Troubles
« L'amour est une folie de l'échange. »
Chapitre 5 : Troubles
De dos par rapport aux autres, il eut la chance que personne ne voit son expression. Doucement, il franchit l'espace menant au couloir et s'éclipsa.
Il fallait qu'il passe d'urgence sous la douche se dit-il en sortant complètement de la pièce. Ce n'était pas le moment de craquer devant tout le monde. D'ailleurs, pourquoi craquait-il ? Il n'y avait vraiment pas de quoi. Il ne s'était rien passé. Absolument rien. Il s'en était tenu au plan et ça avait marché, voilà tout ce qu'il y avait à retenir. Pourtant, le sentiment impérieux de devoir se laver pour effacer la présence de l'homme sur son corps se faisait de plus en plus perceptible. Un halètement de panique franchit soudainement ses lèvres tremblantes et il se décida à avancer.
Tournant un peu sur lui-même pour repérer les lieux, il partit en exploration à la recherche d'une salle de bain dans la maison Whittemorienne. Cette baraque était gigantesque, il lui avait presque fallu un GPS pour trouver une baignoire. Sans se soucier des convenances, il fit couler l'eau et commença à enlever ses vêtements. En relevant son visage vers le miroir, il eut comme un choc et recula vivement. Etait-il vraiment ce gars au regard vide ?
Une larme traitresse coula et il crut à nouveau sentir le pouce de l'Alpha contre sa pommette, effaçant la perle d'eau salée. Rapidement, ce fut le déluge. Il se sentait ridicule. Ça n'avait pas de sens de pleurer pour ça. La chance avait été avec lui et l'autre n'avait rien fait de dramatique. Comment avait-il pu en arriver là ?
Prenant le savon, il frotta rageusement son t-shirt puis son jeans. Il finit par jeter le tout dans la baignoire et s'y glisser à son tour pour faire subir à chaque parcelle de sa peau le même traitement. Passant et repassant le savon, à s'en faire rougir la peau.
Son visage ne portait pourtant plus les marques des morsures mais il les sentait ! Il sentait les lèvres prédatrices contres les siennes, sa langue dans sa bouche, ses mains sur son corps, son esprit s'infiltrant dans le sien. Un haut le cœur fit remonter de la bile le long de sa gorge, brûlant et piquant tout sur son passage, menaçant de faire couler de nouvelles larmes.
Ramenant ses genoux contre sa poitrine, il les entoura de ses bras et se berça pour se réconforter. Tout ceci aurait pu vraiment mal tourner, il devait s'estimer chanceux et arrêter de pleurer pour rien. Il l'avait juste toucher bordel, juste toucher. Frôler, caresser. Ce n'était rien ça. Ça aurait pu être pire. Bien pire.
Mais que se passerait-il la prochaine fois ? Une fois, c'était un accident, deux fois, une coïncidence et trois une tendance ! Et, l'Alpha avait l'air d'un gars qui ne se contentait pas d'un simple « non ». Son genre n'était pas non plus de renoncer à une proie. Et, Stiles n'était que trop conscient d'être devenu sa proie. Au fond de lui, il savait qu'il ne devait pas y avoir de prochaine fois ! Jamais ! Il n'était pas sûr d'y survivre.
Refusant de subir d'avantage, il se redressa brusquement dans la baignoire, bomba le torse et se fixa dans le miroir droit dans les yeux. Avec satisfaction, il vit une flamme étinceler dans son regard. La vie avait beau être injuste avec lui, il n'abandonnerait pas sans combattre. Il pointa un index impérieux et défia son reflet. Ose pleurer, ose te morfondre. Il y a pire dans la vie. T'es plus fort que ça. T'es Stiles Stilinski ! Un être au QI supérieur, ayant par deux fois déjà échappé à un Alpha. Auto-motivation à son niveau maximum. Il agita son doigt vengeur pour s'invectiver silencieusement. C'est à ce moment précis qu'il remarqua ce qui n'allait pas sur son corps.. Ou plutôt ce qui allait sur ce corps dont il se souciait si peu d'ordinaire.
