Le fantôme de mon amour

Harry attendait la fin de la journée avec une impatience qu’il ne se reconnaissait pas. Le lycée de Forks, en cette fin de journée du vendredi, était étrangement calme par rapport au reste de la semaine. Les élèves s’étaient échappés plus vite que d’habitude, en tout cas plus vite que les quatre autres jours, mais lui, il restait là, planté sur sa chaise, les yeux fixés sur le tableau désormais effacé de la salle de classe alors que l'enseignant finissait de ranger ses affaires.

Il n'y avait pas de véritable raison à cette pause, juste la réalisation qu'il l'avait fait. Il avait réussi à passer une semaine complète dans ce lycée moldu au milieu de ces adolescents si étranges dans leur normalité.

Harry n'avait jamais eu l’occasion de vivre une véritable adolescence. Voldemort, la guerre, les conflits, le tournoi, les conséquences. Tout cela avait tellement occupé son temps que les seules fois où une bride de vie normale s'était présentée à lui, il n'avait pas su comment agir. Comme avec Cho, comme avec Cédric.

Cédric.

Il repensait à ses premiers jours ici, à ce lundi, au moment où il avait croisé les yeux d'Edward à la cafétéria. Il n'avait pas fallu longtemps à Harry pour apprendre le prénom de ce dernier. Apparemment les Cullen étaient la source de beaucoup de ragots et jalousie dans le lycée.

Edward.

C’était tout juste un regard, enfin, plusieurs regards, mais cela avait suffi à réveiller en lui quelque chose qu’il avait mis des années à enterrer : la douleur de la perte de Cédric et des « et si ».

Et si les choses avaient été différentes à l'époque.

Mais les choses étaient différentes ici, dans ce lycée,à Forks.

Au début, la ressemblance entre Cédric et Edward avait été frappante, douloureuse, une plaie à vif qu'on avait décidé de rouvrir. Mais au fil de la semaine, cela avait changé.

Edward, même s’il la ressemblance entre lui et Cédric était aussi forte qu'entre Fred et George, n’était pas Cédric. Comme pour les jumeaux, tout était dans les différences. Et des différences, il y en avait.

Beaucoup. Pas physiques, mais nombreuses.

Cette prise de conscience, aussi minime soit-elle, avait commencé à apaiser un peu le tumulte qu'Harry portait en lui.

Il avait passé toute la journée du mardi à éviter soigneusement les Cullen. Fuyant presque à leur vue,et une fois rentré chez lui, il s'était fustigé.

Il était un aurore, il avait 25 ans, qu'est-ce que le monde sorcier dirait s'il savait que leur sauveur se cachait face à un simple adolescent moldu.

Ce fut résolu qu'Harry se présenta le mercredi matin au lycée, déterminé à se comporter en adulte et à ne pas éviter les Cullen et Edward en particulier.

Harry ne put qu'être heureux de se recadrage personnel car dès la première heure de ce mercredi, lors du cours de biologie, Harry avait une fois de plus croisé son regard. Premier cours en commun avec l'un des Cullen, et bien évidement c'était avec Edward.

Ce n’était pas un échange direct, juste un petit instant où leurs yeux s’étaient accrochés, comme ça, sans but précis. Puis, rapidement, chacun avait détourné les siens, comme si rien ne s’était passé.

Harry avait réussi à garder la tête froide, concentrant toute son attention sur les notes de biologie auxquelles il ne comprenait rien étalée devant lui.

Quand la fin du cours eut sonnée, Harry était fier de lui. Il avait réussi non seulement à ne pas se rendre ridicule en ayant une nouvelle crise de nerf devant Edward, mais en plus son attention forcée sur ses notes lui avait permis de presque comprendre le principe du cycle des prédateurs qui lui était présenté. Presque. Car Harry n'était toujours pas convaincu que le lion était le prédateur suprême du règne animal.

Le jeudi après-midi, les choses s’étaient passées de la même manière. Apparemment Edward et Harry avaient les mêmes cours scientifiques et cette fois au cours de physique, ils se retrouvèrent à nouveau dans la même classe.

Une nouvelle fois, un regard échangé, une seconde de flottement, et puis c’était tout. Edward détournait le regard presque plus vite qu'Harry, comme si il sentait qu'Harry était mal à l'aise face à lui, comme s'il savait que le voir causait tant de questions dans sa tête.

Harry aurait presque remercié le jeune homme pour cela s'il n'avait pas été certain que le jeune homme l'aurait pris pour un fou.

Aujourd'hui cependant, les choses avaient été légèrement différentes durant la dernière heure de la journée.

Pas grand chose, juste un petit geste d’Edward lors du cours de biologie.

Le crayon de Harry avait roulé de son banc sous celui d'Edward. Ce dernier, sans un mot, s’était penché et l’avait ramassé pour le lui rendre en se tournant vers lui. Là où Harry s'était attendu à voir le sourire éclatant de Cédric, sur ce visage si semblable, l'expression était toute autre.

Sérieuse, concentrée, inquisitrice.

Des expressions qu'Harry n'avait jamais vu sur le visage de Cédric, même avant d'affronter un dragon.

Choqué par cette différence si grande, Harry n'avait rien dit, il avait juste saisit son crayon sans un mot, et Edward n'avait pas attendu de remerciement. Il avait juste hoché la tête et était retourné à son cours.

Harry avait passé le reste de l'heure à observer Edward et il remarqua beaucoup de petites choses. Cela avait commencé avec les cheveux. Ils avaient la même couleur, presque la même longueurs, mais là où Cédric avait les cheveux parfaitement coiffés, Edward avait des cheveux plus sauvage, indomptable, dans une tignasse qui ressemblait plus au nid d'oiseau qui ornait la tête d'Harry.

Ensuite la posture, là où Cédric était calme et détendu, Edward semblait tendu et nerveux, comme si il était attentif à tout ce qui avait lieu autour de lui en même temps. Edward semblait prêt à réagir au quart de tour.

Une chose qu'Harry remarqua aussi, était bien évidement la pâleur d'Edward. Cédric était à la fois sur de lui et timide, ce qui rendait le rosissement de ses joues charmants. Edward était pâle comme la mort, comme Cédric après que ...

Un craquement bruyant se fit entendre dans la salle de classe et la voix d'Edward s'éleva pour s'excuser d'avoir briser son crayon.

Harry aurait pu se mettre à genou à l'instant en remerciement.

Ses pensées s'étaient encore échappées, étaient encore partie là. Non.

Harry s'était ressaisit et le reste du cours s'était passé sans accros, Harry se concentrant le plus possible à nouveau sur ses notes pour ne pas permettre à son esprit de retomber dans cette spirale infernale.

Alors qu'il rangeait ses affaires dans son sac, Harry avait aperçu Edward lui jeter un regard furtif avant de sortir de la salle.

Il marchait calmement, avec une assurance presque trop tranquille, un peu trop travaillé, un peu fausse qui avait attiré l'attention de Harry.

Et voilà comment Harry s'était retrouvé là, encore assis à son banc alors que tous étaient partis.

Harry fut sorti de ses pensées par son enseignant qui lui signala qu'il devait fermé le local.

Harry acquiesça et se leva lentement, attrapa son sac et se dirigea vers la sortie, mais après avoir passer la porte, il sentit cette sensation à nouveau, celle qu'il avait ressentit toute la semaine, cette impression d'être observé. Quand il se scruta le couloir pour voir qui l'observait, Harry ne vit personne, mais il aurait pu jurer avoir vu le bout d'un sac à dos bleu foncé disparaître à grande vitesse au bout du couloir. La même couleur de sac qu'Edward.