
Ils ne sont pas battus
Le jeu avait alors continué. Lily et James étaient revenus de l’armoire tous les deux rouge comme des tomates à une distance minimale de sécurité et sans se regarder une seule fois, comme s’ils étaient particulièrement honteux de ce qui venait de se passer.
-Et bien dis donc, qu’avez-vous fait vous deux dans cette armoire ?
Avait crié Sirius en les voyant revenir, aucun des deux n’avaient répondu et ils s’étaient rassis dans le plus grand des silences. Le jeu avait alors pu reprendre. Parfois, ils se lançaient des petits regards et rougissaient immédiatement après.
-Léwina, dit Sirius une fois que la bouteille s’était arrêtée sur elle, as-tu déjà déçu tes parents ?
Elle regarda et puis répondu un simple « Oui » d’une voix très neutre. Sirius, alcoolisé, prit alors une voix idiote et se moqua :
-Ton père ne serait pas content, petite Malfoy.
Cela mis un sourire sur le visage de quelques-uns. Néanmoins, ni Arthur, ni Léwina ne rigolaient.
-Non, il est mort de toute manière.
Il y eut alors un silence, un grand silence. Même la musique de fond changea ce qui laissa alors un blanc de quelques secondes. Tout le monde arrêta de rigoler. Certains eurent un visage horrifié mais Léwina ne leur jeta même pas un regard. Elle regardait Sirius et seulement Sirius, elle se demandait quel tête il allait faire, quelles émotions allaient traverser son visage. Elle regarda ses yeux gris et ses cheveux noirs qui bouclaient légèrement.
Or, aucune émotion ne traversa son visage, il resta parfaitement neutre, le regard droit, les traits détendus. Léwina n’avait jamais eu l’occasion de remarquer à quel point son visage pouvait devenir glacial, lui, qui était toujours en train de rire, de crier et de s’exclamer.
Cet échange la troubla alors elle le brisa puis se leva pour faire tourner la bouteille.
-Marcus, dit-elle d’une voix détachée quand la bouteille s’arrêta sur le Poufsouffle, enlève un vêtement.
-Je savais que t’attendais que ça depuis le début, rigole Marcus en enlevant ses chaussettes et en présentant ses pieds à sa voisine.
Léwina le regarda et le remercia du regard. Sa réplique avait eu le don de détendre l’atmosphère et les discussions reprirent peu à peu. Néanmoins, Léwina resta silencieuse pendant de nombreuses minutes, ce ne fut pas le cas de Sirius. Il avait recommencé à faire des blagues. Il avait visiblement l’alcool joyeux. De temps en temps, elle lui jetait des petits regards.
-Sirius, Action ou Vérité, demande Lei ?
-Vérité.
-Quand était la dernière fois que tu as pleuré ?
Sirius perdit alors son sourire à la seconde où Arthur termina sa question. Léwina, interloquée fronça les sourcils, il semblait inconfortable, voire effrayé. Elle n’avait jamais vu, au grand jamais, Sirius Black comme cela. Elle l’avait vu rieur, moqueur, déçu, fier et même sans émotion dernièrement mais jamais horrifié. Comme quoi Sirius Black semblait être plein de surprises.
Ce dernier sembla alors chercher ses mots, ses mains bougèrent mais sans qu’aucun son ne sorte de sa bouche. Le Gryffondor regarda son meilleur ami. Ce dernier le regardait aussi. Tout le monde avait compris. James savait pertinemment quand Sirius avait pleuré pour la dernière fois. Mais aucun des deux ne semblait vouloir dévoiler l’information. Il semblait tous les deux aussi effrayés l’un que l’autre. Sirius se recentra ensuite sur Arthur, pour répondre à sa question. Son visage se vida peu à peu d’émotions pour revenir au visage neutre qu’il portait tout à l’heure. Léwina fronça les sourcils, personne n’était capable de masquer ses émotions de cette manière, surtout pas Sirius Black. Il semblait toujours animé par quelque chose, il aimait toujours se faire remarquer. Personne n’était capable de se vider d’émotions de cette manière, sauf si on lui avait appris…
-Je… C’était… C’était lors de notre rupture, finit-il par répondre en jetant un regard en coin à Marlène.