L'index s'abaissa et se porta à son coté. Sur son flanc, il ne restait aucune marque de son agression de la veille. Troublé, il tira légèrement sur sa peau, celle-ci était vierge de toute blessure. Sa main repassa plusieurs fois, émerveillé. L'œuvre de Derek sans aucun doute, il était le seul à avoir pu. Pu quoi ? Le soigner magiquement ? Au moyen de sa salive surnaturelle ? Pendant qu'il dormait…
Il l'avait léché durant son sommeil ? Perturbant. Ce gars avait de curieuse façon de montrer son affection. C'était quoi ça de le lécher alors qu'il dormait ? Comment devait-il le prendre ? Certainement comme une preuve de l'attachement du loup, vu que l'action visait à le soigner et non à l'empoisonner. Mais pourquoi l'avait-il fait ? Avait-il eu un moment d'égarement ? Une folie passagère, comme le câlin du matin ou le baiser dans le bureau de son père.
Une nouvelle méthode de torture selon lui, avant il le frappait, maintenant, il le déstabilisait autrement. Démon !
Derek le loup à la salive curatrice … non vraiment, ça sonnait mal. Derek le loup protecteur. Derek le loup curieusement flippant …
Il avait du mal à imaginer la langue de Derek en contact avec sa peau, associer sa langue de loup léchant ses blessures. Derek l'ayant soigner intentionnellement de la meilleure manière dont il disposait. laissant sa petite langue parcourir son flanc, c'était hautement érotique. Il avait pris soin de lui, il était venu le chercher, le sauver à deux reprises en moins de 24 heures.
Mon Dieu ! Derek exécutant un soin de loup-garou sur lui, il n'en revenait pas d'avoir raté ce phénomène !
Pourquoi avait-il fait ça ? Etait-ce à cause de sa promesse de le protéger tant qu'il tenait son rôle de petit-ami ? Le pourrait-il toujours ? Un frisson d'émotions violentes le parcourut soudainement. Pris dans une sorte de tourbillon étourdissant, il fallait qu'il sorte, qu'il le voit. Stiles voulait l'avoir physiquement près de lui, il en avait besoin pour son équilibre, pour retrouver son calme. Il sentait qu'il ne pouvait-être bien loin …
/
/
Lydia vit Derek suivre Stiles et intercepta Scott quand il voulut sortir à sa suite. Elle pensait qu'ils valaient mieux laisser les deux autres seuls et que l'attitude de Scott, quelle qu'elle soit, ne serait pas d'une grande aide.
-Scott, peux-tu aider Jackson ? Je crois que Danny s'agite vraiment beaucoup.
Sans même attendre la fin de la phrase de Lydia, Scott se dirigea immédiatement vers le lit où en effet, le mordu se soulevait avec les yeux jaunes vifs. Maudissant brièvement Derek de le laisser gérer ça, il plaqua sauvagement le corps grâce au sien sur le lit. Il aurait préféré échanger leur place et rejoindre Stiles en le laissant s'occuper de la transformation de Danny.
Etant passé par là, il ne voulait pas non plus laisser le gardien affronter ça tout seul juste pour voir ce que Derek fabriquait avec Stiles. Il savait que l'autre ne pourrait rien faire de grave ici. Surtout qu'il pouvait entendre ce qui se passait dans la maison, il suffirait à Stiles de parler un tout petit peu fort et il saurait de quoi il retourne.
A cet instant précis, Danny avait plus besoin de lui. Son corps se distordait par endroit avant de reprendre forme humaine. Ses griffes sortaient puis ses ongles réapparaissaient. Tout n'était que chaos et désordre dans ce corps en ébullition. Il risquait de blesser les autres s'il ne le focalisait pas sur une pensée. Il était impensable de le laisser seul. Qu'est ce que Derek avait de plus important à faire que de s'occuper d'un nouveau loup garou ? Lui qui était si à cheval sur la sécurité et le secret depuis leur première rencontre.
-Ecoute Danny, tu entends nos cœurs battre ? Concentre toi sur le rythme, lui conseilla-t-il. C'est comme une musique relaxante. Tu dois trouver une source d'apaisement pour te contrôler.
Danny cria en sentant son corps s'enflammer, un long râle de souffrance puis plus rien, avant d'être à nouveau secouer de spasmes violents. Jackson arriva avec des torchons remplis de glaçons qu'il plaça délicatement autour de Scott et Danny. Il était un peu désemparé face à la souffrance de ce dernier. Cet état devait rapidement cesser au dire des deux autres loups de la maison et il avait hâte, oui vraiment hâte, que son ami reprenne conscience. Il n'était pas à l'aise face à ça.
