
Chapter 7
Musiques d’ambiance : Mr Sandman de Syml et surout le remix de Heart of Glass avec Philip Glass. Sublime !
J’espère que vous aimerez ce chapitre !
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- Allez, venez ! Les éléphanteaux nous attendent pour faire dodo ! s’exclame Ron Weasley, plein d’entrain.
Tous suivent le rouquin à l’intérieur du complexe.
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Allongé contre le dos d’un éléphanteau nommé Bokina, Harry ne trouve pas le sommeil. Sa main caresse la peau de l’animal qui dort déjà depuis trente minutes, repu et confiant auprès d’un de ses protecteurs qui n’est autre que Ron Weasley. La peau fine de l’éléphanteau laisse une légère couche de poussière et de boue séchée sous ses doigts, ce qui n’est étonnamment pas déplaisant. Installé en face du petit pachyderme, Ron a également succombé au charme de Morphée.
Les yeux grands ouverts dans la pénombre, Harry écoute les sons inhabituels qui s’élèvent tout autour de lui. Le sifflement d’oiseaux nocturnes dans la forêt. Le vent faisant frémir les feuilles des arbres et tinter un carillon en bois à l’entrée du refuge. Les ronflements de certains hommes qui dorment avec leurs éléphanteaux, mais aussi de légers barrissements pour ceux qui n’ont pas encore pris leurs repères. Quelques hommes murmurent, tentent d’apaiser leurs craintes. Dans l’esprit de Harry, le crissement de la paille sous les pieds et les pattes des insomniaques prend la forme d’un tango effréné pour la survie des pachydermes.
D’autres bruits, plus inquiétants, se font entendre au loin. Des grondements de félins, des hurlements de singes puis plus rien. Un silence pesant s’installe pendant quelques minutes, puis les oiseaux redonnent le « La » de cette symphonie sauvage.
Harry se blottit contre Bokina, et sans s’en rendre compte, il finit par s’endormir profondément.
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Quelque chose de doux mais poilu caresse le visage de Harry. Ce dernier fait une grimace et chasse la chose mouvante comme on chasserait une mouche agaçante. Et comme une mouche agaçante, la chose revient avec plus d’assurance et d’obstination.
Harry écarquille les yeux lorsque la chose vient lui aspirer le nez.
- Bokina ! s’écrie Ron en s’esclaffant. Viens-là mon gros !
L’animal curieux retire sa petite trompe et se tourne joyeusement vers le rouquin, la démarche maladroite. Les oreilles gonflées, ses énormes pattes bousculent Ron, le faisant rire de plus belle. Harry ne peut s’empêcher de rire à son tour, l’animal essayant maintenant de rouler sur le corps du rouquin.
- C’est ça, grosse patate ! Ecrase-moi les bijoux de famille ! s’écrie Ron, hilare, entre deux goulées d’air.
- Bokina ? Viens mon beau, appelle Harry, les bras grands ouverts.
L’animal répond à l’invitation en barrissant avec excitation, mais il ne laisse aucun répit à Ron qui tente à présent de ramper pour s’extraire de son étreinte potelée. Harry l’aide à se remettre debout. Le rouquin est en larme, le visage bouffi et rouge, mais un grand sourire illumine ses traits.
- Bon sang, il me fait trop marrer celui-là ! Je suis à deux doigts de me pisser dessus !
- Tant de références en-dessous de la ceinture…, déplore une voix familière.
Le visage du rouquin se ferme aussitôt. Ron fait volte-face. Drago est appuyé sur la porte du box. Ses yeux le fixent sans détour. Son sourire en coin en dit long sur ses intentions, mais cela ne freine pas le rouquin, bien au contraire. Sa réponse, quasi instantanée, ressemble à une mauvaise habitude.
- En voici une autre référence spécialement pour toi, la Fouine : tu es vraiment un casse-couilles !
- Aucune subtilité…
- On n’a pas tous la chance d’avoir un bâton dorée dans le cul !
Harry ne peut s’empêcher de sourire. Clairement, Drago tient les ficelles de cet échange et il le sait. Il reste calme et semble jubiler des sautes d’humeur faciles de Ron. Le journaliste réalise que ces moments sont très rares. A cet instant, le responsable de la lutte anti-braconnage parait plus jeune qu’il ne l’est. Harry a l’impression de voir deux adolescents engagés dans un bras de fer psychologique. Drago n’est pas sur la défensive. Il n’est pas non plus réellement en train d’attaquer. Il s’amuse.
- Tellement prévisible, ricane Drago. Tu n’as pas évolué d’un iota, Weasmoche…
Grimaçant, Harry retient Ron par le bras qui s’avance dangereusement vers Drago.
- Répète, espèce de Sang-Pur dégénéré !!
