ne se forcerait à faire ça, mais, il n'était plus un enfant, s'il l'avait seulement déjà été. Sa longue enfance d'apprentissage il l'avait déjà eu, il avait perdu son enfance à être martyrisé, perdue son adolescence à se battre, et perdu son espoir de vie adulte, trop épuisé pour la vivre. Cette fois il avait bien l'intention de ne laisser personne dicter la vie qu'il allait mener, et surtout il n'allait pas en gâcher une seule minute.
Déjà il ferait en sorte de se mettre les Dursley dans la poche, ensuite, il entrerait à Poudlard, se mettrait à la recherche des horcruxes et s'entraînerait davantage au duel, lorsque viendra l'heure de confronter Voldemort dans le cimetière, il sera prêt et le détruira une bonne fois pour toute. Après cela, il pourra définitivement commencer à vivre en paix. Cela allait seulement lui demander quelques années d'effort en plus. Il n'était pas inquiet. Avec ses connaissances actuelles il avait toutes les clefs en main pour réussir sans se laisser détruire une seconde fois. C'est pourquoi porter les regrets et la nostalgie de sa première année avec ses parents ne pouvaient rester dans sa mémoire et qu'il faisait en sorte d'ajouter chaque soir un nouveau verrou autour de ses souvenirs de cette année qu'il avait du mal à ne pas faire resurgir à chaque moment d'égarement.
Il employait bien ses journées, comme il devait rester enfermé dans ce placard sans faire de bruit, autant rentabiliser ce temps également. Il passait de longues journées à perfectionner son esprit, il créait des catégories pour chaque événement, chaque connaissances passées et futures comme Rogue avait vainement tenté de lui apprendre dans son ancienne vie. Celles qui ne devaient être oubliées et les détails qui pouvaient l'être. De sa première vie, il ne conserva au premier plan que les informations récentes et utiles pour le futur proche, et laissa de côté rancoeur et tristesse. Il compila toutes les informations utiles sur sa lutte contre Voldemort dans un coffre, sur ses parents dans un autre, encore six différents pour ses années et étés durant sa scolarité à Poudlard, et finalement toutes ses connaissances sur le monde des sorciers et ce qui attrait à la magie et à la société.
Il était encore une fois perdu dans ses pensées, en train de faire le tri sur ses connaissances en Potions ayant bien l'intention de sécher Rogue dès son entrée à l'école de magie, lorsque retentit au-dessus de lui une dégringolade bruyante. Visiblement Dudley avait raté une marche. Le vacarme qui en résultat alarma immédiatement les deux parents qui se précipitèrent pour aller le relever en s'inquiétant pour leur bébé. Harry n'avait pas vraiment de souvenir de Dudley lorsqu'ils n'avaient pas encore deux ans, mais le connaissant il devait avoir largement eu de quoi amortir la chute. Harry ricana en se laissant retomber en arrière sur son couffin, les bras en arrière.
"Où est la barrière Pétunia ?" demande Vernon d'une voix aiguë alors que les pleurs de Dudley retentissent en fond.
"Oh mon Dudlynouchet, montre où ça fait mal !" couine Pétunia pour seule réponse.
"Pétunia, la barrière." gronde Vernon.
"Sous l'escalier. Allez mon bébé, montre à maman." continue-t-elle sans faire attention.
Harry lui avait haussé un sourcil. Il n'y avait qu'un seul placard sous l'escalier. Il fut cependant pris de surprise lorsque la porte du placard s'ouvrit d'un coup à côté de lui. Il se redressa immédiatement et se retrouva à fixer Vernon Dursley qui semblait trop sous le choc pour ne serait-ce que réagir.
Les talons de Pétunia claquèrent sur le parquet ciré alors qu'elle se précipitait vers eux.
"Vernon ! Je vais t'expliquer."
Vernon regarda sa femme, visiblement sous le choc qu'elle ait connaissance de l'intru qui squattait leur placard sous l'escalier. Il vit immédiatement la main de Vernon commencer à trembler alors qu'il se redressait vers elle.
"Sors de là !"
Harry n'aurait pas osé désobéir et il sortit du placard en trébuchant pour retrouver finalement la lumière du jour après de très longues journées. Mais il n'eut pas réellement le temps d'en profiter, le visage tournant au violet de Vernon Dursley lui cachait l'accès à la fenêtre du salon. Harry jeta un rapide regard vers Pétunia qui tenait fermement Dudley, qui était moins gros que Harry ne l'aurait cru, et fixait son mari inquiet. Dudley lui regardait toute la situation, confus les yeux encore rouge.
"Tu as une grosse affaire en cours, je ne voulais pas te déranger pour si peu."
"Qui est-il ?" demande-t-il en détachant chaque mot un à un.