-Ça va aller, vint le rassurer Allison en posant une main amicale sur son épaule.
Il ne la repoussa pas trop heureux de ce contact. Cette soirée ne s'était pas exactement passée comme prévue. A cette heure-ci, ils aurait dû être en boîte avec Danny. Une sortie pour que ce dernier surmonte sa récente rupture. Rupture que Jackson avait plus ou moins précipité. A sa décharge, il voulait bien faire. Niveau méthode, il s'était comporté comme un vrai connard. Niveau amitié, il se jugeait avoir été à la hauteur. Son amitié avec Danny avait un peu mis à mal par la dépression qui avait suivi, mais Danny lui avait pardonné encore. Parce qu'il savait que sur le fond, il était meilleur que sur la forme. Maintenant, Danny incarnait celui qui serait meilleur sur le fond que sur la forme. Ce trait d'humour lui rendit le sourire.
Jusqu'à présent, il n'avait eu que Danny et Lydia comme vrais amis et il n'avait jamais vu aucun d'eux dans une situation aussi critique. A un moment donné, il aida Scott en épongeant la peau brûlante de Danny et quand un calme relatif arriva enfin, il se laissa tomber sur le sol pour s'adosser au lit.
/
/
Derek attendait derrière la porte de la salle de bain où Stiles s'était retranché. Il hésitait à franchir les quelques mètres qui les séparaient. Il avait compris ce que l'alpha lui avait fait subir et il ne pouvait pas en parler de but en blanc sans s'énerver. La rage qu'il ressentait, il devait la mettre de côté. Ne pas la laisser lui brûler les entrailles. Ce n'était pas lui qui était blessé, qui avait souffert. Il devait donc aborder le problème sous un autre angle et ne pas brusquer Stiles. Lui-même était prêt à réduire à l'état de déchets organiques le monstre ayant posé ses sales pattes sur le garçon. Comme si cet affront marquait sa propre chaire.
Il vivait la souffrance et le supplice de Stiles dans son corps et dans son âme.
Déchiré, il avait entendu les larmes silencieuses, l'agitation frénétique, perçu l'odeur du savon remplaçant peu à peu celle du loup et les battements de son cœur faire les montagnes russes. La façon dont l'Alpha l'avait traité, visiblement pour la deuxième fois, était horrible et totalement incompréhensible pour le loup qu'il était. Il n'osait imaginé ce que Stiles pouvait réellement ressentir. La fragilité, les tentatives d'analyse, l'incompréhension.
L'horreur de la scène lui revint en pleine face. Les marques sur ses lèvres tendres que les siennes avaient goûté peu de temps avant, les mains caressant ce corps qui ne lui appartenait pas, ses doigts s'accaparant l'innocence incarnée. Ce fou furieux avait tenté de le violer. Au fond de lui, il sentait le besoin de hurler de douleur à la place de Stiles qui se murait dans le silence angoissant du secret.
Il voulait le prendre dans ses bras et effacer tout ça, lui assurer qu'il était là et qu'il laverait cet affront dans le sang. Qu'il mettrait les tripes de ce salaud à l'air ! Ses crocs sortaient prêts à dévorer le cœur de l'ennemi. Oui, il allait se baigner dans son sang pour obtenir un semblant de paix.
Mais, Stiles préfèrerait faire comme si de rien était, comme la veille. Il essayerai certainement de cacher ses blessures psychologiques sous une couche de normalité écœurante d'hypocrisie. C'était son moyen de défense. Son moyen d'être fort, malgré les horreurs qu'il pouvait vivre.
Le réduisant ainsi au rôle de spectateur impuissant, au même titre que les autres. Or, il devait l'assurer de son soutien, c'était son rôle en tant que compagnon. Maitrisant son envie de vengeance sanglante, il obligea son corps à reprendre conscience de son humanité. L'adolescent et son bien être comptait plus que l'apaisement de son ego.
Au moment où il se décida enfin à frapper à la porte pour s'assurer de l'état du garçon, de curieux bruits se firent entendre du côté de Stiles. Sa main en suspend frôla le bois sans le cogner avant de retomber le long de son corps.
-Derek ? murmura doucement Stiles derrière le battant de telle manière que seul un loup à moins de 1 mètre de lui puisse entendre sa demande.