- Arrêtez ça, s’il vous plaît, demande doucement Matenda qui s’approche du petit groupe.
L’expression de Drago change immédiatement. Il courbe l’échine et se détourne de Ron. Les sourcils du journaliste se soulèvent face à cette inflexion d’atmosphère, comme si la bulle de tension créée par les deux hommes s’était résorbée d’elle-même en une fraction de seconde.
L’aura de douceur que diffuse Matenda autour d’elle est perceptible par les trois hommes, y compris Bokina qui a arrêté de s’agiter.
- C’est l’heure du nourrissage, explique la jeune femme à Harry.
La jeune congolaise tend deux gros biberons d’une substance laiteuse à Ron avant de passer au box suivant, Drago poussant le gros chariot rempli de biberons.
- Tu veux lui donner ? demande Ron au journaliste qui s’empresse de lui prendre un biberon des mains.
- Avec grand plaisir !
Bokina reconnaît l’objet. Sa trompe tente de l’arracher des mains d’Harry qui ne peut s’empêcher de glousser. L’animal barrit de frustration.
- Tiens, on va lui mettre une couverture sur la tête. Vas-y, donne-lui le biberon maintenant, ordonne gentiment le rouquin.
Le pachyderme tète goulûment, la trompe enroulée autour du bras d’Harry. Les deux hommes échangent un sourire victorieux.
- Qu’est-ce vous mettez dedans ?
- C’est un mélange d’huile de coco, de porridge et je ne sais plus quoi d’autre. Ce n’est pas aussi parfait que le lait maternel, mais ça les aide à grossir.
- Et pourquoi vous utilisez une couverture ?
- Elle donne l’illusion du corps de leur mère au-dessus d’eux. C’est une présence rassurante.
- Je vois.
- On le fait avec les plus jeunes.
Le premier biberon tombe par terre, instantanément remplacé par le second. Harry pose sa main sur la couverture et caresse l’éléphanteau, doucement. Son sourire s’efface de lui-même. Le journaliste a une pensée pour la mère de ce petit. Il aurait été tellement plus simple qu’elle soit là, tellement plus naturel, dans l’ordre des choses.
- Salut Harry ! Si tu veux voir un truc dingue, dépêche-toi ! s’exclame Dean Thomas à l’autre bout de l’allée. Drago va le refaire, rajoute-t-il en s’adressant à Ron.
- Faut toujours qu’il passe pour le héros celui-là…, peste Ron en récupérant les deux biberons vides.
Quelques mètres plus loin se trouve un enclos solide de forme circulaire. Des barrissements furieux se font entendre de l’autre côté de la clôture en bois d’une hauteur de 1 mètre 50. Tout le personnel du refuge est rassemblé devant l’enclos. L’effervescence est palpable dans leur façon de se parler et d’interagir. Leurs mains font des voltiges dans les airs. Certains visages reflètent la désapprobation, d’autres de l’admiration, d’autres encore de la peur.
- Bonjour Minerva. Que se passe-t-il ? demande Harry, en s’approchant de l’enclos, les sourcils relevés.
- Bonjour Harry. Nous avons des difficultés à approcher Gambo. C’est l’un des deux éléphanteaux que nous avons récupérés dernièrement. Il est paniqué et nous charge dès qu’on approche.
Le journaliste pose un regard peiné sur l’animal qui s’agite comme un lion en cage aussi loin que possible de l’entrée de l’enclos. Gambo barrit désespérément et Harry comprend qu’il appelle sa mère. Le son puissant et déchirant lui transperce les entrailles.
- Le pauvre. Il est si petit, constate Harry, la gorge serrée.
- Et pourtant, il est suffisamment gros pour nous piétiner à mort, précise Ron. C’est pour ça qu’il faut être complètement barré pour faire ce que va faire Drago…
Le journaliste n’a pas le temps de demander des explications. Drago vient d’entrer dans l’arène. Inconsciemment, Harry retient son souffle, son regard allant et venant furtivement du jeune homme à l’éléphanteau.
Gambo, qui faisait face à la clôture, se retourne. Il émet un barrissement furieux et terrorisé en voyant Drago. La bave aux lèvres, la queue dressée, les yeux exorbités, les oreilles gonflées, tout en l’animal indique qu’il va attaquer Drago. Et effectivement, le pachyderme charge.
- Il est fou ! s’écrient quelques personnes derrière Harry.
Le journaliste inhale bruyamment lorsque Drago s’allonge soudainement par terre, un bras déplié mollement vers l’animal. L’éléphanteau s’arrête net, le corps tremblant et tendu. Un mètre sépare l’homme du pachyderme. Drago ne bouge pas et ne le regarde pas. Le temps semble suspendu tandis que l’animal observe intensément le responsable de la lutte anti-braconnage. Les minutes passent dans un silence absolu et la respiration de Gambo semble se calmer un peu.