"Le fils de ma sœur, Harry."
"Et ? Qu'est-ce qu'il fait là ?"
"Ma … elle est morte, on me l'a laissé en me disant qu'il n'a plus que moi."
"Et pourquoi devrait-on le garder ?"
Harry observait toujours la scène fasciné, il est vrai qu'il ne se l'ait lui-même jamais demandé, Pétunia lui avait dit qu'elle le gardait par charité et il avait toujours cru qu'elle voulait juste un elfe de maison et c'est pourquoi elle avait décidé de le laisser rester, mais comment avait t-il été accepté dans un premier temps ? Comment Vernon avait accepté sa présence ici, est-ce qu'il avait réellement été découvert ainsi par Pétunia, et caché ? Il savait que Dumbledore avait menacé Pétunia qu'elle devait le garder, donc elle le faisait, mais elle n'avait pas pu l'expliquer ainsi à Vernon, si ?
"Il est comme elle ?"
Pétunia pince ses lèvres en hochant la tête.
"Surement."
"Il ne reste pas."
Pétunia baissa la tête.
"S'il te plait."
"Pourquoi le garder ? Parce que ta sœur t'as envoyé quelques gentilles lettres, tu voudrais d'un coup faire de la charité. Je refuse de nourrir une bouche inutile et surtout si elle est de son espèce."
Harry n'était pas vexé par ces paroles, mais ils devaient comprendre que les enfants comprennent tout et arrêter de parler devant Dudley qui voit seulement ses parents se disputer. Harry, lui, savait déjà ce que pensait Vernon, et ce n'est pas comme s'il voulait spécialement son affection ou son argent. Ce qui est certain est qu'il n'avait aucun souvenir d'une telle scène par le passé. D'un autre côté, il n'a aucun souvenir de ses premières années chez les Dursley, seulement à partir de ses 6-7 ans lorsqu'il a commencé à travailler et qu'il est entré à l'école.
"J'ai cette lettre, dans le tiroir de la cuisine, nous n'avons pas le choix de le garder." dit Pétunia en désignant la cuisine d'une main vague.
Harry se doutait de quelle lettre elle parlait, c'était celle de Dumbledore.
Vernon part en grondant vers la cuisine de son pas lourd. Harry espère les suivre pour avoir le fin mot mais Pétunia le repousse dans le placard et lui dit d'y rester. Il se retrouve donc de nouveau enfermé, cette fois il ne se rallonge pas, et colle son oreille à la porte, espérant entendre des bribes de conversation.
"Qui c'est celui-là encore !? De quel droit il nous le refile ce- ?"
"Vernon s'il-te-plait, Dudley entend tout !"
"Je ne veux pas un mot ! Donne-moi une seule bonne raison de le garder."
"Cet homme est très puissant et dangereux. Il dit que nous devons le garder. Oh j'ai si peur de ce qui arrivera si on ne le fait pas." finit par couiner Pétunia.
Il y eut quelques secondes où seuls ses sanglots pitoyables se sont fait entendre. En parallèle, Harry qui écoutait toujours avec une pointe d'agacement la conversation s'était réinstallé sur son coussin. Finalement il n'avait pas tant envie de savoir. Entendre ces couinements pittoyables et plaintifs lui suffisait. Evidemment qu'il n'y avait pas une autre raison derrière l'acte 'o combien généreux' de sa tante que sa frousse sans nom de sorciers. Harry préféra se retourner à son esprit, ignorant les grognements de Vernon et les sanglots de Pétunia débattant sur son sort et ceux de Dudley encore plus fort, visiblement frustré de ne pas être au centre de leur attention pour une fois. Finalement, une fois la situation calmée et les cris de Vernon également, Harry resta dans le placard à somnoler jusqu'à Pétunia ne vienne l'en sortir à l'heure du dîner.
Harry avait repris sa place dans le placard et attendait. Il ne pouvait rien faire de plus, il savait que Pétunia parviendrait à convaincre Vernon de toute façon. Il avait juste laissé tombé l'idée de connaître la raison, car les motivations de sa tante ne tenaient qu'à elle, et qu'au final cela ne justifiait pas son traitement. Sa tante ne le haïssait pas moins que dans sa précédente vie. Harry dû rester allongé un long moment, somnolant dans le petit placard qui lui semblait plus sombre qu'à l'ordinaire, avant que Pétunia ne vienne enfin ouvrir le placard et lui dise d'en sortir.
Elle se posa alors devant lui en gardant son air pincée.
"Tu vas manger avec nous à table, tiens toi bien, sinon tu continueras de manger dans le placard."
Harry hocha la tête et elle sembla s'en contenter.