-Je suis là, répondit-il immédiatement.
-J'ai pas de vêtements de rechange, se plaignit l'adolescent en continuant d'une voix très basse.
Soupirant, Derek entra. Il balaya la scène et son regard s'arrêta sur le corps nu et tremblant de Stiles, serrant ses vêtements trempés contre lui, le tout ruisselant sur le carrelage noir. Trouvant que l'adolescent était suffisamment perturbé comme cela, il évita de lui faire remarquer qu'il lui aurait suffit d'ouvrir un placard pour prendre au moins une serviette. A la place, il en sortit une lui-même et en enveloppa Stiles délicatement.
Conscient que sa peau habituellement pâle était anormalement rougie par une utilisation excessive du savon, il n'osa pas frotter pour le sécher.
Stiles voulut parler mais il se ravisa. Derek pencha la tête sur le côté semblant attendre qu'il se décide. D'autres auraient pu entendre la conversation et Stiles se contenta de savoir qu'il aurait pu lui en parler. Derek se contenta de savoir que Stiles lui faisait confiance. Tout était dit dans un regard suspendu entre eux.
Derek ferait comme le garçon voudrait. Ils feraient comme si de rien était. Comme si rien était arrivé. Si Stiles voulait enterrer ce souvenir, il creuserait le trou pour lui et garderait la tombe. Protecteur, il priait pourtant pour ne pas être le gardien d'autres inhumanités.
Puis, il enleva son jeans et le lui tendit, avant de lui mettre sa veste en cuir sur les épaules. L'enveloppant de ses grands bras pour la refermer, il enserrait en réalité l'adolescent dans son parfum pour le marquer comme sien. Les manches tombèrent par-dessus les poignets marqués d'immenses bleus, cachant ainsi les traces visibles de la puissance de l'étau avec lequel l'Alpha l'avait maintenu.
En l'enfilant, Stiles eut l'impression de revêtir une armure et il se sentit protégé, fort. Depuis le temps qu'il rêvait d'avoir une veste en cuir comme celle-ci. Trop la classe, se dit-il et il vit que le loup lui souriait doucement, étrangement. Une certaine tendresse émanait de son regard, Stiles le trouva attirant dans la lumière crue de cette salle de bain. Magnétique.
Soudain, son souffle devint plus haletant, son cœur battit plus fort, une lueur fugace traversa son regard. Stiles fit un pas en avant comme aimanté vers le corps du loup. Derek lui souriait avec chaleur et une pointe d'incertitude. Dans le fond de ses yeux une lueur lupine étincela sous la pulsion des émotions qui le traversait.
Comme hypnotisé, Stiles leva une main pour se raccrocher au loup, vérifier qu'il était bien réel. Mais avant d'avoir pu le toucher, il se rappela de ne pas écouter cette poussée instinctive, que Derek n'était pas réellement son petit-ami et qu'en plus de cela, il n'était même pas gay ! Enfin, il n'en était pas bien certain. Ses pensées étaient vraiment trop embrouillées et instables. Il ne savait plus ce qu'il voulait ou ressentait.
Gêné, il détourna le regard et fixa son tas de fringues imbibées de flotte et de savon.
Derek se retrouvait en boxer avec un t-shirt, néanmoins cela ne semblait pas le déranger outre mesure. Il ne pouvait tout de même pas laisser Stiles errer nu. Déjà parce qu'habiller, il représentait bien trop de tentations, alors sans vêtement, avec cet air vulnérable. Son regard s'alluma quelques instants en frôlant ce corps avant de reporter, lui aussi, son attention sur les habits humides.
Le plus jeune réunit ses affaires mouillées dans la grande serviette et emporta le tout hors de la salle de bain, loin des manies pyromanes du grand méchant loup. Une fois lui avait suffit et il espérait grandement que l'odeur de savon suffirait à les sauver.
-Ça te donne un air de mauvais garçon, lui dit Lydia quand elle le croisa dans la cuisine.
Bien content de retrouver une présence humaine progressive, Stiles lui lança un sourire timide, loin de ceux qu'il tentait, il n'y a pas si longtemps en sa présence. Lydia s'en contenta et lui glissa son verre d'eau à moitié plein dans la main.