Harry sait qu’il assiste à un moment unique. Il sait qu’il devrait sortir son portable pour filmer la scène, mais aucun muscle ne lui répond. Sidéré par l’émotion, le journaliste assiste au rapprochement entre deux êtres blessés qui tentent de se faire confiance. Une confiance sommaire mais essentielle qui suppose que l’autre ne nous veut pas de mal. Gambo franchit la ligne invisible qui les sépare. Sa trompe plane maintenant au-dessus de la main ouverte de Drago. Ce dernier ose enfin bouger. Il rapproche doucement sa main de la trompe du petit éléphant qui se risque à lui sentir le creux de la paume.
Harry détourne un instant le regard vers Minerva McGonagall. La vieille dame retient ses larmes. Un léger sourire adoucit ses traits tendus. Le journaliste perçoit aisément la fierté et l’affection qu’elle ressent pour le jeune homme, comme si ce dernier était son fils.
Harry recentre son regard sur l’arène. Drago est en train d’enrouler son bras autour de la trompe de l’animal. Le journaliste reconnaît bien ce geste d’amitié qu’il a déjà vu à plusieurs reprises entre des éléphants de la harde de Kimya. Gambo se raccroche au bras du jeune homme. Ses paupières s’affaissent et son corps titube d’épuisement.
Drago s’assoit prudemment. Le pachyderme s’approche encore et se laisse tomber au sol, les pattes repliées sous son corps. Il vient ensuite appuyer sa tête contre le torse du jeune homme, cherchant la présence imposante et rassurante de sa mère. Drago l’enveloppe de son corps, un bras toujours enroulé autour de sa trompe. Sa main libre lui caresse la tête et le dos. L’animal soupire longuement et semble progressivement glisser dans le sommeil.
Au même moment, la porte de l’enclos s’entrouvre. Blaise Zabini ferme la porte derrière lui et se tient là, une couverture et deux biberons dans les mains. Il attend un ordre de Drago. Ce dernier tourne la tête vers lui et lui fait signe d’approcher.
Blaise avance lentement, recroquevillé, l’œil braqué sur Gambo qui paraît à présent totalement calme et inoffensif. Volontairement, Drago laisse Blaise s’installer à côté de lui et présenter le premier biberon à l’éléphant. L’animal agrippe faiblement la tétine et commence à goûter au mélange étrange avant de reculer la tête, l’air hagard.
Les deux hommes se regardent, murmurent. Gambo finit par rouler sur le côté et poser sa tête sur la cuisse de Blaise. Ses paupières sont clauses.
- J’espère qu’on arrivera à le sauver, souffle Ron à l’oreille du journaliste. A cet âge, ils doivent boire très souvent, de jour comme de nuit. Gambo est de toute évidence déshydraté et affaibli. On ignore depuis combien de temps il n’a pas bu. Tout ce qu’on sait, ce que c’est une course contre la montre.
Drago installe la couverture sur le pachyderme et prend le temps de le caresser avec Blaise. Puis, son visage s’approche de son oreille droite et ses lèvres se mettent à remuer. Harry sait qu’il lui murmure des mots apaisants en Lingala. Son oreille ondule gracieusement et Gambo soupire à nouveau avant de s’endormir pour de bon. Blaise pose une main sur l’épaule de Drago, puis, progressivement, ce dernier s’écarte de Gambo et fait marche-arrière en direction de la porte.
A peine sorti de l’arène, Minerva McGonagall enlace déjà Drago et l’embrasse affectueusement sur la joue.
- Merci, lui dit-elle simplement.
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Le moteur de la jeep ronronne tranquillement tandis que Drago s’engage sur le chemin accidenté qui mène enfin au complexe du parc de Garamba. Il ne reste que quelques kilomètres à parcourir.
- Tu es bien silencieux, constate le responsable de la lutte anti-braconnage sans quitter la route des yeux.
- Je pense à Gambo, explique Harry. J’espère qu’il s’en sortira.
- Ils font tout ce qu’ils peuvent. Mais ils ne pourront jamais remplacer parfaitement une mère ou une harde. Ils essayeront de renforcer les liens entre ces orphelins et voir s’ils arriveront à former un clan suffisamment solide pour retourner dans la vie sauvage dès que possible. Mais certains sont trop marqués par ce qu’ils ont vu. Ils se laissent mourir ou développent des troubles du comportement incompatibles avec la vie en société. Dans tous les cas, ce n’est pas facile et cela prend du temps.
- Ce que tu as fait était incroyable et dangereux, remarque le journaliste. Tu savais que ça allait se passer comme ça ?