Les questions s’étaient enchainées, James jouant un grand rôle dans la reprise rapide du jeu. Certains avaient maintenant enlevés leur pantalon ou leur tee-shirt. Dorcas et Emmeline avaient visité l’intérieur de l’armoire. D’autres encore avaient parlé de leur avenir ou avait révélé des choses sur eux. Lily avait parlé de combien d’enfants elles souhaitaient, Remus de sa vie dans dix ans, il avait d’ailleurs semblé un peu triste. Certains avaient dû parler de leurs attirances, de leurs amours ou de leurs précédentes relations.
-Léwina, dit Mary quelque peu déçu, et pour cause, la bouteille était à deux doigts de s’arrêter sur Marcus mais elle avait finalement continué sa course pour atterrir sur sa voisine.
-Encore moi, s’exclame celle-ci !
Depuis sa question précédente, Léwina était redevenue un peu plus elle-même, elle semblait plus heureuse.
-Je choisis Action, dit-elle, elle en avait un peu assez des vérités pour ce soir.
-Bon, reprend Mary, comme j’ai assez peu d’intérêt à te voir te déshabiller, (et comme ça lui permettrait de libérer Marcus pour quelques instants) ça sera sept minutes au Paradis avec…hum… Sirius, ce qui promet d’être bien plus amusant !
-Pardon ?
Les deux concernés avaient répondu d’une seule et même voix.
-Oh oui, ça sera marrant, renchérit Peter en tapant dans ses mains d’enthousiasme.
La plupart autour de la table rirent, il était, en effet, évident qu’ils se détestaient, les imaginer à s’insulter pendant sept minutes devenaient assez drôle. Ils durent se faire trainer par leurs amis jusque dans l’armoire. Sirius entra le premier et fit en sorte de prendre un maximum de place. Or, Léwina qui entra à sa suite ne se laissa par marcher sur les pieds. Elle prit à son tour un maximum de place de sorte qu’en fait ils étaient relativement proches alors que s’ils ne jouaient pas à qui avaient la plus grosse, ils auraient pu éviter de se toucher.
-Putain de Sirius Black, tu sens l’alcool à plein nez, tu es complément bourré, déclare Léwina visiblement énervée.
-Mais nonnn !
-Par Merlin, ces sept minutes vont être les pires de ma vie, se lamente la Serpentard.
Leur échange fit rire le reste du groupe qui partirent se rasseoir sur le canapé. Mary resta devant eux encore quelques instants, un grand sourire sur les lèvres.
-Essayez de pas vous entretuer, dit-elle en fermant les portes de l’armoire.
Elle jeta alors un sort de silence et retourna auprès des autres :
-Je prends les paris, lequel ressort le plus amoché des deux et au bout de combien de minutes l’un mets un pins à l’autre ?
Sa réplique fit rire.
-Je paris sur Sirius, commence Arthur, elle va le détruire, je lui donne deux minutes pas plus.
-J’aurais aussi dit deux minutes mais je pense que Léwina ressort pire, réplique James.
-On verra, mon beau, dit Arthur en haussant les sourcils de manière suggestive en direction de James.
Celui-ci resta toujours aussi déstabilisé de la manière dont Arthur lui faisait ouvertement du rentre-dedans.
Pendant ce temps, dans l’armoire :
-Hey, ton genou me rentre dans la cuisse, ça fait mal, déclare Léwina.
-Désolé votre grandeur, se moque le Gryffondor en se mettant à rire seul.
Elle ragea contre lui et il ne déplaça nullement sa jambe. Elle avait l’impression que cela faisait au moins une heure qu’ils étaient dans cette foutue armoire. Il y avait un lourd silence, aucun des deux ne semblaient vouloir ouvrir la bouche.
Léwina profita de la proximité pour jeter un coup d’œil à Sirius. Elle était intriguée de revoir les mêmes yeux qu’elles avaient pu apercevoir tout à l’heure, ceux sans émotion, ceux qui n’était pas pétillant, ceux qui était seulement profondément gris.
Sirius ressemblait maintenant à un jeune homme. Ses cheveux noirs et bouclés avaient poussé, un semblant de poils de barbe commençaient à apparaitre proche de ses oreilles. Il avait grandi et pris en muscle (mais pas en maturité). Elle essaya de voir ses yeux mais cela fut impossible, il avait la tête tournée et la luminosité était faible.
Se rendant compte qu’il était assez étrange de le dévisager de cette manière, Léwina se mit soudainement à trouver très intéressant à regarder le coin supérieur gauche de l’armoire. Mais cela fut de courte durée. En effet, Sirius finit par briser le silence, elle le regarda avec surprise :
-Hey, je suis désolé à propos de ton père, je ne savais pas.