Puis, voyant son fardeau dégoulinant, elle lui trouva un sac plastique pour le débarrasser de ce poids. La jeune fille ne semblait absolument pas gênée par leur dégaine, trouvant presque normal que Derek lui ait filé la moitié de ses vêtements. Elle aurait fait pareil. Derek se tenait derrière Stiles, dans une posture entre le protecteur et le prédateur. Lydia aimait cette présence sans vraiment savoir pourquoi.
Enfin, elle avisa sérieusement Derek avec lequel elle n'avait pas eu bien le temps de se familiariser et le jaugea d'un coup d'œil rapide. Vraiment beau gosse, au corps bien dessiné, pas du tout son genre, mais ça n'avait aucune importance étant donné sa relation avec Stiles. Vraiment adorable.
-A la guerre comme à la guerre, déclara-t-il de marbre, n'ayant rien loupé de l'attitude de Lydia.
-Venez, je vais vous donner ce qu'il faut. Jackson a des armoires pleines, sourit-elle sincère et avant que les garçons ne protestent, elle ajouta : vous savez truc de meute, prendre soin des autres, alors hop ! Pas de discussion.
Elle pointa une porte du doigt et les obligea à suivre. Lydia était autoritaire et aucun n'avait la force de s'opposer ce soir. Instinctivement, Derek savait qu'il pouvait lui faire confiance, certainement parce qu'elle ressemblait un peu à Stiles, en beaucoup plus calme, plus sûre d'elle, plus intégrée à la vie sociale, plus normale en bref. Egalement très intelligente, elle avait immédiatement compris le sens du mot meute dans la bouche de Stiles et ce que cela impliquait. Son attitude le montrait clairement depuis tout à l'heure. Et puis, au lycée, elle avait fait preuve d'un courage et d'un sens tactique qui avait provoqué une vague de respect de la part de Derek. Surtout quand elle avait cloué le bec de Scott quand il avait essayé de l'envoyer balader.
Encore elle qui lui avait brièvement expliqué la situation à son réveil, lui permettant de sauver Stiles.
Aussi, le mystérieux Derek Hale se laissait faire calmement, sans montrer les crocs ou grogner ou n'importe quelle autre attitude qu'il adoptait fréquemment pour indiquer son désaccord. C'était bien agréable de se laisser prendre en charge comme au temps où il vivait en meute avec toute sa famille.
Cela lui laissait le temps de repenser à cette soirée et plus particulièrement au monstre. Il était quasiment certain de connaître l'Alpha, de l'avoir croisé, fréquenté. Sa fourrure et son odeur étaient mémorisés dans ses souvenirs d'enfance. Ça l'agaçait de ne pas mettre un nom dessus. Si seulement, il avait prêté plus d'attention à son entourage, au lieu de se laisser vivre comme un sauvage pratiquement toute son insouciante jeunesse.
Troublé, il jetait de fréquent coup d'œil à Stiles pour s'assurer que ce dernier ne se briserait pas d'un instant à l'autre sous ses yeux. A la surface de ses émotions flottaient la colère et la tristesse d'avoir laissé ça se produire et de ne pas savoir comment aider Stiles à le gérer. Il ne restait que l'impuissance et l'attente devant les réactions de Stiles.
Quelques minutes plus tard, ils rejoignirent le reste de leurs amis, de leur meute en fait maintenant. Stiles n'avait pas voulu quitter la veste de Derek pour enfiler un t-shirt plus confortable. Il se sentait plus rassuré par le contact du cuir à même sa peau, baignant dans une aura protectrice. Déstabilisé, Scott retroussa ses narines, humant de sa place l'air autour de son ami. Un parfum magnétique, puissant, l'entourait comme un territoire marqué par un loup. Tout à la fois, une marque de possession et une mise en garde.
Dans son regard assombri, on pouvait lire le reproche suivant : « tu sens comme Derek ». Mais, Stiles ne regardait pas Scott et il aurait de toute façon répliquer que c'était mieux que de sentir le pervers dérangé ou le chien mouillé. Il traversa la pièce et prit place près de Jackson dont le dos reposait contre le lit au plus près de son ami.
La nuit était bien avancée et il avait eu sa dose d'émotions fortes. Comme les autres, il souhaitait dormir, se refaire des forces. Alors, emmitouflé dans l'armure du loup, épaule contre épaule avec Jackson, il se laissa partir dans un sommeil sans rêve. Allison somnolait déjà dans le seul fauteuil de la pièce, ses bras entourant ses genoux. Scott serrait le corps du futur loup-garou secoué de spasmes par moment, contre lui et Derek se plaça de l'autre côté sur le lit. Scott ne daigna pas lui accorder un regard et fut en plus vexer que Derek ne le remarque pas.