- Un animal stressé est imprévisible. Mais les éléphants sont tellement intelligents que je crois en leur capacité à comprendre nos intentions. Cela aurait pu mal se finir, c’est vrai, mais il fallait le faire pour gagner du temps.
- Tu l’as déjà tenté avec Kimya, n’est-ce pas ? demande Harry après un moment de réflexion.
- Oui. C’était d’autant plus dangereux que Kimya était adulte et qu’elle m’avait certainement vu dans la jeep lorsque mon père et ses hommes avaient décimé sa famille. Les éléphants sont capables de se souvenir d’un visage des décennies plus tard, alors imagine au bout de quelques jours.
- Elle t’a certainement vu dévier l’arme de ton père lorsqu’il a voulu l’abattre avec son petit.
- C’est possible. En tout cas, elle a choisi de me faire confiance. Elle a compris que j’étais prêt à tout pour la protéger, comme si on n’avait été de la même famille. Je crois qu’elle avait besoin de ça pour sortir petit à petit de sa dépression.
- Elle se laissait mourir ?
- Oui. Et personne n’arrivait à l’approcher. Alors, un jour, je me suis allongé par terre, j’ai tendu mon bras vers elle et j’ai attendu qu’elle s’approche de moi, ce qu’elle a fait.
- Comment l’avez-vous introduite à Garamba ?
- Kimya a fini par prendre sous son aile la dizaine d’orphelins qui grandissaient au refuge à cette époque-là. On avait donc une nouvelle harde. A notre grande surprise, Kimya a réussi à tisser des liens avec une vieille matriarche du parc qui était à la tête d’un groupe d’une trentaine d’éléphants. Celle-ci a accepté leur intégration à la harde. Peu de temps après, la matriarche est décédée et l’une de ses filles a pris le relai pendant trois ans, jusqu’à ce qu’un groupuscule de braconniers ne la tue avec sept autres membres du clan. C’est ensuite la sœur de la matriarche qui a pris le relai, mais elle aussi, a été abattue au bout de quelques mois avec cinq autres éléphants. C’est comme ça que Kimya a fini par devenir l’éléphante la plus âgée de la harde et qu’elle est devenue la matriarche. Cela fait six ans qu’elle mène son clan, tant bien que mal, avec l’aide notamment de la dernière fille de la précédente matriarche qui s’appelle Yamé.
Une jeep se trouve déjà garée devant leur maison lorsque les deux hommes entrent dans le complexe. Maya baille à s’en décrocher la mâchoire et se redresse, sentant la voiture décélérer. Kimya est également là, à côté de leur maison. Trois gardes armés se tiennent à bonne distance de l’éléphante, prêts à intervenir à la moindre menace de braconniers. Drago gare la jeep et Maya saute immédiatement par-dessus la portière pour rejoindre Kimya. L’éléphante s’amine doucement à la vue du grand félin qui prend plaisir à se frotter contre les pattes du pachyderme. Un grondement apaisant se diffuse de la gorge de Kimya. Drago franchit les quelques mètres qui les séparent et presse tout son corps contre elle. Sa trompe vient l’enlacer.
- Mbote na yo, moninga, murmure Drago, les yeux fermés. Ndenge nini ?
- Qu’est-ce que ça veut dire ? ose demander Harry.
Drago tourne la tête vers le journaliste, clairement irrité par sa question.
- Qu’est-ce que tu fais lorsque tu rencontres quelqu’un ?
- Je le salue ?
- Et en général, on lui demande comment il va, non ? Eh bien, voilà. Inutile de gaspiller ta salive pour de telles banalités.
- Oh, je t’emmerde, Malefoy…
- C’est clair ! Bon, je dois y aller. A plus tard, Potter. Et fais pas de connerie…
En même pas cinq minutes, Drago est prêt. Il s’est habillé en tenue de camouflage, a pris un sac pour tenir la journée et sa carabine. Puis il a grimpé sur le dos de Kimya et est parti sans se retourner, Maya à ses côtés, comme toujours. Les militaires, comme une ombre, ont suivi le pachyderme.
- Bonjour Harry. Alors cette sortie au refuge ? demande Hermione en sortant de leur maison.
C’est à ce moment que le journaliste réalise qu’il est resté bêtement planté dehors, l’esprit ailleurs. Il comprend que la jeep garée-là appartient à Hermione.
- C’était magique, vraiment. Dormir avec les éléphanteaux, je dois dire que je ne suis pas prêt d’oublier ça. Et Drago a été remarquable dans sa façon d’interagir avec eux, notamment avec l’un d’entre eux qui était mal en point.
- Ravie que ça t’ait plu. C’est vrai que Drago sait y faire avec les animaux. Nous avons beaucoup de chance de l’avoir ici.
- C’est certain.
- Regarde ce que je t’amène, informe Hermione avec enthousiasme. Ton équipement est arrivé ce matin !