La Serpentard mit quelques secondes pour comprendre qu’il parlait de sa blague de mauvais goût de tout à l’heure. Il tourna les yeux vers elle et elle put enfin voir ces magnifiques yeux sans émotion. Il y avait quelque chose d’attirant, quelque chose de surprenant et d’interdit. Elle ne savait ni comment ni pourquoi mais elle se sentait attiré par eux.
-C’était d’assez mauvais goût, finit-il fuyant le regard de son interlocutrice.
Léwina revint soudainement à elle. Sirius semblait gêné. Sirius Black gêné, devant elle qui plus est ? En voilà une nouvelle. Elle resta quelques instants sans répondre, sous le choc de la scène qui se déroulait devant ses yeux. D’emblée elle lui aurait envoyé une pique, mais elle se retint au dernier moment. Peut-être était-ce l’attitude de Sirius qui semblait sincèrement désolé ou peut-être c’était les quelques verres qu’elle avait bu qui lui retournait le cerveau.
Elle regarda une dernière fois le Gryffondor mais ne décela aucune once de moquerie. Elle souffla et décida d’être, elle aussi, sincère :
-T’inquiète pas, c’était il y a longtemps et c’était aussi la pire personne possible.
Les deux ennemis se firent face, voilà bien longtemps qu’ils n’avaient pas eu une conversation aussi calme. En vérité, cela ne dérangeait pas vraiment Léwina de parler de son père. Elle avait vécu sa mort comme un soulagement. Elle avait répondu de cette manière à Sirius lors du jeu afin de le mettre mal à l’aise mais elle n’y portait pas autant d’importance qu’elle l’avait laissé paraitre.
-Tu dis ça sûrement car tu n’as jamais rencontré ma mère, reprit le Gryffondor qui prit une attitude désintéressé.
-J’ai entendu… Enfin… Comme mon frère sort avec ta cousine Narcissa, j’ai entendu plusieurs choses sur ta famille…
-Crois-moi, il n’y a rien à être fier. Ils sont les personnes les plus détestables de ce monde.
Léwina savait que Sirius Black n’avait rien d’un Black et qu’il détestait sa famille. Or, elle ne l’avait jamais entendu exprimer cela aussi clairement. Ce dernier croisa ses bras sur sa poitrine et regarda Léwina, ennuyé. Tiens, il n’avait jamais remarqué ce petit grain de beauté qu’elle avait sur le visage.
Elle demanda :
-Sont-ils autant accrochés au sang-pur qu’on le dit ?
-Oui, totalement.
-Comme les miens.
-Et ce n’est pas ton cas ?
-Non, bien sûr que non.
-Alors pourquoi tu es à Serpentard, tu dois te sentir supérieur ou quelque chose comme ça !
Léwina fronça les sourcils. Il semblait que Sirius ait de nombreux préjugés à son propos. A vrai dire, il lui paraissait imaginable que quiconque la connaisse ose dire qu’elle n’aimait pas les né-moldu. Sirius l’avait vraiment très mal cernée. De plus, il avait également de nombreux préjugés à l’encontre de sa maison, Serpentard. Comment ce garçon, qui apparemment, d’après ses professeurs, étaient très intelligents et réussissaient dans toutes les matières, pouvait être en réalité un tel abruti à croire le monde si manichéen.
Elle se mit alors en tête de lui faire changer d’avis :
-Non, pas du tout. Serpentard est pour les personnes déterminées et ambitieuses. Autant que Gryffondor est pour les personnes courageuses et braves, Poufsouffle pour leur loyauté et leur persévérance et Serdaigle pour leur intelligence et leur curiosité. Bien sûr, les mages noirs, enfin la plupart apportent une attention toute particulière à l’ambition, à la détermination et à la ruse. Mais cela ne signifie pas du tout que nous allons tous finir comme des sorciers du mal. Au contraire, en fait la plupart de nous choisirons le bon côté mais bien sûr on n’entend jamais parler des bons, seulement des mauvais.
Ce fut au tour de Sirius de froncer les sourcils, moyennement convaincu par l’explication que venait de lui donner Léwina. Pour lui, il y avait forcément quelque chose, quelque chose qui expliquerait pourquoi toute sa famille de tyrans a fini à Serpentard. Quelque chose qui prouverait qu’ils étaient les méchants et que lui, qui n’avait pas été envoyé dans cette maison, serait le gentil.