Aucun n'avait osé aller s'allonger dans une des nombreuses autres chambres. Préférant se rassurer dans la proximité alors que le matin même, ils n'étaient que de simples copains.
Lydia ricana intérieurement en regardant le trio de loups occuper le lit et l'attitude puérile de Scott. Puis, elle vint s'allonger de manière à ce que sa tête repose sur les jambes de son petit-ami. Automatiquement, la main de Jackson se mit à lui caresser les cheveux dans geste apaisant. Son petit-ami était la seule personne à savoir la tranquilliser, et aussi le seul à pouvoir l'agacer au point de générer une réaction de type attaque nucléaire.
Elle tendit la sienne vers celle de Stiles et la lui serra brièvement pour le remercier de tout ce qu'il avait fait ce soir. Il avait donné de sa personne pour poser les fondations d'une meute atypique maintenant, c'était à chacun d'eux d'y mettre une pierre pour construire un édifice solide. Lydia avait pris la mesure du danger et elle ne remercierait jamais assez son camarade s'ils se sortaient tous de ça. Elle consacrerait toute son énergie à ce projet s'il le fallait.
Avant de sombrer dans le sommeil, Derek laissa ses doigts errer vers l'épaule de Stiles, s'assurant qu'il était bien là, près de lui. Il se concentra sur sa respiration et sentit l'adolescent s'assoupir. Son contact le rassura suffisamment pour qu'il puisse reporter une partie de son attention sur Danny.
Vers midi le lendemain, une faim de loup réveilla Danny coincé entre Scott et Derek.
-Je me réveille entre deux mecs super sexy et je ne me souviens même pas de ma nuit, c'est bien ma veine, dit-t-il entre deux bâillements.
-Moi, je m'en souviens et t'étais pas beau à voir, plaisanta Jackson en lui répondant immédiatement.
-Tu me raconteras ta version quand j'aurais bu 2 litres d'eau parce que là, je meurs de soif et ma mémoire a des trous gros comme l'Arizona.
-C'est normal, assura Derek en se levant souplement. Bienvenue dans ton nouveau corps.
Danny lui jeta un drôle de regard avant de frotter son épaule douloureuse. Bien que pratiquement guéri, une large marque de morsure était encore bien visible. Les corps se mirent en mouvement, s'étirèrent et geignirent d'avoir dormi dans des positions plus ou moins confortables. Délicatement, Jackson réveilla Stiles en repoussant sa tête de son épaule. Ce dernier sursauta désorienté. Il avait mal partout et il se demanda un instant pourquoi le visage de Jackson était à quelques centimètres du sien. C'était comme de se réveiller nez à truffes avec son chat quand il avait 10 ans. Fortement bizarre.
Pas autant que le regard de Derek le transperçant depuis l'endroit où il se tenait. Cela lui donna envie de se lever immédiatement et de se trouver une occupation, n'importe laquelle. Lydia réajusta sa coiffure sommairement, interrogeant Stiles et Jackson du regard. Puis à travers la pièce, Jackson envoya des vêtements propres à Danny. Danny occupait souvent cette chambre quand il venait chez son ami. Il avait donc quelques affaires dans la commode.
Chez lui, ce n'était pas toujours la joie et pour Jackson non plus, ils étaient aussi proches que deux amis peuvent l'être et avec Lydia, ils formaient un trio assez soudés.
-Je tuerai pour avaler quelque chose, déclara Allison en poussant un peu tout le monde pour essayer de trouver la cuisine.
Derek observait Stiles du coin de l'œil et s'assurait que tout allait bien. Il détaillait son corps et le moindre de ses mouvements pour détecter une blessure qui aurait pu lui échapper la veille. Il vit la main de Scott attraper le poignet de Stiles et le tirer à lui. L'adolescent tressaillit légèrement entre douleur et angoisse qu'il cacha rapidement en se dégageant d'un geste souple et naturel. Scott se pendit à son ami pour plaisanter avec lui et l'éloigner de l'attention suspecte que lui portait le brun ténébreux. Il ne savait pas encore ce que l'autre manigançait mais il ne se servirait pas de Stiles pour arriver à ses fins.