Il la suivit en trébuchant jusqu'à la cuisine qui lui semblait bien loin. Elle l'installa sur une chaise de fortune faite à partir d'une pile de magazines. Dudley quant à lui, avait les yeux rivés sur le nouvel arrivant depuis sa propre chaise haute. Il était très différent de l'homme en devenir qu'Harry avait quitté, mais ses cheveux blond étaient déjà volumineux et sa peau toujours aussi rose. Il n'était évidemment pas baraqué comme durant la fin de leur adolescence mais il n'était pas encore le garçon grassouillet de leur enfance avec seulement un visage très rond et des yeux un peu globuleux bleu-gris auxquels Harry n'avait jamais prêté grand attention. Il n'avait pas l'air de comprendre sa présence ici et gardait son regard idiot fixait sur lui, mais on ne pouvait pas en dire autant de son père. Vernon Dursley était semblable aux souvenirs qu'il avait de son enfance. Bien trop gras, pas de menton, une touffe blonde qu'on prendrait pour une perruque pour seul couvre-chef. La seule différence étant qu'il n'avait pas encore les rides ni les années marquées sur le visage. Il faisait relativement jeune et en bonne santé malgré son sur-poids apparent et il semblait tout particulièrement mécontent de la situation, ne jetant même pas un regard vers les trois autres, se contentant de manger son pâté en croûte à grosses bouchées. Les enfants avaient tous deux de la purée orange devant eux, la part de Harry étant évidemment plus petite que celle de son cousin.
Harry remarqua très vite que Dudley semblait faire de l'œil au plat des adultes et surtout essayait au mieux d'ignorer les ingrédients orangeâtres dans la petite assiette devant lui. Pétunia commença alors à faire au mieux pour le faire manger, délaissant son propre repas. Ne souhaitant pas faire de vague et ravie d'avoir enfin l'occasion de manger un souper, comme Pétunia ne lui apportait à manger que lorsque Vernon était au travail jusque là donc durant la journée, il saisit sa propre cuillère et tenta au mieux de maîtriser ses quelques tremblements pour ne pas renverser sa précieuse pitance. Il se savait sur le billot, à la moindre erreur Vernon exploserait directement. Il tâcha donc de se concentrer sur son repas et de se faire oublier au mieux. Ce qui ne manqua pas, en moins de trois minutes, le plat de Dudley avait été renversé sur le sol et ce dernier hurlait à tout rompre des mots que lui-seuls devait comprendre. Harry qui avait lui-même des difficultés à parler a partagé son malheur de ne pas pouvoir exprimer son mécontentement sans des hurlements de goret, mais il aurait beaucoup donné pour finalement retourner dans son placard, au calme.
Les parents, ayant depuis longtemps oublié Harry, durent finalement passer au dessert, un flan que Dudley engloutit avec bonheur et lorsque tous eurent fini leur dîner, ils quittèrent tous la table. Laissant Harry sur sa chaise de fortune et commencèrent à vaquer à leurs occupations, Pétunia à la cuisine, Vernon et Dudley devant un programme télé visiblement palpitant. Ce ne fut qu'alors qu'elle était sur le point de quitter la cuisine à son tour que Pétunia remarqua que Harry était toujours bloqué au même endroit. Elle soupira comme si c'était de la faute du jeune enfant et le souleva pour l'emmener sans plus de sommation jusqu'au placard de l'y poser et de l'y enfermer en lui disant de ne plus faire de bruit.
Harry s'exécuta, ravi d'avoir lui aussi la paix. Voilà quelque chose que jamais aucun des trois Dursley ne pourrait jamais comprendre, que ce placard n'était pas qu'une punition, une cache risible de l'enfant infernal qu'ils espèrent dissimuler et garder loin de leur vue. Car Harry pouvait en dire autant, ce placard lui cachait également la vue de l'imposant Vernon Dursley à la colère fulminante, des mesquineries de Pétunia et des poings brutaux de Dudley. Harry n'y était pas plus mal. Cependant, il n'allait pas revivre la même enfance, il n'en était pas question. Il refusait de se soumettre de nouveau à eux.
Une idée lui vient alors. Celui faisant la pluie et le beau temps de la famille Dursley c'était Dudley. Si Harry parvenait à s'entendre et à se le mettre dans la poche, il aurait un allié de poids dans cette fichue famille. Il n'avait pas l'intention de se laisser marcher sur les pieds cette fois. Et au fond de lui, au plus profond de lui, il le savait, en sortant de cette fichue guerre, le seul qu'Harry supportait de voir était Dudley, son cousin qui ne lui parlait pas que de célébrité, d'argent ou de Voldemort. Peut-être que cette fois, ils pouvaient vraiment devenir des cousins comme il se doit.