-Non, dit-il, il y a forcément quelque chose. A quoi tu pourrais autre déterminée ? Si ce n’est pas apprendre la magie noire et devenir toi-même l’un des Mangemorts ?
Sirius avait presque crié. Léwina ne s’attendait nullement à une réaction aussi violente de la part de son interlocuteur et s’accula contre le fond de l’armoire sous la surprise. Elle était sûre que Sirius était en train d’essayer de se prouver quelque chose mais elle n’arrivait pas à mettre le doigt sur quoi.
Elle prit une longue inspiration, essayant de ne pas s’énerver. Elle se devait d’être calme, c’était le moment où elle devait décider l’avenir de plusieurs élèves. En effet, si elle réussissait à montrer à Sirius qu’il se trompait, peut-être que celui-ci se calmerait sur ses mauvaises blagues, peut-être qu’il arrêterait de faire souffrir des gens. Elle devait être celle qui lui montre la bonne voie. Elle prit alors une grande inspiration, enfermant la colère au plus profond d’elle et déclara :
-Je ne sais pas quelle haine t’anime Sirius. Mais non, je ne suis pas comme ces personnes, je n’ai strictement rien à voir avec eux. Je suis rentrée à Serpentard et j’ai pris cela comme un honneur d’appartenir à une nouvelle famille et d’intégrer une maison aussi prestigieuse. Maintenant, s’il faut répondre à ta question. Non, je ne suis pas déterminée à découvrir et devenir adepte de la magie noire ni à rejoindre les forces de Tu-sais-qui. Mais, je suis déterminée à faire mes preuves, à m’assumer tel que je suis, à devenir quelqu’un de bien et de grand en faisant par exemple des choses que je suis la première à faire. Ce ne sont pas des choses qui t’animent toi ?
Sirius resta bouche-bée, il ne savait plus quoi dire. Léwina esquissa un sourire, elle semblait avoir fait mouche dans l’esprit du jeune homme. Or, il n’eut pas le temps de parler que :
-Fin des sept minutes ! Après vous pouvez toujours rester si vous voulez, s’exclame Mary en ouvrant soudainement les portes de l’armoire.
-Très peu pour moi, affirme Léwina en sortant la première.
Dès qu’elle eut le pied dehors, elle prit une grande inspiration comme s’il n’y avait pas assez d’oxygène dans l’armoire qu’elle venait de quitter. A l’intérieur, elle avait ressenti des choses étranges et elle se demandait comment elle avait pu agir de manière aussi cordiale avec Sirius Black. Mais elle préféra ne pas y penser et retourna vers les autres. Le Gryffondor sortit alors à son tour mais aucun son ne passa la barrière de ses lèvres.
-Arthur, James, je crois bien que vous aviez tort, déclare Lily, on dirait bien qu’ils ne se sont pas battus !
La soirée s’était alors tranquillement terminé alors que le soleil était en train de se lever. Ils étaient alors partis chacun à leur tour pour dormir pendant quelques heures, ou quelques minutes, dans leur dortoir respectif. Léwina et Arthur, bras dessus, bras dessous, rigolaient pour un rien, la fatigue et l’alcool qu’ils avaient bu y jouant probablement un rôle important.
-Ah tiens mon amour, dit Arthur hilare.
Remus se retourna et leur fit face, lui aussi semblait exténué.
-Arthur ?
-On pourrait avoir l’Amortentia, j’aimerais bien sentir ce que ça sent, demande Léwina ?
-Bien sûr, répond le loup-garou en fouillant dans ses poches mais faite moi le plaisir de la détruire après, je vous fais confiance hein !
C’est ainsi qu’il la leur donna et puis partit à son tour. Léwina s’écarta alors un peu d’Arthur et se mit à sentir la potion.
-Alors ? Qu’est-ce que tu sens ?
-Ce n’est pas aussi clair que ce que je pensais que ça serait, réfléchit Léwina. Je dirais que ça sent les produits capillaires et les crêpes.
Arthur rigola :
-Etrange tout ça, fais-moi sentir.
Il s’empara alors de la fiole puis prit une grande inspiration. Il lui fallut quelques instants pour identifier clairement les odeurs. Il finit par rire doucement :
-Ca sent comme Anna.
Léwina sourit, heureuse, pour son ami. Ils partirent enfin à leur tour et s’arrêtèrent par les toilettes où ils versèrent la potion. Ainsi, personne ne pourrait jamais s’en servir avec de mauvaises attentions.