Le simple fait de le voir lui porter de l'attention le dégoutait, tout comme cette odeur qu'arborait Stiles depuis la veille. Un peu comme s'il devenait une extension de ce loup-garou ténébreux et asocial.
-Quelle patience ! lui fit remarquer Danny. Je ne sais pas si je supporterai aussi bien qu'un autre gars s'accroche à mon copain. Quand bien même, ce ne serait qu'un geste de camaraderie et que ces deux là ont toujours eu une certaine proximité.
-Danny ! coupa Lydia. Tu ne crois pas que c'est le moment où tu pars t'hydrater avant d'énerver le gars qu'il ne faut pas dès le matin ?
Danny jeta un regard à Derek en remarquant qu'en effet, il avait la mâchoire légèrement contractée et qu'il faisait un effort visible pour se contenir. Il jugea préférable de déguerpir quand il vit les sourcils froncés du brun et surtout ses narines se dilater dans un signe évident de colère, fixant rageusement la main de Scott se resserrer sur l'épaule de Stiles. Il lui restait encore un brin d'instinct de survie et il se promit de ne pas aborder le sujet des amours devant quiconque avant un bon moment.
Ce qui avait énervé Derek, c'était de voir Scott toucher le poignet de Stiles sans prendre en compte les traces de l'agression de la veille. Scott n'avait même pas fait attention au sursaut angoissé de son ami. Derek avait dû retenir un grognement de rage, il ne pouvait pas sauter sur Scott sous prétexte de protéger Stiles. Ça aurait pu paraître exagérer comme réaction et effrayer l'adolescent plutôt que de le rassurer.
La blonde soupira agacée pour amener l'attention de Derek sur elle. Quand il daigna lui jeter un regard, Scott et Stiles avaient disparu dans le couloir. Elle lui fit un petit sourire forcé qui ressemblait fort à une grimace réprobatrice. Jackson se tenait juste derrière elle, prêt à intervenir si le loup la menaçait. Sa main fit signe à son petit-ami que tout allait bien et qu'il pouvait descendre prendre tranquillement ses suppléments vitaminés ou autre. Lentement, Jackson s'obligea à sortir de la chambre d'ami et il regarda la scène une dernière fois avant de les laisser seuls pour organiser le petit-déjeuner de la meute.
-Et bien ? finit par demander le loup en haussant les sourcils.
-Rien, répondit tranquillement Lydia.
Un peu surpris, Derek se tourna pour sortir d'un pas paisible, Scott pouvait tenter ce qu'il voulait son odeur supplanterai la sienne sur le corps de Stiles. Le jeune louveteau avait encore bien des choses à apprendre. Cette fille était un peu bizarre tout de même. Sentant une main chaude se glisser sous son bras, il s'arrêta pour se retourner vers Lydia.
-En fait si. Tu ne devrais pas laisser Scott te mettre dans cet état, glissa-t-elle malicieusement en l'entraînant pour rejoindre le reste du groupe.
/
/
Avec autant d'ordre que possible, ils envahirent la cuisine en plaisantant. La nuit passée avait créé une proximité que des années de lycée n'auraient pas remplacé.
Un résumé enflammé, mené par Scott et Jackson, combla les quelques vides de la mémoire de Danny. Il accepta la partie surnaturelle qui n'avait visiblement pas été une hallucination dû à la prise de stupéfiants à son insu. Il vida d'un trait une bouteille d'eau minéral avant de s'asseoir devant un bol de céréales avec les autres autour de la table.
Perdu dans ses pensées, Stiles écoutait distraitement les conversations en repensant à son petit-déjeuner de la veille. Il savait que Derek était appuyé sur le meuble juste derrière lui, il sentait presque son regard brûlant sur sa nuque. En fait, il aurait voulu être sur ses genoux dans ses bras, contre son torse.
N'importe quoi mon pauvre Stiles, ça ne te réussit vraiment pas de te faire agresser. Tu veux des câlins de Derek ? Et pourquoi pas lui réclamer un baiser pour effacer ceux de l'autre ?
Scott lui fila un coup de pied sous la table pour attirer son attention. L'adolescent releva sa tête vers lui tout en se massant le tibia. Un instant, il crut même avoir entendu Derek grogner face à cet acte de violence gratuite. Si tel avait été le cas, son ami l'ignora royalement.
-Tu comptes préparer encore combien de tartines ? demanda Scott en désignant la montagne que Stiles avait méthodiquement beurré et enduit de confiture.
Stiles haussa les épaules un peu surpris car il ne mangeait habituellement rien le matin. Jetant un regard circulaire, il se tendit à l'extrême en sentant un souffle chaud juste à côté de son oreille. Sachant que s'il tournait la tête, ses lèvres se retrouveraient à quelques millimètres seulement de celles de Derek, il s'obligea à l'immobilité pour ne pas commettre l'irréparable. Une des mains du loup s'appuyait sur son épaule tandis que l'autre raflait plusieurs tartines.
La scène avait figé les attitudes comme si une chape de plomb en fusion venait de couler dans la cuisine. Derek fit un sourire en coin à Scott en coulant sa deuxième main de l'épaule de Stiles vers la table pour se saisir du reste. Dans cette position, il entourait Stiles de ses deux bras musclés. Lydia se demanda s'il se rendait compte de la sensualité de ses gestes autour de son compagnon et décida que non, sinon il n'oserait pas adopter ce genre d'attitude en présence d'adolescents aux hormones bouillonnantes. Elle vit Stiles fondre sur sa chaise, concentré sur le regard enragé de Scott. Comme si Stiles le trahissait.
Derek jubilait de sentir Stiles contre lui, de sentir son corps réagir, se tendre vers lui, réclamer son contact. Sa peau désirant la sienne.
Emportant l'ensemble de son butin, il commença à s'en délecter et quitta à regret la chaleur et la proximité du jeune homme. Une à une, il dégusta les tartines fixant le dos de Stiles alors que Scott le fusillait d'un regard furieux.
-Si tu tiens tant que ça à manger des tartines, je peux t'en faire, décida Allison avant que cet intermède ne se termine en bagarre, comme si les tartines étaient le réel enjeu du conflit
-Ou il peut aussi les faire lui-même, répliqua Lydia sarcastique en regardant Derek engloutir ses précieuses denrées, ce dernier lui proposant une tranche à la confiture d'abricot qu'elle prit dans un sourire complice.
-Et pour l'entraînement de tout à l'heure ? Je me sens dans une forme stupéfiante et j'ai une de ses envies de courir, avoua Danny en changeant de sujet, ne voulant pas se retrouver face à un Derek à la mâchoire crispée et aux narines dilatées.
-Ouais, ben va falloir faire doucement. A la moindre alerte, tu devras sortir du terrain sous n'importe quel prétexte ! répondit Stiles heureux que quelqu'un détourne l'attention de cette scène étrange. Deux louveteaux dans l'équipe, bonjour les dégâts.
-Je ne veux pas d'un autre co-capitaine, râla Jackson pour la forme. Mais au moins, on est sûr de gagner le championnat. Quoi que ça pourrait être considéré comme du dopage non ?
En réponse, Danny catapulta des céréales sur son ami qui répliqua en manquant sa cible de peu. Déjà à fleur de peau, les yeux de Scott brillèrent juste avant qu'il ne saute par-dessus la table pour châtier le coupable. Mû par un réflexe protecteur, Stiles poussa Jackson pour lui éviter de se ramasser le corps du loup-garou en plein élan. Par effet de domino, Allison renversa sa tasse de thé et s'apprêta à se jeter sur Scott pour se venger. Danny la devança pour protéger Jackson d'un nouvel assaut de Scott et ils roulèrent tous les deux en poussant des petits jappements, essayant de jauger leur force. En soulevant Stiles pour le mettre à l'abri derrière lui, Derek allait grogner pour calmer tout le monde et éviter que ça ne dégénère.
Mais, la scène se figea d'elle-même et les rires moururent quand la sonnette d'entrée retentit. Tous se regardèrent. Scott au dessus de Danny dressa l'oreille avant de l'aider à se redresser. Jetant un curieux regard concernant la proximité de Derek par rapport à Stiles, le loup lui répondit par un sourire en coin, un brin provocateur.
-Pour l'amour du ciel ! Je ne pense pas qu'IL sonnerait à la porte, annonça Lydia comme une évidence avant de se lever pour aller ouvrir.
Alors ? Qu'en avez-vous pensé ? Qui est derrière la porte ?